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XX.

Jurisdiction de Hauts-Justiciers.

Lesdits Juges Hauts-Justiciers ne peuvent connoître des lettres de remission, de répits, ni des lettres pour être reçû au benefice de cession, ni pareillement des causes de crimes de leze-Majesté, fausse monnoye, et autres cas Royaux.

Les lettres dont cet Article fait mention, procedant de la pure grace du Prince, la connorssance ne peut en appartenir qu’à ses Officiers : Il n’en est pas de-même des lettres de Justice, qui ne ont à vray dire qu’un impost que le Roy leve sur les procez ; ce qui a fait dire àdu Moulin , qu’en France sumus nimis diplomatarii. Et c’est pourquoy les. Etats d’Orléans demanderent l’abolition de ces formalitez de lettres de Justice, qui n’ont jamais été connuës aux Grecs ni aux Romains.

Loyseau des Seig. c. 14. n. 13. e parleray de l’effet des lettres de remission sur l’Article 143.

Le malheur de ce siecle a rendu l’usage des lettres de répy, et du bonefice de cession, fort commun, tempora quedam etiam occurrunt difficillime solutioni ; Cicero pro Cecinna. Le benefice, de cession est un moyen de droit si favorable, qu’il ne doit être empesché que par des exceptions pien précises de l’Ordonnance ou de la Coûtume. Neanmoins il ne doit pas être accordé mdiffet remment et sans connoissance de cause ;. Plusiours personnes en sont excluses, ou à causé de reur qualité, ou par le privilege de la dette.

Bacquet du droit d’Aub. part. 2. c. 16. n. 8. etMornac . l. 28. ex quib. caus. manom. ont dit que les étrangers ne peuvent joüir de ce benefice. Févret en son Traité de l’Abus est aussi de ce sentiment, et que cette grace ne doit être accordée qu’aux Sujets naturels du Prince. Et même qu’un étranger n’est pas recevable à appeler comme d’abus, ce qu’il aurovise par le témoignage de Du-Luc l. 2. t. 2. q. 5. Provocatorem quod alienigema effet à protrocatio-ve, quam ab abusu dicimus, fubmotum invenimus. Mais aujourd’huy que les appellations comme d’abus sont si fort en usage, et qu’on n’est plus si serupuleux à les rocevoir comme au temps d passé, il doit être permis en toutes rencontres d’employer h Justice et l’autorité du Prince, et de se plaindre des Juges d’Eglise aussi bien que des Juges Royaux.

Par la jurisprudence des Arrests, ceux qui vendent en détail ne peuvent faire cession de biens ; ils ne peuvent alléguer de pertes qui sont la cause de la cession, puisqu’ils sont payez comprant de tout ce qu’ils debirent ; ce qui s’observe aussi à Tholose, où par Arrest un Boucher fut déclaré non recevable à faire cession. Mr d’Olive l. 1. c. 30. et c’est aussi la jurispru-sence du Parlement de Paris établie par plusieurs Arrests.

Le debiteur ayant obtenu de ses creanciers u attermoyment, ne peut plus faire. cessiont ugé par Arrest du 23 de May 1657. entre Cabeüil et Vautier : Les creanciers de Cabeüil luy avoient donné un temps de trois ans pour payer ses dettes, et pour faire sortir ses effets ; Aprés le temps expiré, au lieu de payer ses creanciers il demanda à faire cession, dont il fut n debouté par ledit Arrest, plaidans le Normand et moy.

Ceux qui ont contracté en foites franches en sont aussi exclus : Un Facteur contre son Commettant, et un Fermier contre le Propriétaire ; le fermier qui a confumé les fruits commet un parcin, ce qui le rend indigne de toute faveur ; l. serous S. locari. ff. de furt. Ce qui a été jugé plusieurs fois. Arrest du 1é de May 1653. Autre Arrest du 8 de Janvier 1659. pour le sieur Moisson, Receveur de l’Issebonne, contre Roussel, dans lequel Arrest cette circonstance étoit considérable ; Roussel étoit mineur quand il signa le bail, mais il n’avoit commencé à jouir que depuis sa majorité, il fut debouté de ses lettres de récision et de cession. Le Parlement de Paris a jugé le contraire, suivant un Arrest rapporté dans la 2. part. du liv. 1. c. 4. du Journal des Audiences, par lequel une femme fut recûé au benefice de cession, pour une obligation causée pour loyer de maison.

On a disputé plusieurs. fois fi l’on peut faire cession pour des dépens ajugez sur un procez criminel. Dans le même Journal des Audiences du Parlement de Paris, l. 4. c. 1. un particulier fut, reçû par Arrest. Nôtre usage est contraire ; Par Arrest en la Chambre de la Tournelle du z de May 1609. un homme condamné par contumace s’étant mis prisonnier, pour s’exemprer de la refusion des dépens ; il demanda le benefice de cession dont il fut refusé.

Par autre Arrest en la même Chambre, du 26 de lanvier 1608. on déclara non recevable à faire cession de biens, un particulier condamné en des interests, dommages et dépens pour outrages et excez qu’il avoit commis. On le jugea dans un cas moins favorable en la Chambre des Vacations, contre une femme accusée de substraction ; Je plaidois pour un creancier qui l’a fit debouter de sa Requête, aux fins de la cession de biens. On a jugé la même chose pour des dépens resultans d’une cause civil entre Boucachard et le Bourg, plaidans le Sauvage et Laurens le Févre.

Ie trouve un Arrest donné en la Chambre de la Tournelle le 30 de lanvier 1609. par lequel deux particuliers furent reçûs à faire cession contre un Concierge, pour leurs gites et gardes.

Il est sans doute qu’un principal obligé est tres-mal favorable à demander le benefice de cession contre sa caution, dont l’office a été gratuit ; aussi il a été jugé plusieurs fois qu’il n’y est point recevable. Arrest du 3 de Février 1622. par lequel le preneur d’une rente ayant été condamné r corps à la racheter, et étant emprisonné pour ce sujet sur la demande qu’il fit contre la cauon du benefice de cession, il en fut debouté. Cette. compassion que l’on a pour les miserables, que leur mauvaise fortune a reduits dans l’impuissance de payer leurs dettes, ne doit point être étenduë à ceux qui trompent leurs amis et leurs bien-faicteurs. Autré Arrest en la Chambre dé l’Edit du 11 de Decembre 1652. entre l’Archevesque et de l’Eau. Autre Arrest en la GrandChambre du 29 Avril 1653.

Les premiers Arrosts du Parlement de Paris avoient debouté le principal obligé du benefice de cession, mais depuis cette jurisprudence a changé, et les Arrests font intervenus en si grand nombre au contraire, que l’on n’en doute plus. Loüet l. C. n. 56. Du Fresne l. 1. c. 29. de l’impres-sion de l an 1652.

On a traité cette question dans le même Parlement, si un Gentilhomme ayant été reçû au renefice de cession à l’égard de son fidejusseur, étoit tenu de porter le Bonnet Verd. Il se défendoit par deux raisons, l’une qu’il avoit été reçû par Aprest à faire cession ; à la charge de l’Ordon-nance qui porte seulement que celuy qui veut faire cession, sera tenu de la faire en lugement et non par Procureur, la teste nuë, de sorte que l’Ordonnance ne l’obligeant point à potter le bonset verd, il y avoit peu d’apparence de ly vouloir contraindre. : L’autre raison étoit fondée sur sa-qualité de Gentilhomme ; le bonnet verd étant une espèce d’infamie, il falloit faire quelque distinction entre les personnes de qualité, et celles d’une condition moins relevée. Ledroit Romain exemptoit de la prison en certains cas hs personnes qualifiées, sciondum non omnes hac sevéritate debere tracturi, sed utique humiliores ; caterum eos qui sunt in aliqua dignitate positi, non, ut opinor, vinculis publicis contineri oportere l. 3. 5. tutores D. de suspect. tutor. Le fidejusseur au con-traire foûtenoit, qu’encore qu’il n’y eût point d’ordonnance exprosse de porter le bonnet verd, I ne s’ensuivoit pas pour cela que son debiteur én pût être dispensé. La loy qui a étably la cession de biens, ayant depuis confidéré que les debiteurs on abusoient pour-tromper leurs créanciers, a voulu que ceux qui avoient recours à cette extrémiré, fussent notez de quelque marque ignominieuse, ce qui a été suivy par les Arrosts, en condamnant ceux qui font cession à porter le bonner verd. De sorte que cela est maintenant tourné en coûtume, soit à l’égard de ceux qui ont dissipé leurs. biens dolo malo et suo vitio, soit à l’égard de ceux qui sont déchus de leurs moyens, per rasus inopinos qui incidunt rebus mortalium ; sans vouloir recevoir la distinction rapportée sur ce sujet en la l. 1. qui bon. ced. pos. C. Theodof. l. 1. 1. 20. Quant à la qualité de Gentilhomme, elle ne : luy pouvoit servir en cette rencontre, cette. Coûtume ayant lieu contre toutes fortes des essionnaires de quelque condition qu’ils soient, et les Arrests favoient ainsi jugé, même sontre un Gentilhomme âgé de plus de 70. ans : Par Arrest on infirma la Sentence qui dispensoit de porter le bonnet verd, et le debiteur fut condamné de le porter, autrement permis au fidejusseur de le reintegrer dans les prisons.

Il faut encore remarquer que si les créanciers avoient accordé quelque delay à leur debiteur en consideration de ses pertes, la caution ne pourroit pas se prévaloir de cette grace, ni leur opposer les exceptions et la faveur de sa qualité de caution. Du Renel caution de la nommée Boulie, yant demandé que l’attermoyment accordé à Boulie par ses creanciers, fût declaré commum vec luy, il en fut debouté par Arrest de la Chambre de l’Edit du 20 de Novembre 1652. Berault ur cet Article a rapporté un Arrest conforme. On pourroit dire au contraire suivant le sentiment deGodefroy , que la caution peut profiter de la grace que le creancier a faite au principal bligé, parce qu’autrement elle luy seroit inutile s’il pouvoit être inquieté par sa caution : mais n répond que ce delay n’ayant été donné par le creancier que par la commiseration qu’il a euë pour le principal obligé, à cause des pertes qu’il a souffertes, c’est une faveur que l’on ne peut étendre plus loin contre sa volonté, lauf au fidejusseur à poursuivre comme il avisera bienSuivant la disposition du Droit l’obligation naturelle et civil subsiste ; par cette raison un de-oiteur peut être poursuivy pour le payement de sa dette, s’il parvient à une meilleure fortune, n quantum facere potest. S. fut. I. de action. exactio debiti tantum suspenditur.

On a fait neanmoins de la difference entre la cossion et l’attermoyment ; et par Arrest du 10 de Juin 1670. en la Chambre de l’Edit, il fut jugé que celuy qui avoit obtenu un attermoyment de ses créanciers en leur payant le tiers, ne pouvoit être poursuivy pour le surplus, bien qu’il eût rétably ses affaires, et l’on présuma que les creanciers ne s’étant point reservez à demander le surplus, ils luy en avoient fait une donation, plaidans Theroude pour le Sergent de S. Jores, le Sauvage et moy pour les créanciers. De la cession de biens, voyez Loüet l. C. n. 56. et l. I. c. 10.