Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


XXIV.

Jurisdiction des Bas-Justiciers.

Les Bas-Justiciers qui ont droit de Foires et Marchez, peuvent prendre connoissance des mesures de boire et de blé, s’ils les trouvent fausses en leur fief. avant que la Justice Royale y mette la main.

En cet Article la Coûtume commence à traiter des Basses-Justices, qui font la derniere espece des Justices connuës en cette Province : Elle ne définit point la Basse-Justice, elle Loyseau en déclare leulement quelques droits, mais on ne trouvera aucune relation de nos BassesJustices avec celle dont Loyseau a fait la description en son Fraité des Seigneuries.

Loysel Loysel en ses Institutes, l. 2. t. 2. Art. 44. dit que, donner poids et mesures, tuteurs et curateurs, faire inventaire et partages, font exploits de moyenne Justice, suivant cela les Bas-Justi-ciers, qui ont droit de foires et de marchez, ont une espèce de moyenne Justice, puisqu’ils peusent prendre connoissance des foires et marchez, dont régulierement le Bas-Justicier ne doit li point connoître.

Bien qu’en France la Justice et le fief n’ayent rien de commun, néanmoins l’usage a prévalu qu’il n’y a point de fief, qui n’ait Basse-Justice sur ses hommes, au moins pour la conservation Loyseau de ses droits. Loyseau des Seig. c. 10. n. 46. a soûtenu le contraire, et que c’est une chose le fausse que quiconque a fief ait aussi Justice ; parce, dit-il, que la Seigneurie publique, qui seule emporte Justice, est specifiquement différente de la Seigneurie directe ; mais à vray dire, fe nos Basses-Justices n’ont point de Seigneurie publique, et c’est pourquoy Iancienne Coûtume les appelle Justice fiefale, comme êtant proprement attachées et appartenant aux fiefs. La Coûtume de Tours des Basses-Justices, Article 1. nomme fort à propos ces Basses-Justices un demy droit, et on peut dire de nos Bas-Justiciers, ce que Ciceron disoit des Ediles, paulo mplius quam privati.Cujat . Ad l. 10. de Jurisd. Mr d’ Argentré ; Article 20. no. 2. n. 3. n’étoit pas bien informé des Justices de Normandie, lors qu’il en a fait une description si étrange et si peu véritable ; Normannorum tribunalia verius quidem latrocinia, in quadriviis, sub ulmo, in solois ad lacuum aggeres exercentur, huc qui conveniunt aut vapulant, aut diffiso die eluduntur, nec ratio est quà faisissima gesta refelles nullo ut plurimum actuario scribente, sed ipfo illo qui judicat, quod protinus cum videbitur, mutet ex libidine aut suâ aut Dominorum.

Cette accusation est fort injuste, outre qu’en Normandie il y a bien moins de Justices Seigneuriales qu’en France, les Hautes-Justices au moins celles dont le district a quelque étenduë, te sont fort bien reglées : Elles ont leurs Pretoires, leurs Officiers, leurs Greffiers, qui sont tous tenus de garder les Ordonnances et les Reglements faits pour l’administration de la Justices et pour les Justices feodales ou Basses-Justices, le Seigneur est tenu de les faire exercer par C un Seneschal et par un Greffier ; et d’ailleurs leur compétence a si peu d’étenduë, qu’il ne faut point de Prétoire pour en faire l’exercice La pluspart des Coûtumes de France font de deux sortes de Basses-Justices, l’une fonciere, Masuer censuelle, ou censiere, ou domaniaire, comme Masuer la nomme 5. item omnia, t. de judic. autre est appelée Basse-Justice proprement, où les differens des vassaugde peu d’importante. sont vuidez, et quelques causes pecuniaires, personnelles, ou possessoibes, et des excez dont r la peine n’excede pas soixante sols Nous avions autrefois en Normandie ces deux espèces de Justice ; car outre les Hautes et les Basses-Justices il y avoit une autre Justice que l’on appelloit la Justice aux Barons, dont la competence est rapportée dans le vieil Coûtumier, parmy les Ordonnances de l’Echiquier : en cet endroit on explique en quoy consiste la Justice aux Barons, et autres Justiciers de Normandie, qui tiennent par Baronnie et par membre de Haubert, et qui n’ont le pled de l’épée ni Haute-Justice : et il paroit qu’encore que la competence de la pluspart des choses, dont ils connoissent soit encore restée aux Bas-Justiciers, ils avoient neanmoins une plus grande Jurisdiction, et ils pretendoient même de plus grands droits, comme on l’apprend de ces paroles, et nulle autre Justice ; ils n’ont plus en Normandie, si comme dient les Clercs de l’Echiquier par les Rôles de l’Echiquier, chap des Cours ; jaçoit ce qu’ils dient qu’ils en ont plus. Et dans l’ancien Coûtumier les Chevaliers, et ceux qui tiennent franchement, les Comtes, les Barons, et les autres Dignitez, fieffaux ou les fiefs de Haubert, ou franches Sergenteries, ou autre françs-fiefs ont la Cour de leurs resseances, simples querelles, et les legeres et pesantes de meubles, héritages et des larcins. Roüillé de actionibus, c. 1.. en cet endroit a remarqué que les das-Justiciers ne joüissent pas de tous les droits, qui leur êtoient attribuez par l’ancien Coûtumier.

Nos Barons et Seigneurs Normans se conserverent enAngleterre cette espèce de Justice, Bracton fait mention de la Cour aux Barons, qui libertates habent de averiis captis et detentis, et de placito Namii vetiti pro servitiis et consuetudinibus. Ils avoient la connoissance des biens executez, pour leurs droits, services et devoirs Seigneuriaux. Ces mots Averiis, et Namiis, sont deux anciens mots Normans. Nôtre Coûtume a conservé l’usage du dernier, au titre de delirance de Namps ; et pour le premier la pluspart du vulgaire dans la basse Normandie s’en sert encore aujourd’huy, car ils appellent avers leurs animaux domestiques : ce qui est emprunté lu Latin, habere, avoir, et corrupa averia et avers.

Il ne nous reste plus maintenant que les Hautes et Basses-Justices. On ne peut donner à ces dernieres d’autre origine que celle des fiefs, quoy que du Moulin se soit persuadé que par le droit Romain, les Maîtres avoient une Justice en première instance sur leurs fermiers, j’ay remarqué ailleurs qu’il s’étoit trompé.

Papon dans le troisième Tome de ses Notaires, l. 5. de recis. perpet. et temp. dit que les lettres d’octroy de foires et de marchez, doivent être presentées dans les dix ans pour être nterinées, et qu’autrement elles sont inutiles l. 1. de nund. nundinis impetratis à Principe, non trendo qui meruit decennio usum amittit. Aprés la verification leur effet est perpetuel ; et bien que les marchez ou foires cessent pour quelque temps, le droit s’en conserve toûjours, suivant le çaisonnement d’ Ulpian ; flumen est, inquit, quod femper sluit, si tamen astate aliquâ exaruit, quod alioquin perenne fluebat, non ideo minus perenne est. Il fut jugé de la sorte pbur Antoine de Hennot, Ecuyer, sieur de Theville, il avoit obtenu des lettres pour établir un marché, qui furent verifiées, ce marché n’avoit pû s’établir entièrement, et il avoit cessé durant plusieurs années durant lesquelles le sieur de Theville continua de payer la rente dué au Domaine. Me Castel, Scigneur de S. Pierre-Eglise, voyant cette cessation obtint des lettres pour augmenter son mar-thé d’un autre jour, mais qui étoit le même, que celuy du sieur de Theville devoit tenir, et pour soûtenir sa pretention, il remontroit que le sieur de Theville jus suum habuerat pro derelicto, et que son marché luy êtoit entièrement inutile : Je répondois pour luy, que par la veri-fication de ses lettres, le droit de marché luy êtoit pleinement acquis, qu’il n’avoit pû le perdre, per non usum, et que pour avoir cessé pendant quelques années pour des confiderations particulieres, il pouvoit à l’avenir le faire valoir, les hales qui avoient été bâties subsistant encore ; ce qui prouvoit l’établissement du marché et sa possession par ces hales, qui étoient toûjours demeurées en état de servir. Par Arrest en l’Audience de la Grand. Chambre, au mois de Novembre ou Decembre 1661. le sieur de Theville fut maintenu par provision, et depuis le sieur de S. Pierre fut debouté de ses lettres ; Greard plaidoit pour luy.

Touchant l’octroy des foires et marchez,Pap . Notaire, 3. l. 8. 1. des lettres d’octroy.Chopin , du dom. l. 3. t. 27.