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XXV.

Ont aussi la connoissance du bruit de marché, c’est à sçavoir s’il intervient quelque bruit audit marché, le Seneschal en peut connoître, pourvû qu’il n’y ait sang et playes, et en lever l’amende.

Le Seneschal étant le premier Officier de cette Province, avant que la sceance de l’Echiquier eût été renduë perpétuelle, je ne sçay comment cette qualité est demeurée aux Juges de nos Basses-Justices. Pasquier, l. 2. c. 24. en ses Rech. estime que ce mot nous est venu des Anglois, à cause qu’on s’en sert particulièrement dans les Provinces, où les Anglois ont régné.

Gregorius Tholosane Tholosane l. 47. c. 33. appelle les Seneschaux, Senarchas, et veut qu’il soit composé du mot Latin genex, et du mot Grec MOTGREC : voyez Fauchet en ses Orig. l. 1. c. 10.

Ragueau Ragneau Seneschal M Bignon en ses sur Nottes sur Marculphe, l. 1. c. 25. la plus commune opinion est que c’est un mot corrompu, moitié Latin, et moitié François, qui signifie un vieil Chevalier.

Par cet Article et par le precedent, on peut remarquer qu’il y a difference entre les BasJusticiers, que ceux qui ont droit de foire et de marché, ont plus d’autorité que les autres, et uivant cet Article ils ont une Jurisdiction criminelle, mais qui est limitée aux actions, où il l’y a sang et playe : et la Coûtume luy donne pouvoir d’en lever lamende.

Par le droit Romain, les Magistrats seuls et Prasides, Provinciarum pouvoient condamner en lamende : l. 2. 5. ult. de jud. his datur mulctae dicenda jus, quibus publice judicium est : quamobrem Duumviris et Magistratibus municipiorum non licuit, l. 1. si cui jus dic. non obtemp. M d’Argentré , sur la Coûtume de Bretagne, Art. 33. no. 1. le Juge d’Eglise ne peut condamner en sa-Loyseau mende, parce qu’il n’a point de térritoire, sinon en l’appliquant à quelque usage pieux. C. irrefragabili. 5. ult. de offic. ordin. Loyseau des Seig. c. 15. n. 44.

Loyseau L’amende que cet Article permet au Seneschal de lever, ne peut être qu’une peine pecuniaire. Loyseau des Seig. c. 12. n. 74. a remarqué que les amendes furent introduites, lors que es Juges ne prenoient aucun salaire des parties, ils se recompensoient sur les amendes.

Berault sur ce mot amende, a pris occasion de traiter cette question, auquel doit appartenir l’amende entre plusieurs Receveurs, dont l’un joüissoit au temps du crime commis, et l’autre au temps de la condamnation : les sentimens sont fort differens sur cette matière. On pourroit. les concilier par cette distinction entre les amendes qui sont reglées et taxées par la loy, et celles qui sont arbitraires. Celles qui sont cettaines et imposées par la loy pour certaines fautes, sont dûët dés le temps que la faute a été commise. En ce cas la peine êtant certaine et ne pouvant être moderée par le Juge, nihil restat in officio judicis, nisi ut declaret, an tale delictum commissum sit, le Juge n’a d’autre pouvoir que de déclarer, si l’accusation est véritable, et si le crime a été commis ou ne l’a pas été, et hoc casu facti tantum questio est inpotestate judicantis, juris authoritas non est. l. in ordine. D. Ad municipal. l. si qua pona de verb. sign. D. Coquille d. 14. Et on confirme ce raisonnement par l’exemple des crimes dont la peine est acquise et encouruë lés le temps, du delict, comme en ceux de lexe-Majesté, d’heresie, de peculat, et d’autres dont la peine n’est pas éteinte aprés la mort. l. ex judiciorum ff. de accusat. et ibi glos. En ces crimes. à, la Sentence n’est que declaratoire et retrotrahitur.

Mais quand les amendes sont arbitraires, comme elles le sont presque toutes cn France dles appartiennent à celuy qui est fermier au temps de la Sentence, parce qu’elles ne sont dûës qu’en vertu d’icelle ; et qu’il étoit en la liberté du Juge de les prononcer, ou de ne les prononcer pas. Guy Papé decis. 535. à été un des premiers qui a tenu cette opimon : Ceux qui lont commenté, rapportent un Arrest du Parlement de Grenoble, qui a jugé le contraires mais ces mêmes Auteurs témoignent qu’il fut donné sur des circonstances particulieres, à çavoir que le premier fermier avoit fait de grands frais pour le jugement du procez, et que le jugement n’en avoit été retardé que par les troubles qui étoient arrivez, il parsit raisonnable que ce fermier en fut recompensé : Hors ces circonstances particulieres il faut suivre le sentiment dedu Moulin , in not. ad alex. consil. consilio. 7. vol. 3. que inspiciendum eaet tempus senrentiae, quia prius non debetur pena, et conductor nullum jus habet ante sententiam, j’en parleray plus amplement ailleurs

Il faut encore toucher cette difficulté, si la Sentence étant confirmée par Arrest l’amende appartiendra à celuy qui êtoit fermier au temps de la Sentence, ou à celuy qui l’étoit au temps. de l’Arrest. Du Moulin au lieu préallégué donne l’amende au fermier, qui êtoit au temps de la Sentence, et bien que la loy furti s. 1. de his qui not. infam. semble contraire, il en fait voir la différence par cette raison, que l’infamie dont il est parlé en cette loy non potest afficere condamnatum revocabiliter, sed aut nullo modo afficit, aut irrevocabiliter. Celuy qui est declaré infame par un jugement, quand il en est appelant, ne peut être reputé tel du jour de la Sentence, ni dubir la peine qui luy est imposée car cette peine pouvant être revoquée par l’appel, il ne seroit pas juste de le deshonorer dés le jour de la Sentence, et c’est pourquoy le Jurisconsulte dit fort à propos, hodie notari puto non retrâ. Il n’en est pas de même des amendes, qui peuvent voir un effet retroactif. Bérault cite un Arrest, par lequel une amende jugée par le Bailly d’Evreux, au Siege d’Orbec, ayant été confirmée par la Cour, elle fut ajugée au Receveur des amendes de la Cour ; en ce cas il faudroit dire que, jus habet à confirmante, non à confirmato, et que l’amende n’est acquise que du jour de l’Arrest qui confirme, et non point du jour de la Sentence qui est confirmée.

Un païsan ayant eu querelle avec le mésureur du marché de Baqueville dans le marché, le Prevost sur une clameur de Haro, voulut les conduire devant le Seneschal, mais le jaugeur ayant été enlegé de force par le Sergent de Longueville, le Bailly voulut en informer, et decreter prise de corps contre le Prevost, et comparence personnel contre la Demoiselle de Ba-queville ; sur l’appel comme d’incompetence, cette Demoiselle soûtint que s’agissant d’un bruit de marché, l’affaire étoit de la competence de son Seneschal ; par Arrest du 8 de Juin 1632. la trocedure du Bailly de Longueville, comme d’un Juge incompetent, fut cassée, et les parties renvoyées par devant le Seneschal, nonobstant sallegation qui fut faite qu’il y avoit eu de sang répandu.