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XXIX.

Les Seigneurs peuvent faire prendre leurs Prevosts, Receveurs et Meusniers, un mois aprés leur charge expirée, pour leur faire rendre compte et les retenir prisonniers jusques à ce qu’ils ayent rendu compte, ou baillé plege de compter. Toutesfois s’ils n’ont que Basse Justice, ils ne les peuvent detenir en leurs prisons que vingt-quatre heures, et aprés sont tenus les renvoyer és prisons du Roy, ou de la Haute-Justice dont ils dépendent.

Cet Article étant mis en suite de ceux qui traitent des Basses. Justices, on pourroit croire que la Coûtume fait quelque difference entre les Justices feodales et les Basses-Justices. Les Seigneurs, dit cet Article au commencement, peuvent faire prendre leurs Receteurs ; puis on ajoûte, toutefois s’ils n’ont que Basse-Justice : D’où lon pourroit inferer que le mot de Seigneur ne pouvant être entendu que des Seigneurs de fief, ils pouvoient arrêter leurs Receveurs et les retenir prisonniers, jusqu’à ce qu’ils eussent rendu compte ; ce qui leur donneroit un pouvoir plus grand que les Bas-Justiciers, qui ne peut ent les retenir dans leurs prisons, qui durant vingtquatre heures. Pour éviter cette absurdité, bien que dans cet Article et dans les precedens et ur les suivans, il ne soit traité que des Basses-Justices, il faut entendre ce mot de Seigneur, de sa tous ceux qui ont Justice, soit haute ou basse ; mais il y a cette difference que les Bas-Justiciers ne peuvent detenir leurs Receveurs en leurs prisons que durant vingt-quatre heures.

Le Bas-Justicier peut avoir des prisons, et il doit même en avoir en consequence de lArticle 37. qui permet au Bas-Justicier de faire un procez criminel. Les particuliers ne peuvent pas avoir de prisons, Tit. de privat. carcer.

Par lancienne Coûtume, titre de Justiciement : pour la dette au Prince, dequoy terme est passe, peut justice être faite par le corps aux debteurs, jaçoit que pour aucune autre dette ne doit corps d’homme être justicié : et pour ce aucun qui soit en Normandie ne peut mettre en prison le corps de son homme, s’il ne luy est de larcin par devant luy, ou trouvé saisi, oi s’il n’est son Sergent, ou Prevost, Meusnier, ou Receveur de ses rentes ; et toute justice de corps d’homme en Normandie appartient au Duc pour la feauté que tous luy doivent. Le Glossateur estime que quand cette ancienne Coûtume fut redigée par écrit, il n’y avoit point encore de Hautes-Justices, ce que j’ay remarqué ailleurs.

L’Ordonnance de l’an 1667. à rétably en quelque sorte nôtre ancienne Coûtume, ayant aboli les obligations et par corps ; mais comme elle les permet pour des fermages, on ne peut pas dire que cet article soit abrogé par cette Ordonnance.

Quoy qu’un Receveur soit une personne Ecclesiastique, il peut être constitué prisonnier, s’étant engagé volontairement dans cet employ. Guillaume le Conquérant irrité contre Odon, Evesque de Bayeux, se servit de ce pretexte pour l’arréter, luy demandant compte de l’administration qu’il avoit euë de son Royaume d’Angleterre.

Rheinardus l. 1. c. 10. dans son Traité de la difference du droit civil, et du droit Saxoh, a p remarqué que par le droit Saxon le Juge met le debiteur insolvable entre les mains de son creancier, qui peut non seulement le faire travailler, mais aussi l’emprisonner, cela pourtant ne se pratique que contre les personnes de basse condition ; le Seignour même peut arréter : ses vassaux pour le payement de leurs dettes : la rigueur des premieres loix Romaines fut bien-tost moderée, on ne souffrit pas que les creanciers pûssent mettre en pièces le corps de leur obligé, et on ne leur permist pas même de les emprisonner, ni de les faire travailler. Voyez Corras Corras. lib. 3. Miscellan, c. 18