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XL.

Action en garantie.

Nul n’est tenu attendre le quatrième garand sans avoir jugement, et le premier garand ne peut appeler le second sans faillir de garantie, ou s’en charger, et ainsi de garand en garand.

Suivant la pensée de MrCujas , in comment. Ad Tit. 36. l. 4. de feud. de lege Conrad. gerand est un vieux mot Allemand, qui signifie ce que les Latins appellent authorem, qui de evictione Loyseau renetur. Du Moulin au contraire a crû que guarentigier est un mot barbare, garand est vocabulum à Francis et Longobardis ortum.Loyseau , de la garant. des rentes, c. 1. luy donne une au-tre étymologie, et le fait venir de garer, vieux mot François, qui signifie mettre en seureté.

Les Anglois et les Ecossois disent narantir, et marantisare, changeant le g, en un double m, comme nous avons fait au mot de mé, pour gué. Ils disent aussi parnir pour garnir. Le Pere Sirmond en ses Notes sur les Capitulaires de Charles le Chauve, p. 59. de suo marnitus. l. instructus, paratus, garni : En fait de garantie la première contestation arrive ordinairement pour la Jurisdiction ; le garand ne manque point à proposer un déclinatoire, et à demander son renroy devant son Juge naturel, suivant la l. venditor. D. de judic. L’acheteur est tenu de suivre la Jurisdiction du vendeur, qui l’appelle en garantie ; mais en explication de cette loy, nos Auteurs ont fait une distinction du garand formel, d’avec le garand simple. Le premior ne peut décliner la Jurisdiction du demandeur en garantie, s’il n’a un privilege : l’autre peut demander son renvoy ; mais quand ils veulent définir le garand formel ou le garand simple, ils s’en expliquent assez obscurement : Ils appellent garand formel celuy qui dans une cause réelle se charge du fait du demandeur, ubi quispiam possessor actione reali conventus, eum vocat à que titulo oneroso rem comparavit, aut cujus nomine rem possidet, ut litem in se suscipiat et suis sumpribus defendat ; et hos garendos formales vocant, dit M’d’Argentré en sa Preface sur le t. des garands.

Le garand simple est celuy qui étant appelé en une action personnelle, tefuse de se charger lu fait du demandeur en garantie, en ce cas le déclinatoire est raisonnable. Chenu en ses Notes ur les Arrests dePap . l. 11. t. 4. Charondas en ses Resp. l. 3. Resp. 60. MiMainard , l. 3. c. 33.

Ce dernier Auteur fait une différence entre la garantie et eviction et la sommation et indemnité, celles-là, dit-il ; regardent une action petitoite, et par consequent réelle ; celles-cy une condiction, et ainsi personnelle : Pour les premieres on ne peut demander le renvoy, et pour les autres il est permis de conclure ce qu’il prouve par la l. in fin. Cobi in rem act. ubi in rem agitur Jurisdictionis forma in eadem Provincia constitutis tam petitore quam possessore ob authoris personam, quem in aliâ Provinciâ certum est consistere non debet immutari : at ubi in personam, sive civiliver, sive criminaliter agitur juris ordo convertitur si postuletur, aut aliter contendatur, ut non actor forum rei, sed reus actoris sequatur. Ce qui fut jugé de la sorte à son Rapport.

Le PresidentFabri , in eor. err. pragm. dec. 6. cor. 10. accuse d’erreur tous les Praticiens, quand ls enseignent que le vendeur appelé en garantie par l’acheteur, doit necessairement reconnoletre la Jurisdiction où l’instance est artachée, soit qu’il se charge, ou qu’il manque de garantie.

Il convient bien que quand il ne se défend point de la garantie, il ne peut proposer de declinatoire ; que s’il conteste la garantie c’est une erreur, dit-il, qu’il ne puisse pas demander son renvoy, et son distingue mal à propos les actions réelles d’avec les personnelles : Nam si quis ex venditione ; vel ex causa mandati conveniatur, ut litem pro alio suscipiat, necesse est, ut ex contractu, vel quasi contractu conveniatur ; ergo ex personali actione : personales enim actiones ex unt omnes, que ex contractu, vel quasi, ex aelicto, vel quasi proficiscuntur. Or c’est une regle vertaine en droit, que dans les actions personnelles le demandeur suit la Jurisdiction du défenleur, l. 2. C. de Jurisd. omni Jud. quod & in actionibus in rem locum habet ; nisi quod eo casis etiam un iis locis in quibus res propter quas contradicitur site sunt, actio in rem contrâ possidentem exerceri potest l. ult. ubi in rem : a quoy la l. venditor, n’est point contraire, car en cette loy le vendeur ne se défendoit point de la garantie, sed dicebat privilegium sui judicis habore, mais c’est un cas fort different, quand le vendeur contredit la demande de garantie ; tunc enim qui ex propria persona proprioque facto convenitur apud alienum judicom conveniri non debet L’Ordonnance de 1667. a fait cesser cette controverse ; par l’Art. 8. du t. des Garans, ceux qui seront assignez en garantie formelle ou simple ; seront tenus de proceder en la Jurisdiction où la demande originaire sera pendante, encore qu’ils dénient d’être garands, si ce n’est ue le garand soit privilegié, et qu’il demande son renvoy ; que s’il paroit par écrit ou par évidence du fait que la demande originaire n’ait été formée que pour traduire le garand hors de la Jurisdiction, il est enjoint aux Juges de renvoyer la cause. Cette même Ordonnance 2 reglé les delais pour appeler garands, t. des garands. Et l’Article 12. du même titre a decidé ne question que l’on avoit jugée diversement, à sçavoir que les jugemens rendus contre les garands seront executoires contre les garantis, fauf pour les dépens, dommages et interests, dont la liquidation et execution ne se fera que contre les garands, et il suffira de signifier le jugement aux garantis

C’est une question si toutes sortes de contrats produisent une action en garantie. On fait distinction entre les contrats à titre lucratif, et les contrats à titre onereux : d’Argentré en sa Préface sur le titre des garanties.

Pour les premiers on fuit la disposition de la loy Aristo. 5. dernier de donat. D. que le lonateur n’est point garand de sa liberalité s’il ne s’y est expressément obligé, l. 2. c. de Evict. ou s’il n’y a du dol de sa part ; et le Jurisconsulte explique quel peut être ce dol, à sçavoir lors qu’il donne une terre qu’il sçait certainement ne luy appartenir point, et cependant il ouffre que le donataire fasse de grandes dépenses sur ce fonds-là, dont il ne peut être remboursé par le propriétaire.

Il y a neanmoins encone ufe action on garantie, si le testateur avoit légué un esclave sans le fiommer ni le designer ; si le legataire étoit dépossedé de celuy que l’heritier luy avoit baillé, il auroit action contre luy pour luy en demander un autre. Heres servum non nominatim legaum tradidit et de dolo repromisit, postea servus evictus est, agere cum herede legatarius ex testamento goterit, quamvis heres alienum servum esse ignoraverit. l. heres 58. de Evict. D. Le Jurisconsulte en rend cette raison en la loy qui concubinam. 8. si heres. 29. de leg. 3. quia non videtur heres dediffe quod ita dederat, ut habere non possit.

Pour les contrats à titre onereux le vendeur est obligé à la garantie par la propre nature du contrat, sans aucune promesse ni stipulation, l. si in venditione et l. evicta de Evict. D. ce qui est si certain que la stipulation de garantie ne sert de rien, et est inutile, quia expressio eorun quae tacité insunt nihil operatur, cette action en garantie ne produit pas seulement la restitution du prix que le vendeur à reçû, il doit encore à l’acheteur tous ses dommages et interests, tanto damnatur venditor quam si pro evictione cavisset. Si toutefois quelqu’un achetoit une chose qu’il sçavoit fort bien n’appartenir point au vendeur, il n’auroit point de recompense contre luy, s’il ne l’avoit expressément stipulée, l. si fundum. c. de Evict. et c’est en ce cas que la stipulation de garantie est necessaire, parce que la garantie ne seroit pas dué par la seule nature du contrat à celuy qui achete une chose qu’il sçavoit bien n’appartenir point à son vendeurMais bien qu’il soit certain qu’en toutes ventes, cessions et transports à titre onereux, la ga-rantie soit dûë naturellement, neanmoins lors qu’il s’agit de la vente ou cession de rentes, de noms, et d’actions, on fait de deux sortes de garanties, l’une de droit ; l’autre de fait. En vertu de la garantie de droit, celuy qui céde ou vend une dette ou une rente, est obligé de garantir nomen subesse, que la dette subsiste et que la rente soit legitimement constituée, et pour cet effet la stipulation d’éviction n’est point nécessaire : car tout vendeur, ou cedant est naturellement obligé de prester ces trois choses, que la dette soit et subsiste, qu’elle appartienne au vendeur, et qu’il ne l’ait venduë et hypothequée à d’autres auparavant La garantie de fait consiste à garantir non seulement que la chose existe, ou qu’elle soit dûe, mais elle engage encore le vendeur à garantir que la chose soit bonne, qu’elle soit exigible, et qu’elle soit exempre de tout vice.

Pour obrenir cette garantie, on pretend que la stipulation en est absolument necessaire, parce que l’acheteur doit s’informer des conditions de la chose dont il traite, et il suffit que Loyseau les contractans consenserint in corpore vendito & in ejus substantia et materia ipsa, licet in qualitare materiae, id est, in gradu internae bonitatis erraverint ; car c’est de cette manière que Loyseau concilie deux loix qui paroissent contraires ; la loy quid tamen, et la loy cum abeo s. ult. ff. de contrah, empt. autrement la garantie de fait n’est point dûé, si elle n’est promise.

Suivant lusage de Paris, la stipulation pure et simple ne suffit pas pour obliger le vendeur d’une rente à s’en recharger, et à la payer luy-même ; ce n’est pas même assez, suivant le sentiment de quelques-uns, d’avoir employé la clause de fournir et faire valoir ; il faut encore y ajoûter que le vendeur ou cedant s’oblige de payer soy : même en defaut du debiteur. On Loyseau peut voir une parfaite explication de toutes ces clauses dans le Traité de Me CharlesLoyseau , Loyseau de la garantie des rentes. Car, comme ditLoyseau , garantir une rente n’est autre chose que la faire bonne, c’est à dire payable et perceptible.

Mais en Normandie nous n’avons point permis à nos Notaires d’embarrasser nos contrats de tant de clauses, et sans nous arrêter à ces distinctions de garanties de droit et de fait, nous enons indistinctement que tout vendeur est tenu par la seule nature de son contrat de garantir, de fournir, et de faire valoir la rente, et de la payer par ses mains, lors que le debiteur est notoirement insolvable et que ses biens ont été discurez : Car garantir une rente, n’est autre hofe que de la faire bonne, exigible, et perceptible. Il est inutile de garantir nomen subesse, si l’on ne promet pas aussi bonum nomen subesse Il est vray que pour les actions redhibitoires, la distinction de la garantie de droit et de fait sest necessaire. Celuy qui vend un cheval ou quelqu’autre animal est toûjours garand de droit, c’est à dire que la chose luy appartienne, mais il n’est pas garand de fait, c’est âdire que le cheval soit bon ; car le vendeur n’est point tenu des vices et defauts apparens que l’acheteur a pû remarquer, parce que c’étoit à luy à y prendre garde, et à le bien visiter ; si talis sit morbus qui omnibus potuit apparere, venditor ejus nomine non tenetur, perinde ac si nominatim morbus exceptus efset. I. queritur. de Edil. Ed.

D’où il resulte qu’ordinairement aux actions redhibitoires, la garantie de fait n’est point. dûë à elle n’est stipulée : quand le contrat est pur et simple, et qu’il n’est point fait mention dé garantie, le vendeur n’est point obligé de garantir que la chose soit bonne, et qu’elle soit exempte de tous vices, l’acheteur a dû connoître la condition et la qualité de la chose qu’il tacheroit.

Il faut neanmoins apporter deux exceptions à cette regle generale : La premiere, quand il y a dol ou fraude de la part du vendeur, nisi sciens venditor consulto morbum reticuerit, tunc enim danda est de dolo malo replicatio dicta I. queritur. S. si venditor. La seconde, pour certains vices latens et cachez dont la garantie est dûe sans aucune stipulation.

La police des Romains êtoit fort belle sur cette matière : Ils ordonnoient aux vendeurs l’esclaves et de chevaux d’en déclarer tous les vices et impersections, et pour lavente méme des maisons, il falloit declarer si elles étoient contagieuses. Le vendeur ne pouvoit pas même s’excuser sur son ignorance : Cau se enim Edicti proponendi est, ut occurratur fallaciis vendentium & emptoribus succurratur & venditorem etiam si ignoraverit ea que Ediles prestari jubent, camen teneri debere, l. l. 5. causa de Ed. Ed. D. Et cet Edit des Ediles ne s’étendoit pas feulenent à la vente des esclaves et des chevaux, on l’observoit pour la vente de toutes espèces de marchandises, de sorte que le vendeur êroit obligé d’en déclarer les vices : Edictum pertinet ad venditiones non tantùm mancipiorum, sed caterarum quoque rerum l. sciendum 83. de Ed. Ed. D.

Lors que l’acheteur avoit été trompé il pouvoit agir en-deux manières ; Redhibitoria, vel estimatoria, par l’action redhibitoire la vente êtoit entièrement annulée ; le vendeur reprenoit sa marchandise, et l’acheteur êtoit restitué de son argent ; par l’action estimatoire l’acheteur êtoit recompensé de ce que la chose valoit moins, quanti minoris On pouvoit former cette action pour trois causes ; la premiere pour la reticence du vendeur, lors qu’il n’avoit point declaré le vice ou la maladie, soit qu’il le sçût ou qu’il l’ignorât ; car il n’importoit pas à l’acheteur qu’il fût trompé par l’ignorance ou par la malice de son vendeur, nihil interest emptoris cur fallatur ignorantia venditoris, aut calliditate, l. 1. 8. 2. de Edil. Ed. D. La deuxième lors que le vendeur avoit promis quelque persection en la chose qu’il vendoit, ou qu’il l’a-voit garantie exempte de quelque defaut ; et la troisième si le vendeur ne vouloit point garantir tout ce qu’il devoit prester par l’Edit des Ediles, si de his que edicto Edilium continentur non caveat l. si venditor aS. de Ed. Ed. D.

Ces deux actions n’étoient pas d’égale durée, la redhibitoire devoit être formée dans les six mois : et aprés ce terme expiré l’acheteur pouvoit agir pour faire estimer la chose et obtenir la condamnation quanti minoris, l. cum proponas. C. de Ed. Ed.

En France la police n’y est pas si exacte que parmy les Romains, et l’on n’apporte pas tant de précautions pour empescher la surprise, et pour se mettre à couvert de la subtilité des venleurs : Nous trouvons neanmoins dans plusieurs Coûtumes de France des dispositions sur ce sujet : celle de Sens, Article 160. porte qu’un vendeur de chevaux n’est tenu des vices d’iceux, excepté de morve, de pousse, et de courbature, sinon qu’il les ait vendus sains et nets ; car Loysel en ce cas il est tenu de tous vices apparens, et non apparens. La Coûtume de Bar s’en est expliquée en ces mêmes termes, Article 205. Auxerre, 151. Bourbonnois, Article 87. Loysel : en ses Institutes coûtumières, l. 3. t. 4. Art. 16. aux vices redhibitoires de morve, pousse, et courbatures, y en ajoûte un quatriéme, les courbes ; et plusieurs estiment que l’action rednibitoire est aussi recevable pour la maladie du Tie.

Pour les autres animaux, comme moutons vaches, et pourceaux, ils ont aussi leurs vices Loysel atens et cachez, pour lesquels on peut exercer l’action redhibitoire : et Loysel dans le même Article 17. ajoûte que les Languayers sont tenus de reprendre les porcs qui sont meseaux en la angue, et s’il n’y avoit rien en la langue, et neanmoins s’ils se trouvent meseaux dans le corps, de vendeur est tenu d’en rendre le prix, sinon qu’un troupeau fût vendu en gros La durée de cette action est diversement limitée par nos Coûtumes et par nos Usages : quelques Coûtumes pour les vices redhibitoires en ventes de chevaux, ne donnent que huit jours, à compter du jour de la delivrance. Bourbonnois, Article 87. et Coquille en son Institution Institution au droit François, que cela est conforme à l’ancienne Ordonnance de la police de Paris.

La Coûtume de Baren l’Article que j’ay remarqué, donne quarante jours, et c’est aussi l’usage. en cette Province ; la raison est que par des remedes on peut empescher que ces vices ne se detouvrent pas si-tost, mais aprés un delay si long on n’est plus admissible : Et c’est pourquoy celuy qui a acheté un cheval ne peut aprés les quarante jours agir en garantie contre son vendeur, quoy qu’il allégue qu’ayant revendu le même cheval à un autre, il n’a pû poursuivre son garand que du moment qu’il a été attaqué par le second acheteur. Cela fut jugé en la Chambre des Vacations le 6 de Novembre 1663. en la cause des nommez Chefdelaville, le Brun et Barbé, plaidans de Cahagnes, de l’Epiney et Theroude. L’Arrest fondé sur cette raison, que le second ache teur possede pour le premier, et que si l’on recevoit aprés les quarante jours de la premiere vente l’action en garantie contre le premier vendeur, il pourroit arriver qu’il seroit inquieté même aprés un an, supposé qu’il y eût eu divers marchez faits d’un même cheval, ce qui détruiroit la regle établie en cette matière. On avoit jugé auparavant en la Chambre de lEdit le 29 de May 1653. entre les nommez Lamy, Létang, et autres, que l’action redhibitoire pour vente d’un heval devoit être intentée dans les quarante jours.

Pour l’action en garantie pour vente de vaches et de moutons elle a beaucoup moins de durée, elle doit être formée dans les neuf jours de la vente, ou de la delivrance.

C’est encore un usage que pour hardes de chevaux, il n’y a point de garantie : Ainsi jugé par Arrest en la Chambre des Vacations du 20 d’Octobre 1657. le demandeur en garantie fut apoiné à faire preuve de la promesse faite, lors de la harde, qu’on luy garantissoit le cheval exempt de ous vices ; c’étoit juger la question que cessant la promesse on n’auroit pû demander de garantie.

On a fait cette autre exception en cette Province pour la vente de la graine de lin, comme ; pourroit arriver que cette graine n’avoit point levé, non point par le defaut d’icelle, mais ou par la rigueur de la saison, ou par plusieurs autres accidens ; on n’a point trouvé raisonnable de donner une garantie pour ces sortes de ventes, et toutes les fois que les laboureurs ont formé des actions pour cet effet contre les marchands, ils en ont été deboutez : on a même jugéi que la stipulation expresse de la garantie étoit incivile, et qu’encore qu’on eût promis et gasanti non seulement que la graine étoit bonne, loyale et marchande, mais aussi qu’elle leve-roit bien, cette promesse êtoit nulle, parce qu’il n’étoit pas au pouvoir du vendeur de la faire reüssir, cela dépendant des causes secondes, de la qualité du terroir, de la culture du laboureur, de l’air du Soleil ; et des faisons. Il est vray qu’on peut se charger des cas fortuits, l. si quis, locati : D. si quis fundum locaverit, ut etiam si quid vi majore accidisset, hoc et prastaretur, pacto standum est. Mais cette espèce de garantie êtoit fort différente, car outre les cas fortuits, la faute peut proceder du laboureur pour n’avoir pas choisi un fonds propre, pour ne l’avoir pas bien cultivé, ou pour n’avoir pas semé dans un temps convenable ; aussi par la l. fistulas. D. 5. dern. D. de contr. empt. bien qu’on ait pris sur soy le peril des cas fortuits, cette dipulation neanmoins ne s’étend point aux cas insolites, et contra consuetudinem tempestatis : parce que l’on présume que l’on n’a jamais pensé à garantir les accidens tout à fait extraordinaires : Cela fut jugé de la sorte pour le marchand qui s’étoit chargé de garantie, par Ar-cest en la Grand. Chambre du 8 de Mars 1651. Autre Arrest du 25 de May en la même annnées le marchand avoit garanti que sa graine leveroit bien, faute dequoy il n’en demanderoit rient c’est une jurisprudence cettaine au Palais, et on a cassé les Sentences qui ordonnoient que les terres seroient vûës, pour sçavoir si elles avoient été labourées et fumées comme il êtoit necessaire Le cedant d’une rente constituée est naturellement obligé à la garantie, neanmoins il s’en peut défendre si le cessionnaire ne l’a point fait appeler à la discution des biens de l’obligé, et si auparavant l’adjudication il ne l’a point interpellé d’encherir les héritages à si haut prix qu’il pût être porté.

Celuy qui avoit acquis un héritage d’une femme, à qui il n’appartenoit point, étant troublé par le proprietaire, il le soûtenoit non recevable en son action, vû sa qualité d’heritier preomptif de la personne qui luy avoit vendu, concluant suivant cette regle quem de evictione. &c. il ajoûtoit outre cela qu’il demeuroit avec elle, et qu’ils étoient en communauté de bie ns : le proprietaire répondoit, que cette qualité d’heritier presomptif ne détruisoit point son droit, étant ncertain s’il accepteroit la succession : la communauté de meubles, et même de tous biens, n’oblige pas personnellement pour les choses qui ne resultent point de la communauté ; par Arrest donné au mois de Janvier 1620. au Rapport de Mr de Banneville, il fut dit à bonné tause laction du propriétaire.

La nécessité des affaires publiques ayant causé le retranchement des rentes dûës par le Roy, cela a fait naître plusieurs actions en garantie contre ceux qui les avoient venduës ; mais quelque stipulation expresse qu’on eût employée dans les contrats, nonobstant la clause de fournit et faire valoir, ou de payer soy-même, et quelques favorables que fussent ces garanties, les Arrests du Conseil en ont déchargé les vendeurs.

Il étoit juste neanmoins d’en excepter les rentes baillées en partage ou pour mariage. On de jugea de la sorte pour David, sieur de la Hogue, pour lequel je plaidois ; par son contrat de nariage avec la soeur d’un nommé le Comte, on luy avoit donné trois mille livres en dot, constiuées en 2oo livres de rente ; le Comte pour s’acquiter de cette rente luy ceda deux parties le cent livres de rente, dont l’une êtoit à prendre sur le Roy, et depuls David la ceda au sieur de S. Germain-Matinel, lequel faute de payement par le Receveur du Domaine, poursuivit Daid en garantie, et David ayant fait condamner le Comte à se recharger de la rente ; sur l’appels du Hequet alléguoit la force majeure et le fait du Prince. Je remontrois pour David la faveur de son action, que c’étoit la legitime de la femme, et que ce transport fait par le Comte n’étoit à proprement parler qu’une delegation, ayant stipulé que David n’en pourroit recevoir le ran chapt qu’en sa presence : Par Arrest en la Grand-Chambre du 18 de Juin 1657. on mit sur l’appel hors de Cour.

Par les derniers Arrests, tant du Conseil Privé que de ce Parlement, on n’a plus fait de distinction, et les vendeurs ont toûjours êté déchargez, parce que les retranchemens et redu-ctions de rentes, soit pour le principal ou pour les arrerages, sont des effets de la puissance Souveraine, à laquelle on ne peut resister ; et par un Arrest donné au Conseil Privé du Roy le 47 d’Aoust 1666. pour la ville d’Auxerre, qui depuis a servi de Reglement pour toutes les autres villes du Royaume, il est expressément porté qu’en consequence des retrenchemens faits par le Roy, les créanciers ne pourront pretendre aucun recours ni garantie contre leurs cedans et coheritiers par quelques actes et contrats que lesdits transports et cession ayent été faits, soit par contrats de mariage, fondations de services, ou par testament, donations entre vifs, ou à cause de mort, codicilles, legs, et tous autres actes et dispositions generalement quelconques, et à l’égard des contrats où les cedans ont promis garantir, fournir, et faire valoir la rente, et à faute de payement, de payer soy-même, ou si le cedant s’est obligé par clause expresse de garantir le fait du Roy, sursoiront toutes actions de garanties des cessionnaires, jusqu’à ce qu’autrement par Sa Majesté en ait été ordonné Bertrand le Boucher avoit vendu des héritages à Guillaume du Val, relevans du fief de la Mote des Rotours, à cette condition de payer toutes les rentes et redevances, mais ces herigages étant chargez d’une ainesse, l’acquereur conclud en garantie contre son vendeur pour ne luy avoir point exprimé cette charge, qui ne pouvoit être entenduë ni comprise sous cette clause generale de charges, rentes et sujetions, le vendeur ayant été condamné à la garantie : Ce Telier son Avocat disoit pour moyens d’appel, que l’ainesse êtoit une charge et une sujetion que l’acquereur êtoit tenu d’acquiter, puisqu’il s’étoit obligé par le contrat d’acquiter tou-tes les charges et sujetions, et que même il n’avoit pû l’ignorer étant voisin, et ayant été long-temps Procureur du Seigneur : Durand representoit au contraire, que cette charge étoit extraordinaire, qu’elle devoit être expressément declarée par le contrat, pouvant être si onereufe que l’acquereur seroit forcé de déguerpir : Par Arrest du 18 d’Aoust 1661. la Sentence fut confirmées, nonobstant que l’appelant eût allégué que cet acquereur depuis son contrat voit fait le service de cette ainesse, ce qui faisoit connoître quien contractant il avoit eu ette intention de s’en charger.