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C.

Definition d’héritage noble.

L’héritage noble est celuy à cause duquel le vassal tombe en garde, et doit foy et hommage.

En l’état où sont maintenant les fiefs, la definition que cet Article nous en donne est plus pûrfaite que celle des Jurisconsultes, Feudum, dit MCujas , in proem. Ad lib. fend. est jus pradio alieno utendi, fruendi, quod pro beneficio Dominus dat, eâ lege, ut qui accipit fidem & militia munus, aliud-ve exercitium exhibeat. Mr le Le Févre a repris cette definition comme ne convenant plus au fief ; un vassal en France n’étant plus obligé depuis plus de 300. ans de suivre son Seigneur à la guerre, et d’ailleurs une joüissance perpetuelle et legitime est une véritable roprieté ; Toutes les autres definitions conservent au Seigneur de fief une proprieté inutile, celle de du Moulin est la plus suivie ; Benevola, et perpetua concessio rei immobilis, aut aaequipollentis cum translatione utilis dominii, retentâ proprietate sub fidelitate & exhibitione servitiorum.

Le fief peut retourner au Seigneur en tant de manieres, que le domaine direct qu’ileretient de luy est pas inutile : La proprieté des fiefs a introduit la foy et l’hommage ; auparavant on le faisoit le serment de fidelité qu’au Roy, et tous les lieux où l’on parle du ferment de fidedité, doivent être entendus de la sorte, non pro ea fidelitate qua vassaticum importat, non point de cette foy que le vassal doit à son seigneur feodal cela ne s’est pratiqué que depuis six cens ans ou environ,Domin . Prarov. Alod. c. 11., dans son voyage Remond de Agiles la Terre Sainte, a écrit que Remond Comte de Tholose voulut bien prêter le serment de delité à l’Empereur Alexius, mais qu’il refusa de luy faire hommage, n’étant point son vassals La différence de ces mots, fidelité et hommage, est fort bien marquée dans une Epitre duPape Adrien , rapportée parRadevicus , en ces termes, Episcopos, inquit, ltalia solum Sacramentum fidelitatis, sine homagio debere Domino Imperatori, id est, sine personarum subjectione.

L’hommage est d’un usage plus nouveau, et quoy que cet Article le fasse entrer dans la definition du fief, non est tamen de substantialibus feudi, le terme même en êtoit encore inconnu au temps de la compilation du livre des fiefs ; Il n’en est fait mention en aucun lieu. Illud verbum homagium barbarius est feudo, ditdu Moulin , et introductum fuit moribus quorumdam, & quod aut consuetudine se faciendi hominem alterius, car il étoit permis à un homme libre de se choiir un seigneur ; ce que Mr leLe Févre , des fiefs, l. 3. c. 1. et dans ses preuves verb. homo. traite Chassanée fort doctement, quoy que cette Coûtume soit abolie, on a retenu le terme ; voyez Chassanée sur la Coûtume de Bourgogne, titre des fiefs 83. in verb. hommoge ;Hotom . disput. feud. c. 20 et Bouteiller en sa Somme Rurale.

Spelmannus en son Glossaire, verb. feudi, a fort bien expliqué les diverses espèces des fiefs ; nous n’avons reçû que les fiefs de Dignité, et les fiefs de Haubert.

Les droits des fiefs sont aussi de plusieurs sortes,Argent . Art. 277. gl. sunt substantialia, naturalia, et accidentalia. Ceux qui composent leur essence sont inalterables et immuables, telle est la retention de la Seigneurie directe ; l’hommage non est de naturalibus : les fiefs ont subsisté avant la prestation de Phommage, c’est pourquoy les Docteurs disent feudi naturam dependere potius ex pacto, quam alio jure communi,Boër . Coûtume de Bourges, t. des fiefs, S. 5. Tous les autres droits que les hommes ont ajoûtez sont accidentels aux fiefs, et naissent de la convention des parties. Or quand il s’agit de ces droits feodaux, il y a cette difference que le demandeur n’a point besoin de prouver ceux qui sont de l’essence ou de la nature des fiefs, mais pour eux qui ne sont que par accident et par la seule convention, ils ne sont point dus, s’ils ne sont prouvez,

Il y a neanmoins certains droits ordinaires que la Coûtume a établis, et qui sont dûs sans aucune convention, et qui peuvent être demandez par ceux qui ont fief ; d’autres extraordinaires, quii ne peuvent être exigez sans paction ; ce que l’on peut apprendre dedu Moulin ,Molin .. 82.. n. 125.Argentré , Coûtume de feud Bretagne, Art. 230. gl. 1.

Chaque fief a sa denomination particulière, et c’est pourquoy il n’est pas permis de prendre a qualité d’un fief, dont on n’est point Seigneur ; Et quand dans une Paroisse il y a deux fiefs, qui ont la même denomination, et qui appartiennent à deux Seigneurs differens, qu l’ont aucune prerogative lun sur lautre, à cause de leurs fiefs, chacun d’eux peut se qualifier Seigneur en partie ; jugé par Arrest en l an 1601. pour le sieur de Surtainville, contre le sieur de Sainte Mereglise, et depuis pour le sieur de la Rochelle-JourdainLa Noblesse du fief, et la Jurisdiction ne pouvant être données que par le Roy, elles ne peuvent s’acquerir par prescription ni par usurpation ; la possession d’une chose contraire à son origine et à sa qualité naturelle n’en peut changer la nature ni la condition. Cela est vray seulement quand il paroit que la possession n’a pour fondement que l’usurpation ; car il est sans doute que la qualité de fief peut être prouvée par une possession immemoriale, justifiée par titres : autrement aprés tant de vicissitudes, de changemens et de guerres, qui sont arrivées en ce Royaume, il resteroit peu de fiefs ; s’il falloit montrer leur titre primordial. C’est l’espece des Arrests remarquez parBérault , on découvroit l’usurpation ; ainsi cette possession étant vicieuse, elle ne pouvoit suppléer le titre. Ce qui fut jugé sur les mêmes considerations. contre les Chanoines de la Ronde de Roüen, l’Ir de May 1616.