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CXI.

Saisie feodale est annale.

Toute prise de fief est annale, et doivent les diligences être recommencées par chacun an, s’il n’y a Sentence d’adjudication, ou procez formé pour lesdites diligences.

Par l’Article 3. de la Coûtume de Paris, la saisie feodale doit êtré renouvelée de trois ans en trois ans. Mais parmy nous quand la reünion est jugée bien faite par Sentence, et qu’on en ajuge le prosit au Seigneur, elle ne perit point par an et jour : fuivant cet Article il fut jugé de la sorte en l’Audience de la Grand-Chambre le 31 de Juillet 1671. entre le sieur Comte de Chamilli et le sieur de Courci : De Cahaignes soûtenoit que la Sentence êtoit annale, mais on n’eûr point d’égard à cette prétention, on décida par le même Arrest, qu’encor que le Seigneur ait fait signifier la Sentence à son vassal par trois ans consecutifs, et qu’en consequence il demandât les fruits de ces trois années-là au vassal, qui avoit joui par ses mains, toutefois elles ne luy appartenoient point, non pas même les fruits de l’année, puisqu’il en avoit souffert l’enlevement sans s’en plaindre, et puisqu’il luy avoit permis de labourer, il devoit veiller qu’il n’emportât les levées, et que c’est en ce cas que l’on peut dire, tant que le Seigneur dort, le vassal veille. Il semble étrange que le vassal profite de son attentat, et que le Seigneur qui a fait tout ce que la Coûtume luy preserit, ayant fait juger la reünion valable, et l’ayant fait. signifier à son vassal., soit neanmoins privé du benefice de sa diligence par un vassal peu resrectueux, et que la neüinion ne puisse avoir son effet, si le Seigneur ne couche sur le champ et n’y pose des gardes : C’est en vain que la Coûtume donne ce pouvoir, si le vassal le peut rendre inutile par une surprise, et par un attentat, ou une diligence prematurée : Il perd la pos-ession et la proprieté de son fonds par la signification qui luy est faite de la saisie et de la reü nion, et cependant il peut impunément emporter les fruits, s’il peut prévenir son Seigneur, si le fonds reüni consiste en une terre aux champs qui soit labourée et ensemencée, lors que l’adjudication est faite au Seigneur, il ne peut executer la Sentence ni prendre d’autre possession que la notification de la reunion qui dépossede le vassal, et qui ne peut toucher aux fruits que par attentat, et autrefois la saisie feodale emportoit non seulement la perte des fruits, mais aussi celle du fonds même, ce qui montre que le vassal est absolument dessaisi ; ce qu’on peut dire pour soûtenir l’Arrest, est que le Seigneur s’étoit en quelque sorte départi de l’effet de la reunion, en ce que depuis la notification qu’il en avoit faite, il avoit souffert son vassal dans la ouissance des choses reünies, et qu’il ne l’avoit pas empesché de labourer et d’ensemencer les terres, ce qu’il êtoit tenu de faire. Aussi la Cour s’en est expliquée nettement par un Arrest donné en l’Audience de la Grand-Chambre, le 12 de Juillet 1674. sur ce fait. Un Seigneur ayant fait reunir un héritage, dont tout le revenu consistoit en fruits, il fit cueillir deux boisseaux de pommes au mois d’Octobre, à l’effet d’executer la reunion par une prise de posses-sion actuelle. Depuis le vassal ayant emporté les fruits, et nonobstant qu’il eût presenté Aveu, la Cour le condamna à la restitution d’iceux, parce que le Seigneur avoit pris possession, et que les fruits avoient êté enlevez par le vassal avant que d’avoir baillé son Aveu.

Si les héritages sont baillez à ferme, il faut suivre l’Article 1o du Reglement de 1666. Touchant la peine qu’encourt le vassal quand il empesche la jouissance du Seigneur, voyez Co-quille, Question 25.