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CXII.

Solemnitez requises aux prises des fiefs.

Le Prevost, Sergent, ou autres faisant prise de fief, doit declarer par trois Dimanches consecutifs à l’issuë de la Messe Paroissiale du lieu où les héritages sont assis, que le Seigneur les entend mettre en sa main, à faute d’homme, droits et devoirs Seigneuriaux non faits, et que s’il ne se presente aucun homme pour les faire dans les quarante jours ensuivant de la derniere criée, ils se-ront ajugez au Seigneur aux prochains Pleds ensuivant : et en ce faisant doit déclarer le jour, lieu et heure desdits Pleds par le même exploit qui sera certifié de témoins.

Par tous ces longs delais et ces diligences, que le Seigneur est tenu de faire, il paroit que nôtre Coûtume est fort indulgente aux vassaux, mais aprés tant de semonces de s’acquitter de eur devoir leur negligence est inexcusable

La Coûtume de cette Province donne à tous les fiefs une Justice feodale, qu’elle appelle asse-Justice ; et c’est pourquoy ils peuvent se servir de leurs Officiers, qu’on appelle Prevosts.

La Coûtume de Nivernois, titte des fiefs, Article 9. porte, que la saisie feodale peut être faite par le Sergent du Seigneur de fief, ores que ce soit en Justice, et doit ledit Sergent demander assistanJe au Seigneur Justicier du lieu, où il fait ladite saisie. Et Coquille expliquant cet Article, dit u’il s’entend, si le Seigneur du fief a Justice et droit de créer des Seigents, autrement il doit s’aider du Sergent de la Justice du lieu, en laquelle est le fief servant, parce que c’est une regle que le fief et la Justice n’ont rien de commun, et que pour être Seigneur feodal on n’est pas fondé en Jurisdiction ; mais comme j’ay dit il n’y a point de véritable fief en Normandie, qui ne soit fondé en Cour et usage, c’est à dire en basse-Justice, ce qui est tres-ancien. Car nous apprenons que dans l’ancien usage de nos fiefs, les Seigneurs faisoient leurs saisies, et ous leurs exploits feodaux par le ministere de leurs Sergents, comme ils faisoient juger leurs auses par leurs Pairs ou Hommes de fief, appelez Pares curiae.Brodeau , Article 1. n. 13. et Loüet se9. et M. Loüer, l. R. n. 36. Nous avons donné le nom de Prevosts à ces Sergents de fief quasi Prapositi, comme étant préposez par le Seigneur pour avoir le soin de ses affaires feodales.

Brodeau ibidem, estime que nos Prevosts ou Sergents de fief, étoient ces servientes, sive milites solidarii, idest stipendiarii, quia in solidis, forensi nummorum genere, ctipendia numerantur vice feudi, quod feudum soldata dicebatur, dequoy il est fait mention dans les Auteurs du temps. Voyez Ménage in verbo, fouldoiers, et, l. 2. Dadin de Haute-Serre Duc. et Com. Provincialibus Galliae, c. 8. et i0. in fine, et libro de originibus feudorum pro moribus Galliae, c. 30. où il dit que de-là viennent les Sergenteries fieffées, dont les propriétaires sont obligez de faire la recepte des droits du Seigneur du fief, et d’en tenir compte et rendre autres semblables services, et dont il est souvent parlé dans l’ancienne Coûtume de Normandie, c. 26. 28. 33. 34. 83. 85. 94 et 117. et autres Ordonnances de l’Echiquier de l’an 1426. Du Chesne Chesne, sur sur Alain Chartier, pag. 864. et 865. etTerrien Terrien , l. 2. c. 13. au commencement

Les formalitez necessaires pour parvenir à la reünion sont prescrites par cet Article : il oblive seulement le Prevost à declarer par trois Dimanches consecutifs, à l’issué de la Messe Paroissiale, que le Seigneur entend mettre en sa main les héritages saisis, sans ajoûter qu’il est neces-faire d’afficher ces proclamations. Bérault neanmoins en est d’avis, et rapporte un Arrest qui doit l’avoir jugé de la sorte, et la pluspart des Prevosts le pratiquent ainsi : voyez la Coûtume de Nivernois, titre des fiefs, Article 8. où Coquille prouve par plusieurs raisons qu’il ut offrir ou bailler copie à la partie, ce qui ne se peut faire que par affiche, lors que la partie est inconnuë. L’Ordonnance semble y être conforme, cette formalité néanmoins ne me paroit pas necessaire, et ce seroit aujourd’huy une aggravation de frais pour le vassal à cause du papier de Formule et du Controlle

On demande si ce delay de quarante jours court contre ceux qui l’ignorent ; Comme les publications rendent la saisie notoire, l’ignorance ne peut être excusée. NeanmoinsPontanus , Coûtume de Blois, t. 5. Art. 54. estime que, etiamsi summo jure currat, tamen ob probabilem & justam ignorantiam per in integrum restitutionem eis succurri posse : Mais aprés tant de forma litez, l’excuse fondée sur. l’ignorance n’est point admissible.

Si on doit dire la même chose pour les mineurs, cela sera décidé sur l’Article 148. Mre Jacques Godefroy propose cette question, comme fort douteuse, si le Seigneur pendant les diligences pour parvenir à la reünion fait les fruits siens s Mais il faut tenir certaine-ment que si le vassal purge son retardement et donne son Aveu avant la reünion, le vassal sauve ses fruits, et que le Seigneur ne peut demander que les frais. Les diligences ne sont de pour reveiller le vassal, et pour luy donner le loisir de se mettre à son devoir, aussi les termes de cet Article y sont exprés ; les fruits ne sont ajugez au Seigneur que quand il ne se presente personne avant la reünion. La Coûtume d’Orléans, Art. 50. dit que le Seigneur fait les fruits siens, qui sont échûs depuis la saisie, et avant que le vassal ait fait son devoir. Ce même Auteur propose cette difficulté, si le proprietaire de l’héritage faisi décede aprés les quarante jours de la dernière Criée, le successeur aura encore quarante jours : Mais il faut dire que le Seigneur n’ayant point connu le défunt pour vassal, sa mort ne doit point interrompre bi arrêter le cours des diligences, si ce nouveau successeur ne se presente point pour avoir le delay porté par l’Article 109.