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CXLI.

Tenûre en pure aumône.

Neanmoins si l’Eglise a possedé fief ou heritage par quarante ans en exemption de bailler homme vivant, mourant et confisquant, ou de pourvoir à l’indemnité du Seigneur, elle tiendra de-là en avant le fief ou héritage en pure aumône, et ne sera tenue que bailler simple declaration au Seigneur.

Le Roy n’a point approuvé cet Article, parce que les Ecclesiastiques ne peuvent posseder aucuns biens sans sa permission, comme on l’apprend par le Procez verbal de la reformatiun de la Coûtume, néanmoins cet Article ne parle que de l’indemnité. C’est aussi le sentiment deBacquet , du droit d’amortissement, c. 60. que les gens d’Eglise ne peuvent se prévaloir de la prescri-ption, ni pas même de la centenaire, parce qu’elle seroit contre l’interest public, nullo tempore prescribitur amortisatio adversus Regem,Molin . de feud. 5. 51. n. 92. Voyez Salvaing 2. part. c. 59.

Les Coûtumes de France sont fort différentes sur cette sorte de prescriptions : Par l’Article 14. de la Coûtume de Blois, si les gens d’Eglise ou autre Corps de main-morte ont possedé les héritages par eux acquis pendant quarante ans, sans interpellation de les mettre hors de leurs mains les Seigneurs feodaux ne les y pourront contraindre : toutefois ils seront tenus de bailler aux Seigneurs feodaux, s’ils les en requierent, homme vivant et mourant ; et par la Coûtume de Tours, Article 2. le Seigneur ne peut les contraindre aprés quarante ans de remettre l’heritage ; mais pour l’indemnité elle ne se prescrit que par un temps immemorial, qui est de cent ans.

Celle d’Orléans, Article 40. n’admet la prescription qu’aprés soixante ans. On jugeoit autrefois à Tholofe que le droit d’indemnité ne se prescrivoit point ; par les derniers Arrests on a tenu qu’il pouvoit être prescrit sur ce fondement, que l’indemnité est donnée au Seigneur, au lieu les lots et ventes qui luy pourroient écheoir, si le bien n’étoit pas en main-morte, or les lots et entes pouvans être prescrits, l’indemnité qui est substituée en leur place, est sujette à la même loy.Cambol . l. 4. c. 23. Et c’est aussi l’avis de du Du Moulin et deBacquet .

Quoy qu’il soit dit en cet Article que l’Eglise qui a possedé par quarante ans, en exemption de bailler homme vivant, mourant et confisquant, ou de pourvoir à l’indemnité du Seigneur, il ne faut as entendre cette disjonctive ou, pour en conclure qu’il suffit de bailler homme vivant, mourant et confisquant, ou de pourvoir à l’indemnité du Seigneur, comme je l’ay déja remarqué sur l’Article precedent ; mais le sens est que si l’on a baillé l’homme vivant, mourant et confisquant, a et que l’on n’ait point payé l’indemnité, on ne pourra la demander aprés les quarante ans, quoy que l’on puisse demander l’homme vivant, mourant et confisquant, ou bien si l’on a payé l’indemnité, sans bailler homme vivant, mourant et confisquant, on ne pourra plus y assujettir l’Eglise, c’est à dire que l’un et l’autre droit peut être prescrit separément, Il est vray que suivât cet Article, le droit d’indemnité ne peut être prescrit par l’Eglise qu’aprés quarante ans : mais la consequence que Mr de Cambolas tire de la prescription des lois et ventes pour prouver que le droit d’indemnité est aussi sujet à lu prescription, ne me semble pas valable. On peut prescrire un treizième échû et pour une seule fois ; mais pour l’exemption du droit de treizième elle est imprescriptible dans les regles, parce que c’est un droit casuel qui peut n’écheoir qu’aprés cent et deux cens ans, et les terres ne se vendent pas toûjours. Si le droit de treizième se prescrivoit par quarante ans, il y a plusieurs siecles que ces droits seroient éteints, parce qu’il ne se trouveroit point de terre qui n’esit été possedée par quarante ans, sans être venduë. Aussi pour priver les Seigneurs de ce droit, il a falu en faire une disposition expresse en faveur de l’EglifeAprés une possession quadragenaire l’Eglise n’est plus tenuë qu’à bailler une simple declara-tion, dans laquelle les Ecclesiastiques pourront employer qu’ils ne sont point sujets de comparoir aux gage-pleges, ni de payer les reliefs, treizièmes et autres droits ce qui fut jugé le 15 de Février 1516 contre le sieur de Courbespine pour les Bourgeois de Bernay. Voyez la Coûtume de Bretagne, Article 347.

On allégue un cas favorable, où les gens de main-morte ne peuvent être forcez de vuider leurs mains, à sçavoir lors que le fonds a été donné pour la construction d’une Eglise Paroissiale, quelques-uns ajoûtent que cela doit avoir aussi lieu pour létablissement d’une école publique, voyez les Auteurs citez par de laLande , sur les Articles 41. et 42. de la Coûtume d’Orléans.