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CXLII.

Que peut demander celuy qui a fait don de son bien à l’Eglise.

Celuy qui a fait don à l’Eglise de son héritage, n’y peut reclamer autre chose que ce qu’il a expressément reservé : neanmoins s’il luy a fait don de Patronnage sans reservation, les droits honoraires dûs aux Patrons luy demeurent entiers et à ses hoirs, ou ayans cause au fief ou glebe auquel êtoit annexé ledit Patronnage.

Un Philosophe disoit qu’il n’êtoit point necessaire de faire une loy pour obliger les hommes à reconnoître les graces et les biens qu’ils avoient reçûs, parce que la gratitude dans les ames bien nées est toûjours inseparable du bien-fait. Suivant le raisonnement de ce Philosophe, il étoit superslu d’ordonner à l’Eglise d’honorer son bien-faicteur, et de conserver à celuy qui luy fait lon du Patronnage tous les honneurs qui sont dûs aux Patrons, encore bien qu’il n’en ait fait aucune reserve.

Ca Coûtume mieux instruite par l’experience que ce Philosophe n’a pas ignoré que l’on perd ort aisément le souvenir d’un bien-fait, et c’est pourquoy elle enjoint justement à l’Eglise de reconnoître son bien-faicteur, quoy qu’il n’eûr exigé d’elle aucune marque de reconnoissance.

Ainsi cet Article n’est pas inutile, au contraire il contient deux décisions fort importantes et fort singulières ; la premiere, que les droits honorifiques demeurent aux Patrons entiers, sans qu’il soit besoin d’en faire réserve ; et la seconde, que les droits honorifiques passent aux hoirs, et à ceux qui ont cause au fief ou glebe, auquel le Patronnage est annexé-

La première disposition de cet Article est fort necessaire ; car les Docteurs Canonistes ont mis en problême, si celuy qui avoit fondé et bâti une Eglise pouvoit s’en conserver le droit de nonination sans une stipulation expresse ; Et Mr d’Argentré , dans son dernier Conseil, a tenu que les honneurs ne sont point dus au Patron, s’il ne les a expressément retenus en fondant l’Eglise ; et c’est une question célèbre entre etRochus de Curte Paulus de Citadinis , que l’Oyseau a conciliée par cette distinction, sçavoir que le parfait Fondateur, qui a donné le fonds, le bariment et la dot est Patron, ipsojure, sans avoir besoin de reservation : mais pour le Fondateur im-arfait, qui n’a donné que le fonds, le batiment, ou la dot, il n’est point Patron, si le droit ne Loyseau uy en a été expressément reservé avant la consecration ; Loyseau des Seigneuries, c. 11. n. 27. et 28.

Si nôtre Coûtume ne s’en êtoit pas expliquée si nettement, on auroit douté avec beaucoup plus d’apparence, si celuy qui yétoit dépoüillé du droit de nomination qui l’avoit aumoné Cou pour parler comme les Canonistes ) qui l’avoit rendu à l’Eglise, pouvoit encore retenir quelques droits ; Ceux qui regardent ces droits comme une servitude imposée à l’Eglise, ne les peuvent souffrir, sans une stipulation expresse, nulle servitude n’étant duè sans titre. Mais on ne doit pas mettre au rang des servitudes une reconnoissance si legitime ; la convention n’est pas nécessaire pour obtenir ces prerogatives ; elles sont dûës naturellement, ipso jure, et ex virtute agratitudinis. Aussi la Coûtume a fort prudemment ordonné que celuy qui avoit exercé enver lEglise cette seconde liberalité, ne méritoit pas moins de reconnoissance que le premier Fondateur.

Elle a suivi en ce point les belles maximes du droit Romain. Le Patron qui avoit remis à son affranchi le droit de luy succeder, ou les autres services personnels qu’il étoit obligé de luy rendre, ne laissoit pas d’être revéré par son affranchi, remissa non videbatur reverentia, l. 3. c. de bon. libert. et no7. 78. c. 2. Ainsi le Fondateur qui a remis son droit de presentation n’est point reputé remettre ce qui ne consiste qu’en des témoignages d’honneur et de revérence.

La seconde disposition de cet Article a décidé cette grande Controverse, si ces droits étoient versonnels ou réels ; elle les repute réels, et les attribué à celuy qui possede le fiefou la glebe où le Patronnage est annexé.

La Coûtume donnant à celuy qui a aumôné le Patronnage les droits honorifiques, et les faisant encore passer à ses hoirs, ou à ceux qui possedent le fief ou la glebe, il est necessaire d’expliquer en quoy consistent ces droits honorifiques ; s’ils sont personnels ou réels ; s’ils sont dûs de plein droit, et sans distinction dans tous les lieux consacrez au service divin : Je parleray aussi de la Seance que peuvent avoir dans l’Eglise ceux qui ne sont point Patrons, de la Preseance entre personnes de même qualité ou de condition différente, du droit de Banc et d’autres questions de cette natute.

bi les Fondateurs des Eglises avoient consulté l’humilité Chrêtienne, ils n’auroient point recherché d’autre recompense de leur aumone que la gloire d’une pieuse action ; mais l’ambition Saluste y a eu trop de part. Natura mortalium honoris avida & imperii, et praceps ad explendam animi cupidinem, dit Saluste. Ces Fondateurs exigerent avec empressement des honneurs et des témoigna-ges publies de leur liberalité, et comme les Payens avoient rendu leurs noms célèbres par les Temples qu’ils avoient élevez, les Chrêtiens à leur imitation se firent donner des titres, des inscriptions, des prieres publiques, de l’encens, des sepultures, et d’autres marques publiques d’honneur et de revérence. Ils appelerent de leur nom les Eglises qu’ils avoient bâties ; ils y faisoient graver leurs noms dans les lieux les plus éminens, imitans encore en ce point les Payens qui méttoient des inscriptions dans tous les ouvrages qu’ils donnoient au publie. Ce qu’on apprend par la l. 2. D. de aper. publ. qui publicum opus adificaverit munificentiae suae fructum capere potest, de inscriptione sui nominis huic operi.

Toutes ces marques d’honneur se donnoient avec facilité ; car d’un côté l’homme naturellement amoureux de la gloire, les affectoit avec passion. D’autre côté les Ecclesiastiques ne pouvoient pas se dispenser de reconnoître une charité si digne de loüange.

Nos Patrons se sont maintenus en la meilleure partie de ces prerogatives ; ils sont encore recommandez aux prieres publiques de la preseance, de l’encens, des sepultures ; peuvent mettre des Armes, des Litres et des Ceintures funebres à l’entour des Eglises Il faut remarquer que dans les prieres publiques l’on peut bien nommer l’Etat Ecclesiastique et celuy de Judicature, mais jamais personne de la Noblesse en particulier. Cela a été jugé au Parlement de Paris, au Rapport de Mr de Tambonneau, en l’année 1668. entre Goinbert, Seigneur de Beleau, et Gautier Elû-

La Noblesse de France a toûjours affecté passionnément ces honneurs : adeo sdit un Auteut le ce siecle Jinsionia gentilitia deperire Duces et Comites, ut vi aternae pietatis argumenta sacris. edibus à se constructis inscribere gestirent., Dadin de Haute-Serre Duc. et Com. Provinc. l. 3. c. 3.

De Roye ,. cap. 8. a recherché avec beaucoup soin et d’érudition l’origine de jur. honor nos Ceintures funebres, et de ce mot de Litre. C’étoit une coûtume parmy les anciens Romains. de faire graver et écrire sur les ouvrages publics leurs noms, leurs familles, leur dignité, et leurs actions remarquables. Les Chrêtiens n’eurent pas moins d’ambition, ils ne manquerent pas d’apposer leurs noms et leurs titres aux lieux les plus éminens des Eglises qu’ils avoient fait construire, ce qui se pratiqua dés le commencement du cinquième siecle. On rencontre encore aujourd’huy en plusieurs Eglises de ces inscriptions gravées sur des lames d’airain ou de marbre.

Les Litres aujourd’huy font à peu prés le même effet, et comme les familles nobles se distinguent particulièrement par leurs Armes, on appose les Armes du Patron au lieu d’y mettre son nom et celuy de sa Maison.

On convient de la chose, mais l’origine de ce mot de Litre est plus obseure. Le Maréchal le fait venir litura ; sed spongia lituraque digna notitia, dit un Auteur., Dadin de Haute-Serre Duc. et Com. l. 3. c. 3. en tire l’étymologie du mot Grec MOTGREC, qui signifie un Cercle ou une Couronne : nais il n’y a gueres d’apparence que les François ayent emprunté ce mot des Grecs. L’opinion Vossius est plus vray-semblable, que litre vient lista, qui signisie quelquefois une ligne, suivant l’observationSpelmanus , Vossius, etMénage . Ce qu’il confirme par l’autorité de Roye la Coûtume de Loudun, Chap. 5. Art. 2. qui appelle ces ceintures funebres listres. Ma conecture seroit que ce mot vient de litera. Scaliger ayant remarqué qu’en plusieurs lieux, et par-iculierement en Flandre, on prononce litra au lieu de litera, et les litres ayant succedé à ces litres et à ces inscriptions, qui s’apposoient aux lieux les plus éminens des ouvrages publics, on a retenu le mot de litera pour signifier l’apposition des Armes, qui se fait au lieu du nom et de la amille du Patron.

Toutes ces prerogatives dont on a honoré les bien-faicteurs des Eglises étoient attachées au commencement à leurs personnes, elles passerent en suite à leurs enfans, à leurs successeurs, et à ceux de leur famille. c. filiis c. considerandum si plures, 16. 4. 7. Mais on a mis en Controverse, si ces droits honorifiques étoient communicables aux étrangers, et s’ils pouvoient se trans-mettre à ceux qui possedoient le fonds ou glebe, dont la fondation faisoit autrefois partie.

L’on ne peut douter, suivant les preuves que j’en ay données sur. l’Article 1. du titre de Patronnage, que le droit de Patronnage dans son origine ne fût personnel, puisqu’au commencement Il étoit restraint à la personne des Fondateurs ; il est plus mal-aisé de sçavoir comment le chanement est arrivé, et de quelle manière il est devenu si absolument réel, que lors qu’il appartient des personnes Laiques il doit être nécessairement attaché à un certain fonds et à une certaine glebe, comme parle la Coûtume en cet Article.

Les grandes guerres que les Rois de la seconde Race eurent à soûtenir contre les Sarrazins. sles obligerent à demander du secours aux gens d’Eglise qui possedoient dés ce temps-là des biens tres-considérables : Ce fut alors que se firent ces infeodations, non pas seulement des dixmes, mais même des Eglises, que ceux qui en étoient investis tenoient en fief de l’Evéque ou du Prince, ce qui ne se fit pas par une usurpation qui ne puisse être défenduë, que par la lon gueur du temps ; ce fut une convention solennelle qui fut arrêtée, suivant le sentiment Mrde Marca , dans son Histoire du Bearn, l. 1. c. 18. dés le temps de Charlemagne et de Loüis le Debonnaire, et dans une assemblée tenue à Liptines en Cambresis, en l’année 743. dont la convocation fut faite par le Prince Carloman où assista Boniface, Archevéque de Mayence, Legat du Pape Zacharie Cacharie, il fut arrêté qu’en consideration des guerres que ce Prince avoit sur les bras, il retien droit pour un certain temps une partie des biens Ecclesiastiques à titre de Précaire, et sous un certain cens ou redevance annuelle, par chaque tenancier : que si le possesseur investi de ses piens venoit à mourir l’Eglise en êtoit ressaisie, si la nécessité n’obligeoit le Prince à continuer e Précaire : Or envertu de ces infeodations les Gentilshommes ne recevoient pas seulement l’investiture des dixmes, mais celle des Eglises, c’est à dire selon la manière de parler des Capitulaires, de tous les revenus Ecclesiastiques, consistans aux fruits, aux oblations et autres menus devoirs, et encore au droit d’établir le Prestre dans l’Eglise de la Paroisse ; de sorte que les Laïques ausquels les Eglises avoient été infeodées étoient en quelque façon maîtres du Corps de l’Eglise et de ses clépendances, et joüissoient du droit de Patronnage, des oblations, des prémices, et des dixmes en baillant un entretenement honnête au Prestre et en reparant l’Eglise, et ils faisoient si hautement valoir ce droit de proprieté qu’ils s’attribuoient la terre qui étoit aux environs de l’Eglise, et interdisoient, quand il leur plaisoit, l’entrée ou l’issuè l’Eglise par leur terre. Voyez de Marca l’Histoire de Bearn. l. 5. c. 30

Et bien que ces investitures ne fussent faites au commencement par le Prince, que pour la tie du possesseur, neanmoins à l’exemple des fiefs, ces investitures des biens et des fiefs d’Elise devinrent hereditaires et patrimoniales.

Sur ces investitures et ces infeodations des Eglises, et des biens qui leur appartenoient, ine autre partie de ces biens-là passa encore en la main des personnes Laiques, par cette aure voye. Les gens d’Eglise qui possedoient des biens considérables ayant été contraints pour leur conservation de se mettre en la protection de personnes puissantes, ces Avocats ou Avoüez ces Patrons, ces Vidames, qu’ils avoient choisis, se rendirent les maîtres absoluts de ces biens, dont ils avoient l’administration. L’on apprend par d’autres titres que les donations faites aux Eglises étoient conçûës en leur nom : Les resignations des Benefices se faisoient en leurs mains, sans le consentement de l’Evesque ; Can. Gonfaldus 11. 4. 2. Enfin ils se mirent en possession des Patronnages, des Dixmes, et des Terres qui leur avoient été baillées, c. cum Bertoldus de senten. et re jud.

Il arriva aussi que ceux qui possedoient le fief ou le fonds, dont la fondation de l’Eglise faisoit partie, partagerent entr’eux l’Eglise même, comme leur propre bien. Sic olim obtinuit usu pravo, contra jus et regulas Ecclesiasticas, ut cum loco ipsa Ecclesia transiret ad heredes. Janus Acosta Acosta ad capit. 2. et 3. de jure Patronatùs, aux Decretales. Ce que l’on apprend aussi par ces Vers deVenantius Fortunatus , Evéque de Poitiers, dans son Epigramme pour l’Eglise de S. Denis.

Exiguam dederat hic prasul AEmilius arcem.

Christicolam populum nec capiente loco.

Quo vita Claudente diem dehinc prole graduque

Venit ad heredes hoc opus hicque locus.

Enfin comme il étoit beaucoup plus commode pour l’Eglise que les Patronnages fussent annexez à quelque fonds certain, pour éviter la multitude de Patrons dont elle auroit été accablée, si ce droit eût appartenu à tous les heritiers du Fondateur, les gens d’Eglise donnerent volontiers les mains à rendre les Patronnages réels en les attachant à quelque fief ou à quelque glebe, et il fut même ordonné par les Canons 2. et 3. d’élire un Patron, et que les Eglises ne seroient plus divisées entre coheritiers

Pour l’explication de cet Article je rapporteray cette question qui s’offrit en l’Audience de la Grand.-Chambre entre Mr Charles Gruin, Conseiller Secrétaire du Roy, sieur des-Bordes, et tuteur de : ses enfans, seigneurs de Preaux, appelant et demandeur contre Me Charles de Maiol, Abbé Commendataire du Prieuré de Beaulieu, intimé et défendeur. L’appel n’étoit as considérable au principal, le sieur des-Bordes maintenoit que ses enfans representans les Seineurs de Preaux, seuls Fondateurs du Prieuré de Beaulieu, ils devoient jouir, à la reserve de la nomination aux Benefices, de tous les droits utiles et honorifiques, qui sont dus aux Patrons, suivant les Constitutions canoniques et civil. Le Prieur de Beaulieu ne contestoit point que les Seigneurs de Preaux n’eussent fondé son Prieuré, et qu’il ne tint de leur liberalité ce qu’il possedoit. Il se défendoit seulement par ces trois moyens, que les prerogatives dont l’Eglise avoit honoré ses bien-faicteurs étoient attachées à leurs personnes, et qu’encore que depuis on les eût étenduës à leurs enfans et à leurs heritiers, et même à ceux de leur nom et de leur famille, ils n’étoient pas neanmoins communicables aux étrangers, et qu’aprés tout quand on leur donneroit une qualité réelle les Patrons n’en pourroient joüir que dans les Eglises Paroissiales, et non point dans les Eglises Conventuelles et Collegiales.

Je répondois pour le sieur des-Bordes, que les deux premieres objections se pouvoient refoudre par la division qu’on a faite des Patronnages en personnels et réels ; le Patronnage. personnel est transmis aux heritiers et à tous ceux de la famille du Fondateur, cela fut mis Justinien en usage dés le temps de Justinien, comme on l’apprend par ses Novelles, et bien que regulierement ce qui est personnel ne passe point aux heritiers, il n’en est pas de même du Pa-tronnage personnelicar il n’est pas appellé personnel, parce qu’il est attaché à la personne, non ut cuilam personae adstrictum intelligatur, sed ut abeo distinguatur quod reale est, seu fundo adstrictum On appelle Patronnage réel celuy qui est attaché à la glebe, comme aujourd’huy sont tous les Patronnages, parce que le fonds donné par le Patron est reputé faire encore partie de la Seigneurie, et quoy que la consecration efface toutes les charges et servitudes profanes, elle ne détruit point le droit du Patron, parce qu’il luy appartient naturellement, et qu’on ne peut y déroger par aucun privilege, suivant la décision du C. Monasterium. c. 17. 4. 7 Ce Patronnage est un droit si véritablement réel, que par ce principe nos Rois sont devenus Patrons de plusieurs Eglises, en même temps qu’ils sont devenus les maîtres de plusieurs terres, dont les anciens Seigneurs étoient les Patrons, suivant l’observation deChopin , en sa police Ecclesiastique, l. 1. c. 4. n. 12

Loyseau Il est vray que Me Charles Loyseau les à reputez mixtes par cette raison, qu’ils ne pouvoient être purement personnels, comme les Offices qui sont directement attachez aux personnes, et qu’aussi ils ne pouvoient être tout à fait réels, parce qu’une terre n’étoit pas capable de les recevoir en soy, d’où il concluoit qu’ils étoient d’une condition mixte, étant attribuez à la personne à cause de la chose

Mais on n’a plus douté qu’ils ne fussent réels, puisqu’ils tomboient dans ce commerce, et qu’on pouvoit en disposer avec sa glebe, comme de tous autres biens par toutes sortes de contrats de donation, de vente, d’échange, ou autrement ne pouvant être tenu pour spirituel, quia per se non stabat, comme il est décidé par le C. Ex insinuatione. Le C. Nemini. Le C. Cum saculum de jure Patron. aux Decretales.

Ce qui peut être confirmé par cet exemple du droit civil, par lequel les sepuleres, comme étant une chose facrée, ne pouvoient être vendus separément ; mais il étoit permis de les aliener avec le fonds, dont ils n’étoient qu’accessoires : Il y a plusieurs choses qui de soy sont inalienables, qui entrent neanmoins dans le commerce, comme des annexes et des dépendances de celles dont l’alienation est permise, quedam que non possunt sola alienari, per universitatem transeunt.. quedam. ff. de ac4. rer. dominio. Tout le titre de jure Patron, aux Decretales est plein de décisions, qui attribuent les droits de Patronnage à ceux qui possedent, ou qui ont acquis la glebe du Patronnage ; comme nôtre Coûtume l’appelle, C. cum seculum. C. quia Clerici, et dans le même titre on le repute si réel, qu’Alexandre III . dans le Chap. ex literis, confirme la nomination faite par le fermier au préjudice du proprietaire, l’espèce de ce Chapitre est remarquable. L’Abbesse du Monastere de Winton en Angleterre avoit baillé à ferme au Chevalier Gregoire une métairie, à laquelle le Patronnage êtoit annexé, sans se reserver le droit de presentation : pendant ce bail le Benefice ayant vaqué l’Eveque donna la collation à celuy qui luy fut presenté par le Chevalier Grégoire, et refusa celuy qui depuis luy fut presenté par l’Abbesse : L’affaire étant portée à Rome on ne mit pas en doûte que le Patronnage ne fût un droit réel ; au contraire l’Abbesse soûtenoit que la presentation n’appartenoit qu’au possesseur et proprietaire du fonds, d’où elle concluoit qu’elle seule avoir pû presenter, parce que sa partie n’étoit qu’un fermier : neanmoins le Pape maintint le presenté par le fermier, parce qu’il avoit tous les droits utiles, par la même raison, que le mary presente au Benefice dont la nomination appartient à sa femme.

Aussi nos Jurisconsultes François n’ont point douté de cette vérité, Patronus est, ditRebuffe , qui fundavit Ecclesiam, vel qui jus habuit ab eo qui eam de suo patrimonio construxit. Le C. cum dilectus de jure Patron. le définit aussi de cette sorte, et suivant la doctrine de duDu Moulin , de feud. S. 37. gl. 10 ce droit est réellement attaché à son fonds, que etiam sine ullè aliâ expressione transit cum loco vel domo particulari, quocunque titulo vel modo, sive universali, puta successionis vel confiscationis, sive particulari donationis, vel legati, vel venditionis transfertur ; unde si vendatur fundus, ratione cujus competit jus Patronatùs in aliquâ Ecclesiâ, transit ad emptorem, nec requiritur consensus Episcopi, sive non fiat mentio in venditione de jure Patron. sive fiat, transit ad emptorem.

Aussi on a considéré qu’il étoit plus commode à lEglise même de les artacher à la glebe ou au fonds, dont la fondation faisoit autrefois partie : elle se déchargeoit par cette voye d’une multitude de Patrons, dont elle auroit été accablée, et d’ailleurs ceux qui possedoient les fiefs ou les terres, dont les fondations avoient été détachées, eussent souffert difficilement que ceux qui n’avoient point la Seigneurie, ni l’autorité publique en ce lieu-là, eussent joüi de ces prerogatives qui sont si passionnément recherchées dans les Eglises : ce qui me persuade que les droits de Patronnage furent rendus tout à fait réels, quand les fiefs devinrent hereditaires et patrimoniaux.

Que si lon reputoit ces droits de Patronnage purement personnels, on tomberoit en deux absurditez inévitables ; la premiere, parce qu’il ne se trouveroit maintenant que tres-peu ou point de personnes, qui pussent conserver ces marques d’honneur aprés un si grand nombre d’années, qui ont causé tant de changemens, non seulement dans les familles, mais aussi dans toutes les choses du monde ; il seroit mal-aisé de justifier que l’on seroit descendu de ces premiers Fondateurs ; il s’ensuivroit en second lieu que l’on ne pouvoit contracter des droits de Patronnage par aucune voye, et tous les contrats qui en ont été faits jusqu’à present seroient nuls et simoniaques : Si le Patronnage étoit personnel, il ne pourroit être vendu, donné, ni aliené ; car ne tombant point dans le commerce que quand per se non stat, et qu’il est artaché à quelque fonds, s’il étoit personnel on ne pourroit en disposer valablement.

La Coûtume en cet Article est si expresse sur ce sujet, qu’on ne peut plus en faire un problême, et en effet elle est citée par les Auteurs qui ont traité cette matiere, comme une décision solemnelle et précise : Cet Article décide deux questions fort remarquables ; la premiere, que tous les droits honorifiques sont dûs à celuy qui a fait don du Patronnage à l’Eglise, encore qu’il n’en ait stipulé aucune reservation, et cette disposition est tres-raisonnable, si la simple fondation donne tant d’avantage au Fondateur, on ne doit pas traiter moins favorablement celuy qui se dépoüille du plus beau droit du Patronnage, qui est celuy de la nomination.De Roye , de jurib. honor. l. 2. c. 3. semper honesta esse debet persona Patroni, nec minus et debentur honores, quamvis suam prasentationem loco religioso donaverit, quia retinet semper qualitatem & dignitatem fundatoris quam solan inspiciunt sacri Canones, ut ex ea causa pietatis & munificentiae nomen déférant.

Aussi le C. Nobis de jur. Patron. accorde les droits honorifiques aux Patrons mêmes qui ne peuvent avoir le droit de presentation.

Cet Article décide en second lieu, que les droits honorifiques demeurent entiers à celuy qui a fait don du Patronnage, et à ses hoirs ou à ceux ayans cause au fief où glebe, auquel le Patronnage étoit annexé : D’où il resulte que le droit de Patronnage est purement réel, puisque pour osseder les droits honoraires, il suffit, suivant cet Article, d’avoir le fief ou la glebe où le Patronnage étoit annexé, bien que cet Article porte que les honneurs sont dus aux heritiers du donateurS

On ne peut inferer de ces paroles que le droit de Patronnage soit mixte, personnel, et a réel, et même qu’il soit plus personnel que réel, puisque la Coûtume donne les honneurs en premier lieu aux heritiers du Patron, et ne les fait passer aux possesseurs de la glebe qu’au defaut des heritiers : mais cette explication est éloignée du véritable sens de cet Article. La Coûtume a voulu dire que les heritiers du Patron, qui possedent la glebe, doivent joüir aprés sa mort de ces droits honorifiques, que s’ils ne possedent point cette glebe, alors ils appartiennent à celuy qui possede le fief ou la glebe où ce Patronnage étoit annexé. La disjonctive ou, mise en cet Article, ne signifie pas que pour joüir de ces droits honorifiques ; il faut être heritier du Patron ou posseder la glebe du Patronnage, autrement il s’ensuivroit que deux sortes de personnes pourroient joüir des droits honorifiques, les heritiers et le possesseur de la glebe ; et toutefois il est certain que la seule qualité d’heritier ne donne point ce droit, si elle n’est conjointe avec celle de proprietaire de la glebe. Il faut donc expliquer les paroles de cet Article en cette maniere, que non seulement les heritiers du Patron possedant la glebe de Patronnoge doivent avoir les droits honorifiques, mais aussi tous ceux qui ont cause au fief ou à la glebe, encore qu’ils ne soient point heritiers du Patron ni de sa famille : Aprés cela il est vray de dire, que les enfans du sieur des-Bordes ont toutes les conditions requises pour obtenir les droits honorifiques dans l’Eglise du Prieuré de Beaulieu. Ils representent les Patrons, et ils possedent le fief dont a fondation faisoit partie.

Le Prieur de Beaulieu étant forcé d’abandonner cette première question, et de convenir que les droits honorifiques sont réels et communicables à ceux qui possedent la glebe, il prétend qu’ils ne peuvent être dûs que dans les Eglises Paroissiales, et non point dans les Collegiales. ou Conventuelles.

Il est aisé de prouver qu’ils sont dûs aux Patrons dans toutes sortes d’Eglises, quocumque modo accipiatur Ecclesia verbum, dans les Collegiales, suivant la réponse d’Innocent III . l. 3. Epist.

Epist. 192. dans les Conventuelles, et mênes dans les Monasteres. c. 1. de jure Patron.

Il est vray neanmoins que comme le droit de Patronnage consiste en plusieurs prerogatives, il n’a pas une étenduë si generale et si pleine dans les Eglises Conventuelles et Collegiales. comme dans les Eglises Paroissiales et dans les Chapelles. Le droit de nomination n’a point lieu ordinairement dans les premieres, les Fondateurs neanmoins n’en sont point incapables Ce que lon peut prouver par la même autorité que l’ou employe pour exclure les Patrons du droit de nomination, c’est ce fameux Chapître Nobis de jur. Patron. où le Pape aprés avoir reconnu que les droits de Patronnage sont acquis aux Patrons ipfo jure, ajoûte cette limitation, que in Ecclesia Conventuali, non electioni faciendae Prelati, sed jam facta, honestius Patroni postulatur issensus, nisi aliter de sua Jurisdictione obrineat, ut partes suas interponere debeat electioni faciendae Suivant ce Chapitre le Patron semble être exclus de l’élection, et neanmoins on y apporte deux limitations considérables ; la premiere, qu’encore que le Patron ne puisse pas assister à l’élection, on doit toutefois demander son approbation, ce qui marque que l’on conserve toûjours aux Patrons leurs droits, autant que la nature de la chose peut le permettre ; la seconde limitation est plus importante. L’exclusion du Patron pour l’élection n’est pas generale et absolut au contraire le Pape conserve et confirme ce droit à celuy qui le possede, nisi aliter de sua Jurisdictione intersit, c’est à dire que si par la fondation le Patron avoit retenu expressément ce droit d’élection, le Pape trouve juste de l’y maintenir : On en trouve un exemple notable dans les Epitres d’Innocent lII . l. 1. c. 21. où un Marquis de Brandebourg en fondant un College de Chanoines, jus illud reservaverat, ut eorum prapositum prasentare posset, ce qui luy fut confirmé par le Pape

Covarruvias traitant cette question, pourquoy le Fondateur n’a point la nomination aux Eglises Collegiales, n’use pas de ce mauvais raisonnement de quelques Canonistes, que l’élection est quelque chose de spirituel ; il dit seulement que le Patron Laique n’a point sujet de se plaindre yant dû prévoir qu’en fondant une Eglise de cette qualité, il ne pouvoit se conserver la nomination, sibi imputet, nam legem recipere tenetur quae ipsi actus inest de jure, et ex eo ipso quod Ecclesia Collegiata constituit, datur et et competit jus eligendi,Covar . 2. Par. Prel. S. 10. n. 3.

Il importe peu au sieur des-Bordes que le Patron Laique soit exclus du droit de nomination dans les Eglises Collegiales et Conventuelles, puisqu’il ne le prétend point, et qu’il demande seulement les autres droits qui sont dûs aux Patrons. Les Canonistes ont fait difference inter jus Patronatùs, et jus praesentandi. L’un peut avoir le Patronnage, et l’autre la presentation ; et comme par le droit Romain le Patron qui avoit remis à son affranchi le droit de luy succeders conservoit neanmoins tous les autres avantages que luy donnoit la qualité de Patron, aussi quoy que ce droit ne soit pas si plein et si general dans les Eglises Conventuelles, comme dans les Paroissiales, parce que la nomination en est retranchée, il conserve toutefois toutes les autres prerogatives qui sont dûës aux Patrons.

C’est le sentiment des Docteurs, et même de ceux qui ôtent aux Patrons Laiques la nomination aux Eglises Conventuelles : Panorme sur le C. nobis retinet alia jura Patronatùs, et Ecclesia sit Covarruvias au lieu préallégué, que licet in Ecclesia Collegiata non sit locus juri Patronatùs quod ad prasentationem est locus, quoad honores et similia : nihil-repugnat, dit un autre Auteur, quo minus in Ecclesia Conventuali locum habere possit jus Patronatùs, saltem quoad alios effectus.

En effet la raison en est pareille, si la fondation acquiert de plein droit la qualité de Patron, si l’Eglise ne peut se dispenser honnétement de reconnoître cette aumone, il est juste au moins que dans les Eglises Conventuelles on conserve aux bien-faicteurs les autres marques l’honneur, en les privant du droit le plus important qui est celuy de la nomination ; et c’est la disposition du Chap. Nobis, où l’on conserve aux Patrons processionis aditum, et les alimens en cas de necessité

Dans les Eglises Conventuelles, comme dans les Paroissiales, il doit y avoir une relation perpetuelle et inviolable d’affection et de gratitude ; et c’est pourquoy la Coûtume en cet Article a fort prudemment ordonné qu’il n’est point necessaire d’emplover une reservation pour censerver aux Patrons les honneurs qui leur sont dûs : la seule difference que l’on peut établir entre les Eglises Paroissiales et les Conventuelles et Collegiales, est que pour les premieres la nomination et la presentation appartiennent aux Fondateurs, sans reservation : dans les autres on présume que le Fondateur a remis son droit quand il ne l’a point expressément retenu, suivant le sentiment deCovarruvias , et pour les autres honneurs ils sont dûs aux Patrons dans tous les lieux consacrez au servicice divin : Par Arrest du 18 de Juin 1675. la Cour faisant droit au principal, maintint le sieur des-Bordes en la possession des droits honotifiques, à sçavoir de preseance, de sepulture et d’armes.

La même chose avoit été jugée le et de Mars 1603. contre Mre Joachim de Mathian Con seiller en la Cour, et Prieur Commendataire du Bourgachard, et les Prieur et Religieux dudit Convent, demandeurs en Mandement de Gage-plege par eux obtenu contre Mre Jéan du Fay, sieur du Taillis, et Seigneur dudit lieu du Bourgachard, pour empescher la persection d’une Ceinture funebre et apposition d’Armoiries qu’il vouloit faire mettre au dehors et au dedans l’Eglise et Chapelle dudit lieu du Bourgachard, aprés le décez de Dame Anne du Mou-el, Dame dudit lieu du Bourgachard ; et ledit sieur de Mathan appelant de deux Sentences données aux Requêtes du Palais, par lesquelles il auroit été ordonné que pour faire droit aux parties, sur la déclaration dudit sieur de Mathan, audit sieur du Fay, que sans acceptation de droit il fit parachever la Ceinture funebre et apposer les Armes de ladite Dame du Moucel aux lieux où il y en avoit eu auparavant ; ils mettroient leurs pieces par devers la Cour, et ledit sieur de Mathan demandeur en Requête, tendant à ce que vû sa declaration, à laquelle il persistoit qu’il n’empeschoit pas que le sieur du Fay ne fist achever la Ceinture funebre qu’il avoit commencée, suivant le droit qui luy pouvoit competer, les parties fussent envoyées hors de Cour, et ledit Jean du Fay, sieur du Taillis, intimé et défendeur : Aprés que Vinement, Avocat du sieur de Mathan et des Prieur et Religieux du Bourgachard, eut conclud qu’il consentoit pour famitié qu’il portoit au sieur du Taillis, qu’il fist achever la Ceinture funebre et apposer ses Armes en tel endroit de ladite Eglise qu’il aviseroit bien, sans attribution toutefois d’un plus ample droit que ses Predecesseurs y avoient, et qu’en ce faisant ils seroient en-royez hors de Cour sans dépens ; et que Salet Avocat pour le sieur du Fay eut soûtenu que le sieur de Mathan devoit conclure ou acquiescer purement à son appel, et qu’au principal il doit être permis de parfaire la Ceinture commencée et apposer les Armes de ladite du Moucel, tant dehors que dedans ladite Eglise et Chapelle, en tel endroit que bon luy sembleroit, vû qu’il a justifié par titres que les precedents Seigneurs du Bourgachard, dont il representa le droit, ont aumoné l’Eglise et Prebende susdite, et fait encore plusieurs autres donations et fondations. La Cour, sans avoir égard au Mandement de Gage-plege, maintint le sieur du Fay aux droits honorifiques de ladite Eglise du Bourgachard, et luy permit de continuer la Ceinture funebre dont il étoit question. Cet Arrest est dans la même espèce que celuy du sieur des-Bordes. Le sieur du Taillis n’étoit pas heritier, ni de la famille des Fondateurs. VoyezChopin , de la Police Eccl. l. 1. t. 4. et du Domaine l. 3. c. 19. où il fait mention d’une pareille question entre le sieur de Chauvigny et l’Abbé du Bourg-Dieu en Berry.

Depuis le Parlement de Paris a donné Arrest conforme à ceux de ce Parlement, le s’de Juin 1644. entre Mre Loüis de Mornay Chevalier, Seigneur de Villarceaux, demandeur d’une part, et Dame Elisabeth Amelot, Prieure du Prieuré Royal et Conventuel de sainte Marie Magdeleine de Villarceaux, et les Religieuses dudit Convent défenderesses : La Cour faisant droit sur les demandes dudit de Mornay, condamna lesdites Religieuses, Prieuré et Convent, de rétablir à leurs frais et dépens les Armes des Seigneurs de Villarceaux qui étoient au dessus de la porte et principale entrée de leur Eglise, et plusieurs inscriptions et titres qui justi-fioient que les Predecesseurs du sieur de Villarceaux avoient réedifié cette Eglise, et qu’elles feroient aussi rétablir une Ceinture funebre, tant dehors que dedans ladite Eglise, sur lesquel les seroient peintes les Armes dudit de Mornay. Lors de la plaidoirie de la cause du Prieur de Beaulieu, de Freville son Avocat, cita en sa faveur un Arrest rapporté dans la seconde parie du Journal des Audiences du Parlement de Paris, l. 1. c. 43. qui fut donné sur cette que-stion, si l’acquereur peut ôter les Armes d’une Eglise, dont le vendeur est Fondateur, et si le droit d’apposer Armes aux Eglises par le Fondateur est réel ou personnel ; Le fait étoit que le Duc de Rohan en l’année 1633. avoit vendu trois fiefs ; la clause du Contrat portoit que l’on vendoit avec tous les droits de Haute-Justice les droits honorifiques, preseance et prerogatives en toutes les Eglises, tout ainsi que le sieur de Rohan en joüissoit en l’année 1629.

Ce sieur de Rergroades, qui possedoit un de ces trois fiefs, presenta sa requeste au Juge des sieux, contenant que dans l’etenduë de sa terre il y avoit un Convent de l’Ordre de S. François dont il se trouvoit Fondateur, demandant que ses Armes fussent mises en ladite Eglises et en suite il fit ôter celles de Rohan pour y mettré les siennes. Les Religieux s’y opposerent, et Madame de Rohan prit cette action pour une entreprise sur les droits de sa Maison. L’acquereur avant été condamné de rétablir les Armes de la Maison de Rohan, sur l’appel du sieur de Rercroades, il soûtenoit que les droits honorifiques luy ayant été vendus, c’étoit des droits réels qui suivoient la chose venduë. Transeunt cum uni versitate fundi, C. ex litteris de Jur. Patr. aux Decret. quand un droit est artaché à une terre, il n’y a pas de difficulté qu’il passe à l’acquereur, si vendatur fundum cujus ratione competit jus Patronatâs in aliquâ Ecclesiâ, transit jus Patronatùs in emptorem,Molin . in Cons. Pat. Art. 55. gl. 10. n. 10. Et du Fresne Fresne l. 1. c. 39. rapporte un Arrest, par lequel il a été jugé que les droits honorifiques passent au tiers acquereur cum universitate, c’étoit au préjudice des puisnez du vendeur. Madame de Rohan répondoit qu’il n’avoit pas été au pouvoir du Capitaine d’ôter les Armes de la Maison de Rohan, par le droit l. 2. 8. 2. de oper. publ. il n’étoit pas permis d’ôter les marques de celuy qui avoit fait un ouvrage publie pour y mettre les siennes ; les Armes de la Maison de Rohan étant des marques perpetuelles de leur liberalité envers cette Eglise, elles n’avoient pû être ôtées qu’avec mépris et avec injure de leur Maison. Il est vray que les Docteurs ont tenu que les droits de sepulere et autres passoient cum universitate feudi ; mais le droit prétendu par Madame de Rohan ne devoit pas passer pour un droit de Patronnage, mais que par bien-seance on permettoit à ceux qui avoient fondé un Monastere d’y mettre les Armes de leur Maisons par l’Arrest la Sentence fut confirmée. L’espèce de cet Arrest n’a rien de conforme à celle de l’Arrest du Prieur de Beaulieu.

En expliquant les paroles de cet Article, j’ay remarqué que les heritiers du donateur du Patronnage ne peuvent joüir des droits honorifiques, s’ils ne sont en possession de la glebe.

Voicy neanmoins un cas où ils le peuvent avoir, bien qu’elle ne soit pas en leur main, à sçavoir quand le Patron n’a pas simplement aumoné le droit de presentation, mais que de plus il a donné le fief où le Patronnage étoit annexé. Un Gentilhomme demandoit des honneurs d’Eglise ; il paroissoit par le piocez que le Patronnage et le fief, auquel il étoit annexé, avoient été aumonez à l’Abbaye de S. Evrout par ceux dont il justifioit être descendu en ligne directes il s’agissoit de sçavoir si les honneurs luy appartiendroient, et s’il seroit reputé Patron honoraire en consequence des termes de cet Article 4. à ses hoirs. On disoit contre sa prétention qu’il falloir faire distinction du Patronnage réel et personnel, que quand le Patronnage est réel, sil est artaché à un fonds et à une glebe cettaine, et en ce cas les heritiers de celuy qui a donné le Patronnage ne peuvent rien prétendre s’ils n’ont la glebe, et si la glebe appartient à lainé les autres freres ne participent point aux droits honorifiques. Quand le Patronnage est personnel, ce qui arrive lors que celuy qui a fondé et doté l’Eglise n’a point infeodé le Patronnage, c’est à dire qu’il n’a point declaré qu’il l’étoit à cause de quelque fier ou glebe, alors il est vray de dire que tous ceux qui peuvent justifier d’être descendus de luy doivent avoir toutes les prerogatives des Patrons honoraires : mais puisque le Patronnage n’étoit en cette Maison-là qu’à cause d’un fief, il êtoit absolument réel, et le fief en étant sorti on ne pouvoit plus prétendre aucun droit honorifique ; car comme le Patronnage fuit la glebe les honneurs y sont aussi attachez, et en sont une dépendance, et on ne peut donner un autre sens à cet Article ; ce seroit choquer les principes des Batronnages qui se doivent regler par les Canons qui les ont établis, et ne peuvent être changez par les Coûtumes, de sorte qu’il les faut expliquer par les constitutions Canoniques. On alléguoit d’autre côté que la Coûtume s’étoit expliquée si nettement qu’on ne pouvoit y trouver d’ambiguité. Et pour rendre raison de l’alternative contenuë en ces paroles, à ses hoirs, ou ayant cause à la glebe, il faut remarquer que quand on a donné et le Patronnage et la glebe, comme en l’espèce de cette cause, l’intention de la Coûtume est de donner aux hoirs cette prerogative : que si l’on avoit retenu le fief ou la glebe, en ce cas les heritiers n’ont pas les honneurs, ils appartiennent aux possesseurs du fiefou de la glebe : qu’aprés tout on ne pouvoit sans ingratitude refuser ces marques d’honneur aux descendans et à la postérité du bien-faicteur de l’Eglise, suivant cette interpretation les droits honorifiques furent accordez à ce Gentilhomme, par Arrest en la Chambre des Enquêtes, au Rapport de Mr Damiens, au mois de Mars 1662.

Puisque nous connoissons en quoy consistent les droits honorifiques, et en quels lieux on en peut jouir, il faut parler des personnes qui ont qualité pour les prétendre, et pour s’y faire maintenir. En cette Province les droits honorifiques ne sont dûs qu’à ceux qui ont aumoné le Patronnage, et à leurs hoirs, ou ayant cause au fief ou glebe, où le Patronnage étoit annexé.

La Jurisdiction ou la Justice haute, moyenne ou basse, ne donne point cette prerogative, quoy que l’Eglise soit bâtie dans l’etenduë de la Justice ou du fief.

Loyseau On pratique neanmoins le contraire en plusieurs Coûtumes de France : Loyseau des Seig. c. 11. donne au Haut-Justicier la preseance et tous les autres honneurs de l’Eglise, pourvû qu’elle soit située dans l’etenduë de sa Justice, parce qu’il a la Justice et la Seigneurie publique dans icelle ; car, dit-il, encore que l’Eglise soit exempte de la Justice temporelle, et de la Seigneurie publique du Haut-Justicier, cette exemption n’a lieu qu’à l’égard des personnes et des choses facrées, mais elle n’ôte pas tout à fait l’Eglise hors du térritoire où elle est enclavée.

Cet Auteur convient neanmoins qu’à l’égard de ces honneurs, qui font notoirement partie du Patronnage, le Patron est preferable au Haut-Justicier, et pour les moyennes et bassesJustices, il estime que les honneurs ne leur appartiennent point de droit, n’étant pas Seigneurs du térritoire, mais que par bien-seance ils doivent preceder tous ceux qui sont soûmis à leur Justice, et comme ils n’ont point de Justice personnelle sur les nobles, ils ne peuvent prétendre sur eux ce droit de preseance.

De Roye , l. 2. c. 4. de jur. honor. aprés avoir entrepris de prouver qu’autrefois, et même sous la seconde Race, chaque Seigneur dans sa Seigneurie avoit haute, moyenne et basseJustice, il conclud en consequence que les honneurs d’Eglise ne peuvent être refusez au Haut-usticier, cum omnimodam hiabeant jurisdictionem in suo Senioratu, et il appuye son sentiment sur le Can. 58. du Concile de Wormes tenu sous Charlemagne, ut Episcopi provideant quem honorem suis Senioribus tribuant pro Ecclesiis.

Il est vray que dans le langage de ce siecle-là, le mot de Senior signifie Seigneur, et non point un homme ancien. Mais on ne convient pas du sens que cet Auteur leur donne, voulant que les Seigneurs de ce temps-là fussent des proprietaires de Seigneuries, qui avoient omnimodam Jurisdictionem, haute, moyenne et basse-Justice. Mr le Le Févre ne prétend pas que du temps de, Charlemagne il y eût aucune autre Justice que la Royale, ni qu’il y eût des Seigneurs qui eussent des vassaux, et que ces Seigneurs dont il est parlé dans les Capitulaires, n’étoient pas des Seigneurs de fief, mais des Officiers Royaux qui étoient au dessous des Comtes, et c’est en ce sens qu’il faut entendre le Canon 8. Concilii Trogleiani, tenu sous Charles le simple, ut Presbyteri iis in quorum ditione suae consistunt Ecclesiz, congruum honorem & debitum impendant obsequium.

Quoy qu’il en soit ce Chapître peut recevoir une explication contraire à celle de Roye en consequence de ces paroles pro Ecclesus, qui font présumer que cet honneur que le Concile enjoint de rendre Senioribus pro Ecclesiis, avoit pour son fondement et sa cause la fondation de l’Eglise ; ce Concile ayant voulu dire que les Evéques devoient ordonner les honneurs qu’il falloit rendre aux Seigneurs, à cause des Eglises qu’ils avoient bâties, ce qui ne peut être appliqué qu’aux Patrons, et non aux Hauts-Justiciers.

Pour soûtenir cette explication, je me sers des paroles du Ch. 1. in Edicto Pistensi, de Charles le Chauve, bien que cet Auteur le prenne aussi pour son opinion, ut Preabyteri Parochianis suis Senioribus debitam reverentiam & competentem honorem atque obsequium fecundùm mi-ni sterium suum impendant ; ce terme de Parochianus Senior, ne se peut entendre que des Patrons.

Loyseau Ce même Auteur avouë, comme a faitLoyseau , qu’il y a de certains honneurs qui sont incommunicables à d’autres qu’aux Patrons, comme la nomination, la litre au dedans de l’Eglise, et l’encens.

Tronçon sur l’Article 69. de la Coûtume de Paris, à dit aussi que dans la pluspart des Eglises de France les Hauts Justiciers ont les honneurs de l’Eglise au préjudice des Patrons, mais d’Argentré n’approuve point cet usage, il soûtient même que le fondateur n’a point le droit de Patronnage, s’il ne l’a expressément reservé. L’Ordonnance qui fut faite pour la Bretagne réserve entièrement ce droit aux Patrons, voyez les termes. Nous voulons pour faire ces-Ter les contentions entre nos sujets, qu’aucun de quelque qualité et condition qu’il soit ne pourra prétendre droit et possession, autorité, préeminence au dedans des Eglises, soit pour y avoir banc, siege, oratoire, sepulture, armoiries, ou autres enseignes de leurs maisons, sinon qu’ils soient Patrons ou Fondateurs d’icelles, et qu’ils en puissent promptement informer par lettres et titres de fondations ; ou par sentences et jugemens dûëment donnez avec connoissance de cause, et avec partie legitime, et outre les cas susdits ne seront nos sujets reçûs à intenter aucun procez à raison desdits prétendus. droits. Et c’est aussi un usage certain en Normandie ; ainsi refusant cette prerogative au HautJusticier, nous sommes fort éloignez de l’accorder au moyen et bas Justicier, ni à celuy qui possede un fief dans la Paroisse, ni aux Officiers Royaux, suivant l’opinionde Roye , l. 2. c. 5. 6. et 8. de jur. hon

On a douté si les Engagistes du Domaine du Roy pouvoient joüir de ces droits d’Eglise ; qui Domania Regis pignori tenent hoc honore fisci jure uti non possunt ;Chop . de Doman. l. 3. c. 19.

Bacquet des droits de Just. c. 20. c. 19. n. 10. Le Maréchal des Droits honor. De la Lande ur l’Art. 63. de la Coûtume d’Orléans, assurent que c’est une jurisprudence établie par plusieurs Arrests du Parlement de Paris. On a jugé le contraire en ce Parlement le 1o de De cembre 1657. au Rapport de Mi de Brinon, entre Michel Cadot, Guillaume le Bas, Mre Claude de la Guiche, Comte de S. Géran, Engagiste du Domaine de S. Sauveur le Vicomte d’une part, et Mre Jacques de Harcour d’autre ; les honneurs furent ajugez au sieur de S. Geran en sa qualité d’Engagiste, comme autrefois les Patronnages d’Eglise n’étoient point compris e dans les engagemens, les Engagistes ne pouvoient en avoir les honneurs : Aujourd’huy qu’ils sont compris dans les alienations du Domaine, on ne fait plus de difficulté qu’ils n’appartiennent aux Engagistes. Et au mois de Novembre 1662. on enrégistra une Declaration d’un don fait par le Roy au sieur de la Sale, dans laquelle les droits honorifiques étoient compris.

Et bien qu’il soit vray qu’un Patron ne puisse ceder à un autre les droits honorifiques qui luy appartiennent, sans aliener en même temps la glebe du Patronnage : néanmoins plusieurs ont obtenu des Lettres du Roy, par lesquelles ils se sont fait donner les honneurs dans les Eglises dont le Roy êtoit Patron. Le 12 de Février 1656. Mr Royer de la Brisolière Conseiller en la Cour, fit enrégistrer des lettres de confirmation de celles obtenuës par ses Pre-décesseurs, contenants le don fait par le Roy de la joüissance des honneurs et prerogarives en l’Eglise de Domfront, comme ont accoûtumé de faire les Fondateurs et Patrons des Eglises, suivant l’accord fait avec le Comte de Quincey, et l’Arrest du Conseil du 23 de May 1636. et ainsi que ses peres en auroient bien et dûëment joui. Autres Lettres obtenues par MrCotey, Doyen de la Cour, contenant le don à luy fait par le Roy des honneurs et préeminen-ces de l’Eglise de S. Martin de Harfleur et à ses successeurs, comme Fondateurs et Patrons, et permis d’y faire mettre bancs et vitres, sans pouvoir neanmoins nommer ni presenter au Benefice de ladite Eglise : lesquelles lettres furent ratifiées à la Cour le premier jour de Juin 1661.

Plusieurs Auteurs ont estimé que les droits honorifiques n’appartiennent point à celuy qui Tronçon joüit du fief auquel les droits sont annexez. Du Moulin et àronçon, sur l’Article 2. de la Coûtume de Paris.Le Maréchal , c. 4. des droits honorifiques. Nôtre usage est contraire.

Je ne doute point que celuy qui auroit acquis une terre par engagement, avec faculté de remaire, ne dût avoir les droits honorifiques. Il n’en seroit pas de même d’une simple Anticrese, uia, dit, ex fundo hpothecario fructus non percipit, nisi in solutum usurarum cum quijus prasentatio ad beneficia Ecclesiastica non potest habere functionem. Voyezdu Moulin Du Moulin , de feudis 9. gl. 3. n. 5. et 8.Brodeau , Article 31. la Coûtume Paris, n. 15. De Roye in Prolegomenis ad titulum de jure Patron. c. 36.

Tronçon , sur l’Article 2. de la même Coûtume, n’estime pas que ces droits puissent appartenir aux usufruitiers, et c’est aussi le sentiment de duDu Moulin , quia civil actus et jura competunt potius Domino proprietatis quam usufructuario possessori. l. item : apud Labeonem 4. sed si suf. ff. de Minoribus. Puisque le droit de presentation est in fructu, que les doüairieres et les usufruitiers presentent au Benefice, les honneurs ne peuvent leur être refusez étant attachez à la glebe dont l’usufruit leur appartient,

On a formé cette question, si un Gentilhomme avant pris par bail à rente d’un Ecclesiastique un fief avec le Patronnage et droit de presenter à lEglife peut être empesché de faire Litres, Timbres et Ceinture funebre avec ses Ecussons et Armoiries à l’entour de l’Eglise, dehors et dedans. Les Abbesse et Religieuses de Fontaine-Guerard baillerent à bail d’héritage à G. de a Gandelle le fief d’Qudeauville, avec le Patronnage et droit de presenter à l’Eglise de d’Oudeauville ; ce Contrat fut approuvé par le Superieur de l’Ordre, et homologué au Parlement.

Aprés sa mort la Demoiselle de Clere, sa veuve, ayant commencé une Ceinture funebre, de Fers, sieur d’Audevergne, en empescha la continuation, par Sentence des Requêtes du Palais.

I fut permis à la Demoifelle de Clère de la continuer ; l’appelant soûtenoit que le fief et le Patronnage ayant été entre les mains des Ecclesiastiques et ayant été amortis, tous les droits honorifiques étoient éteints, ou qu’au moins ils étoient demeurez à ceux qui leur avoient aumoné de Patronnage en reconnoissance de leur liberalité, que ces droits ne tombent point dans le commerce, et ne sont point cessibles, les Religieux n’ayant pû céder que ce qui est utile, comme la presentation. Il fut reparti par l’intimé que l’action de complainte n’appartenoit qu’au Patron et à celuy qui est en possession des droits honorifiques ; or cette qualité ne pouvoit luy être contredite. Les Patronnages ne changent point de nature pour avoir êté en la possession de Eglise, le Contrat fait à l’intimé êtoit legitime : et il n’est point prohibé aux gens d’Eglise de donner à bail d’heritage leurs fiefs avec tous les droits qui y sont attachez, quand ils le font avec avance pour l’Eglise ; ceux qui possedent des fiefs mouvans de l’Eglise les ont acquis par cette voye, et bien que le bailleur puisse saisir et se remettre en possession à faute d’avoir payé les droits convenus, cela n’empesche pas que le preneur n’ait tous les droits utiles et honorifiques, et pour l’objection que l’on a faite que les droits honorifiques sont éteints, quand les fiefs ont été en la main de l’Eglise, elle se resout par cette distinction, que quand le Patronnage a été separé du fief et donné à l’Eglise, les Ecclesiastiques n’ont point les droits honorifiques, et par consequent ils ne les peuvent céder, nemo dat quod non habet ; car ils sont demeurez à ceux qui avoient aumoné le Patronnage et retenu la glebe d’iceluy

Mais quand le fief avec le Patronnage a été donné à l’Eglise, et que depuis il est aliené et retombé en la main d’une personne Laique, en ce cas il ne reçoit aucun changement ni alte ration par l’amortissement, et il conserve sa qualité de Patronnage Laique. Tout ce que les Ecclesiastiques possedent est venu des Laiques ; l’amortissement n’a d’autre effet que de les rendre capables de les posseder, et de pourvoir à l’indemnité des Seigneurs, quand l’Eglise possede des fiefs, à cause desquels elle a le droit de Patronnage, en ce cas ce n’est point un Patronnage Ecclesiastique, mais Laique, et par cette raison le Pape ne peut prévenir ce Patron-là, comme il auroit fait si le Patronnage étoit Ecclesiastique. Suivant le sentiment de duDu Moulin , sur la regle règle de infer. resig. resig. n. 145. si initio fuit fundatio Laica et Spectat presentatio ad Ecclesiam gatione feudi, castri aut alterius rei temporalis cui annexum est jus, et à quo dependet Ecclesia, non est Patrona, nisi in quantum est Domina talis casiri vel feudi, & sic tale jus Patronatùs est Laicum Ce même Auteur, sur la Coûtume de Paris, tient que feudum decimale, si transiret ad Ecclesiam vel reverteretur ad Ecclesiam non per se, sed cum universitate castri, vel rei taemporalis, cui annexum est, semper retinet naturam feudi et rei profanae, sieut principale cui accedit : non enim fruitur Prelatus tanquam Pralatus, sed tanquam Dominus rei temporalis, et amortisatio cum universitate rei non immutat ualitatem.Terrien Terrien , l. 8. 1. de Patron, cite un Arrest donné entre Champus et d’Arondel, par lequel il a été jugé que les Chanoines de Cleri, pour les Benefices êtans de la fondation Royale,

resentent au nom et l’autorité du Roy, et sont reputez Patrons Laiques ; tellement que leur presentation est necessaire, et les Collateurs ordinaires ne leur peuvent faire préjudice, non plus qu’aucun Roy.

Ce Patronnage donc annexé au fief, quoy qu’il soit en la possession de l’Eglise, demeure Patronnage Laique, sans acune alteration ni changement en ses qualitez et prerogatives, c’est pourquoy, lors qu’il retourne en la main d’un Laique, il y rentre avec tous ses droits ; la chose retourne à sa première nature ; jure quodam postliminii ad pristinam revertitur libertatem.

Les Dixmes qui de leur nature étoient Ecclesiastiques et Spirituelles, quand elles étoient infeodées, elles changeoient de condition et devenoient profanes et temporelles, mais étant venduës ou données par les Laiques aux Ecclesiastiques, elles reprenoient leur première condition, et ne pouvoient être rétirées par les Lignagers, suivant l’Arrest du Parlement de Paris. donné au profit de l’Evéque de Bayeux, remarqué pardu Luc , l. 2. c. de Decim. La même chose arrive au fief que l’Eglise remet à un Laïque, il reprend toutes les qualitez qu’il avoit de son origine, mutatione persona mutatur rei qualitas : quod castrense erat in persona defuncti desinit esse castrense in persona heredis, l. per curator. ff. de acquir. vel omitt. hered.

Le Roy même a interest que les droits feodaux soient conservez, à cause du droit de Garde. noble, et des services qui sont dûs par les fiefs. Il resteroit à examiner si les Ceintures funebres Cesar ne font pas partie des droits honorifiques : les anciens Gaulois affectoient magnifiques funerailles, funera pro cultu Gallorum magnifica & sumptuosa sunt ; Cesar, lib. 6. de bello Gall. Au lieu des Statuës et des Images, qui faisoient l’ornement des pompes funebres parmy les Romains, ils élevoient dans leurs maisons de superbes tombeaux. Les François se sont servis d’Armoiries, ainsi appelées, parce qu’ils les gravoient sur leurs Boucliers. Cette coûtume est fort ancienne, comme on l’apprend de ces Vers deVirgile , 1. 7. AEneid.

Elypeoque insigne parentùm

sentum angues, centumque gerit serpentibus hydram.

La Litre faisant partie des droits honorifiques, on ne la peut refuser à l’intimée, autrement on feroit une étrange division du Patronnage ; l’intimée seroit Patronne pour presenter, et elle ne le seroit pas pour les Litres et Ceintures funebres. Les Coûtumes de Tours, t. 4. des droits de Châtellenie : Loudun, c. 4. Art. 2. disent que le Seigneur Châtellain est fondé en préeminence d’avoir Litres, Armes, Timbres au dedans et dehors des Eglises ; et si le vassal est Sei-gneur et Patron, le vassal les peut avoir, sinon que l’Eglise fût la principale Eglise Paroissiale, en laquelle fût assis le Châtel, auquel cas le vassal ne pourra avoir ses Litres et Armes dehors, mais les pourra avoir au dedans seulement. Par Arrest du 6 de Février 1622. la Sentence qui permettoit de continuer la Ceinture funebre fut confirmée, plaidans le Telier et Giot, entre Catherine du Clos, veuve du sieur de la Gandelle, et Jacques de Fers, se disant Seigneur de d’Oudeauville

Sur cette question, si un Ecclesiastique en vendant à un Laïque le fief, auquel le Patronnage. êtoit annexé, retient le Patronnage, ce Laique aura Es droits honorifiques, et s’ils demeurent attachez au fiefe On argumente de cet Article, par lequel si quelqu’un a fait don du Patronnage. sans reservation, les droits honorifiques dûs aux Patrons luy demeurent entiers et à ses hoirs, ou ayant cause au fief ou glebe, auquel le Patronnage êtoit annexé ; puis donc que les droits honorifiques demeurent artachez au fief, en quelque main qu’ils passent, ils doivent appartenir au possesseur d’iceluy.

Mais cet Article s’entend, que quand un Laique aumône son Patronnage à l’Eglise, les droits honorifiques luy demeurent entiers, vice gratitudinis, et pour reconnoissance de son bien-fait.

Que si l’Ecclesiastique en vendant le fiefretient le Patronnage, il ne transfere point ces droits noncrifiques qui demeurent attachez au Patronnage, et ils ne sont conservez au fief que quand il à été aumoné à l’Eglise, et non pas quand il a été vendu sans le Patronnage. La liberalité du Patron luy conserve cette prerogative, quoy qu’il ne l’ait pas réservée, mais par la vente il n’acquiert que ce qui luy a été vendu expressément, ainsi la vente n’est point le cas de cet Article, c’est l’aumône et le bien-fait.

Comme le Patronnage peut appartenir à plusieurs Patrons, il peut aussi arriver de la contestation entr’eux pour la preseance ; il fut jugé par Arrest du 17 de Juillet 1652. pour Me Jac-ques de Harcour, Baron de l’Angle-de-Nehout, et Mre Claude de la Guiche, Comte de S. Geran, qu’encore que le sieur Comte de S. Geran, comme Engagiste du Domaine de S. Sauveur le Vicomte, possedant la portion ainée de cette Baronnie, toutefois l’Eglise de Nehout étant située dans la portion puisnée, et possedée par le sieur de Harcour, il devoit avoir les droits honorifiques au préjudice du sieur Comte de S. Géran-

Par autre Arrest du 2t de Juillet 1657. Nicolas de S. Germain, sieur du Breüil, qui possedoit le fief Dominant, situé dans la Paroisse d’Anneville, fut maintenu aux droits honorifiques de l’Eglise de cette Paroisse au préjudice de Bon Christophle de la Cour, sieur du Tour, qui possedoit le fief du Tour dans la même Paroisse. Le sieur de S. Germain êtoit appelant, défendeur, et demandeur pour être maintenu en la qualité de seul Patron honoraire, et Fondateur de l’Eglise de S. Leger d’Anneville, et en tous les droits honorifiques d’icelle ; les sieurs Chantres,

Chanoines, et Chapitre de l’Eglise Cathedrale de Coûtance, intimez et de mandeurs, pour faire dire que les Bancs et Armes miles dans ladite Eglise par ledit sieur de S. Germain et ledit sieur du Tour seroient ôtées, et que défenses leur seroie nt faites de prendre la qualité de Patrons, ni de prétendre aucuns droits honorifiques, ni de fe qualifier Seigneurs, à cause de leursdits fiefs, et ledit sieur du Tour, intimé, défendeur, et demandeur pour faire défense à tous Gentilshommes de le troubler aux droits honorifiques qu’il prétendoit luy appartenir ; la Cour sur l’appel mit les parties hors de Cour, et faisant droit au principal, entant que le Mandement obtenu par ledit de la Cour, dit à tort iceluy à bonne cause le Mandement du Chapitre, ledit sieur du Tour condamné de faire ôter son Banc et ses Armes, et à l’égard dudit sieur Germain, tort le Mandement obtenu par le Chapitre, ledit S. Germain maintenu en sa qualité de Patron honoraire, aux droits honorifiques de ladite Eglise, au droit de son fief du Breuil, Anneville, parce qu’il auroit pour son banc et seance le côté de l’Evangile, et les sieurs du Chapitre le côté de l’Epitre en parallele et vis-àvis dudit de S. Germain.

On a aussi jugé par Arrest du 4 de Juin 1é04. rapporté parBérault , que le Patron de la premiere portion peut choisir côté du Chancel qu’il voudra pour sa seance et pour sa sepulture, et le Patron de l’autr : portion l’autre côté, entre M. Jean du Loir, Avocat General en la Chambre des Compres, demandeur en Requête, tendante à ce qu’en qualité de Patron de la remiere portion de la Cure de Marteinville, il soit maintenu aux honneurs, preseances, et bancs au côté droit de l’Eglise, et se dire et nommer seigneur dudit lieu de Marteinville, et Anne Richer veuve de Pierr. Belin, Dame du fief du Ménil, et Patronne de la seconde ortion de ladite Eglise ; la Cour ajugea audit da Loir les honneurs et preseances en ladite Eglise, et à cette fin il seroit tenu de thoilir un des côtez dans le Choeur, auquel il pourroit mettre un banc pour luy, sa femme, et ses enfans, demeurant l’autre côté à ladite Richer, auquel elle pourroit mettre pareillement un banc pour elle et ses enfans, et qu’ils pourroient eux et leurs successeurs être inhumez chacun de son côté, et avant que de faire droit sur la dénomination des Seigneurs de Marteinville, on ordonna qu’ils representeroient leurs anciens Aveux.

Cette question assez singuliere s’offrit entre des Patrons touchant leurs preseances ; la presentation de la Cure de Berigni appartenoit pour deux tours à des nommez le Coû, à cause de la vavassorie de la Mare, et les Abbé et Religie-ix de Cérisi avoient droit d’y presente pour le troisième tour, à cause de la donation qui leur en avoit été faite par de Baudrés, Seigneur du fief de Berigni, dont cette vavassorie étoit tenuë. De Baudrés prétendoit avoir les nonneurs, comme Seigneur superieur, et qu’il seroit mal-seant qu’il fût précedé par ses vassaux, à cause du fief qu’ils tenoient de luy : ce qui les obligeoit à luy porter du respect. Les-dits le Coq disoient que ces droits honorifiques étoient réels, et qu’ils ne pouvoient y être troublez par leur Seigneur : comme il ne pouvoit leur empescher la presentation, il ne pouvoit aussi leur contri dire les honneurs qui leur sont acquis par la Coûtume : Par Arrest du et d’Avril 1607. ils furent maintenus par provision, et définitivement par autre Arrest du t de May 1610.

Autre Airest entre deux Patrons pour la Litre et Ceinture funebre ; le Seigneur Marquis de Beuvron, et le sieur de Varneville, Patrons alterna-ifs de Varneville, eurent contestation pour la Ceinture funebre dedans et dehors l’Eglise : le Seigneur de Beuvron disoit qu’il étoit seigneur supetieur, et que l’autre Seigneur rel-voit de son fief, et que par cette raison le sieur de Varneville ne pouvoit mettre de Ceinture funebre qu’au dessous de la sienne : le sieur de Varneville répondoit qu’il étoit Patron alternatif et Seigneur de Varneville, et qu’en cette qualité il avoit droit de mettre une Litre et Ceinture funebre d’un côté de l’Eglise, et de Seigneur de Beuvron de l’autre côté. On avoit ordonné par Sentence que la Ceinture, Litre et Armes du Seigneur de Beuvron seroient placées au plus haut lieu, et celles du sieur de Varneville au dessous ; sur l’appel du sieur de Varneville on mit hors de Cour, par Arrest lu mois de Février 1629.

autre Arrest du 24 de Mars 1665. entre Mre Felix le Comte de Nonant, Chevalier, Seigneur de Cernieres, ayant repris le procez en létat qu’il favoit laissé ; Felix le Comte de Nonant son pere, prétendant les droits honorifiques en l’Eglise de S. Martin de Cernieres, demandeur en execution de l’Arrest de la Cour du 14 de May 1640. d’une part, et Mre Henry le Pelerin, sieur de Gauville, ayant aussi repris le procez en l’état qu’il l’avoit laissé, Loüis le Pelerin son pere, prétendant aussi les droits honorifiques en ladite Eglise, d’autre part. La s Cour ordonna que lesdits le Comte de Nonant et le Pelerin joüiroient respectivement, à cause de leurs fiefs de Cernieres et de Gauville, des droits honorifiques en ladire Eglise de S. Martin de Cernieres, et neanmoins que ledit le Comte de Nonant, comme possedant le fief dominant, auroit la preseance et les premiers honneurs, au préjudice dudit le Pelerin, et choisiroit son banc et place d’un côté de ladite Eglise, l’autre demeurant audit le Pelerins qu’il marcheroit dans les cérémonies du côté droit, et le premier, où ils ne pourroient marcher tous deux, qu’il seroit recommandé aux prieres publiques, et qu’il auroit le Pain benit et autres prerogatives le premier, et ledit le Pelerin aprés, en suite la Dame, femme dudit Comte de Nonant, celle dudit le Pelerin apréz ; le fils ainé dudit le Comte de Nonant avant celuy dudit le Pelerin, et les autres filles consecutivement de même les unes aprés les autres ; et au cas que ledit le Comte de Nonant fût absent, la Dame sa femme ou le premier de sa famille aura lesdits premiers honneurs, au préjudice dudit le Pelerin, et que les Armes et Ceinture funebre dudit le Comte de Nonant à l’entour du dedans de ladite Eglise et Chapelle seroient renouvellées et mises au dessus de la famille dudit le Pelerin. On peut tirer de cet Arrest la décision de cette question, si tous les enfans du Patron precederont les Gentilsnommes plus âgez : Quelques-uns sont d’avis que cet avantage n’est dû qu’au fils ainé : d’au-tres estiment que tous les enfans doivent preceder, tandis que le pere est vivant, et par l’Arrest cu-dessus on a donné la preseance à tous les enfans du Patron ; aussi Bérault a remarqué plusieurs Arrests qui l’ont jugé de la sorte

Par autre Arrest du 4 de Février 1658. au Rapport de Mr de Sainte-Helene, entre Frere Loüis Eustache, Prieur, Curé d’Englesqueville, appelant comme d’abus, et Guillaume Dursus, Seigneur et Patron d’Englesqueville ; ledit Dursus, tant pour luy que pour sa famille, fut maintenu en la seance du Choeur du côté de l’Evangile, et qu’à cette fin le Curé laisseroit les deux côtez libres pour sa famille, nonobstant la prétention du Curé, qu’il y avoit huit Prestres et nombre de Cleres, et que par consequent le Clergé devoit être des deux côtez ; il fut aussi enjoint au Curé de faire prier Dieu pour le Patron, et de le nommer, encore que le Manuel ne l’y obligeât point.

Le 2 de Mars 1617. on agita cette question en l’Audience de la Grand-Chambre, si un Patron Ecclesiastiqué pouvoit permettre au préjudlice du Patron honoraire à un Gentilhomme de réedifier une Chapelle étant à côté de l’Eglise pour y avoir droit de sepulture. De Tilly, sieur d’Urville, étoit Fondateur et Patron honoraire de l’Eglise de la Pernelle, le Chapître de Coûtance avoit le droit de presenter. Jourdan, sieur d’Escarboville, obtint permission du Chapitre de réedifier une Chapelle étant à côté du Cheur de l’Eglise de la Pernelle, avec concession de banc et de sepulture, nonobstant l’opposition du sieur de Tilly ; le Juge de Valogne permit au sieur d’Escarboville de réedifier la Chapelle pour y avoir seance et sepulture : Sur l’appel du sieur de Tilly, il soûtenoit que le Chapitre n’avoit pû donner à son pré-udice, et sans son consentement, le droit de sepulture et de seance dans une Chapelle qui dépendoit du Choeur, que le Patron Ecclesiastique n’avoit aucun pouvoir de disposer des hont neurs : il fut répondu par le sieur d’Escarboville que la Chapelle n’étant point du Choeur, mais à côté, et s’agissant seulement de réedification, le Chapitre avoit pû donner la seance et la sepulture, ce qui ne blessoit point le droit du sieur de Tilly, ne luy donnant aucun trouble, et ne luy apportant aucune incommodité dans le Choeur, que le Patronnage s’acquiert lonatione, fundatione, et edificatione, que réedifiant cette Chapelle il méritoit au moins d’y voir sa seance et sa sepulture ; la Cour cassa la Sentence, et en reformant permit au sieur l’Escarboville de rebâtir la Chapelle dans laquelle il auroit droit de seance et de sepulture, et luy permit aussi d’apposer ses Armes à une des vitres, à condition toutefois de faire une porte par dehors le Choeur de l’Eglise, pour entrer et sortir, sans passer par le Choeur de l’Eglise.

Les droits honorifiques ne se multiplient point par la division de la glebe, et les puisnez ou leurs representans n’y ont part qu’autant que dure le parage, ce qui fut jugé par Arrest du 22 de Février 1618. entre Jean de Glapion, sieur de Boition, demandeur en clameur de Gage-plege, pour empescher Jean et Philippes Malard de placer et d’élever bancs, tombes 8 sepultures dans le Chancel de l’Eglise de S. Martin de Boition, et de troubler ledit de Glapion dans la possession des droits honorifiques de cette Eglise, ni d’enterrer des morts dans le Chancel, comme se prétendant seul Patron honoraire d’une part, et lesdits Malard et la Dame Abbesse d’Almenesche, et la Dame de la Tramblaye prétendant droit de Patronnage, d’autre. Leon Malard de son chef demandeur pour avoir les droits honorifiques, comme parager du sieur de Boition, la Cour prononça à bonne cause le Mandement obtenu par le sieur de Glapion, et le maintint en tous les droits appartenans aux Patrons honoraires, au préjudice de la Dame Arbesse d’Almenesthe, et autres parties ; et faisant droit sur les conclusions de Leon Malard. or donna qu’il auroit droit de seance, banc et sepulture dans le Choeur de ladite Eglise, aprés et au dessous du sieur de Glapion, tant que le parage dureroit. Pareille question a été jugée au proit de Me Loüis Greard, Ecuyer, Avocat en la Cour. Il avoit acquis du sieur Comte de la Suze la Terre et Seigneurie de Fertieres, avec le Patronnage honoraire : cependant un Gentilhomme nommé le sieur Coursy possedant un fiefdans la même Paroisse, avoit fait mettre un banc dans le Choeur, prétendant que ledit fief ayant autrefois êté démembré de la Seigneurie de Ferrieres, qui étoit la véritable glebe du Patronnage, il devoit entrer en participation des droits honorifiques, et avoir du moins les seconds honneurs aprés ledit sieur Greard. Sur la contestation que ledit sieur Greard y apporta, il fut jugé conformément à l’Arrest de Glapion, qu’encor qu’il y eût apparence que le fief dudit sieur de Coursy eût fait autrefois partie de ladite Seigneurie de Ferrieres, neanmoins n’en relevant que par hommage depuis plus de deux cents ans, il n’auroit aucune part aux honneurs, et seroit tenu d’ôter son hanc de dedans le Choeur, ce qui a été executé.

Pour obtenir les honneurs en qualité de Patron honoraire, il faut prouver que l’on possede le fief ou la glebe. Un seigneur de Paroisse ne justifioit point qu’il eût joüi des droits honorifiques, n’ayant ni Litres, ni Ceintures funebres, ni seance, ni sepulture ; il representoit seule-ment quelques aumones et quelques tenûres à l’entour du Cimetière, et son manoir Seigneurial, étoit proche de l’Eglise, mais il n’avoit aucuns titres pour prouver que le Patronnage eût été aumôné par les proprietaires de son fief ; il fut jugé en la Chambre des Enquêtes, au Rapport de Mr de Sainte-Heleine, le 13 de May 1644. entre les Chanoines de Séez, et Demoiselle Catherine le Petit, veuve de Jean le Tanneur, que les droits honorifiques en l’Eglise de Vari n’appartenoient point audit le Tanneur, et qu’il ne pouvoit en joüir au préjudice d’un autre Gentilhomme plus âgé que luy : les fiefs assis dans une Parosse n’attribuent aucuns honneurs aux possesseurs d’iceux. Berault rapporte les Arrests qui l’ont jugé de la sorte.

Laissons les Patrons en la possession de leurs honneurs qu’ils affectent avec tant d’empressement et de vanité, régardant les Eglises comme de petites Seigneuries, tanquam sibi majoribus suis regnata rura : Comme l’Eglise est le lieu le plus honorable, les particuliers n’ont pas moins de passion pour obtenir quelque rang qui les distingue des autres ; et c’est pourquoy aprés avoir reglé les droits des Patrons, il a été aussi necessaire pour éviter les desordres et les querelles de faire des reglemens entre les particuliers pour les seances, les bancs, et les autres prerogatives d’honneur et de preseance.

Les Gentilshommes tenans le premier rang aprés les Ecclesiastiques ; on n’a pû trouver de meilleur expedient pour borner leur ambition que de donner la preseance à l’âge, suivant le Chap. 1. de major. et obed. ut qui potior sit tempore, potior sit et jure : car en cette Province pour posseder un fief dans la Paroisse, on n’acquiert aucune prerogative, quoy que de Roye soit d’un sentiment contraire, de jur. honor. l. 2. c. 9.

L’âge en toutes rencontres doit donner l’avantage neanmoins les plus jeunes disputent souvent la preseance aux plus anciens, sous pretexte de charges, de dignitez, d’emplois, oud’autres prerogatives.

La contestation est arrivée fort souvent entre les Juges Royaux et les Gentilshommes.

Loyseau Ceux-là prétendans preceder les Gentilshommes plus âgez ; sur cette matiere Loyseau des Ordres c. 5. n. 75. a fait distinction entre les Offices, et son sentiment est que les Magistrats. dans letenduë de leur pouvoir precedent les Gentilshommes, à cause de la puissance et de fautorité qu’ils ont sur eux êtans les Juges de leurs fortunes, de leurs biens et de leurs vies.

De Roye , de jur. hon. l. 2. c. 8. a suivi dette opinion, et que ceux qui tiennent des Offices qui anoplissent, doivent marcher par tout devant les simples Gentilshommes, parce qu’êtans nobles cemme eux, ils ont cela de plus d’être Officiers du Roy, et d’avoir par consequent la puissance publique et une fonction excellente que ces simples Gentilshommes n’ont pas.

Pour les Offices qui n’annoblissent point, ils ne sont pas tous de même titre ; il faut distinguer entre les Offices en chef et les autres Offices, et entre les Officiers qui sont Gentilshommes, et ceux qui ne le sont pas. Pour les Officiers qui n’ont point cette qualité, on traita cette question en l’année 1628. s’ils devoient preceder les Gentilshommes ; La cause étoit entre un Gentilhomme et un Conseiller du Presidial d’Evreux, qui n’avoit pas la qualité de noble, les opinions des Juges étant partagées, il fut arrêté que Mr le Garde des Sceaux en seroit averti ce qui ne fut point fait. Aujourd’huy on ne douteroit plus qu’un simple Conseiller du Presidial de pourroit avoir la preseance sur un Gentilhomme, quoy que ce fût dans letenduë de sa Jurisdiction, comme on peut l’induire de l’Arrest du sieur Isnel, dont je parleray dans la suite.

Il y auroit plus de difficulté pour un Juge en chef, comme un Lieutenant General dans un Siege de Bailliage. Plusieurs estiment que dans les Céeremonies publiques qui se feroient dans le lieu de son exercice par l’ordre du Roy, on doit luy donner la preseance, mais hors cette rencontre, qu’elle ne leur appartient point ; et par Arrest du 3 de Mars 1617. on confirma la Sentence du Bailly d’Alencon, au Siege de Trun, donnée au profit de Mre Gohier Liart, par daquelle la preseance et les honneurs luy avoient été ajugez, au préjudice du sieur du Ménilquapel ; et tant s’en faut qu’on donnât tant d’avantage aux Officiers qui ne sont point Gentils. hommes, qu’on ne fattribué pas aux Officiers Gentilshommes, au prejudice de ceux qui sont plus âgez, comme il paroit par l’Arrest qui suit.

Il se mût un procez entre le sieur de la Picoterie et le sieur Isnel, Conseiller au Presidial de Caudebec, tous deux Gentilshommes, pour des honneurs d’Eglise : Le sieur de la Picoterie prétendoit la preseance comme le plus âgé, et que la qualité de Conseiller au Presidial n’ajoûtoit aucune prerogative à celle de Gentilhomme, qu’ssnel possedoit ; ce qui étoit si véritable que s’il n’avoit que le seul titre de Conseiller au Presidial, il seroit mal fondé à luy disputer la preseance Le sieur Isnel répondoit que sa naissance étant égale à celle du sieur de la Picoterie il avoit par dessus luy le caractere de Magistrat, en consequence dequoy il étoit son Justiciable, ayant l’autorité sur sa personne, sor ses biens, et sur sa vie : Mais aprés tout il avoit mauvaise grace de luy renouveler cette contestation, puisqu’en l’année 1606. ayant entrepris ce même procez ils en avoient tranfigé, et qu’il luy avoit consenti la preseance, dont en vertu de cette transaction. il étoit en possession depuis quarante ans : Le Bailly avoit maintenu le fieur Isnel ; sur l’appel on mit les parties hors de Cour, et neanmoins sans tirer consequence ; par Arrest du 18 de cévrier 1646. plaidans le Dain et Mr Poirier, maintenant second President en la Cour ; la transaction faite entre les parties mettoit la cause du sieur Isnel hors de toute difficulté, depuis a Cour a décidé ces matieres.

Cette question de preseance s’offrit au Parlement de Paris, en l’Audience de la Grand-

Chambre, le 3 de Decembre 1649. entre deux Conseillers du Presidial de Lyon, reçûs presque en même temps, l’un audit Presidial, et l’autre peu de temps aprés au Parlement de Paris, il fut jugé non seulement que celuy qui avoit été recû au Parlement devoit preceder ; mais aussi ur ce que celuy qui avoit été reçû au Presidial, n’ayant alors que vingt-deux ans, avoit obtenu une dispense d’âge, laquelle il avoit fait enteriner audit Presidial, quoy que les Presidiaux n’ayent pas ce pouvoir, qui n’appartient qu’aux Cours Souveraines. La Cour reçût M le Procureur General appelant de la reception de ce Conseiller, en faisant droit sur cet appels ensemble sur celuy interjetté par ce Conseiller reçû au Parlement, de la Sentence dudit Presidial, qui prenant connoissance du different d’entre ces deux particuliers, qui ne pouvoit être pareillement reglé que par la Cour, avoient ordonné que le reçû au Presidial precederoit, dit qu’il avoit été mal, nullement et incompetemment jugé, et ordonna que l’intimé rapporteroit ses glettres de provision pour y être pourvù, et jusques à ce luy fit défenses. Le motit de cet Arrest fut apparemment que les Presidiaux n’avoient pû connoître d’une dispense d’âge Et par Arrest en la Grand. Chambre, au Rapport de Mr Auber, du 4 d’Avril 1859. entre le sieur de Costentin, Ecuyer, et Mre Henry le Coûs Ecuyer, Lieutenant General à Cerence, I fut jugé que ledit sieur le Coû, Lieutenant General à Cerence, precederoit dans l’Eglise de Cérence le sieur de Costentin plus âgé que luy, tant à la Procession qu’à l’Offertoire et marche, pourvû que le Lieutenant Gendral fût en habit decent et de magistrature, bien qu’il ne fût pas certain que l’Eglise de Cerence fût située dans ce Bailliage-là ; le sieur de Costentin prétendoit qu’elle êtoit dins celuy de Coûtance, et on tint pour constant que pour les Juges en chef, quand e ils sont Gentilshommes, ils ont la preseance sur les autres Gentilshommes dans l’Eglise situé dans le lieu où est le Siege principal de leur Jurisdiction. Cette cause avoit été plaidée lors que Mr le Comte de Thorigni, Lieutenant G néral pour le Roy en Normandie, prit sa seance au Parlement l’11. d’Avril 1658. et ayant été appointée au Conseil, intervint l’Arrest cu dessus.

Cela ne s’étend point aux autres Juges, suivant l’Arrest du 19 de Mars 1660. par lequel il fut dit que lesieur de Vauville, Ecuyer, prec deroit Me Avice, Ecuyer, sieur du Ménil Jourdan, Lieutenant particulier au Bailliage à S. Sauveur-le-Vicomte, comme étant le plus âgé, et qu’il n’y a que le Lieutenant General qui ait cette prerogative de preceder les Gentilshommes plus âgez que luy.

D’autres ont prétendu que l’Ordre de Chevalier de S. Michel leur donnoit rang au dessus des Gentilshommes, qui étoient plus âgez. Cette question fut d’cidée par Arrest du 27 de Juillet 1648. au Rapport de Mr du Houlley en la Grand-Chambre, entre René Campions Ecuyer, sieur du Ménil, et J an de la Croix, Ecuyer, d’uné part ; et Colardin, sieur de la Pinsonnière, Chevalier de l’Ordre S. Michel, d’autre part ; par lequel il fut dit que sans avoir égard à l’Ordre de S Michel, les plus âgez auroient la preseances Il est certain que l’Ordre S. Michel ne donne aucune prerogative, et les Chevaliers de cet Ordre ne peuvent avoir de plus grands dépens que les autres Gentilshommes, comme il fut jugé au Rapport de Mr Turgor, le 23 de Janvier 1631. en la Chambre des Enquêtes, entre le sieur du Pin, Chevalier de S. Michel, et le sieur Bachelier. Il fut dit par l’Arrest que le sieur du Pin ne pouvoit prétendre en sa qualité de Chevalier plus grande taxe qu’un autre Gentilhomme.

Voicy encore un autre exception à la regle qui donne la preseance à l’âge. Cette question s’offrit en l’Audience de la Grand. Chambre, le 23. de Mars 1610. entre des Gentilshommes nommez le Fortier, sçavoir si le fils du frere ainé devoit avoir les honneurs de l’Eglise avant son oncle plus âgé que luy ; L’oncle disoit que de droit qui gradu proximior est praferri debet. en matière de successions. Qu’il seroit contre la bien-seance et contre l’ordre de la nature que le neveu marchant avant son oncle, frère de son père, Patruus est quasi pater alius. Le neveu répondoit qu’il represente son pere, qu’il est une même personne avec luy, et que le droit de primogeniture passe aux enfans comme un droit de dignité qui ne s’éteint point, tant qu’il reste des enfans de l’ainé. Brrault a cité cet Arrest. Parmy les Payens, le fils ainé seul succedoit aux Héliodore Tiraquel thoses facrées, on en trouve un exemple remarquable dans H-liodore, lib. 10. ce qul se pratique aussi quelquefois entre les Chrêtiens. Tiraqueau, t. de jure primog. qu. 36. De Roye c. 19. in Prolegom. leges Scot. l. 3. c 33.

Tiraquel Cela doit être particulièrement gardé en Normandie, où l’ainé ou ses representans succedent en ce qu’il y a de noble : Mr Tiraqueau de jure primogenitorum, a remarqué que, ex consuetudine xpressâ Normannorum patruus prafertur nepoti. t. d’écheance de succession et de brief de prochain d’an cesseur ; Mais le vieux Coûtumier dit que cette Coûtume est contraire à l’ancienne, et qu’elle ut introduite par les Puissans, aussi cela ne s’observe plas parmy nous. VoyezHottoman .

Questions illustres. Qu. 3. et 4Chopin , l. 2. t. 12. Par Arrest il fut dit que la preseance appartiendroit au fils du second frere, au préjudice de l’oncle qui étoit le troisième frère-Coyseau des Seigneuries, c. 11. n. 36. et 37 fait de deux sortes de preseances, l’une de droit, et l’autre d’honneur. Il appelle preseance de droit, celle du Seigneur Haut-Justicier ; dans son Territoire, du Maître en sa Maison, du Patron en son Eglise. La preseance d’honsieur et de bien-seance est celle du parent superieur sur l’inferieur, d’un vieillard sur un je ne nomme, d’une personne de qualité sur une moindre, suivant cette distinction ; bien que de droit les honneurs appartiennent au fils de l’ainé, il ne peut neanmoins s’en prévaloir contre son oncle, sans choquer en quelque sorte la bien-seance ; cependant quand il faut juger à la rigueur et suivant les Coûtumes, la cause du neveu remporte sur celle de loncle.

Par Arrest en la Chambre des Vacations du 25 de Septembre 1614. entre Morin Laboureur demeurant à S. Pierre de Longueville, et un Archer de la Porte du Roy, sur ce que cet Archer vouloit preceder Morin, la preseance luy étant ajugée, Morin en appela, et disoit qu’il étoit plus gé, que cet Archer êtoit fils d’un Païsan, que la qualité d’Archer de la Porte ne luy donnoit point la preseance, et luy Morin avoit porté les armes pour le service du Roy, ce qu’il justifioit par des certificats ; néanmoins la Sentence fut confirmée, et la preseance ajugée à l’Archer.

Bien que l’âge entre Gentilshommes regle la preseance, on a fait quelque difference entri ancien noble et celuy qui avoit obtenu l’annoblissement ; cette question s’offrit en la GrandChambre le mois de May 1599. Le nouveau noble remontroit que la vertu seule est l’origine et le fondement de la véritable noblesse, de sorte que celuy que le Prince honore de ce titre pour recompense de ses services, est d’un merite beaucoup au dessus de celuy qui n’a fait aucun acte vertueux, et qui doit tout l’avantage de sa noblesse aux bonnes actions de ses ancêtres.

Il n’est pas juste qu’il profite de leurs travaux, puis qu’il n’imite pas leur vertu, et qu’il abanlonne la route qui conduit à la gloire pour vieillir dans la faineantise et l’oysiveté. Il y a eaucoup plus de mérite à donner à sa Postérité des titres d’honneur que de les emprunter Saluste de ses Predécesseurs : Malo, ditCiceron , posteris meis esse nobilitatis initium & virtutis exemplum, quam majorum opinione uti. Il vaut bien mieux, comme répondit Marius dans Saluste à ceux qui luy reprochoient la bassesse de sa naissance, pouvoir montrer à chaque moment les marques de sa noblesse, qui étoient les blessures qu’il avoit reçûës pour le service de sa Patrie.

Malo pater Thersites sit tibi, dummodo tu sis

Cacidae similis, Wlcaniaque arma capessas,

Quâm te Thersiti similem producat Achilles.

Ce n’est pas à vray dire la Charte et la Lettre du Prince qui donne la noblesse, elle ne fait que déclarer et le mérite et la vertu de celuy qui est annobli, et il n’étoit pas moins nobli auparavant s’il avoit les qualitez qui forment la véritable noblesse. Aprés tout puis que toute la noblesse procede du Prince, quand il luy plaist honorer quelqu’un de cette qualité, il luy confere toutes les conditions qui sont requises pour joüir pleinement de toutes les prerogatives des nobles. Sa grace ne demeure point imparfaite, et celuy qui est annobly devient aussi parfaitement noble que celuy qui l’est par naissance. S’il étoit autrement, celuy qui montreroit plus de generations seroit le plus noble, et il ne faudroit plus considerer l’âge, mais compter les degrez pour-re gler la preseance entre Gentilshommes, ce qui causeroit une étrange conusion : La noblesse est comme la substance que neque extenditur, neque remittitur, non recipit magis et minus

Le nobie d’extraction faisoit comparaison de la noblesse avec les fleuves qui croissent et qui trossissent leur cours plus ils s’éloignent de leurs sources ; la noblesse aussi augmente sa splendeur et son lustre plus elle vieillit. Les peuples les plus polis ont eu toûjours du respect et de la veneration pour ceux dont l’origine étoit ancienne et illustre : C’étoit la gloire des Hepreux de rapporter leur origine à leur pere Abraham. Les Grecs affectoient d’ajoûter à leurs noms ceux de leurs peres, et les Romains dans les Cérémonies publiques étaloient avec faste les Images enfumées et tronquées de leurs ancêtres. La vertu ; la gloire, et l’honneur des ayeuls est une belle lumière qui éclaire à leur postérité, et qui leur inspire un noble desir de suivre leur exemple et de se montrer dignes successeurs d’un sang genereux.

Fortes creantur fortibus, & bonis,

Est in juvencis, est in equis patrum

Virtus, nec imbellem feroces

Progenerant aquilae columban

Les Ordonnances de nos Rois favorisent si fort ceux qui sont d’extraction noble qu’elles veusent qu’ils soient preferez pour les Cffices et les Benefices, et par l’Ordonnance de Loüis XII. il est requis cinq ans d’étude aux graduez nen nobles, et il n’en faut que trois pour les nobles. par Arrest entre Oger de Pierre, sieur des Hautes-Terres, et le sieur l’Archer, Conseiller en la Cour des Avdes, les honneurs et la preseance furent donnez au sieur des Hautes-Terres, noble d’ancienne Race, au préjudice du sieur l’Archer, nouveau annobli, encore qu’il eût été vingt ans Conseiller en Cour Souveraine. Autre Arrest du 13 de Juillet 16z1. entre Paian de Monts, Ecuyer, sieur de Thiboville appelant, et Jean Colas annobli ; le Juge de Valogne avoit donné la preseance à l’annobli, comme plus ancien d’âge, par l’Arrest en infirmant la Sentence la preseance fut donnée au noble d’extraction ; mais il faut remarquer que ledit Colas avoit obtenu les lettres d’annoblissement.

Une question presque semblable s’offrit en l’Audience de la Grand. Chambre le mois de Mars 618. entre Gilles de Meharenc, Ecuyer, sieur de la Noë, dont la famille est noble et ancienne, et Jean de Melun, dont le pere avoit été annobli en l’année 1593. De Melun se fondoit sur cette raison, qu’il étoit fils de noble, et que par consequent sa noblesse étoit de Race, à quoy de

Meharene répondoit que de Melun êtoit né avant l’annoblissement de son pere, d’où il concluoit qu’il étoit né roturier, et non de pere noble, mais annobli : la Cour sur cette question appointa les parties au Conseil. Ciceron pro Fonteio, pour marque d’une véritable noblesse désire ces quare choses : antiquitas generis, continua Praturae in familia, deinde mémoria Patris, postremâ ipse Je quo loquitur, in omnibus vitae partibus honestus arque integer. Au contraire Decius dans TiteLive , voulant persuader au peuple Romain qu’il falloit choisir des Sacrificateurs d’entre le peuple, luy remontroit Patricios esse factos, non è celo demissos, qui patrem avumque cière possunt, nihil pra. terea ingenuum jam patrem cière posse, filius avum patremque ciere poterit. Sur cette question si le fils avant l’annoblissement de son pere est noble, voyezHottoman , Quest. Illust. 4. 2.

Puisque la noblesse donne tant de prerogatives ; il ne sera pas inutile de remarquer qu’en Normandie, comme ailleurs, il suffit pour établir cette qualité de prouver deux degrez au dessus de l’inquieté, quoy qu’autrefois on prétendit qu’il falloit en justifier trois. Cela fut ordonné par un Arrest du Conseil d’Etat du 13 d’Avril 1641. donné sur ce qui fut remontré au Roy, par le Procureur Syndie des Etats de Normandie, que la prétention de Me Jean Bapriste Paleologo, qui avoit traité avec sa Majesté du droit de Franes-fiefs, que tous ceux qui ne vérisioient pas leur noblesse de quatre Races, les Officiers des Cours Souveraines et tous les nobles par et tres les veuves et les descendans des uns et des autres, étoient sujets au payement dudit droit, êtoit contraire aux anciens droits de la noblesse, et contre la loy commune du Royaume, qui tient pour nobles tous ceux qui sont descendus de pere et ayeul, qui ont vécu noblement, les annoblis par lettres et tous les Officiers des Compagnies Souveraines, le Roy en son Conseil ayant égard aux remontrances dudit Syndic des Etats de Normandie, ordonna que tous les Gentilshommes de ladite Province, dont le pere et ayeul auroient vécu noblement, et été en possession de noblesse, et ceux dont l’ayeul auroit obtenu lettres de noblesse, dûëment verifiées, et qui n’auroient point dérogé à noblesse, seroient exempts des taxes des Françs. fiefs.

La même question ayant été renouvelée devant les Commissaires députez pour la recherche les usurpateurs du titre de noblesse, par un Arrest du Conseil d’Etat au profit de Jacques, François et Claude Frontin freres, qui comme dessus d’ayeal et pere, Auditeurs en la Chambre des Comptes Roüen, furent maintenus en la qualité de Nobles et Ecuyers.

EXTRAIT DES REGISTRES DU CONSEIL D’ÉTAT.

V EU au Conseil du Roy, l’Arrest rendu en iceluy le 10 de May 1672. portant Commission aux sieurs Commissaires y dénommez, pour instruire et faire rapport audit Conseil, des instances pendantes en iceluy, concernant la recherche des Usurpateurs du titre de Noblesse. Les Lettres patentes cu-devant expediées au sieur Foucaut, Procureur General du Roy en ladite Commission, du 2o Septembre 1666. et autres Lettres patentes et Arrests, donnez pour l’execution des Declarations de sa Majesté, des 8 Février 1661. 22 Juin 664. et autres precedens et subsequens. L’Instance d’entre Me Jacques Frontin, sieur du Tot, Conseiller du Roy, Maître ordinaire en sa Chambre des Comptes de Normandie, denandeur aux fins des Requêtes, sur lesquelles est intervenue l’Ordonnance desdits sieurs Commissaires du Conseil du 28 Aoust 1672. d’une part ; et Me Nicolas de Licourt, Commis à ladite recherche en la Province de Normandie, défendeur d’autre ; Et entre François Fronin, sieur de la Hauteville, et Claude Frontin, sieur de Clarmont, intervenans et reçûs par-les en ladite Instance, par Ordonnance desdits sieurs Commiffaires du 29 de Septembre audit an 1672. d’une autre part ; et ledit de Licourt défendeur d’autre : La première desdites Requêtes, tendante à ce que ledit sieur du Tot fût recû opposant à l’execution faite sur ses siens-meubles le 3. Aoust audit an, à la requête dudit de Licourt ; et faisant droit sur ladite opposition, déclarer ladite execution injurieuse, tortionnaire et déraisonnable, ordonner que la vaisselle d’argent saisie et mentionnée en ladite execution luy seroit renduë et restituée, et en outre le recevoir appelant de l’Ordonnance contre luy renduë par le sieur de Creil Commissaire départy en la Genéralité de Roüen ledit jour 3. Aoust dernier, luy permettre de faire intimer sur ledit appel ledit de Licourt et autres qu’il appartiendra, et faisant droit sur iceluy, que ladite Ordonnance sera cassée et annullée. Et la seconde et dernière desdites Requêtes tendante à être recû d’abondant opposant aux executions sur luy faites le 20. dudit mois d’Aoust, et appelant en adherant de l’Ordonnance dudit sieur de Creil dudit jour 20. Aoust ; faisant droit sur lesdites oppositions et appellations declarer lesdites executions nulles, tortionnaires et déraisonnables, les casser et annuller, ensemble lOrdonnance dudit sieur de Creil, et condamner solidairement ledit de Licourt, le nommé Aubry son Commis, et le Sergent qui a fait lesdites executions, aux dommages et interests dudit sieur du Tot, à rendre et restituer les choses saisies et executées et par corps, et les douze livres de frais et mises d’execution, ensemble tous dépositaires d’iceux, et même le nommé Briffaut, és mains duquel ledit sieur du Tot a consigné la somme de mil livres contraint par les mêmes voyes à luy rendre et restituer ladite somme, moyennant quoy ils en demeureront bien et valablement déchargez, et lesdits de Licourt, aubry, et le Sergent aussi condamnez solidairement aux dépens envers ledit sieur-du Tot-

L’Ordonnance desdits sieurs Commissaires du Conseil dudit jour 28 Aoust 1672. intervenuë. sur lesdites Requêtes portant qu’avant faire droit sur icelles, ledit sieur du Tot produiroit dans quinzaine au Greffe de la Commission tout ce que bon luy sembleroit pour être communiqué audit de Licourt, montré au Procureur General, et fait droit ainsi que de raison. L’inventaire de production faite en consequence par ledit sieur du Tot, par lequel il conclud aux fins cu-dessus, et à être maintenu et gardé en la qualité de Noble et d’Ecuyer, comme étant issu de Jacques Frontin son pere, et de Jacques Frontin son ayeul, qui ont toûjours été successivement Auditeurs des Comptes depuis l’année 1582. Les lettres de provision de Jacques Frontin, ayeul dudit sieur du Tot en la Charge de Conseiller Auditeur en la Chambre des Comptes de Normandie du 17 Janvier 1582. sur le reply desquelles est l’acte de reception du 2. Avril audit in, et sous le contre-scel est artaché la Procuration, ad resignandum, en faveur dudit sieur Frontin, et la quittance du Marc d’Or dudit Office des 13. et 16. Janvier audit an 1582. Deux copies collationnées de permissions de chasses : accordées par les Rois Henry III. et Hefiry IV. audit Jacques Frontin, des 21 Octobre 1585. et 17 Janvier 1600. Les lettres d’honneur dudit acques Frontin, en sa Charge de Conseiller Auditeur, aprés trente deux ans de services, en datte du 25 Février 1614. régistrées en ladite Chambre des Comptes de Normandie le 21. Juillet audit an. Copie collationnée Mignot, Secrétaire du Roy, des lettres de provision de Jacques Frontin, pere dudit sieur du Tot, en la même Charge d’Auditeur des Comptes du 24 Février 1614. et son acte de reception du 24. Juillet audit an. Chartres en formes d’anoblissement octroyées audit Jacques Frontin, en consideration de ses services et de ceux rendus par Me Jacques Frontin son pere, en l’exercice de ladite Charge d’Auditeur, en datte du S Decembre 1633. registrées en la Chambre desComptes et Cour des Aydes de Normandie, les premier Février 1634. et 11 Juillet 1637. Lettres d’honneur dudit Jacques Frontin pere dudit sieur du Tot, de sadite Charge d’Auditeur du 18 Juillet 1638. registrées en ladite Chambre des Comptes le 10 Septembre audit an. La Declaration du Roy du mois de Juillet 1652. portant anoblissement en faveur des Officiers de ladite Chambre des Comptes de Normandie, régistrée au Parlement, en ladite Chambre et Cour des Aydes de ladite Province. Certificat que ledit Jacques Frontin Auditeur ere dudit sieur du Tot, auroit contribué avec tout le Corps de ladite Chambre des Comptes. comme honoraire d’icelle, au commerce des Indes Orientales en 1665. Extrait mortuaire du decez dudit sieur Frontin du 11 Février 1667. La grosse en parchemin des lots et partages de la succession dudit feu sieur Frontin entre François Frontin, Ecuyer, sieur de la Hauteville, Jacques Frontin, Ecuyer, sieur du Tot, et Claude Frontin, Ecuyer, sieur de Clarmont ses fils, et heritiers du 4 Juillet 1667. Extrait du Rôlle arrêté au Conseil le 10 May 1667. dans lequel Jacques Frontin, sieur du Tor et de Hauteville, est employé pour 2ooo livres d’amende, à laquelle il auroit été condamné par forclusion le 19. Avril audit an, pour avoir pris et usurpé la qualité d’Ecuyer. Autre Extrait du compte rendu au Conseil par ledit de Licourt des amendes des usurpaeurs de ladite Province de Normandie, auquel l’article de l’amende dudit sieur Frontin est em-ployée et admise à neant du 23 Janvier 1672. Acte du 12 May 1667. signifié audit de Licourt à la requête desdits sieurs Frontin enfans dudit sieur Frontin, contenant offre de produire.

Exploit de commandement fait audit feu sieur Frontin, parlant à sa personne, à la requête dudit de Licourt, de payer ladite amende de 2o0o livres du 17 May 1667. Extrait de produit par lesdits sieurs Frontin, au Greffe de la Commission dudit sieur Barrin du 18 desdits mois et an. Acte de sommation audit de Licourt, de remettre audit Greffe la production desdits sieurs Frontin, du 6. Juin audit an. Requête presentée audit sieur de la Gallissonnière, par lesdits Frontin, à ce que ledit de Licourt fut condamné de remettre au Greffe leur production, au bas de laquelle est lOrdonnance, de soit communiqué. Et cependant toutes choses demeurant en état, du 12 Juin 1667. Acte de communication audit de Licourt du 16. Septembre audit an. L’Ordonnance dudit sieur de la Gallissonnière du 20. desdits mois et an, par laquelle lesdits sieurs Frontin sont remis à produire dans huitaine, en payant les dépens de la forclusion. Plusieurs actes et procedures en consequence, et le Jugement difinitif dudit sieur de la Gallissonnière lu 28 Juillet 1668. portant renvoy au Conseil, en explication de la Declaration de 1652. attendu que ladite Declaration semble n’être qu’en faveur des Officiers, qui étoient actuelle ment titulaires, et ledit Jacques Frontin lors de ladite Declaration de 1652. n’étant plus revétu de la Charge d’Auditeur, mais simplement honoraire. L’autre moyen, qu’il y a eu pere et grand pere successivement pourvûs de la même Charge d’Auditeur, n’étant considérable en Normandie où il en faut trois au dessus de l’inquieté. Acte de reception dudit sieur du Tot, en sa Charge de Maître des Comptes audit Roüen, du 28 Juin 1669. dans lequel est énoncé. Autre acte de la reception dudit sieur du Tot, en la Charge de Lieutenant Genéral, civil et Criminel en la ville de Gournay, du 12 Juin 1651. Extrait de la Declaration du mois de Juillet 1669. Autre Extrait de l’article 25. de l’Edit 1600. faisant défences à toutes personnes de prendre la qualité d’Ecuyer, et de s’inserer au Corps de la Noblesse, qu’ils ne soient issus de pere et ayeul ayant fait profession des Armes, ou servi au public en Charges hono rables, et de celles qui par les Loix et moeurs du Royaume, peuvent donner le commencement de Noblesse, avec les Remontrances faites au Roy sur ledit article, par la Cour des Aydes de

Normandie, et l’intention de sa Majesté sur lesdites Remontrances. L’Extrait de l’Arrest du 1s Avril 1602. portant declaration de Noblesse, des enfans des Officiers de Parlement et Chambre des Comptes, ayant eu leur pere et grand pere, veterans desdites Charges, ou decedez dans le service d’icelles. L’Exploit de saisie et execution faite sur ledit sieur du Tor, à la requête dudit de Licourt, en qualité d’heritier dudit feu sieur Frontin son pere, pour la somme de 2000. livres d’amende et deux sols pour livre, en laquelle ledit de Licourt prérendoit que ledit feu sieur Frontin avoit été condamné et compris au Rôlle du Conseil, du mois de May 1667. Ledit Exploit de saisie du 3 Aoust 1672. L’Ordonnance dudit sieur de Creil, dudit jour, portant que ledit sieur du Tot seroit tenu de faire juger son instance dans le mois au Conseil, et cependant qu’il garniroit dans huitaine ladite somme de 2000. livres et deux sols pour livre entre les mains de Jacques Briffaut Epicier à Roüen, dont il mettroit le billet de garnissement és mains dudit Aubry, pour par luy toucher ladite somme, faute par ledit sieur du Tot de faire vuider ladite Instance dans le mois, cependant les choses executées tenant état ; et permis de les faire vendre, faute de faire ledit garnissement dans ledit temps de huitaine. Autre Exploit de saisie et execution faite par le Comte Sergent, à la requête de dit de Licourt, sur les meubles dudit sieur du Tor, et bestiaux d’un de ses Fermiers, du 2o dudit mois d’Aoust 1672. Autre Ordonnance dudit sieur de Creil dudit jour, portant entr’autres choses que ledit sieur Frontin consigneroit dans le jour la somme de mille livres entre les mains dudit Briffaut, et en fourniroit le billet de consignation audit Aubry, moyennant quoy main-levée desdits bestiaux saisis, tant sur luy que sur son Fermier, la saisie des autres meubles tenant, jusques à ce qu’autrement par luy en eût été ordonné ; et faute par ledit Frontin d’avoir fait la consignation portée par ladite Ordonnance du 3. dudit mois, condamné aux frais et mises d’execution, moderées à douze livres. Copie de Quittance dudit le Comte Sergent, de ladite somme de douze livres. Autre copie de billet de consignation faite par ledit sieur du Tot és mains dudit Biiffaut, de la somme de mille livres, dudit jour 20. Aoust ; Le Blazon des Armes de Frontin porte d’argent à trois branches de houx à triple feüille de Sinople. Treize certificats justificatifs des services rendus dans les Armées par François Fron-tin Ecuyer, sieur d. Hauteville, et François Frontin Ecuyer, fieur de la Jozerie, son fils, frere et neven dudit sieur du Tot, des années 1641. 1644. 1667. 1668. 1669. et 1672. L’acte de sejour dudit sieur du Tot, signifié audit de Licourt, au domicile de Me Jobert son Avos car, le S Septembre 1672. Autre acte signifié audit jobert, comme ledit sieur du Tot avoit mis sa production au G’effe, à ce que ledit Jobert audit nom eût, à en prendre communication, et y fournir de contredits, du f2. dudit mois de Septembre. Trois Actes de somma-tions faites audit jobert, de remettre ladite production au Greffe, et de fournir de contredits à icelle, des 17. 19 et 20. dudit mois. Roquête dudit sieur du Tot, à ce qu’il luy fût pourvû sur le refus dudit de Licourt, de répondre à sadite production, signifiée audit lobert Avocat dudit de Licourt, le 23. dudit mois de Seprembre. Requête d’intervention desdits François et Claude Frontin, sieurs de la Hauteville et de Clarmont, freres dudit sieur du Tot, aux fins d’être reçûs parties en ladite Instance, et leur être accordé acte de ce qu’ils employent, tout ce qui a été dit, écrit et produit par ledit sieur du Tot, pour être maintenus en leur qualité de Noblesse et d’Ecuyer. Ordonnance desdits sieurs Commissaires, du. à0 Septembre 1672. intervenuë sur ladite Requête, par laquelle lesdits François et Claude Frontin sont reçûs parties intervenantes en ladite Instance, et au surplus en jugeant, signifiée audit Jobert Avocat le 14. Octobre audit an. Contredits fournis par ledit de Lieourt le 4. dudit mois d’Octobre. Salvations dudit sieur du Tot aux contredits, du 5. du même mois. Conclsions du Procureur General en ladite Commission : Où y le Rapport du sieur de Thuily, Conseillet du Roy en ses Conseils, Maître des Requêtes ordinaire de son Hôtel, Commissaire à ce dé puté qui en a communiqué ausdits sieurs Commissaires du Conseil, et tout considéré LE ROY EN SON CONSEIL, faisant droit sur ladite Instance de renvoy, et sur l’opposition dudit Jacques Frontin, sieur du Tot, ensemble sur l’intervention desdits François Frontin, sieur de la Hauteville ; et Claude Frontin, sieur de Clarmont, freres issus d’ayeux pere, Auditeurs des Comptes à Roüen ; et sans s’arrêter audit Jugement rendu par for-clusion par ledit sieur de la Gillissonniere, cy-devant Commissaire départy en la Generalité de Roüen dudit jour 1o Avril 1667. et au Rolle arrété audit Conseil le 10. May ensuivant, ni à tout ce qui a été fait en consequence : à maintenu et gardé, maintient et garde lesdits François, Jacques et Claud : Frontin frères, en la qualité de Nobles et d’Ecuyer ; En consequence a ordonné et ordonne qu’ils joüiront, ensemble leurs enfans, successeurs et posterité, naiz et à naître en legitime mariage, des droits, privileges, honneurs ; et exemptions, dont joüissent les Nobles du Royaume : Faisant sa Majesté défences audit de Licourt et à tous autres de les y troubler ; tant et si longuement qu’ils vivront, sans faire aucun acte dérogeant à Noblesse ; et pour cet effet que lesdits Frontin seront inscrits dans le Catalogue des Genrilshommes, qui sera arrété et envoyé dans les Bailliages, Elections, et autres lieux du Royaume, que besoin sera en execution de l’Arrest dudit Conseil du 22 Mars 1666. Ordonne sa Majesté, que la somme de mille livres consignée par ledit Jaeques Frontin, és mains dudit Briffaut, en consequence de ladite Oidonnance dudit sieur de Cteil, Commil aire départy en ladite Genéralité de Roüen, du 20. Aoust dernier, luy sera renduë et restituée, ensemble celle de douze livres aussi par luy payée pour frais d’execution, en consequence de ladite Ordonnances Et en outre luy fait sa Majt sté pleine et entière main-levée des autres biens-meubles sur luy saisis et execurez, et à ce faire lesdits de Licourt, de la Porte sa caution, ses Commis et les dépositaires, contraints par toutes voyes dûës et raisonnables, quoy faisant ils en demeureont bien et valablement déchargez, en vertu du present Arrest. Fait au Conseil d’Etat du Roy, tenu à Versailles le seizième jour de Novembre mil six cens soixante et douze. Collationné, et signé BEeRAMEL, avec paraphes.

Si lambition commande si fort aux hommes, les femmes ne sont pas moins travaillées de cette passion ; elles ont souvent entrepris de marcher avant les hommes ; tant à la Procession qu’à Offrande : mais quelque qualité qu’elles puissent avoir elles ne doivent marcher qu’aprés les commes, ita ut primas anteviros in Processione tenere non debent, sed tantum extremas cujuscumque sint onditionis in ipsa etiam civili & seculari politia semper major est dignitas in sexu virili, l. 1. D. de Senat.

Loyseau C’est a issi le sentiment de Loyseau des Seig. c. 11. n. 53. et suivant cela il a été jugé par Arrest du premier Féveier 1633. qu’une Demoiselle ne pouvoit preceder les hommes à la Procession ni aux autres Ceremonies, quoy que la pluspart de ces hommes-là fussent ses vassaux et de condition roturirre.

Il reste à parler des bancs comme faisant partie des honneurs d’Eglise. Ce seroit rétrancher un grand abus que d’en interdire le commerce. Tous les sieges dans les Eglises dévroient être publics comme les Eglises sont publiques, et personne ne dévroit avoir d’banc qui luy fût propre et particulier ; mais ce mal a jetté de si profondes racines qu’il n’en faut plus esperer le remede.

Les premiers sieges sur tout dans les Eglises ont toûjours été des marques d’honneur, vel Cathedra honorant, sicut honores seculi, disoitS. Augustin . Augustin, Ep. 203. Les Pharisiens aimoient les premieres places aux banquets, et les premières seances aux Synagogues. S. Matthieu c. 3.

Il est certain qu’autrefois dans les Egliles la seance des fidéles n’étoit point distinguée par les dignitez ou les qualitez, mais par l’âge et le sexe ; les vieillards étoient separez d’avec les jeunes, es femmes d’avec les hommes, il est encor certain que les seuls Ecclesiastiques étoient assis, et que les Laiques étoient de bout, peut. être que dins la suite on permit aux malades de s’asseoits Balsamon on en vint jusqu’au luxe suivant le témoignage de Balsamon, nonnulli lectulos in medio Templi submittentes hujusmodi thoros, seu strata, vel ad majores delicias, ivel alioquin ad suam quietem faciebant. De Hac re, voyez, l. l. c. 10.Servius , sur le second Livre de Roye IEneide, dit que dans les Temples il y avoit des sieges qu’ils appeloient lectisternia, sur lesquels les hommes étoient assis.

Mais aujoui d’huy nul ne peut hors le Patron avoir de banc dans l’Eglise, sans la permission des Marguilliers et Tresoriers de la Paroisse.

Cette concession de banc n’est pas même une proprieté, ce n’est qu’un simple usage à vie, Loyseau qui n’est pas transmissible aux heritiers, s’il n’y a clause expresse. Voyez Loyseau des Seig. c. 11.

Loüet Les bancs ne peuvent être baillez à perpetuité, suivant l’Arrest du Parlement de Paris, raporté par Mr Loüer, l. E. n. 9. et ils ne sont point héréditaires : neanmoins, ditBrodeau , ibidem, les veuves et les enfans, et les heritiers de ceux à qui ils ont été concedez ont accoûtumé d’être conservez en la possession d’iceux, moyennant une reconnoissance à la fabrique de l’Eglise, et d’être preferez à ceux qui les demandent lors qu’ils font le mêmes avantages, par argument de la ley, congruit ff. de locat. prad. civilium. Codice veteres colonos nouis praferendos esseOn demande si un banc d’Eglise ayant été concedé par les Marguilliers à un particulier et aux siens, et ses enfans ayant quitté la Paroisse pendant quelque temps, et y retournans, doivent être maint enus en ce droit de banc au préjudice de la concession faite à un autre de ce même banc, pendant leur absence ; On peut dire en faveur de celuy qui avoit obtenu la dernière concession qu’il étoit en la liberté des Marguilliers de disposer des bancs au profit de qui bon leur semble, aprés la mort de ceux ausquels la concession en avoit été faite, ayant été jugé par plusieurs Arrests que ces concessions finissoient avec la personne, que les bancs des Eglises qui sont facrez et qui ne se peuvent alienet, ne peuvent aussi être baillez comme une chose profane à un Paroissi-n et aux siens, que si cela étoit autorisé ce seroit introduire une seigneurie et proprieté des choses Ecclesivstiques, contre la disposition des loix Canoniques et civil, et qu’en tout cas ces concessiens ne pouvoit nt avoir lieu pendant que le preneur et ses enfans demeuroient dans la Paroisse : mais quand ils l’abandonnoient et se retiroient ailleurs, les Marguilliers en pouvoient disposer en faveur de ceux qui faisoient quelque reconnoissance à l’EglifePour faire valoir cette nouvelle concessien au premier preneur ou à ses enfans, il faudroit qu’ils eussent quitté la Paroisse sans ai cun dessein d’y retourner quelque jour ; car pour avoit drmeuré ailleurs, y étant peut-être obligez par la nécessité de leurs affaires, ou pour quelqu’autre sujet, il ne seroit pas raisonnable de les priver de leur droit, sous pretexte de quelque reconncissance qu’on auroit faite à l’Eglise, cela fut jugé de la sorte au Parlement de Paris en l’Audience de la Grand : Chambre le 29 Janvier i64i. la fille de celuy auquel on avoit concedé un banc pour luy et les siens, s’étant retirée avec son tuteur en la ville de Senlis, à cause de la contagion, aprés avoir demeuré neufans à Compiegne, elle retourna à Senlis, et voulant occuper le banc en vertu de la concession qui en avoit été faite à son pere, un particulier qui en avoit pris un troit moyennant six livres lempescha, et s’étant plaint du trouble, il fut dit par Sentence que e banc demeureroit à ladite de la Haye, ce qui fut confirmé par lArrest, en remboursant ce articulier des six livres qu’il avoit payées.

La possession feule ne suffit pas ordinairement ; neanmoins en la cause de Claude de Tourisieur d’Estré, et Jeanne Saley sa femme, d’une part, et Augustin le Petit, Ecuyer, sieur des Is, l’autre part ; par Arrest du 4 d’Aoust 1638. au Rapport de Mr de Galantine, en la Chambre des Enquêtes, ledit Claude de Touri fut maintenu en la possession d’un banc, seance, et sepulture en la Chapelle d’une Eglise, sans pouvoir être dépossedé par les Tresoriers : lArrest sst fondé sur ces raisons, qu’encore qu’on ne fit apparoir du titre primitif de la fondation de la Chapelle dont êtoit question, néanmoins on le devoit présumer, parce que depuis en l’année 1573. a possession avoit été continuée en l’an 1594. en 1611. et 1612. et telle possession bien qu’elle ne fût pas un titre, elle le faisoit présumer, non vi prascriptionis, sed prasumptionis. Outre la possession il y avoit des signes visibles et exterieurs, ceintures funebres, armoiries et sepulture, ue les interdits sont donnez par le droit civil pour les sepulcres de Religieux, EaePERLUETTE sumptibus Institutes funerum. ff. Joannes Faber aux Institutes, 5. retinendae de interdictis.Le Maréchal , des Droits Honorifiques, c. 2. pour les Chapelles, Bancs. Il seroit inhumain de priver un homme de la Loyseau sepulture dans les sepuleres de ses Peres. Et Loyseau qui dans le traité des Seigneuries, semble décider la question au préjudice de la possession, conclud enfin pour la possession, quand elle est accompagnée de marques exterieures et visibles.

Le 18 d’Avril 1667. en l’Audience de la Grand. Chambre, il fut jugé que pour des bancs et seances en l’Eglise, le titre et la possession servoient, et qu’un Gentilhomme de la Paroisse n’en pouvoit déposseder un roturier, nonobstant que sa seance fût plus honorable. Deux Gentilshommes nommez Suhard possedoient depuis long-temps un banc dans l’Eglise de leur Paroisse, ils en avoient même quelques sortes de titres. Un Curé de la Paroisse, qui étoit de leur famille, et qui portoit leur nom, ayant fait employer à la fin d’un Contrat de fondation, qui se faisoit par d’autres personnes que les sieurs Suhard, ses parens avoient seance dans le banc dont étoit question, et en consideration de ce qu’ils avoient fait construire le Clocher et la Tour de l’Eglise, Ils avoient eu durant trente ans la possession de cette place. Aprés leur mort leurs heritiers nommez Herout, qui n’étoient pas nobles, y furent troublez par un Gentilhomme de la Paroisse, qui prétendoit l’avoir, comme étant la place la plus honorable de la Nef, par Sentence du Juge de Lysieux la provision fut ajugée à ce Gentilhomme, nommé Poret : sur l’appel en la Cour on fit intervenir Judith Suhard, qui êtoit de la même famille et de la même Paroisse. Aubout, son Avocat, tant pour cette Demoiselle que pour lesdits Herout, conclud qu’en reformant la Sentence ils seroient maintenus en la possession du banc en question, vs la longue possession de leurs Predécesseurs, qu’ils étoient même bien-faicteurs, ayant fait plusieurs fondatlons en l’Eglise, et qu’il ne seroit pas juste qu’un Gentilhomme, sous pretexte de sa qualité, fût recevable à changer toutes les seances d’une Eglise. La Demoiselle Suhard étant de la même famille, elle avoir un juste interest de s’opposer à ce changement. L’intimé se fondoit sur sa qualité, et qu’il seroit cont re la bien-seance qu’un roturier eût, à son préjudice, la seance la plus honorable de l’Eglise.

La Cour en reformant la Sentence, maintint les appelans en la possession du banc en question.

On a depuis jugé le contraire sur cette même question le 29 de Novembre 1672. entre Charles Gruel, Ecuyer, sieur des Fosses, appelant d’une Sentence, par laquelle il avoit été dit que sans avoir égard à l’intervention de Brançois du Four, sieur du Marchet, Me Leon du Puis, Receveur des Decimes à Seés, êtoit maintenu au droit de seance en l’Eglise de la Paroisse de la Boiquiere, au préjudice desdits du Four et Gruel, d’une part, et ledit du Puis intimé, et François du Four intimé, Grihaut, son Avocat, pour l’appelant dit qu’il s’agissoit de sçavoir si sa partie, qui étoit de condition noble, n’auroit pas un banc dans l’Eglise avant l’intimé, qui étoit de condition roturieC : Que la preseance des nobles dans l’Eglise êtoit certaine, et que l’infeodation attribuée par l’intimé pour se maintenir dans la place par luy occupée n’étoit pas considérable, et à l’égard du sieur du Four elle étoit inutile, n’ayant jamais demeuré dans cette Paroisse. Maurry, pour l’intimé conéluoit qu’il devoit être maintenu en la possession de son banc : De Cahaignes pour du Four demandoit la preference, comme étant le plus âgé. Par l’Arrest la Sentence fut cassée, et le sieur Gruel renvoyé devant les Marguilliers pour luy être donné une place plus avantageusé que celle de du Puis. La Cour déeida la question generale, qu’un Gentilhomme doit avoir la place la plus li honorable dans la Nef, au préjudice d’un Roturier, et pour ôter la contrarieté de cet Arrest avec le precedent, il faut présumer que la Cour se fonda sur l’intervention de la Demoiselle Suhars et sur la longue possession, ce qui n’étoit pas en la cause du sieur Gruel.

La competence des actions formées pour les Patronnages, ou pour les droits honorifiques, appartient au Juge Royal. Mr d’Olive , t. 1. l. l. c. 22. rapporte un Arrest du Parlement de Tolose, par lequel on a jugé qu’un Curé qui avoit negligé de rendre au Seigneur Justicier les nonneurs qui luy étoient dûs, pouvoit être convonu devant le Juge Temporel ; ée n’est pas une question en cette Province quand le Patronage est litigieux, il faut plaider devant le Juge Royal, Art. 61. comme aussi pour toutes les actions qui concernent les droits honorifiques, encore qu’elles soient formées contre les Curez, parce que ce sont droits réels attachez à la glebe du Patronnage.

Les Patrons et Fondateurs peuvent former complainte pour leurs droits, ceux qui posse dent des bancs et places dans les Eglises, s’ils sont troublez en leur possession, ils peuvent intenter complainte en reintegrande.Brodeau , sur sur M. Loüet, l. E. n. 9. néanmoins ces prerogatives ne sont point dûës de plein droit, mais par un droit de bien-seance.

Les dernieres paroles de cet Article, fiefou glebe, ont fait douter si on pouvoit aliener le Patronnage, sine universitate feudi. On tenoit autrefois faffirmative suivant un Arrest du 14 de Juin 1608. pour la Dame de la Fresnaye, contre les sieurs de la Broise et de Vaugris : depuis on a jugé le contraire, comme je l’ay remarqué sur le titre du Patronnage.