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CCI.
Le fief retourne au Seigneur à la charge tant des rentes foncieres et hypotheques, que dettes mobiles dûës par le vassal, discution préalablement faite de ses meubles, lesquelles rentes foncieres il pourra racquiter au prix du denier vingt, excepté celles dûës à EEglise, dont elle aura joüi paisiblement par quaante ans, si elles ne sont raquitables, suivant lEdit du Roy, ou qu’autre prix fût mis audit contrat
Cet Article a terminé cette fameuse question, si le fief retournant au Seigneur, il est tenu d’acquitter toutes les dettes et les charges imposées sur le fief par le vassal : ay remarqué sur l’Article 125. l’Arrest donné au profit de Mr d’Elbeuf, contre la veuve du sieur de S. Baumer, qui fut deboutée de ses droits, tant pour elle que pour ses enfans, sur les héritages ajugez par commise à Mr le Duc d’Elbeuf, pour la felonnie du sieur de S. Bau mer son mary, le mariage ayant été célèbré depuis le crime commis, et l’action intentée.
Long-temps depuis cette autre question s’offrit à l’Audience, si les héritages du sieur de Baumer relevans de la Carneille, et qui avoient été ajugez par commise à Mr le Duc d’Elpeuf, luy devoient demeurer en exemption de toutes les dettes du sieur de S. Baumer, et si les enfans créanciers de leur pere étoient tenus de s’adresser sur les autres biens confisquez, car le sieur de S. Baumer avoit été condamné à un bannissement perpetuel : Mais comme les autres biens ne pouvoient acquiter les dettes, ce procez ayant duré fort long-temps ; enfin la rause portée en l’Audience de la Grand. Chambre le 28 de Février 1673. Lyout, pour le Baron de la Ferriere, qui avoit acquis de Mr le Duc d’Elbeuf la Justice de la Carneille, dont les éritages étoient mouvans, soûtenoit qu’il y avoit de la difference entre la commise et la coniscation ; pour la confiscation, comme le crime donne lieu à la faire juger, et que cela ne pro-cede point d’une cause primitive et inherente au fief, elle ne détruit point le droit des créanciers qui ont contracté avec un homme qui étoit le véritable proprietaire de la chose, et qui pouvoit l’engager, la vendre et l’hypothequer ; mais la commise procede ex primitivâ causâ in feodationis. Le fief est donné à cette condition indispensable, que le vassal porte honneur à son seigneur, et que manquant à ce devoir et à cette obligation, tout le droit qu’il avoit au sief demeure resolu, l. lex vectigali ff. de pign. Ce qui étoit conforme à l’Article 125. de la Coûtume, qui porte que si le vassal est concaincu d’avoir mis la main sur son seigneur, il perd le fief, et toute la droiture qu’il y à retourne au Seigneur. Par cet Article le Seigneur n’est point chargé des dettes du vassal, ce que la Coûtume n’auroit pas manqué d’exprimer, si elle avoir eu cette intention, comme elle a fait dans les cas de confiscation, de bâtardise, et autres especes de retour et de reünion, où elle impose expressément cette charge au Seigneur d’acquit-ter toutes les rentes foncieres et constituées, et même les dettes mobiliaires, ce qu’on confirmoit aussi par l’autorité des anciens Feudistes et de plusieurs Auteurs François, commeTira -queau,Grimauder , et autres ; et en tout cas il concluoit en garantie contre Mr le Duc d’Eleuf, et contre Mr le Comte d’Armagnac, pour lesquels plaidoient Castel et Greard qui ad-heroient à ses conclusions. Le Quesne, pour le sieur de S. Baumer, répondoit qu’on n’avoit plus suivi ces maximes depuis que les fiefs étoient devenus patrimoniaux, conformément Loyseau aux sentimens de duDu Moulin , deLoyseau , de MrLoüet , et des Commentateurs de nôtre Coûtume. Ce qui étoit conforme même à la l. his solis. C. de revocandis donation. laquelle aprés avoir parlé de toutes les espèces de reversions, enfin elle décide en cet Ar-icle que le fief retourne au Seigneur, à la charge tant des rentes foncieres et constituées que des dettes mobiliaires du vassal, aprés discution faite de ses meubles, ce qui com prend toutes les espèces de reversion, comme on le peut induire de ce terme retourne, qui ignifie proprement le retour et la reünion qui se fait par une cause inherente et nécessaire de l’infeodation, et s’il étoit autrement, il en arriveroit d’étranges inconveniens ; le possesseur de fief ou d’héritage pourroit par sa faute, et même par intelligence avec son Seigneur, frustrer ses legitimes creanciers, ce que du Du Moulin a fort bien remarqué, pour détruire l’erreur les anciens Feudistes, qui écrivoient au temps que les fiefs n’étoient, à proprement parler. que de simples usufruits, et qui étoient inalienables. Par l’Arrest on déclara les héritages tombez en Commise, sujets et affectez aux dettes anterieures de la plainte pour le crime de felon-nie, discution faite auparavant des autres héritages et biens confisquez du condamné, et en cas qu’ils ne suffisent pas, sur les biens confisquez ; et pour juger de la validité des dettes, on appointa les parties à écrire et à produire. Messieurs d’Elbeuf et d’Armagnac dés à present condamnez à la garantie du sieur de la Ferriere ; voyezLoüet , let. 1. R. n. 32.Du Moulin , S. 20. gl. 5. 8. 43. gl. 1. n. 98.Pontanus , sur l’Article 101. de la Coûtume de Blois, in fine.
Puis donc que les héritages ne retournent au Seigneur qu’à la charge de payer les dettes, il faut examiner par quelle voye les creanciers peuvent agir contre luy. De la Mare ayant acheté l’Olivier Morel un héritage, pour lequel il se constitua en quarante livres de rente, Alexandre Michel, sieur de Monchaton, le fit appeler à ses Pleds, pour déclarer s’il n’avoit rien acquis qui fit tenu de sa Seigneurie ; de la Mare ayant desavoüé le contrat le sieur de Monchaton en fit juger la Commise par son Senéchal, et en prit possession. Morel pour être payé de sa rente le mit en action et le fit condamner personnellement au payement des arrerages ; sur lappel le sieur de Monchaton disoit qu’il ne pouvoit être poursuivi que par laction hypothecaire, et non point par une action personnelle, et que partant il avoit été mal-jugé, sauf à l’intimé d’user de saisie réelle. Je répondois pour Marguerite Quinel, veuve du sieur Morel, que par les Articles 143 et 201. les héritages ne retournoient au Seigneur qu’à la charge de payer les rentes foncieres et hypothecaires, et pour montrer que ce n’étoit pas l’inténtion de la Coûtume d’obliger les creanciers à un decret, elle ajoûte ces mots, aprés discution préalablement faite des meubles ; elle obligeoit les Seigneurs à payer comme heritiers, car nous avons trois sortes d’heritiers, successores juris, successores bonorum, & successores rei singularis. Les vrais heritiers étoient successores juris.
Les Légataires universels, les Maîtres qui succedoient à leurs esclaves, les Abbez à leurs Moynes, les Seigneurs confiscataires sont successores bonorum, qui ne sont obligez neanmoins que jusqu’à la concurrence des biens qui leur retournent, mais ils en étoient tenus personali actione in rem scriptâ.
Et incidemment ladite Quinel demanda à être reçûë appelante de la Sentence qui jugeoit la Commise, prétendant que pour avoir dénié un contrat de vente on ne tomboit point en Commise. Sur quoy par Arrest du 17 de Juin 1653. sur cet appel on mit les parties hors de Cour, parce qu’un creancier n’étoit pas recevable à appeler de la Sentence qui jugeoit la Commise, et sur l’autre appel on cassa la Sentence, sauf à l’intimé à se pourvoir par la voye hypothecaire. Et c’est aussi le le sentiment de Godefroy sur cet Article ; et par l’Article 24. du Reglement de l’année 1666. il est porté que le Seigneur n’est point tenu personnellement de payer les dettes mobiliaires qui étoient dues par le vassal lors qu’il est entré en joüissance, sans préjudice de l’hpotheque des creanciers Puisque le vassal peut vendre, hypothequer, asservir, et charger de rentes le fonds qu’il tient d’un fief, on demande si le creancier à qui l’on a particulierement affecté un fonds poure payement de sa rente est tenu en consequence de cette speciale hypotheque d’en faire la foy et hommage, et d’en payer un treiziéme, ou au contraire si ce créancier pourroit contraindre le Seigneur à le recevoir à la foy et hommage : Mais cela ne fait point aujourd’huy de difficulté, et comme le Seigneur ne peut forcer le créancier d’une rente constituée à luy payer aucun profit de fief, aussi le creancier n’a pas lieu de prétendre que le Seigneur le reçoive à foy et hommage, encore bien que la rente eût été créée par assignat, que plusieurs anciens Praticiens tenoient être comme une manière d’appropriation.
Dans les autres Coûtumes il n’en est pas de même pour les rentes infeodées, et on repute une rente infeodée lors que le Seigneur a souffert qu’on luy en ait fait hommage et payé les profits, ou qu’elle luy ait été baillée par Aveu, en ce cas le Seigneur usant de saisie feodale est tenu de payer sur les fruits et revenus les rentes infeodées.
Le Seigneur, auquel l’héritage chargé de rentes foncieres retourne, a cette faculté de les pouvoir raquiter au denier vingt ; on a étendu ce privilege plus loin : Il fut jugé en l’Audience de la Grand. Chambre le 13 de Juillet 1628. qu’un Seigneur feodal, qui avoit retiréà droit feodal un heritage chargé de rentes foncieres, avoit la liberté de les pouvoir racheter. Le proprietaire de la rente fonciere soûtenoit que ce fonds luy avoit été baillé à la charge d’une rente perpetuelle, que le debiteur de la rente n’avoit pû luy faire préjudice en vendant son fonds ; le Seigneur fondoit son action sur cet Article, et disoit que le retrait feodal êtoit une espèce de retour qui reünit l’heritage au fief, qu’il devoit être permis au Seigneur de le décharger de la rente fonciere, autrement deviendroit debiteur de son vassal ; les parties étoient le Vaillant, sieur de Barbeville, et Lochart.
Par l’Article 18. de la Coûtume de Paris, quand le Seigneur a reüni à faute d’homme, il fait les fruits siens sans être obligé d’acquiter que les rentes infeodées, mais cela n’a lieu que dans le cas de la saisie feodale ; dans tous les autres cas le seigneur en est tenu suivant cet Article, si la reünion qui se fait ex antiquâ causâ sine facto vasalli, fait préjudice au creancier ; voyez MrLoüet , l. C. n. 53.