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ETTE espèce de Patrons et de Cliens dont l’Histoire et les loix Romaines. font mention, n’a jamais été pratiquée parmy nous, mais nous avons unt autre espèce de Patronnage et de protection qui en a quelque ressemblance.

C’est celle que les Seigneurs s’attribuent à légard des fiefs qui rclevent d’eux, car au lieu des presens, des services et des reconnoissances que les Cliens de Rome faisoient à leurs Patrons, les Seigneurs feodaux ont le droit de Garde, en vertu duquel ils joüissent des fiefs appartenans à leurs vassaux mineurs,Couvell . in Instit. jur. Angl.Cujas , l. l. t. 17. de legitim. patron. tutel.

Ce droit de Garde-Noble n’est point particulier’aux Normans. Jus nec Francis nec cateris Provinciis ignotum, quamquam variat usus, dit M’d’Argentré , sur l’Article 74. de sa Coûtumes qui donne à ce droit le nom de bail et de rachapt : Mais quelque difference que les Coûtumes et les Usages divers y ayent apporté, elies conviennent toutes en ce point que le Gardien fait les fruits siens des choses qui tombent en garde, sans en rendre compte ; elles different en ce point qu’en la pluspart ce droit est deféré par droit du sang ; et par la nôtre, comme par celle de Bretagne, c’est par la loy de la feodalité, lege feudi, non jure sanguinis, M d’Argent . ibid. Et de pretexte que les Seigneurs ont pris pour se fattribuer, est que le mineur n’étant pas en pouvoir de servir son Seigneur, le Seigneur doit joüir du fief pour se desinteresser ; Et d’ailsieurs on présumoit qu’il ne pouvoit être mieux instruit en lart militaire que par le Seigneur même qui en devoit tirer le service :Couvell . ibid.Chopin , Coûtume de Paris, l. 1. t. 1. n. 1. tient que la Garde-Noble est introduite afin que les Seigneurs ne fussent pas privez du service qui leur êtoit du pendant la minorité des pupilles.

Ce droit est en usage dans l’Angleterre et dans l’Ecosse ; il est assez obscur si nous lavons appris d’eux, ou s’ils l’ont recû de nous. Il est bien certain que les Ecossois ne nous sont point redevables de cette invention ; car Maleolin Il. qui commença de régner l’an mil quatre de Nôtre Seigneur, et qui ne regna que trerte ans, l’avoit établi dans l’Ecosse ; et le passage. de nôtre Guillaume le Conquérant en Angleterre ne fut qu’en l’année mil soixante : six. Rex Malleolinus ou Micolinus dedit et distribuit totam terram regni Scotiae hominibus suis, et nihil sibi rerinuit, nisi Regiam dignitatem, & montem Placiti in villà de Sconâ, et ibi Barones concesserunt illi Wardiam et rele vium de cujuscunque herede defuncti ad sustentationem Regis : Ils entendent par ce montem Placiti, le lieu où se jugeoient les procez, et aeù. la Cour et le Parlement du Roy se tenoit : etBuchanan , l. 6. histor. Scotiae, ajoûte que la Noblesse pour reconnoître la liberalité du Roy, consentit que quand quelqu’un tnouroit, ses enfans jusques à l’âge de vingt ns demeureroient en la Garde du Roy, qui joüiroit de tous leurs revenus, à condition de les nourrir et de les faire instruire, qu’il auroit seul le pouvoir de les marier, et que la dot luy retourneroit, ce que Buchanan confirme en la vie de Jacques I. lib. 1o Il est fort vray-semblable que ce droit s’établit aisément en Angleterre, à cause du voisinage et du commerce qui étoit entre ces deux Royaumes, ou peut-être que ce qui fut fait par Maleolin, n’étoit qu’une imitation de ce qui s’observoit en Angleterre ; en effet c’est l’opinion deBuchanan . Hunc morem à Danis et Anglis acceptum puto, quod in totâ Angliâ et parte Normanniae perseveret ; il se tiompe, car il a lieu en toute la Normandie.

Il pourroit être aussi que ce droit étoit déja établi en Normandie avant le passage de Guilaume, et qu’il le fit recevoir aux Anglois comme toutes les autres Coûtumes de Norman-die. On peut en rapporter cette preuve que le mot de Garde est François, Steneus l’avoue, Warda gallicum est verbum : illi enim Gardiam nos Wardam dicimus ; nam illis ( G ) nobis CW est in usu : illi enim i garentir ) nobis ( Warentixare ) illi ( garenne ) nobis ( Warenne ) illi ( garderobbe ) nobis marderobbe, illis ( Gardianus ) nobis ( Wardianus. ) Ce qui peut être confirmé par cette autre remarque, que presque tous les Articles de ce Titre sont conformes aux loix d’Ecosee : Steneus en a composé des regles, l. 2. Tit. 42.

Les Normans porterent encore depuis cette même Coûtume au Royaume de Naples, Matth. de Afflictis Constit. Neapol. l. 3. Tit. 23. et 27. de jure Balii, vide Thomam Smith Reip. Angl. l. 2. c. 4.