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CCLXVI.
Pendant la minorité des freres comment peuvent être mariées les seurs.
Le mariage de la fille ne doit être différé pour la minorité de ses freres : ains sera mariéé par le conseil des tuteurs et des plus prochains parens et amis, lesquels luy bailleront mariage avenant, sans qu’ils luy puissent bailler partage : et au cas qu’ils feussent baillé, le fils venant en âge le peut retirer, en baillant mariage avenant.
Cet Article est beaucoup plus équitable que le 261. On apprend par la l. 20. de nuptiis, quelles personnes on doit consulter pour le mariage des filles : In conjunctione filiarum in sacris positarum, patris expectatur arbitrium, sed sui juris si puella sit, ipfius quoque assensus exploratur ; si patris auxilio destituta, matris et propinquorum et ipfius quoque adulte requiratur judicium, si utroque orbata parente, sub curatoris defensione constituta sit & intra honestos competitores, matrimonii oriatur certamen, ut queratur cui potissimum puella jungenda sit, si puella cultu verecun-diae propriam noluerit depromere voluntatem, coram positis propinquis, judici deliberare permissum est cui melius societur.
Les sentimens de la mere et du tuteur êtant opposez, on demande lequel doit être suivi Cette question fut autrefois disputée à Rome avec beaucoup de chaleur : une fille d’une maison Plebeienne charma par sa grande beauté deux jeunes gens qui la voulurent épouser, lun qui Etoit de même condition que la fille avoit de son côté les tuteurs qui étoient aussi de même qualité, lautre êtoit noble et d’une naissance illustré, et la beauté de la fille étoit le seul motif de son amour. Il étoit appuyé par le party de la noblesse, et il avoir gagné les bonnes graces de la mere, qui désiroit passionnément une alliance si considérable. Les tuteurs au contraire témoignoient plus d’inclination pour un homme de leur party. L’affaire n’ayant pû s’accorder in jus b ventum est, et audito matris postulatu tutorumque, magistratus fecundùm parentis arbitrium dant li jus nuptiarum. Livius 1. Dec. l. 4. Mais aujourd’huy le mariage de la fille ne dépend pas seulement de la volonté de la mere ou du tuteur, on fait une assemblée de six parens paternels n et de six parens maternels, et le mariage s’acheve ou se rompt, selon le plus grand nombre de voix.
Si le tuteur ou les proches parens contre la défenfe qui leur est faite par cet Article donnent partage à la seeur en la mariant, il semble qu’ils ne peuvent commettre impunément cette faute, sur quoy lon peut former ces deux questions, si le mary peut les rendre garands et les de obliger à faire valoir le partage qu’ils luy ont promis, ou si les freres peuvent conclure conr’eux en leurs interests
Le mary paroit fort favorable ; car quelle excuse le tuteur et les parens peuvent-ils alléguer d’une contravention si formelle : Il est vray que regulierement les parens ne sont point garands. de leurs avis, et s’ils n’avoient fait qu’arbitrer le mariage avenant au de-là de la vraye valeur, on ne pourroit leur imputer de faute, parce que la valeur des biens êtant incertaine, il est mal. aisé de faire une estimation si juste qu’il n’y ait rien à dire, et c’est l’espèce de l’Arrest rapporté parBérault , où le tuteur et les parens n’avoient pas accordé partage à la soeur, le trere fe plaignoit seulement que les promesses étoient excessives, qu’il aimoit mieux recevoir sa seur à partage ; mais quand ils reservent la seur à partage, ils ne peuvent ignorer qu’ils outrepassent leur pouvoir, et qu’ils font une chose qui leur est défenduë par la Coûtume ; s’ils alléguent que le mary s’est trompé volontairement, puisqu’il a dû sçavoir que cette reservation à partage étoit nulle : on répond qu’un tuteur qui ne doit rien faire sans prendre avis, et des parens qui ont de l’experience sont beaucoup moins excusables qu’un jeune homme qui n’écoute que sa passion, et dont l’âge ne luy permet pas de sçavoir les Loix et les Coûtumes, Mais on répond pour le tuteur et les parens que le mary doit s’imputer son ignorance, la Coûtume étant publique il a dû la sçavoir, l’erreur de droit n’excuse personne, et comme il s’agissoit de son feul interest, et que les parens n’en tiroient aucun benefice, il n’a pû exiger d’eux des pactions inciviles et nulles, ce qui me paroit raisonnable.
a l’égard des frères la question est aisée à resoudre, la Coûtume leur donnant la faculté de revoquer ce que le tuteur et les parens ont fait, il est en leur pouvoir de reparer le préjudice qui leur a été fait, et ne le faisant pas ils s’en doivent imputer la faute, et non à ses parens.
Mais il reste encore cette difficulté touchant le temps dans lequel le frere est tenu de rer voquer ; il semble qu’il n’est pas necessaire de fixer un terme certain, parce qu’apparemment un mary ne tarde gueres à poursuivre ses droits ; neanmoins s’il ne le faisoit pas, il ne faudroit pas limiter cette revocation à une année, comme dans l’Article 254. parce que l’on ne doit pas avoir les mêmes égards pour les actions d’un tuteur comme pour celles d’un pere ; mais a au moins le frère est tenu d’agir dans les dix ans, qui est le temps ordonné pour revoquer les donations.