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CCLXX.

Les héritages en bourgage, comment se partagent entre freres et soeurs.

Les freres et les seurs partagent également les héritages qui sont en bourgage par toute la Normandie, mêmes au Bailliage de Caux, au cas que les filles fussent reçûës à partage.

Plusieurs ne considérant que les premieres paroles de cet Article, et ne faisant point de reflexion sur ces dernieres ( au cas qu’elles soient regües à partage ) sont tombez dans cette erreur, que les filles, quoy qu’elles ne soient point reçûës ou reservées à partage, prennent part également avec leurs freres aux héritages qui sont en bourgage ; mais ces mots ( au cas que les filles fissent reçûes à partage ) font bien connoître que les feuts ne partagent point avec leurs freres les biens qui sont en bourgage que quand elles sont reçûës ou reservées à partage : La construction de ce Article eût été plus nette en cette manière ( les seurs, quand elles sont reservées ou recûes à partage, nt part égale avec leurs freres aux biens qui sont en bourgage, ) et parce que cet Article ne donne partage aux filles reservées que dans les héritages qui sont en bourgage, et qu’elle ne fait aucune mention des meubles ; plusieurs sont encore tombez dans cette erreur, que les filles n’y peuvent avoir que le tiers ; c’est le sentiment de Godefroy et deBérault , dont le dernier a changé plusieurs fois d’avis : Sur l’Article 262. il donne aux filles une part égale aux freres, et sur l’Article 362. il rapporte l’Arrest de Voisin et Brice qui l’a jugé de la sorte. Sur cet Article il retracte son opinion et se fonde sur l’Arrest d’Alorge : Il s’est surpris comme plusieurs autres, pour n’avoir pas fait a différence dont je viens de parler. Au fait de l’Arrest d’Alorge les filles n’étoient pas reser vées à partage, elles n’avoient que leur mariage avenant, ainsi elles ne pouvoient avoir que le siers du meuble et de l’immeuble ; mais dans l’espèce de l’Arrest de Voisin elles étoient reservées à partage, et c’est un ancien usage en cette Province, comme on l’apprend de l’Atrest de Ricarville rapporté parTerrien Terrien , Tit. d’Echeance d’héritage en Caux Pour l’éclaircissement de la question : ceux qui donnent aux filles reservées une part égale dans les meubles alléguent que les meubles tiennent la même nature que le bourgage, lorsqu’il s’agit de les partager. Dans la Coûtume de Caux les ainez qui ont les deux tiers n’ont qu’une part égale aux meubles, et par l’Article 361. la fille reservée a sa part en la roture et autres biens, s’il y en a : Terrien Terrien rapporte l’Arrest de Ricarville, par lequel il semble que l’on ait ajugé part égale, et aprés l’Arrest de Voisin on n’a plus douté de cette vérité, et en effet il seroit ridicule de la faire partager également les biens en bourgage, et neanmoins ne luy donner que le tieri aux meubles : on cite au contraire les Articles 255. et 257. qui reduisent la part des filles au tiers, tant du meuble que de l’immeuble ; que si la Coûtume eût voulu leur donner une part égale aux meubles, elle se fût exprimée de la sorte, sinon jusqu’à la concurrence du tiers de l’héritage, et de la part qu’elles peuvent avoir aux meublts. Cet Article 270. restreignant la part égale aux filles. en ce qui est en bourgage, il les exclud de la part égale aux autres biens. Ce seroit une etreur de soûtenir que les meubles tiennent nature de bourgage, parce que situm non habent, et par Arrest en la Chambre des Enquêtes du mois de Mars 1643. au Rapport de Mi de Brevedent, il fut jugé que les seurs admises à partage par les creanciers n’auroient que le tiers, et non part égale : Le fait étoit que le sieur Malherbe avoit laissé un fils et cinq filles, et en moutant il leur lonna dix mille livres, qui étoit à chacune deux mille livres ; le frere mauvais ménager étant decreté, sans avoir payé le mariage des soeurs, elles demanderent les dix mille livres.

Ango decrétant et les créanciers soûtenoient la donation du pere excessive, consentant de les secevoir à partage, ce que les seeurs accepterent en leur donnant part égale aux meubles, sui vant cet Article et l’Arrest de Voisin : Les créanciers s’aidoient de l’Article 255. où les freres revoquant ce que le pere avoit trop donné sont quittes en leur baillant le tiers de l’héritage et des meubles, differans en ce point des filles reservées par le pere, lesquelles ont part égale. ux meubles suivant cet Arrest de Voisin.

l est aisé de concilier l’Article 255. avec l’Arrest de Voisin, en distinguant entre la reservation à partage faite par le pere, et le rappel à partage, ou la reduction demandée per le frère.

La réservation faite par le pere a cet effet de rendre les seurs égales aux freres pour le bourgage et pour les meubles : Le rappel à partage du frere, ou pour mieux dire la reduction qu’il demande ne produit pas cet effet, bien que le don du pere n’excede point ce que la fille auroit eu par le moyen de la reservation, toutefois le pere n’ayant point fait ni témoigné de vouloir faire cette reservation, il est reputé avoir laissé sa fille dans la disposition de cet Article 255. et c’est ce qui fut jugé par l’Arrest de Barberie, rapporté sur l’Article 254. Or l’Article 255. ne parlant point de la fille reservée à partage, il ne prouve pas que la fille réservée par le pere ne doive avoir que le tiers aux meubles, il ne s’entend aussi que des filles à qui le pere a promis quelque chose et qui n’a point été payé, alors la fille n’étant point reservée, et par consequent ne pouvant avoir que mariage avenant, il faut reduire ces promesses au tiers, comme on fit par cet Arrest de Barberie : il n’en est pas de même au cas de la reservation, car en rendant la fille habile à succeder, elle doit avoir une part égale aux meubles, puisque generalement entre tous coheritiers ils se partagent également ; autrement, comme j’ay déja dit, il seroit ridicule qu’elles eussent part égale en bourgage, et non point aux meubles que les loix ne considerent point quorum vilis et abjecta possessio. La Cour a terminé cette difficulté par l’Art. 49. de son Reglement Par un usage local du bourg de Bolbec il est dit que les freres et seurs partagent également les héritages situez dans ce Bourg. Susanne et Ester Gilles demandant leur legitime à leurs freres, une portion des héritages de la succession se trouva située dans Bolbec ; en procedant à l’arbitration du mariage avenant les parens y donnerent part égale aux seurs : Le Vicomte, sans avoi égard à cette arbitration, leur ajugea seulement le tiers de tout le bien. Sur l’appel des soeurs le Sailly cassa la Sentence, dont les freres ayant appelé, ils disoient que cet Article local ne devoi pas s’entendre comme s’il eût rendu les filles heritieres pour les biens dans Bolbec, lorsqu’elles ne sont pas réservées par le pere, parce qu’il seroit incompatible que dans une même succession une fille fût héritière en partie, et qu’en l’autre elle n’eût que mariage avenant ; que cet Article vouloit seulement enseigner qu’il y avoit bourgage dans Bolbec, et que quand la fille étoit reservée à partage elle y avoit part égale. Je répondois pour les seurs que cet usage de Bolbec devoit être considéré comme une Coûtume particuliere, et que s’il n’avoit eu d’autre fin que de donner à connoître qu’il y avoit bourgage dans Bolbec, on ne l’auroit pas employé comme une Coûtume locale ; comme on n’a pas fait mention de tous les autres lieux de la Province où il y a bourgage, que quand il donnoit part égale, c’étoit les appeler à la succession, autrement s’il n’avoit lieu qu’au cas de la reservation à partage, il êtoit superslu de l’employer comme ur usage local, puisque cet Article y avoit suffisamment pourvù : Par Arrest en la Chambre de l’Edit de l’Ir de Janvier 1658. on cassa la Sentence du Bailly, et celle du Vicomte fut confirmée On a douté comment les rentes sur le Roy devoient être partagées, et par Arrest dû à d’Aoust 1681. au Rapport de Mr de Sainte-Heléne, il fut jugé que les soeurs étant reçûës à partage, les rentes sur le Roy se partageroient suivant la Coûtume generale ; la discution pour sçavoir où est le Lien du Roy n’étant pas bienseante, et la Coûtume generale devant plûtost si être suivie, cet Arrest ne semble pas juste, suivant les raisons que j’en ay alléguées sur l’Aricle 329. où je rapporteray des Arrests contraites :. : Il n’en est pas de même des rentes qui a eroient dûës par des particuliers dont tout le bien seroit situé en bourgage, les filles reservées à partage y auroient une part égale à leurs freres.