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CCCIV.

Representation en ligne collaterale.

En succession de meubles, acquests, et conquests immeubles en ligne collaterale, representation a lieu entre les oncles et tantes, neveux et niéces, au premier degré tant seulement.

Le droit de representation a été introduit, afin que ceux qui ne peuvent succeder de leur chef puissent entrer en la place d’une autre personne qui êtoit capable de succeder, si elle êtoit vivante la representation est appelée l’image presente de la personne absente, reprasentatio dicitur absenti alicujus prasens imago.Hottoman . Controv. nepot. et patrui argum. 3. C’est un benefice pour succeder seulement et non pour exclure, parce qu’autrement on feroit concurrer deux graces singulieres et une double fiction.

Justinien Elle n’étoit point reçûe par l’ancien Droit Romain, Justinien l’établit en faveur des enfans des freres, mais elle ne passoit point plus loin ; et in Authen. post fratris filios. C. de legit. hered. ultra fratris filios reprasentationi non est locus.Cujac . in paratlit. ad Nov. 118.

La representation ne peut être que d’une personne morte et non d’une personne vivante,Tronçon , sur les Articles 319. et 322. Nota, dit du Du Moulin sur l’Article 241. de la Coûtume du Mayne, quod representatio nunquam est de persona vivente, sed tantum de parente mortuo naturaliter vel civiliter, l. 5. quâ penâ, de his qui sunt sui juris vel alieni : et c’est le sentiment de tous nos Auteurs, et la jurisprudence du Parlement de Paris est que la representation ne se fait jamais d’un homme vivant et habile à succeder, si le pere est vivant, si vivat adhuc & sit integri Status, bien qu’il renonce à la succession échûë, son fils ne prendra point sa place et n’entrera point en ses droits successifs, pour prendre part aux biens du défunt avec les autres heritiers plus proches en degré, et l’un des heritiers presomptifs renonçant, sa part accroit à ceux du même degré qui acceptent la succession, l. 51. pluribus. S. D. de suis et leg. Ce qui a lieu à plus forte raison en n digne collaterale ;Loüet , l. T. n. 41.Bacquet , des Droits de Justice, c. 21. n. 359.Chenu , E Centurie 2. 4. 23.Mornac , sur la l. si qua penâ, de his qui sunt sui juris vel alieni. De laLande , sur l’Article 304. de la Coûtume d’Orléans.

Me Josias Berault et M’Jacques Godefroy ont touché cette question sur cet Article : ce dernier a suivi la doctrine de nos Auteurs François, et la jurisprudence du Parlement de Paris pour les successions collaterales, pour lesquelles il n’admet point la representation d’une personne vivante ; mais pour la succession directe il estime, suivant l’autorité d’un Arrest qu’il a remarqué sur l’Art. 235. et que Berault a cité sur l’Art. 90. que par la renonciation du pere la succession a été transmise à ses enfans. Berault au contraire a été de ce fentiment, que la representation d’une personne vivante avoit lieu, et que le fils nonobstant la renonciation de sun pere êtoit admissible à succeder avec un plus proche, quasi subductâ personâ patris è medio. si l’on suit la raison, il est sans doute que la representation ne peut avoir lieu d’une personne vivante ; car étant une maxime cettaine que le plus proche exclud le pius éloigné, et la representation étant un privilege en vertu duquel un parent plus éloigné peut entrer en la place d’une personne qui n’est plus, et qui êtoit capable de succeder, il est impossible dé prendre cette place lorsque la personne est vivante, et qu’elle renonce à son droit ; ainsi ce parent étant plus éloigné, et ne pouvant être raproché par le benefice de la representation, parce que le degré est rempli par la personne vivante, il est absolument exclus par le plus proche parent du défunt, Il est vray qu’en ligne directe la representation a lieu à l’infini, mais cela s’entend dans le veritable cas de la representation, lorsque la personne que l’on veut representer est décedée ou morte civilement

L’on objecteroit inutilement que le droit du pere est transmis aux enfans, car outre que sul vant la disposition du droit, l’heredité déférée et non prise ne se transmet pas hereditas delata, non adita, non transmittitur, il y a grande différence entre le droit de representation et le droit de transmission, la transmission ne donne que le droit de celuy qui l’a transmis ; or celuy qui renonce n’ayant jamais rien eu à la succession, il ne peut l’avoir transmise à ses enfans, au contraire par la representation il prend la place de celuy qu’il represente, il entre dans tous ses droits, et il succede in gradum verius quam in locum, et remotivée non transmissivé, et parce que suivant le témoignage d’Hottoman , de Controv. nepotis & patrui, argum. 4. du Moulin a le mieux expliqué les differences de la representation et de la transmission, je rapporteray ses paroles : Dans la transmission l’on succede mediatement, et par le moyen de celuy qui transmet : dans la repre-sentation celuy qui succede immediatement vient à la succession de son propre chef et de sa personne, et ne reçoit rien du droit de celuy qu’il represente, in transmissione qui succedit mediati et ex personâ transmittente succedit : In reprasentatione qui succedit immediatè ex capite proprio et ex personà propriâ venit, et nihil juris accipit ab eo quem representat.Molin . de feud. 5. 22. n. 103. Il faut donc pour donner lieu à la transmission que la chose ait appartenu, et qu’elle ait subsisté quelque temps en la personne de celuy qui transmet.

L’Arrest de Revel que Me Jacques Godefroy a cité n’a pas jugé cette question, comme on e peut voir par les raisons que j’en ay rapportées sur l’Article 235. où j’ay aussi remarqué cet Arrest ; il s’agissoit de sçavoir si Laurens Revel ayant repudié la succession de son pere pouvoit la prendre sous le nom de son fils, qui n’étoit né ni conçû au temps de l’écheance d’icelle, mais qui la trouvoit encore jacente par benefice d’inventaire, au préjudice de Pierre Revel qui l’avoit acceptée : Pierre Revel ne pouvoit pas exclure le fils de Laurens Revel, comme étant le plus proche, parce qu’il n’étoit qu’un parent collateral, et l’autre demandoit la succession de son ayeul, de sorte qu’il venoit de son chef, et il n’avoit pas besoin de representer son pere pour exelure Pierre Revel, parce qu’il étoit encore plus habile à succeder que Pierre Revel, ainsi Godefroy ne devoit pas considerer cet Arrest, comme sil avoit jugé qu’en ligne directe l’on peut cepresenter une personne vivante.

En Normandie, suivant l’opinion la plus commune, il suffit, tant en ligne directe que collaterale, que l’on soit capable de venir par representation, et sans distinguer si la personne repre-sentée est morte ou vivante : la representation a toûjours le même effet, l’on confond ensemble les operations de la transmission et de la representation, et celuy qui peut representer un autre et entrer en sa place a les mêmes avantages qui luy eussent appartenu, si celuy qui renonce fût décedé avant l’écheance de la succession.

Car puisque suivant la plus grande partie des Loix et des Coûtumes, le droit de represens tation a parû si équitable, que dans la ligne directe il a été étendu à l’infini, et dans la ligne Collaterale au premier degré pour les meubles et acquests, afin que les enfans ne fussent pas privez par la mort prématurée de leur pere de ce qui luy eût appartenu, il n’est pas juste de restreindre un droit si favorable, et de ne luy donner lieu que dans le seul cas du decez de celuy que l’on veut representer ; c’est mal expliquer l’intention des Loix et contrevenir à leur fin : La representation n’est introduite que par un principe d’équité, pour mettre les enfans en la place de leur pere, que si le pere vivant ne veut point se prévaloir de son droit, il ne doit point faire li d’obstacle à ses enfans, et quoy que la representation ne se fasse ordinairement que d’une personne absente ou qui n’est plus, neanmoins celuy qui ne veut point être heritier ne doit plus être considéré en cet égard que comme s’il n’étoit plus dans l’être des choses.

Neanmoins le contraire a été jugé en la Chambre de l’Edit le 23 de Juillet 1654. et même pour une succession directe. Henry, Pierre et Michel de Bauquemare étoient frères ; aprés le decez de Henry sans enfans, Michel se déclara heritier, mais Pierre renonça à la succession, et comme créancier il fit saisir les biens de la succession. Aprés sa mort Tobie, son fils, demanda part en la succession de Henty son oncle : la veuve et les enfans de Michel luy opposerent qu’il ne pouvoit venir à la representation de son pere, puisqu’il étoit vivant lorsque la succession fut ouverte, et qu’il n’y avoit jamais de representation d’une personne vivante, que son pere ayant renoncé et étant son heritier il étoit tenu de ses faits, que son pere avoit pû ne prendre pas la succession qui luy étoit échûë, et qu’il n’avoit point d’action pour s’en plaindre. ur tout ne venant demander cette succession qu’apres vingt ans que son pere l’avoit repudiée. lobie de Bauquemare répondoit que s’agissant d’une succession de propres, il y avoit representation à linfini, que le pere par sa renonciation étoit reputé comme mort, celuy qui renonce est censé comme s’il n’avoit jamais été, abstinens censetur tanosssim si nunquam fuisset, dit du Moulin ; et comme son pere n’auroit pû faire préjudice à ses créanciers par sa renontiation, il pouvoit beaucoup moins faire tort à ses enfans : Tobie de Bauquemare avoit été debouté par le Bailly des Lettres de restitution qu’il avoit obtenuës, par l’Arrest la Sentence uut confirmée : On peut douter si par cet Arrest la Cour a décidé la question, car en conse uence de la renonciation faite par Pierre de Bauquemare, Michel avoit pris la succession entière, et le fils de Pierre ne venoit qu’aprés vingt ans de paisible possession que Michel avoir euë, de sorte que son filence faisoit présumer qu’il auroit abandonné son droit quand même il eût été capable de succeder.

La connoissance de la ligne et du dégré étant si necessaire pour le partage des meubles et des acquests, il ne sera pas inutile d’expliquer ce que les Jurisconsultes appellent ligne et degré en matière de successions.

La proximité procede de la consanguinité ou de l’affinité, en l’une et l’autre l’on considère la ligne et le degré, la ligne est un dénombrement des personnes conjointes par la consanguinité, et qui décendent d’une même fouche, et qui contient divers degrez : Linea est ordinata collecti personarum consanguinitate conjunctarum et ab eodem stipite descendentium gradus continens diversos Zepperus Cepperus, in explanat. Legum Mosaic Mosaic. l. 4. c. 19.

Il y a trois lignes differentes ; la première, des ascendans ; la seconde, des décendans ; et la troisième, des collateraux : La ligne des ascendans est celle qui remonte du fils au pere, à l’ayeul au bisayeul, et autres ascendans : La ligne des décendans, au fils et petit-fils : La collaterale. se separe tantost d’un côté et tantost de l’autre, que ex opposito latere nunc seorsum, nunc deorsun spectat, et elle est double, égale ou inégale. Elle est égale lorsque les degrez sont également éloignez de la souche commune, comme le frère et la soeur, le cousin germain paternel, et le cousin germain maternel. Elle est inégale lorsqu’une personne est plus proche que l’autre, ou qu’elles sont inégalement éloignées de la souche commune.

Le degré fait connoître en quelle distance d’agnation ou de cognation deux personnes se touchent. Les Canonistes définissent le degré en cette manière, c’est un état des personnes distantes par lequel on connoit de quelle distance d’agnation et de cognation deux personnes sont éloignées entr’elles, est habitudo distantium personarum, quâ dignoscitur quotâ agnationis vel cognationis distantiâ duae persona inter se differant. Les Docteurs du Droit civil disent que le degré n’est rien autre chose que la generation, en sorte que l’ordre des degrez est la suite des generations, gradus nihil aliud est quâm generatio, ut graduum ordo sit generationum series, et c’est pourquoy le Droit Canon et le Droit civil comprent les degrez si differemment ; ils conviennent dans la ligne des ascendans et des décendans qu’il y a autant de degrez que de per-sonnes, en n’y comprenant point la souche, ce qui a donné lieu à cette regle de Droit, comptez les generations et vous avez trouvé les degrez, numera generationes & gradus invenisti mais ils sont fort differens dans la ligne collaterale pour la supputation des degrez, le Droit civil compte les personnes, et le Droit Canon les generations ; et pour ne s’y tromper pas dans la ligne égale les Canonistes ont établi cette regle, que d’autant de degrez qu’une des deux personnes est distante de la souche commune, elles sont éloignées entr’elles d’autant de degrez, in lineâ aquali quoto gradu distat altera persona à communi stipite, toto gradu inter se distant

Dans la ligne collaterale inégale, le Droit Canon et le Droit civil sont presque semblables ; les Canonistes posent pour principe, que du même degré que la plus éloignée de deux personnes s’est distante de la souche commune, elles sont éloignées entr’elles du même degré, quo gradu remotior distat à communi stipite, eodem etiam inter se distant.

On compte les degrez tant pour l’affinité que pour la consanguinité : les personnes sont conjointes par la consanguinité lorsqu’elles décendent d’une même fouthe, la consanguinité est un lien de personnes décendantes de la même souche, formé par la copulation de la chair et s’appelle comme une unité de sang, consanguinitas est vinculum personarum ab eodem stipite desrendentium carnali copulatione contractum, & dicitur quasi sanguinis unitas, et l’on appelle souche la personne dont tous les autres ont tiré leur origine.

La consanguinité est double, l’agnation et la cognation ; l’agnation est entre ceux qui sont conjoints du côté du pere, et la cognation entre ceux qui sont conjoints du côté de la mère.

L’affinité est une proximité de personnes qui procedent d’un mariage legitime, et elle est ainsi appelée, quasi duorum ad unicum finem unitas ; mais l’affinité n’est point considerée pour les uccessions, par le droit d’affinité aucune succession n’est pei mise, affinitatis jure nulla permittitura successio.

C’est une regle qu’en succession d’acquests on ne régarde point à la ligne, si elle est paternelle ou maternelle, on considere seulement la personne qui est la plus proche, mais en parité de degré les paternels sont preferez aux maternels

Mais bien qu’il soit vray que pour succeder aux acquests on ne considere point la ligne paternelle ou maternelle, mais la seule proximité, il y a neanmoins trois exceptions à cette regle : la première, que dans la ligne des décendans les ascendans, nonobstant la proximité, sont soûjours exclus par les décendans : la seconde est fondée sur la representation ; et la troisième sur l’Article 310. qui préfere les paternels en parité de degré, à la reserve des exceptions portées par les Articles suivaus.

La premiere exception merite qu’on y fasse de la reflexion, surtout parce que nôtre Coûtume est contraire à la pluspart des autres, qui ajugent aux peres et meres la succession de leurs enfans au préjudice des freres et seurs du défunt ; on la comprendra plus aisément par les exemples suivans.

SOEURS.

Madeleine Safray.

Catherine Safray mariée à Cyprian

Auvray, de ce mariage nâquirent

Jacques Auvray, sieur de

l’Escarde.

Madeleine Auvray, femme de

Germain Alain.

Cardine Alain, femme de Pierre

Voisvenel.

acques, Germain, Pierre, et Made-

leine Voisvenel, arrière-neveux de

Jacques Auvray.

Il étoit question de la succession aux meubles et acquests de Jacques Auvray : Marguerite Auvray, sa tante maternelle, la prétendoit : Jacques, Germain, et Pierre Voisvenel, ses petitsneveux, soûtenoient qu’elle leur appartenoir : La tante alléguoit cette regle, que la succession aux meubles et acquests est toûjours déferée au plus proche, que les arrière-neveux ne pouservoient se prévaloir de la representation, puisqu’elle n’a lieu qu’au premier degré et quand ils soûtiennent qu’en effet ils ne viennent point du chef de leur mère, mais par leur propre droit et du chef de leurs personnes ; on répond que la Coûtume par les six premiers Articles de ce Titre, déclare expressément qu’elle ne connoit point d’autre moyen pour succeder en un degré plus éloigné, que par celuy de la representation de la personne qui faisoit le degré plus proche, et c’est par cette raison que les enfans venans au droit de leur pere succedent par souches et non par testes ; la representation ne raproche que pour le premier degré, conformément à l’Authentique de hered. ab intestat. Nous avons donné ce privilege aux fils du frère et de la seur, venans à la succession en la place de leurs premiers parens ; êtans au troisième degré ils sont appelez à la succession avec ceux qui sont au second, venientibus fratris & sororis filiis tale dedimus privilegium, ut in priorum parentum locum succedentes in tertio constituti gradu, cum iis qui sunt in secundo ad hereditatem vocentur ; mais ce privilege ne s’étend point plus outre : Elle s’aidoit de l’Arrest de Sandouville rapporté par Berault sur l’Art. 310. par lequel la succession des meubles et acquests de Jean de Bavent fut ajugée à Pierre de Sandouville son oncle maternel, au préjudice de Pierre de Bavent son cousin germain : Elle citoit aussi celuy de Caillot, remarqué par le même Auteut sur l’Article 248. par lequel la succession des meubles et acquests fut ajugée à Bethencourt au préjudice d’un cousin germain.

La même Authentique ajoûte, mais si le défunt n’a laissé ni fteres ni fils de freres, nous appelons en suite à la succession les collateraux, selon la prerogative de lun et fautre degré, si vero neque fratres neque filios fratrum defunctus reliquerit, omnes deinceps à latere cognatos ad hereditatem vocamus, fecundum utriusque gradus prarogativam : Enfin la Coûtume ancienne et nouvelle n’ont point fait de distinction entre le mâle et la femme, considerant seulement la pro-ximité du degré, à quoy la Coûtume de Paris est conforme, Art. 325. et 329.

Les arrière-neveux répondoient qu’encore que la Coûtume n’eût point expressément décidé cette question, elle est neanmoins assez expliquée par l’ordre de succeder qu’elle a prescrit, pere, mere, ayeul et ayeule, tant qu’il y a quelqu’un décendu d’eux, ne peuvent succeder à’un de leurs enfans, et bien que les Articles qui établissent cette loy soient compris sous le Titre de Succession au Propre, on ne doute point qu’ils ne s’observent pour celle des meubles et acquests, parce qu’il n’y a aucune raison de difference, et qu’il n’y a point d’Article contraire dans le Titre des Successions Coûaterales ; c’est encore une vérité incontestable que l’Article 242. par lequel les peres et meres excluent les oncles et tantes de la succession de leurs enfans, s’entend également des acquests comme des propres : D’où il resulte que si Catherine Safray, mère de Jacques Auvray, vivoit, elle ne pourroit succeder au préjudice de ses petits enfans, suivant à l’Article 241. et néanmoins elle auroit cette même succession au préjudice de Marguerite Safray, suivant l’Article 242. Il est donc vray de dire que tant qu’il y a des freres et seurs, ou de leurs décendans, la succession ne peut remonter aux oncles, tantes ou autres ascendans. La Coûtume a appelé, tant en la ligne directe qu’en la collaterale, tous les décendans avant que de retourner à aucun ascendant ; cela paroit par l’ordre de succeder établi par ce Titre, où l’on regle la manière de succeder par les freres et soeurs, les neveux, arrière-neveux, et auires collateraux, ou collateralement décendans, avant que de toucher au droit des pere, mere, ayeul ou ayeule et en dernier lieu celuy des oncles et des tantes. Si la succession aux meubles et acquests appartenoit toûjours au plus proche parent, la mère seroit preferée aux neveux et arrière-neveux, et neanmoins elle est excluse par eux : La proximité du degté ne confond point la ligne des décendans avec celle des ascendans, c’est la distinction que l’on fait en l’Arrest de Gladain cité par Berault sur l’Article 310. où une niéce mâternelle fut preferée à une tante paternelle par cette consideration, que le pere et la mere du défunt eussent été exclus par la niéce, et lesquels pere et mere eussent êté de leur part preferez à la tante : et pour les Arrests de Caillot et de Bethencourt, ils n’avoient point de rappoit à la question, c’étoit un oncle que l’on jugeoit plus proche qu’un cousin germain, mais on ne parloit point d’un neveu ou arlière-neveu de celuy dont on disputoit la succession ; le cousin ne nous est conjoint que par l’ayeul, d’où il s’ensuit qu’il est nôtre parent en la ligne des ascendans aussi-bien que nôtre oncle ; or êtans tous deux en la ligne des ascendans, et l’oncle plus proche d’un degré, la succession luy appartenoit sans difficulté, mais on n’a jamais jugé qu’un de la ligne des décendans soit exclus par un des ascendans, quelque proche qu’il soit : Quand on a jugé par les Arrests de Caillot et de Bethencourt que les oncles étoient preferables aux cousins en la succession de leurs neveux, on s’est fondé lur cette raison, que les cousins ne pouvoient concutrer avec leurs oncles que par le benefice de la representation, mais elle ne pouvoit leur servir, parce qu’ils étoient hors le premier degré, ainsi si ces arrière-neveux n’aspiroient à cette succession que par cette voye, elle leur seroit fermée, mais ils la de mandent de leur chef au defaut des freres et des neveux du défunt qui n’en a point laissé. Cette affaire ayant été partagée en la Grand. Chambre et en celle des Enquêtes, et le partage ayant été décidé les Chambres assemblées le 21 de Février 1633. la succession aux meubles et acquests fut ajugée aux arriere, neveux.

Cet Arrest de l’Escarde a fait de la peine à plusieurs qui n’en pouvoient faire la distinction, comme il parût en cette rencontre.

Margderite Guerin, seur de

Marie, demande la succession

aux meubles et acquests de

Pierre Duchemin.

Pierre Duchemin,

nary de Marie.

Guerin.

Nicolas Duchemin.

Pierre Duchemin,

de la succession du-

quel il s’agit.

Abraham et Jacob Duche-

min, demandans la suc-

ession des meubles et ac-

quests de Pierre Duche-

min.

Marguerite Guerin demandoit la succession, parce que c’étoit une regle qu’en la succession collaterale des meubles et acquests, hors le premier degré où la representation est re-çûë, celuy qui se trouve le plus proche parent, sans distinction du paternel ou maternel,’est le plus habile à succeder ; or étant tante paternelle elle excluoit les Duchemin, qui n’étoient que cousins germains du défunt, et par consequent hors le dégré de la representation : L’affaire ayant été portée en la Chambre des Enquêtes, elle y fut jugée aprés avoir consulté la Grand. Chambre à cause de la diversité de quelques Arrests, et notamment de celuy du sieur de l’Escarde ; et par Arrest du 21 de Mars 1659. au Rapport de Mi Bretel, la succession aux meubles et acquests fut ajugée à Marguerite Guerin, à l’exclusion d’Abraham et Jacob Duchenin, et aprés avoir vû un Arrest pareil donné au Rapport de Mr Côté. La différence de cet Arrest d’avec celuy de l’Escarde, est que Marguerite Safray, grand tante du sieur de l’Escarde, quoy que plus proche parente, ne luy êtoit neanmoins conjointe que par la bisayeule des arrière.

neveux, lesquels au contraire quoy que plus éloignez étoient conjoints au défunt par Marie.

Safray sa mere, et leur ayeule qui étoit leur souche commune, et par cette raison comme ils étoient dans la ligne des décendans ils furent preferez à leur grand-tante, et par consequent il faudroit que les Duchemin pour être dans l’espèce de ces arrière-neveux fussent décendus de Marie Guerin ; car alors décendant d’elle aussi-bien que Pierre Duchemin, ils auroient exclus la tante, nonobstant la proximité, parce qu’ils se seroient trouvez dans la ligne des décendans. mais n’étant conjoints à Pierre Duchemin, de la succession duquel on disputoit, que par Nicolas Duchemin, ils étoient dans la regle ordinaire des collateraux, où le plus proche l’emporte sans distinction de ligne

Cette question s’offrit en la Grand. Chambre Prr de Mars 1653. Mathurin Jean eut un fils et deux filles, du fils sortit une fille, et de l’une des filles un garçon ; aprés la mort de Pierre, fils de Mathurin Jean, sa fille étant morte et ayant laissé quelques acquests, sa succession fut prétenduë par sa tante qui êtoit soeur de son pere, et par son cousin germain fils de son autre tante : La question étoit de sçavoir si la tante en la succession des meubles et acquests de sa niéce excluroit son neveu, cousin germain de la défunte. Le Vicomte et le Bailly d’Orbec avoient jugé qu’ils succederoient également : Sur lappel de la tante, Cavelande, son Avocat, se prévaloit de sa proximité, et puis-que, cet Article n’admet la representation qu’au premier degré, le cousin germain ne pouvoit venir à la succession de son cousin germain, car sa mere n’étoit pas au premier degré, mais au second imparfait, qui ne peut être representé ; la tante est en pareil dégré que la mere du cousin ermain qui auroit exclud son fils : or suivant la maxime, si je concutre avec celuy qui vous devance, par la même raison je vous devance, si concurro cum vincente te, pari ratione vinco tes et ce qui confirme que l’oncle et le neveu, l’oncle et la niece sont plus proches que le cousin germain, c’est que le Pape peut dispenser entre ceux-cy et non pas entre ceux-là, vide l. avunculo. C. communia de Succ. Lyout soûtenoit que le cousin germain y venoit de son chef, que le premier degré en ligne collaterale ne pouvoit être que suivant la supputation canonique, qui ne fait qu’un degré de deux personnes : La cause fut appointée au Conseil, et depuis la question a été décidée par l’Arrest de Quillet, dont je rapporteray l’espece.

TABLEAU DE GENEALOGIE.

D’André Quiller et de Catherine Farcy étoient issus trois fils et trois filles.

Jeremie décedé a

aissé

Jean décedé avoit laissé

André décedé

à laissé

Jeremie, et autres

enfans.

André, de la succession aux

meubles duquel est question.

André et Jean-

Cilles d’André Guiller et de Catherine Farcy.

Marie décedée a

jaissé

Madeleine vivante, qui est

la demanderesse.

Renée décedée

a laissé

François et Guil-

laume.

Loüis et Fran-

çois.

Entre Madeleine Quillet, veuve de défunt Me Michel du Perche, sieur de la Bretonniere, demanderesse en ajournement en vertu du Mandement de la Cour du seizième jour de Mars dernier, present M. François du Perche, sieur des Essars, Conseiller Assesseur au Bailliage. et Vicomté d’Alençon, son petit-fils ; et par Me Jacques Baril son Procureur, d’une part, et Me Jeremie Quillet Prestre, Prieur de S. Gilles ; Louis, Michel, Nicolas Brice, et Jean Quillet, fils de défunt Me Jeremie Quillet, sieur de la Croix-Christ ; Me André Quillet, sieur de Vaurattier, Conseiller au Bailliage et Siege Presidial dudit Alençon ; et Jean Quillet, sieur de la Guitonnière, fils de défunt Me André Quillet ; Me François Richer, Tresorier de France en la Genéralité dudit Alençon, et Guillaume Richer Prestre, Curé de Condé, enfans de défunte Demoiselle Marie Quillet ; et Mes Loüis et François du Perche, ensans de défunte Renée Quillet, presens lesdits Jean Quillet, fils de Jeremie ;. et Me André Quillet, fils d’André, défendeurs, et par Me Jacques Robert leur Procureur, d’autre part ; en la presence de Julien du Bois, par Me Hervé Bloche son Procureur, d’autre part, ouis. Me Loüis Greard, Avocat pour ladite demanderesse, qui a dit qu’il est question de la succession aux meubles et acquests de défunt André Quillet, son neveu, fils de Jean son frere, qu’ayant irvécu Jeremie, ledit Jean, André, Mafie, et Renée, ses freres et seurs, tous sortis d’Andre Quiller et de Catherine Farcy leurs pere et mére communs, elle est la plus proche parente dudit défunt son neveu, seule dans son degré, et vient à ladite succession des meubles et acquests de son neveu par préference aux défendeurs ses arrière-neveux : Pour parvenir à le delivrance desdits meubles et acquests, dont les défendeurs, heritiers aux propres paternels, se seroient emparez aprés le decez dudit défunt, ladite demandéresse les fit convenir devant de Vicomte d’Alençon, et à son assignation joignit les Lettres de restitution par elle obtenues en la Chancellerie de la Cour le douzième de Février dernier, aux fins de lever l’objection de quelques actes que les parties averses luy avoient fait pratiquer pendant les quarante jours du decez, sçavoir de s’être jointe avec eux à une Requête, pour obtenir des Censures Ecclesiastiques contre ceux qui auroient pillé ladite succession, à la confection de linventaire, d’avoir fouffert qu’ausdits actes ils eussent pris qualité d’habiles à succeder, et consenti qu’ils prissent part à quelques grains trouvez dans les greniers, et en consequence aprés finstruction faite du procez ne s’étant trouvé de Juges audit Alençon à raison de leurs parentelles avec les parties, en vertu dudit Mandement de la Cour la demanderesse auroit fait donner assignation ausdits défendeurs à ladite Cour pour y être jugez ou reglez : comme il ne s’y agit que d’un point de Coûtume, dont il a été conféré à Messieurs les Gens du Roy, laffaire est en état d’être jugée définitivement au principal : Il est donc soûtenu que ladite demanderesse, comme plus proche parente dudit défunt que les défendeurs, doit être preférée dans la succestion des meubles et acquests, que la representation de leurs peres et meres n’est point admissible pour prétendre participer, et que la question est décidée par la Cour et par les Arrests Que la demanderesse soit la plus proche parente du défunt, il n’est pas possible de le contester, puisqu’elle est tante et tient encore du premier degré sur le défunt, au lieu que les dé-fendeurs ne sont que cousins germains, partant seulement au second degré, et hors le cas de la representation renfermée par l’Article 304. de la Coûtume au premier degré seulement, c’est à dire pour la succession d’un oncle, suivant les Articles 305. 306. et 307. qui en font s’exposition ; c’a toûjours été par la plus immediate proximité que s’est reglée en cette Province, la preference de succeder aux meubles et acquests en ligne collaterale, l’ancienne Coûtume n’y admettoit aucune representation ; la nouvelle en a introduit une par ledit Article 304. au seu cas de la succession d’un frère, à laquelle la tante, sour du défunt, rappelleroit les enfans de ses freres et seurs décedez, qui representeroient leurs peres et meres au premier degré, auquel ils auroient été avec le défunt, et cette disposition est restreinte au premier degré, si bien que dans la succession d’un neveu uhe tante, telle que la demanderesse, à l’égard des défenleurs, leurs neveux, rentre dans llusage de la regle generale pour les exclure absolument.

Or la dignité des mâles ne donne aucune preference aux défendeurs, effans des freres, n’5 ayant pas d’autre regle de succeder en telle rencontre que la plus grande proximité du défunt au vivant, sans distinction de sexe ni de ligne, soit paternelle, soit maternelle, hors le cas de parité de degré, dans lequel les paternels sont preferez aux maternels, les frères, les soeurs, les décendans des frères et des soeurs, par les Articles 310. et 317. ainsi le décendu d’une seur precede le décendant du décendu d’un frère, comme il fut jugé par Arrest au sujet de la succession du sieur Chevalier Prestre, rapporté sur ledit Article 317. En effet les oncles et les tantes son mis en pareil ordre par lesdits Articles 304. et 308. pour succeder par les tantes, lorsqu’elles n’en sont point empeschées par leurs freres vivans, sur tout aux meubles et acquests d’un neveu, au préjudice des cousins germains, par la même raison pour laquelle les nommez Sandouville et dethencourt, oncles maternels, ont par deux Arrests rendus en divers temps été prefèrez dans les successions de meubles et acquests de neveux aux cousins germains paternels du défunt, arce que les deux cousins germains paternels étoient dans un plus grand éloignement que esdits oncles, et hors le cas de la representation ; car s’ils avoient été au cas de la representation du degré de leur pere, comme paternels, ils auroient préféré lesdits maternels par l’Article 31oII ne se peut cotter ni Article de Coûtume, ni Arrest qui resiste à ces maximes : Les défendeurs mêmes tombent d’accord par leur éciit de réponse que ledit Dubois, oncle maternel du défunt, les eût exclus desdits meubles et acquests, si la demanderesse fût décedée, et comme elle exclud ledit Dubois, oncle maternel dudit défunt, qui les eût exclus, il en faut conclure qu’elle en exclud les défendeurs, si je prefere celuy qui vous prefere, à plus forte raison vous preférée je ; si vinco vincentem te, fortiori ratione vinco te. Au reste c’est une erteur fort grosçiere aux défendeurs d’avoir soûtenu que le premier dégré ne s’entend pas de l’éloignement qui est entre le défunt et son heritier mais de celuy qui se trouve entre ceux qui succedent ou prétendent succeder ; car par lesdits Articles 305. 3c6. et 307. il paroit que le frère est le terme de la capacité de succeder au cas y reféré, il se doit entendre de même des autres cas, et il s’ensuivroit autrement que des personnes éloignées du défunt de cinq degrez et d’un degré entr’eux succederoient par souches et par representation, ce qui est absurde et contraire aux Articles 317. et 320. de la Coûtume ; davantage si ladite representation de l’Article 304. avoit lieu ailleurs que dans la succession d’un oncle, il s’ensuivroit qu’elle auroit lieu jusques à un infini ; car le fils diroit qu’il representeroit son pere, et ce seroit abroger l’Article 304 ce seroit détruire la regle generale qui attribué hors le cas de representation au premier degré cette succession à la personne plus proche du défunt, l’expression de ladite representation qui ne peut avoir effet qu’en succession d’oncle est donc l’exclusion des défendeurs dans la succession de défunt leur cousin, aux termes mêmes de l’Article 243. de la Coûtume, les oncles et tantes exeluent les cousins en la succession de leurs neveux et niéces, que plusieurs entendent de ladite exclusion des neveux par la tante, jugeant que ledit Article auroit été transposé et mal lacé au Titre de Succession en Propre, où il ne peut pas avoir de sens bien naturel et conforme à la Coûtume, il ne se peut rien opposer à des maximes si constantes et si bien établies ; car quand les défendeurs objecteroient comme ils firent lors de la conference du Parquer, que par Arrest du 21 de Février 1633. la succession aux meubles et acquests du sieur de l’EscardeAuvray fut ajugée à ses arriere, neveux par prefetence à une tante du défunt, la difference s’y trouve bien grande, en ce que la tante du sieur de l’Escarde ne luy étoit jointe que par sa mère ; la demanderesse est jointe au défunt son neveu par André Quillet et Catherine Farcy ses pere et mere, ayeul et ayeule : En second lieu dans la ligne dudit sieur de l’Escarde sesdits arrière-neveux luy renoient lieu de décendans, étant petits-fils de Madeleine Auvray sa soeurs les défendeurs ne sont pas sortis et décendus de soeurs ou niéces du défunt, le défunt les avoit tous survécu, ils ne sont que cousins germains ; l’Arrest ne vient donc nullement au cas de cette question, mais il est tres-conforme à l’esprit de la Coûtume, qui ne donne point de succession aux ascendans que lorsque la ligne des décendans est épuisée, à quoy il seroit nutile aux défendeurs de répondre qu’ils tiennent lieu de décendans au défunt, car ils ne le peuvent montrer, et il n’est pas vray, ne leur êtant joints que par leur ayeul et ayeule commune, et ainsi en ligne d’ascendans aussi-bien que la demanderesse, laquelle neanmoins les prefere dans cette ligne d’ascendans ; parce qu’elle est plus proche qu’eux, qui au respect d’André Quillet et de Catherine Farcy ne seroient qu’au troisième degré. Pour ces raisons est concludS ce qu’il soit dit que ladite Madeleine Quillet demanderesse sera remise en tel état qu’elle étoit avant les actes mentionnez ausdites Lettres, qu’à ce moyen elle aura delivrance des meubles et acquests dudit défunt à lexclusion des défendeurs, avec dépens de la contestation De Cahagnes pour les sieurs Quillet maintenoit que si la prétention de Madeleine Quillet avoir dieu, et qu’elle seule succedût à son neveu pour les meubles et acquests, il faudroit effacer de la Coûtume les Articles 305. 306. et 307. qui disposent que les tantes ne sont excluses par les neveux, comme elles leussent été par leurs peres, mais qu’ils succedent par southes avec leurs tantes.

La disposition de ces Articles étant précise, la demanderesse linterprete à sa mode, et dit que tes Articles ne doivent être entendus qu’au cas de la succession d’un oncle et non du cousin, qui est une interpretation qu’elle fait à sa mode, contraire aux termes précis de la Coûtume, qui ne distingue point, mais qui parle en termes generaux, et dispose pour les successions collaterales, Aussi la demanderesse pour établir cette distinction fait une supposition, et dit que lesdits sieurs Quillet sont reculez d’un degré et hors la representation, ce qui n’est pas véritable, les peres desdits sieurs défendeurs seroient venus de leur chef à la succession dudit André, quand lesdits sieurs Quillet viennent à cette succession à la representation de leurs peres, c’est au prenier degré

Il est bien vray que si les enfans desdits sieurs défendeurs venoient à demander la succession dont il s’agit à la representation de leurs peres, étant en un degré plus éloigné, in gradu remotiori ils seroient hors le degré de representation

La prétention de la demanderesse seroit d’une étrange consequence la Coûtume de Normandie est pour les mâles et les décendans des mâles, elle les prefere aux femelles ou à leurs dé-cendans ; cependant cette tante qui n’est plus de la famille veut exclure les enfans de ses freres, ce qui a lieu aussi-bien en succession collaterale que directe, et ce qui paroit par l’Arrest rendu par la Cour, les Chambres assemblées, le 21 de Février 1633. où les Arrests de Bethencourt et Sandouville rapportez par le Commentateur, et dont la partie averse fait force, sont induits, par lequel Arrest la tante est excluse de la succession de son neveu par des arrière-neveux, Cette question est tres-bien expliquée et tres-bien resolue par feu Mr l’Avocat General le Guerchois, dans son Plaidoyer inseré à la fin de la Coûtume commentée parBerault , de l’Edithion. de l’année 1648. quand il dit que les successions sont comparées à des ruisseaux qui coulent toûjours et ne remontent jamais, et qui par un voeu commun de la nature doivent toûjours tomber aux enfans ou à ceux qui tiennent lieu d’enfans : ainsi telles successions doivent être reglées par l’Article 241. de la nouvelle Coûtume conforme en cet égard à l’ancienne, qui dispose que l’héritage doit décendre à celuy qui est le plus proche en lignage, sans faire distinction ni de ligne directe ni de collaterale : et comme dans la ligne directe aussi-bien qu’en la ligne collaterale il y a un degré superieur et un degré inferieur, si la prétention de la demanderesse avoit lieu, ce seroit déroger non seulement aux droits de la nature, à la disposition de ces anciennes Coûtumes et nouvelles, mais encore à l’interest public, qui ne permet pas de ransporter les biens en des familles étrangeres, au préjudice de legitimes heritiers du nom ou digne de ceux dont l’héritage est procedé.

quant aux Arrests de Bethencourt et de Sandouville rapportez sur les Articles citez, et dont la demanderesse fait tout le fondement de sa prétention, ils ne sont nullement au cas de la question dont il s’agit par trois raisons particulieres.

Premierement, il est constant qu’il y a de deux sortes de supputations de degrez, sçavoit la supputation civil et la Canonique ; par la supputation civil autant de personnes sont autant de degrez, quot persona tot gradus : Or comme André Quillet semble être décendu d’un degré, et par consequent in remotiori, et ulteriori gradu, si ces degrez se comptent par celuy qui décede, il est certain que la prétention de la demanderesse est incontestable Mais si l’on considère la supputation Canonique qui est la regle des successions, et la supputation que l’on suit, il est cettain que la demanderesse n’est point dans un degré plus proche du défunt que les défendeurs, puisqu’il faut deux personnes pour faire un seul degré. pur quoy l’on doit faire encore une consideration, qui est que la demanderesse n’a point quitté le premier degré sur son neveu de la succession duquel il s’agit.

Or comme il ne s’agit pas de representer la personne décedée dont la succession aux meubles est en litige, mais ceux qui seroient venus à cette succession, et qui en auroient exclus le lemanderesse s’ils avoient été vivans, et qui seroient aussi bien qu’elle encore au premier degré avec le défunt suivant la supputation Canonique comme sont les peres des défendeurs, il n’y a pas lieu de dire que les défendeurs soient hors le cas de la representation comme ils le font suivant la supputation civil

La seconde raison pour laquelle lesdits Arrests de Bethencourt et de Sandouville ne sont l’aucune consideration, resulte de ce que Bethencourr et Sandouville étoient les oncles mater nels de Bavent et Caillot, et par consequent dans une branche et dans une ligne étrangere. dans laquelle ils ne pouvoient rappeler ni Bavent ni Caillot

Mais cecy ne se rencontre pas dans la question qui se presente, puisque la demanderesse à dans sa ligne des neveux qu’elle rappelle, ayant toûjours conservé le premier degré sur André Quillet décedé, et qui ont encore plus de droit qu’elle dans la succession dont il s’agit, non seulement parce qu’ils representent leurs peres qui l’auroient excluse, mais encore par la raison de la dignité de leur sexe, par la faveur de l’ancienne et nouvelle Coûtume, et par la maxime generale qui veut que succession ne remonte point tant qu’il y a des mâles où décendani de mâles, sans distinction de ligne directe ou collaterale, comme il a été dit cy-devant suivant l’Article 248

Enfin la troisième raison pour laquelle lesdits Arrests ne font aucune décision est en ce qu’ils ont été rendus, non pas sur la consideration de Bethencourt et de Sandouville, mais suivant l’Article 243. de la Coûtume, qui dispofe que les oncles et les tantes excluent les cousins en la succession de leurs neveux : Ce terme s de consins ) qui faisoit pour lors une disposition tenerale et d’une execution nécessaire, mais qui depuis lesdits Arrests ayant été interpreté, a été restreint aux enfans des oncles et des tantes, étant naturel et raisonnable que les oncles et les tantes ne preferassent que leurs propres enfans dans la succession de leurs neveux ou niéces : Par Arrest en la Grand-Chambre du 23 de Juillet 1672. la succession fut ajugée à Madeleine Duillet.

On peut apprendre par ces exemples qu’on ne doit pas faire de confusion entre la ligne et le degré, et que la proximité de degré ne donne pas toûjours le droit de succeder, les décendans tant toûjours preferez aux ascendans, quoy que plus proches

La secondé exception contre la regle generale qui donne les acquests au plus proche parent, est établio par cet Article, par le moyen de la representation qu’elle approuve au premier degré seulement. La Coûtume de Paris s’est expliquée fort nettement en l’Article 325. en ligne colla. terale la representation a lieu quand les neveux viennent à la succession de leurs oncles avec les freres lu décedé et non autrement.

La representation est un privilege introduit contre l’ordre naturel des successions, qui saisit toûjours le plus proche parent des biens du défunt, pour raprocher la personne éloignée et la mettre en pareil degré que celuy qui est representé, et c’est pourquoy in Synopsi Basil. elle est appelée fort proprement MOTGREC, comme un degré qui fait remonter celuy qui étoit décendu.

Par l’ancien Droit de la France elle n’étoit point reçûë ni en ligne directe ni en collaterale, et plusieurs Coûtumes s’attachant à cet ancien usage n’admettent aucune representation, f elle n’est stipulée par un contrat de mariage, mais comme elle est favorable, sur tout au premier degré, on a trouvé moyen de l’introduire en réservant ou rappelant à la succession la personne éloignée, et qui êtoit hors le degré de succeder, et ce rappel, tant en ligne directe que collaterale, est d’un usage tres-ancien en France, mais il ne poutroit valoir parmy nous pour rendre heritier celuy qui seroit hors le dégré de la representation.

Par les Arrests que j’ay rapportez on apprend que la representation étant limitée au premier s degré, les oncles et tantes en la succession de leurs neveux et niéces excluent les cousins gern mains de la succession de leurs cousins germains ; la Coûtume de Paris en a fait un Article exprés, qui est le 338. Cela fut encore jugé en une espèce remarquable. De quatre freres nommez le Roy, deux étoient morts, ayant laissé chacun un fils, l’un d’iceux étant aussi mort, les deux oncles vivans demanderent sa succession à l’exclusion de leur autre neveu ; ces oncles neanmoins ignorans d’abord leur droit avoient admis leur neveu à partager avec eux par une tran-saction, contre laquelle ils se pourvûrent de Lettres de récision : Heroüet, Avocat du neveu, seconnoissoit que son exclusion êtoit incontestable, comme étant hors le degré de represen tation, mais il soûtenoit que les oncles ayant bien voulu renoncer à cet avantage, ils n’étoient plus recevables à se retracter, siquis sciens non debere solvit, cessat repetitio, l. 1. D. de condict. indib.

Cette décision fondée sur la presomption que habet animum donandi, que d’ailleurs ignorantia uris nemini prodest l. 9. de jur. et facti ignor. Cloüet representoit pour les oncles que la transaction étoit pleine d’erreur, et que s’agissant d’une succession on pouvoit se faire restituer en out temps ; si post divisionem factam testamenti vitium in lucem emerserit exhis, quae per ignorantiam acta, sunt prae judicium tibi non comparabitur, et en la l. Majoribus. C. Communia utriusque jud. majoribus etiam per fraudem, vel dolum, vel perperam sine judicio, factis divisionibus solet subveniri, quia in bonae fidei judiciis quod inaequaliter factum esse constiterit, in melius reformabitur : Par Arrest en la Grand. Chambre du 20 de May 1650. le neveu fut condamné de rapporter ce qu’il avoit perçûDe trois freres l’ainé eut un fils et deux filles, ce fils mourut et laissa un fils ; aprés la mort lu second frere qui étoit Curé, le troisième demanda tous ses meubles et acquests, parce que le fils du frère ainé étant mort, et le petit-fils plus éloigné d’un degré, il n’étoit point dans le cas de cet Article, mais les filles du frere ainé prétendoient succeder par representation de leur pere avec leur onclé, ce qu’il contestoit par cette raison, que pour être capable de cette representation il faloit être capable de succeder, que ces filles ne pouvoient succeder à leur pere en étant excluses par leur frere : Pour resolution de cette question on peut dire que leur frere étant mort, et se trouvant plus proche que leur neveu, elles étoient devenuës capables de venir par representation à la succession de leur oncle.

Une succession de meubles et acquests fut disputée entre un grandoncle et un cousin remué de germain ; le grand-oncle se disoit plus proche, et que par la supputation civil il étoit au quatrième degré, et le cousin au sixiéme, que par la supputation Canonique ils étoient au troisième degré, mais que in lineâ inaequali ; on régarde celuy qui est le plus éloigné, que pour admettre ce cousin germain il faudroit que ce fût par representation, qui n’a point lieu en ligne collaterale au-de-là du premier degré : Le cousin remué de germain répondoit qu’il étoit décendant, et que tant qu’il y a des décendans, les ascendans ne succedent point : Par Arrest du 7 de Février 1634. au Rappoit de Mr Rocques, la succession fut ajugée au grand-oncle.

Pour faire succeder, suivant cet Article, les neveux et niéces avec les soeeurs et tantes, il n’est point necessaire que leur pere fût frère de pere et de mére du défunt, le double lien qui rest établi par le Droit civil et par quelques Coûtumes de France, n’est point suivi parmy nous, quoy qu’autrefois il y fût en usage, comme on l’apprend deLithleton , lib. 1. n. 6. et l’on a jugé que des enfans du frère du pere pouvoient succeder par representation avec leurs oncles, qui étoient frères de pere et de mere, de celuy de la succession duquel il s’agissoit.

Martel avoit été marié deux fois, il eut deux fils de son premier mariage, et un autre du second ; celui-cy laissa des enfans, et depuis un des freres du premier lit étant mort sans enfans, sean Martel son frere prétendit avoir seul la succession des meubles et acquests au préjudice des enfans de son frère de pere seulement, le Bailly de Roüen ayant ordonné que la succession seroit partagée entre les freres et les enfans du frère de pere, ledit Jean Mattel s’en rendit appelant ; Greard, son Avocat, se prévaloit de l’avantage du double lien introduit par Justinien Justinien, en sa Novelle 118. et pour la Coûtume il disoit qu’en cet Article la Coûtume avoit bien reglé que representation avoit lieu en la succession de meubles et acquests au premier degré, et que les enfans des freres succedoient avec leurs oncles, mais que cet Article ne devoit s’enrendre que des neveux sortis des freres conjoints du côté de pere et de mere, et pour le prou-ver il citoit l’Article 311. qui porte que le frere de pere succede également avec le frère de pere et de mere, d’où il concluoit que la Coûtume avoit bien marqué par cet Article qu’elle mettoit le la difference entre ceux qui étoient conjoints par ce double lien, puisqu’autrement il êtoit superflu, dautant qu’il suffisoit. de l’Article 304. Or comme en cette matière de successions il ne faisoit point d’extension, et que l’on avoit jugé que les enfans du frere uterin ne succedoignt point avec leurs oncles, parce que la Coûtume ne l’avoit point declaré, il falpit conclure que puisque la Coûtume s’étoit contentée d’ordonner que le frere de pere succedoit avec le frera de pere et de mere, et n’avoit point ajoûté que les enfans du frère succederpient avec leurs oncles, on devoit suivre la même regle que l’on avoit établie pour les enfans du frere uterins Theroulde pour les intimez répondoit que le double lien n’étoit point considéré en cette Province, que la Coûtume ayant disposé par cet Article que les neveux succedoient par representa, tion avec leurs oncles, il devoit s’entendre aussi-bien des neveux sortis du frère du pere feulement, comme des neveux du frère de pere et de mére, parce qu’ils avoient jus agnationis & consanguinitatis, et qu’il y avoit grande différence entr’eux et les uterins, qui n’étoient que semifratres, que l’Article 311. n’étoit point considérable, et que pour tous les autres suivans ils n’étoient qu’une exception à l’Article 310. lequel ayant préferé les paternels aux maternels en parité de degré, on avoit ajoûté pour exception les Articles suivans, mais que cela ne détruisoit point l’Article 304. que cette question avoit été décidée par l’Arrest du Veau, et bien qu’en l’espèce de cet Arrest c’étoient des tantes qui vouloient exclure les enfans du frère de pere, que, l’on s’étoit neanmoins fondé sur cette même raison, que les enfans du frère de pere seulement avoient le droit de representation : Par Arrest, en l’Audience de la Grand. Chambre, du sde Mars 1667. on mit sur l’appel les parties hors de Cour et de procez.

Il n’en est pas de même des enfans du frere uterin, qui ne peuvent pas succeder avec les freres de pere du défunt, comme il a été jugé par l’Arrest de Theodabs, rapporté sur l’Article 312. La Coûtume admet bien en cet Article la representation entre l’oncle et le neveu, mais ce n’est qu’aux successions où il n’y a que la seule difference du degré Mais les tantes d’un nommé le Veau eurent une prétention ridicule, elles s’imagineren qu’elles pouvoient exclure les enfans de leurs freres de la succession de leur frère de pere et de mère ; Nicolas le Veau eut des fils d’un premier mariage, et il eut de son second mariage.

Nicolas le Veau et des filles : aprés la mort de ce Nicolas le Veau fils, sa succession fut conrentieuse entre ses soeurs de pere et de mére d’une part, et les enfans de ses freres de pere seulement ; elles soûtenoient qu’en vertu du double lien elles étoient preférables, étant d’ailleurs plus proches au défunt, et puisque l’on avoit jugé que les enfans du frere uterin ne pou-voient succeder avec leurs oncles, frères de pere et de mére de celuy de la succession duquel il l’agissoit, par la même raison les enfans du frère de pere étoient exclus par leurs tantes, sours de pere et de mére du défunt. Le Vicomte de Roüen l’avoit jugé de la sorte : Sur l’appel Theroulde s’aidoit de cet Article, qui admet la representation au premier degré, que la Coûtume ne connoissoit point le double lien, et qu’il y, avoit bien de la difference entre les freres de pere et les frères de mere seulement, car à ceux-cy le degré ne manque pas seulement, mais aussi la ligne : Par Arrest en la Grand-Chambre du 15 de May 1664. la Sentence fut cassée, et ordonné que la succession seroit partagée par souches entre les neveux et les tantes On apprend par ces Arrests que les enfans du frère de pere peuvent venir par representation, pour succeder avec leurs oncles qui étoient frères de pere et de mére du défunt, et qu’à plus forte raison ils doivent succeder avec leur tante, soeur de pere et de mère du défunt Par l’Article dernier des usages locaux, des vingt : quatre Paroisses qui sont au : de-là de la riviere d’Epte, il est porté qu’en ligne collaterale representation a lieu jusques au second degré nclusioement, surquoy on a donné un Arrest en la Chambre des Enquêtes le 8 d’Avril 163 au Rapport de Mr de Galentine, entre de S. Oüen, de Malnoue, et autres, par lequel on a admis farriere-neveu avec le neveu à la succession de l’oncle, comme étant l’arrière-neveu au second degré de representation, quoy qu’il soit au troisième degré de parenté, autrement cet Article de l’usage local n’eût rien dit davantage que la Coûtume generale, quoy qu’il étende la representation plus qu’aucune autre Coûtume de la France ; car en effet le frère ne represente versonne : Il est de son chef au premier degré, et le neveu bien qu’il vienne à la succession de son chef, néanmoins comme il ne peut être reputé aussi proche parent que le frere du défunt, qu’en feignant qu’il represente son pere, il est le premier qui a besoin du secours de la representation, ainsi il fait le premier degré et l’arriere, neveu le seconde