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CCCXIX.

Acquests n’augmentent le préciput de l’aîné.

Et si en ladite succession il y a propres qui soient partables entre mêmes heritiers, lainé ne pourra prendre qu’un préciput sur toute la masse de la succession.

Pour comprendre les Articles 318. et 319. il faut les joindre ensemble, et voicy leur sens La succession d’un frere défunt qui se partage entre freres consiste en meubles et acquests seulement, où il y a des acquests et des propres de même nature divisibles entre tous ces freres qui sont des heritiers de même qualité, entisdem naturae : Au premier cas les freres partagent également, s’il n’y a quelque fief, en ce cas l’ainé peut le prendre par préciput, et c’est la disposition de l’Article 318. mais si dans cette succession il y a des propres partables et des acquests, l’ainé ne pourra prendre un prréciput au propre et un préciput ou une parr aux acquests, ou bien prendre un préciput au x acquests et une part au propte, il ne peut avoir qu’un préciput sur toute la masse de la succession, et en prenant ce préciput, ou sur le propre, ou sur les acquests, il n’a plus rien au reste. Berault sur cet Article 318. cite un Arrest qui doit avoir jugé que l’ainé prenant uti préciput en la succession au propre, pouvoit encore prendre part aux acquests du frère déced’é, mais il n’a pas entendu cet Arrest ; il fut rendu entre Guy de Neufville, Ecuyer, sieur de Cleray et de Mesange, c’étoient des freres uiterins, qui par consequent n’étoient pas de mêêmes heritiers ejusdem naturae, car les freres uterins ne pouvoient avoir de part au propre, Riais seulement aux acquests, si bien que l’on n’étoit pas aux termes de cet Article 319. qui cotitient ces termes, s’il y a propres qui soient partables entre mêmes heritiers : Or comme les uterins prennent part dans les acquosts, il n’étoit pas raisonnable que l’ainé des freres de pere n’y eût rien, quoy qu’il eût pris un préciput au propre, parce que son exclusion eût profité non seulement à ses frères de pere et de mere, mais aussi à son frere uterin, et voila la véritable espèce de l’Arrest cité parBérault , qui ne juge pas comme il l’a écrit, que l’ainé qui prend préciput au propre peut encore prendre part aux acquests ; mais on jugea qu’entre des frerts de pere et de mere, et des uterins, on pouvoit avoir préciput au propre et part aux acquests, et tant s’en faut qu’on ait jugé ce que Berault avoit dit, que le contraire a été depuis décidé tentre les sieurs de Desson, au Rapport de Mr du Plessis. Puchot, le 30 de Juillet 1670. Il fut dit par cet Arrest que l’ainé qui avoit pris prériput au propre en une succession collaterale n’avoit rien aux acquests, et l’on cassa une Sentence arbitrale renduë par Mr le President d’Estalleviille, qui avoit prononcé au contraire, et lors de cet Arrest la Cour vit sur le Régistre celuy quie Berault avoit cité, qui ne se trouva pas conforme à ce qu’il dit entre François Desson apppelant, et Claude Desson.

On ne peut revoquer en doute que quand la succession des propres et des acquests échet à de mêmes heritiers, qui ont un même titre et un même droit, et que les propres sont divisibles entr’eux, on ne la considere en ce cas que comme une feule et même succession La Coûtume s’en est expliquée ouvertement par cet Article, en disant que s’il y a propres qui soient partables entre mêmes heritiers, l’ainé ne pourra prendre qu’un préciput sur toute la masse de la succession.

Mais il est mal-aisé de comprendre le sens due ces paroles, s’il y a propres qui soient partables entre mêmes heritiers ; car puisqu’il y a des peopres partables entre mêmes heritiers, il faut absolument qu’il y ait des propres qui ne soient point partables : d’où il s’ensuit aussi necefsairement que si lorsque les propres sont partables, l’ainé ne peut prendre qu’un préciput sur toute la masse de la succession, lorsque les propres ne sont point partables, sa condition doit être plus avantageuse, autrement la Coûtume feroit inutilement et mal à propos cette distinction. entre les propres partables et non partables : Si la condition de l’ainé êtoit toûjours égale, soit que les propres soient divisibles ou non divisibles, comme on ne peut dire que ces paroles soient super fluës, il faut necessairement leur trouver un sens qui foit raisonnable, et rechercher comment et quand il peut y avoir dans une succession des propres partables et des propres non partables, et comment encore ceux qui succedent à une personne peuvent être reputez mêmes. heritiers, ejusdem forma et naturae, pour user des termes deBartole , sur la I. quoties. C. de bered. Inst Nous trouvons aisément quand et comment les propres sont divisibles ; cela arrive lorsque la succession du pere a été partagée également entre les freres, et que l’ainé n’a point pris de réciput, car alors un frere mourant sans enfans, les propres sont partables entre l’ainé et ses freres, et c’est en ce cas que s’il y a des propres et des acquests, l’ainé ne peut avoir qu’un préciput sur toute la masse de la succession.

Suivant l’Article 341. l’ainé ou autre ayant pris préciput, avenant la mort de l’un des puisnez, ne luy peut succeder en quelque chose que ce soit ; et par l’Article suivant il est porté que si neanmoins il y avoit un fief partagé avec les autres biens de la succession, sans avoir été choisi par préciput avenant la mort sans enfans de celuy au lot duquel il est échâ, l’ainé ou ses representans succede en ce qui est noble, et peut prendre le fief par préciput.

Aprés cela pour l’éclaircissement de cette matière, supposons que la succession d’un pere soit échüë à quatre freres, dont l’ainé ait pris un préciput, et que le reste ait été partagé entre les trois autres frères ; depuis l’un de ces puisnez décede sans enfans, et laisse entre ses proprei un fief et des rotures, ou des rotures seulement ; il laisse aussi des acquests qui consistent en frefs et en rotures, ou en rotures seulement.

Il est sans doute que si dans les propres il n’y a que des rotures, l’ainé n’y peut prendre aucune part suivant l’Article 341. voila véritablement des propres non partables, mais assurément la Coûtume n’a point entendu parler de cette sorte de propres, parce qu’autrement sa distinction de propres partables, pour empescher l’ainé de prendre préciput sur le propre et sur les acquests, seroit inutile : La raison est que l’ainé qui a pris préciput n’ayant rien au propre, quand il consiste en rotures, l’on distingueroit inutilement entre les propres partables et non partables, puisque quand ils ne sont point partables l’ainé n’a jamais le pouvoir ni le droit de prendre un préciput ou une part aux propres, et un préciput ou une part aux acquests ; mais en ce cas il ne succede qu’aux acquests, sur lesquels s’il y a un fief il peut prendre préciput.

Il faut donc necessairement chercher d’autres propres non partables, et en suite examiner. si lorsqu’il y a des propres non partables, la condition de l’ainé est plus avantageuse que quand Il n’y en a point.

On peut dire que le propre non partable consiste entièrement en ce fief, que par l’Article 42. l’ainé peut prendre quand il n’a point été partagé, et avenant la mort sans enfans du puisné au lot duquel il étoit échû. L’on peut appeler avec justice ce fief un propre non partable, parce que l’ainé est obligé de le prendre et de s’y contenter, quelque petite qu’en soit a valeur ; il n’est pas à son choix ou de prendre ce fief ou de rentrer en partage des autres propres avec ses puisnez ; il est un heritier singulier, an certum genus bonorum ; et sa capacité de succeder se termine à pouvoir prendre un fief s’il y en a dans les biens propres, hors cela il est purement étranger en la succession au propre, et il peut avoir ce desavantage que son fief sera de tres-petite valeur, et que le reste des propres sera d’un tres-grand prix ; de sorte qu’en cette rencontre le party des puisnez peut être meilleur que celuy de l’ainé ; mais il n’a pas sujet de se plaindre, parce qu’il est recompensé par le préciput avantageux qu’il a choisi en la succession du pere ou de la mere

Puis donc que nous trouvons un propre non partable, et que la Coûtume n’exclud l’ainé e prendre deux préciputs que quand il y a des propres partables, on peut conclure pour faire galoir la distinction établie par la Coûtume de propres partables et non partables, que quand les propres ne sont point partables et que l’ainé est contraint de se contenter au fief qu’il trouve, il peut prendre ou part ou préciput dans les acquests, ce qui est fondé sur les paroles expresses de cet Article ; car puisque l’ainé ne peut avoir qu’un préciput, lorsque les propres sont partables et que ce sont mêmes heritiers, l’on peut conclure que quand les propres ne sont point partables et que ce ne sont point mêmes heritlers ; l’ainé peut avoir son préciput dans le propre, et prendre encore un préciput ou une part dans les acquests, puisque les deux conditions equises pour n’ajuger qu’un préciput à l’ainé, cessent à son égard. Car à l’égard de la premiere, il est certain que les propres ne sont point partables, et à l’égard de la seconde on ne peut pas le reputer un même heritier, puisqu’il ne peut succeder au propre que lorsqu’il s’y rencontre un fief, et qu’il n’a pas le droit d’entrer en partage avec ses freres : Par le droit Romain il y a deux sortes d’heritiers, les premiers sout nommez heritiers universels, parce qu’ils succedent en tous les droits du défunt, l. heres c. 37. de acquir.

vel omitt. hered. l. hereditas de regul. jur. on appelle les autres successeurs singuliers, successores juris, parce qu’ils ne succedent que pour certaines parts et pour certaines choles, l. ex facto de hered. nstit. La difference entre ces heritiers étoit grande, on pouvoit intenter contre les premiers toutes les actions hereditaires, parce qu’ils étoient de véritables heritiers, et étoient contraints d’exercer les actions hereditaires et de les souffrir, veri heredes, et actiones hereditarias exercere, et pati cogebantur. Les successeurs pour certaine part ne pouvoient faire lun ni fautre, ils n’étoient considerez que comme des legataires en tous les droits du défunt, neque convenire quemquam, neque conveniri poterant :Cujac . Ad l. quoties. C. de hered. Instit.

Aussi nôtre Coûtume fait de deux sortes d’heritiers en la succession au propre, sçavoir des heritiers qui succedent, in jus universum defuncti, ce sont les puisnez qui succedent à tous les s droits de leur frere puisné, parce qu’ils avoient partagé également avec luy la succession du q ere ou de la mere : fainé qui a pris préciput est un heritier singulier, parce qu’il ne succede qu’à une certaine espèce de biens, à sçavoir à ce qui est noble.

Ce sont donc divers heritiers, et l’on ne peut soûtenir que ce soit une même succession, elle peut véritablement être considérée comme une même succession à l’égard de celuy qui la aisse, mais elle a diverses qualirez et divers effets à l’égard de ceux à qui elle échet ; car les puisnez succedent à tous les droits in jus universum du défunt, sans distinction de propres et d’acquests, ce qui rend leur condition égale : mais l’ainé qui a pris préciput ne succede qu’à une certaine espece de biens, à sçavoir au noble, ce qui fait qu’il n’est pas un même heritier avec ses puisnez bi la Coûtume avoit laissé en la liberté de l’ainé ou des puisnez de confondre ce droit, et de rendre l’ainé égal aux puisnez ; en ce cas en prenant préciput en l’une des successions, il ne pourroit le prendre en l’autre ; mais puisque cela n’est pas, et qu’au contraire la Coûtume a fait des propres partables et non partables, que l’ainé n’a point part aux propres partables, et qu’il n’est point un même heritier avec ses puisnez, quoy qu’il succede au noble ; suivant l’Article 342. il n’est point exclus de prendre part ou préciput aux acquests, parce qu’il n’est un même heritier avec ses freres que dans la seule succession aux acquests.

Me Jacques Godefroy nous apprend sur cet Article que cette question s’offrit entre les sieurs de Beuzeville et de Brevant : Le fait étoit qu’Antoine de la Luzerne eut trois fils, Jacques, Pierre et Julien ; Jacques avoit choisi par préciput le fief de Beuzeville, Pierre et Julien avoient partagé le surplus de la succession, et par les partages la terre de Brevant échût à Pierre, et celles du Lorey et de S. Hilaire à Julien. Julien mourut et laissa dans sa succession ces deux verres, et plusieurs acquests considérables ; Antoine, fils de Jacques, prit la terre de Lorey par réciput, et prétendit encore avoir une part égale aux acquests, ce qui luy fut contredit par le sieur de Brevant : la cause fut plaidée et appointée, et les opinions des Juges ayant été partatées, les parties transigerent moyennant huit mille livres que le sieur de Beuxeville donna au sieur de Brevant pour être reçû au partage des acquests. Godefroy êtoit de ce sentiment que les success sions étoient confuses, et que le fils de l’ainé ne pouvoit avoir préciput et partage, et qu’il étoit tenu de se contenter de l’un ou de l’autre, et c’étoient les raisons du sieur de Brevant qu’il n’étoi question que d’une feule et même succession divisible entre mêmes heritiers, en laquelle l’ainé ne pouvoit avoir préciput et partage ; que la distinction des biens n’étoit considérable qu’entre divers heritiers, mais qu’entre mêmes heritiers il y avoit confusion de biens ; que cet Article Etoit une exception du précedent, car la Coûtume ayant dit que les conquesls se partagent égaement entre frères, sauf le préciput de l’ainé : elle ajoûte que si en la succession il y a propres qui soient partables entre mêmes heritiers, l’ainè ne pourra prendre qu’un préciput sur toute la succession.

Il faut avoüier que nos Législateurs ont établi en cet Article une loy imparfaite et défectueuse, car aprés avoir parlé de ce que l’ainé ne peut prétendre dans le cas où il y a des acquests et les propres qui sont partables entre mêmes heritiers, on ne devoit pas oublier de declarer quel est le droit de l’ainé dans l’autre cas, lorsque la succession est composée d’acquests et de propres non partables.

Les raisons dont Godefroy se sert pour soûtenir son opinion ne sont pas décisives, bien loin qu’il se fasse une confusion de biens, au contraire la Coûtume fait une separation de propres, et elle les distingue en propres partables et non partables, ce qui induit necessairement une différente manière de les partager et une distinction d’heritiers.

Tay remarqué cy-dessus que nous n’avons que de deux sortes de propres non partables, a première est lorsque l’ainé a pris préciput, et que le propre qui se trouve dans la succession consiste entièrement en rotures ; mais cette espèce de propres ne peut jamais faire naître de difficulté, et la décision portée par cet Article n’y peut être appliquée ; car l’ainé étant exclus de prendre part en ces propres, et par consequent n’ayant part qu’aux acquests, il n’est pas en pouvoir de prendre préciput ou part aux propres, et préciput ou part aux acquests.

Il ne reste donc plus que cette autre espèce de propre qui puisse causer de l’ambiguité, sçavoir lorsque l’ainé succede seulement à ce qui est noble, suivant l’Article 342. N’estI pas vray que ce fief qui appartient à l’ainé est un propre non partable, puisque cette portion luy est indispensablement limitée, qu’il est forcé de s’y contenter, et qu’il n’a pas la faculté de le remettre en partage pour diviser également les propres avec ses autres freres : Et n’est-il