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CCCXLIII.

Avantage de l’aîné aprés le decez de son ainé avant les partages.

Avenant le decez du fils aîné avant les partages faits de la succession qui leur est échûë, le plus aîné des freres survivans peut choisir tel fief qu’il luy plaist à la representation, et comme heritier de son frère ainé, sans prejudice du droit de preciput qu’il a de son chef, et n’y peuvent les autres freres pretendre aucune part, legitime, provision ou recompense sur ledit fief.

Le sieur de Mailloc eut pour ses heritiers Charles, Gabriel, et Jacques de Mailloc ses enfans ; Charles mourut étant encore mineur en l’année 1652. Gabriel et Jacques eurent procez pour leurs partages, qui furent évoquez en la Cour, où Jacques puisné interpella Gabriel son ainé de déclarer quelle terre il choisissoit par préciput en cette Province, en celle de Picardie ou ailleurs, et quels biens il prétendoit divisibles entr’eux comme puisnez de Charles leur frère ainé : Gabriel fit réponse qu’il prenoit les terres de Mailloc et de Cailly en leur integrité, comme heritier de son pere et de son frere, offrant sur ces terres la provision à vie à Jacques son frere, et consentant qu’il prit sa part aux terres en Picardie selon la Coûtume du lieu, suivant l’Acte signé de luy du 20 de Février 1652. Le puisné demanda que son frère expliquât plus précisément quelles terres il prenoit en la succession du pere, et quelle terre il choisissoit pour la succession du frère ; par Acte du 12 de Juin 1654. lainé declata que n’y ayant autres biens en la Coûtume de Caux que la terre de Gailly, elle luy appartenoit entière au droit de Charles son ainé, sauf la provision à vie qui seroit du sixième comme heritier dé son pere : et à l’égard des biens situez en la Coûtume generale, qu’il prenoit au droit dudit Charles la terre de Mailloc, sauf à partager entre luy et ledit Jacques les rotures, s’il y en avoit aucunes.

Le puisné soûtenoit que l’ainé ayant déclaré par deux Actes qu’il prenoit les terres susdites comme heritier de son pere et de son frere, il ne pouvoit plus varier, mais seulement expliquer laquelle des deux il choisissoit comme heritier du pere, et quelle terre il retenoit comme negitier du frère ; son interest consistoit en ce que sur la terre qu’il prendroit comme heritier du pere, la provision qui sera duë au puisné sera du tiers entier, et non d’un sixiéme, ou que les rotures luy appartiendront entièrement, et non pour une moitié : Par les Articles 337 18. et 343. l’ainé peut prendre un fiefpar préciput, et avenant le decez de l’ainé le plus ainé des freres urvivans peut choisir à sa representation tel fief qu’il luy plaist. Par ces Articles il est besoin d’une declaration de l’ainé, il s’en peut passer et laisser faire lots, s’il a fait son choix, un autre fief appartient aux puisnez ou les rotures ou provision, et si-tost que l’option de l’ainé est faite, le droit des puifnez est acquis et l’ainé ne peut plus varier ; par les Arnicles 338. et 340. en cas que l’ainé, &c.

I laisse le reste aux puisnez, et par consequent dés l’instant du choix le surplus appartient aux puisnez, l. quoties de opr. leg. l. apud Aufid. eod.Cujac . Ad l. 112. de verbor. obligat.

Pour l’ainé l’on disoit qu’il peut varier, suivant l’Arrest de Courtonne rapporté sur l’Art. 358. l. nonnunquam de oblig. nonnunquam Prator variantem non repellit & consilium mutantis non aspernatur. Nous avons plusieurs loix au C. et au D. suivant lesquelles l’on peut varier, Rebus integris, que les choses sont icy entieres puisqu’il ne s’agit que d’une explication demandée par son puisné, que ce n’est qu’une omission de son Procureur, lorsqu’il a dit qu’il prenoit lesdits fiefs comme heritier de son pere et de son frere, et qu’il devoit écrire qu’il prenoit les fiefs comme heritier de son frere, et part aux notures comme heritier de son pere, ou qu’il prend les fiefs comme héritier de son frere qui étoit heritier de son pere : Par Arrest donné au Rapport de Mr de Toufreville-le-Roux, l’ainé fut maintenu en la possession des tertes de Mailloc et de Cailly, sauf les droits des puisnez suivant la Coûtume.

Et ne peuvent les autres freres pretendre aucune part. Sçavoir si en une succession collaterale de propre, hors le premier degré, en laquelle il n’y a qu’un Duché, Comté, Baronnie, ou Fief, les puisnez n’y doivent point avoir de provision à vie, comme ils auroient en succession directe tant en Caux que hors Caux, suivant les Articles 302. et 46. Pour les puisnez l’on peut dire que cet Article est un cas singulier qui ne se doit étendre qu’entre freres et en succession de freres, et non entre freres qui succedent à un oncle, trand. oncle, ou autre ; comme lorsque la Coûtume a dit en l’Article 303. que l’ainé a l’ancienni uccession de ses parens collateraux sans en faire part on portion à ses freres puisnez, elle a mis une exception, que si l’un des puisnez meurt sans enfans, l’ainé n’a que les deux parts, et les puisnez l’autre : D’ou l’on apprend que quand il s’agit de l’interpretation des mêmes Coûtumes, il les faut entendre comme elles parlent, et ne faisant mention que d’un cas, il faut chercher l’équité tirée du Droit et des Coûtumes qui ne permetient point qu’un frère ait tout le bien et les autres rien ; il est certain neanmoins qu’en une succession collaterale où il n’y a qu’un fief, les puisnez n’y ont rien, et la raison de la difference entre la succession directe et la collaterale, est que par le droit naturel les parens sont obligez à la noutritute de leurs enfans, necant qui alimenta denegant, l. 1. 8. pen. de justit. et jur. Il est vray que quand il n’y a qu’un Marquisat, Comté, Baronnie ou une autre Dignité, la Coûtume ne donne rien en proprieté, parce que ces choses sont indivisibles principalement entre freres, Article 272. 361. et 366. La legitime des fils n’est point tirée d’un Royaume, Duché, Comté, ou d’une autre pareille Dignité, legitima filiorum non detrahitur de Regno, Ducatu ; Comitatu, vel aliâ tali Dignitate.Guido Pap .

Quest. 436.Tiraquel . de jure primogenit. Quaeft. n. n. 32. Mais au lieu de la legitime la Coûtume donne aux puisnez pour leur nourriture Pusufruit de la tierce partie, ce qui n’a point de lien en la collaterale, les cousins n’étant point obligez à la nourriture ni à la legitime, mals ils peuvent disposer de tout leur bien c’est pourquoy le frere survivant a le fief sans en faire part à ses puisnez, et l’Article 303. est fondé sur cette raison.

Cet Article étoit necessaire pour prevenir la difficulté qui pouvoit naître, si le premier puisné pouvoit prendre un fief comme heritier de son frère ; et la raison de douter êtoit que l’ainé étant mort sans faire aucune déclaration, s’il acceptoit la succession du pere ou s’il la refusoit, sa portion devoit accroitte également à tous les autres freres, le premier ipuisné ne pouvant choisir aucun preciput au droit de son ainé défunt, parce que pour acquerir ce preciput à l’alné, Il est necessaire qu’il en ait fait option et qu’il ait declaré qu’il retient un tel fief par precipat, ce qui se prouve par les termes de l’Article 337. qui porte que l’ainé peut prendre un preciputi Il ne luy est donc acquis que quand il a témoigné son intention, et cette déclaration est si necessaire, que s’il neglige de la faire avant lécheance des successions paternelles et maternelles, Il s’en fait une confusion, et il ne peut avoir qu’un seul preciput dans les deux successions, encore qu’il eût pû en prendre deux s’il avoit fait son option en temps et lieuMais cet Article a décidé la question en faveur du premier puisné, il n’est pas necessaire dans la succession : paternelle, pour donner lieu à la disposition contenuë en cet Article, que ce frère ait fait une option, et l’on peut soûtenir cette maxime par cette raison, que le mort saisissant le vif, l’ainé dés l’instant de la mort du pere, ipso jure fuit heres et saisitus, et por tionem suam vel ignorans transmisit ad quoscunque heredes, et ainsi ce n’est plus la succession-du pere, mais celle du frere, ista portio non est de successione patris ; c’est une succession collaterale : VideMolin . 5. 13. gl. 1. 4. 8. 31. et 32. Et cela est si véritable, que la Coûtume donne ce droit de preciput, bien que les partages n’eussent point été faits. D’où il s’ensuit que lainé est reputé saisi dés l’instant de la mort du pere.