Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


CCCLXIV.

Contribution des freres à la nourriture, entretenement, et mariage des soeurs.

Les freres contribuent à la nourriture, entretenement, et mariage de leurs soeurs, selon qu’ils prennent plus ou moins en la succession de leur pere et mere, ayeul ou ayeuie, en ligne directe, et pareillement aux autres charges et dettes de la succession.

Cet Article êtoit fort necessaire pour terminer cette grande question, si l’ainé prenant preciput contribuoit au mariage des soeeurs, et aux autres dettes et charges de la fuccession à proportion de la succession ou du profit, pro portionibus hereditariis, aut pro modo emolumenti, n’a pas expliqué ces matieres, et principalement touchant la contribution au mariage des seurs, à cause des preciputs, sur les Articles 279. et 337.

Les freres contribuant aux dettes immobiliaires à proportion de ce qu’ils prennent en la succession, et aux dettes mobiliaires à proportion de ce qu’ils prennent aux meubles, et jusques à concurrence de leur valeur, et où les meubles ne suffiroient pas, ils contribuent au surplus du payement des dettes mobiliaires à proportion de ce que chacun, profite aux immeubles. ûrrest en la Chambre des Enquêtes, au Rapport de Mi Bigot, du 12 d’Avril 1628. entre Bertrand et Nicoles de la Bigne : celuy dont la portion est plus grande dans les immeubles que dans les meubles a interest de faire proceder. à l’inventaire et estimation des meubles, afin que les dettes mobiliaires étant connuës elles soient acquitées également par les heritiers aux meubles. Le contraire s’observe à Paris, et les dettes se payent selon la part de la succefsion, pro quotâ hereditariâ. VideMolin . 5. 18. gl. 1. n. 8. Le sd’Aoust 1666. on décida le partage en la Chambre des Enquêtes, sur le procez du sieur de Fry, touchant la contribution aux frais faits par son tuteur pour le procez d’un héritage où il avoit les deux tiers, et il passa à dire qu’il y contribuëroit à proportion du bien et non personnellement, Mr Voisin Rapporteur. Le Verrier, sieur de Toqueville, avoit trois fils et deux filles, il donna à ses filles en les matiant quelques rotures, à condition que ses fils pourroient les retirer toutefois et quantes en leur payant à chacune trois mille livres ; aprés la mort du pere les puisnez se plaignirent de la donation de ces rotures, parce qu’elles leur auroient appartenu, et par cette raison ils concluoient contre leur ainé qui avoit pris preciput, qu’il étoit tenu de contribuer au rachapt qu’ils pretendoient faire de ces rotures, parce qu’autrement il ne contribucroit à aucune chose au mariage de leurs seurs contre la disposition de cet Article, et puisque le mariage des soeurs êtoit une dette de la succession il ne pouvoit s’en exempter, à quoy l’ainé ayant été condamné, il soûtenoit sur son appel que le pere avoit pû donner de l’héritage à ses filles en les mariant, et qu’ayant pris un fief par préciput et laissé à ses puisnez ce qui restoit de rotures, ils étoient obligez de partager la succession en l’état qu’ils la trouvoient, que cette faculté de rachapt étoit une grace pour les puisnez à laquelle il ne desiroit pas de participer, mais qu’ils pouvoient s’en prévaloir s’ils le trouvoient à propos : Par Arrest en l’Audience de la Grand-Chambre du 27 de May 1625. la Sentence fut cassée, et l’ainé déchargé de la contribution.

Un pere avoit un fils et une fille de son premier mariage, en mariant fa fille il luy promit la somme de trois mille fivres qui seroit payée, sçavoir mille livres sur son bien, et deux mille livres sur celuy de la mere, ce qui fut executé, ce pere en mariant une autre fille issuc de son second mariage, luy promit deux mille cinq cens livres pour toute et telle part qu’elle pouvoir esperer en sa soccession et en celle de sa mère le cas écheant. Aprés la mott du pere le mary demanda la dot de sa femme aux fils du premier et du second lit ; le fils du premier lit sourenoit que la somme promise devoit être distribuée sur les successions paternelle et maternelle à proportion de leur valeur, consentant de payer sa portion de ce que la succession parernelle devoit contribuer, mais il ne devoit aucune chose de la portion qui seroit duë par la succession maternelle, parce qu’il n’y prenoit rien, ayant payé le matiage de son autre loeur sur la succession de sa-mere, ou en tout cas s’il payoit le tiers du mariage entier de cette seconde loeur, il devoit être subrogé à son droit, pour avoir le tiers du mariage qui luy appartiendroit sur les biens maternels le cas écheant. Les deux enfans du second lit alléguoient pour défenfe que eur mere étoit vivante, et que le mariage demandé étant l’obligation du pere seulement, ils étoient tenus de l’acquiter comme ses heritiers, à quoy l’ainé repliquoit que la promesse du pete étoit faite pour décharger sa succession et celle de la mère, que par consequent elle devoit être acquitée sur l’une et sur l’autre, qu’il ne seroit pas juste qu’il payât le mariage qui étoit dû cette fille du second lit sur le bien de sa succession, que la renonciation qu’elle avoit faite à la uccession de la mere en consequence de cette promesse tournoit au seul profit des enfans du econd lit, et que suivant cet Article les freres contribuent aux mariages de leurs soeurs selon qu’ils prennent plus ou moins aux successions de pere et de mère, et à proportion du profit, et pro mode emolumenti, le pere même auroit pû la reserver à la succession de sa mère : Par Arrest du 14 de Jan-ier 1622. entre les nommez Mausçavoir, il fut jugé que le pere ayant promis mariage à sa fille pour telle part qu’elle pouvoit prétendre en la succession de pere et de mère, encore qu’il eûr promis feul, et que la mere n’eût rien promis, néanmoins que la somme promise pour le mariage seroit payée tant sur la succession du pere que de la mere qui étoit vivante et qui défendoit tant en son nom qu’en qualité de tutrice, et pour cause et sans tirer à consequence, et en effet cet Atrest ne peut servir de loy

Par la disposition du droit la mere n’est point obligée de doter sa fille, le pere même ne peut assigner la dut sur le bien de la mere contie sa volonté, neque mater dotem pro filia dare cogitur, neque pater de bonis uxoris suae invitae, ullam habet dandi facultatem, l. neque mater C. de jur. Dot. et bien que le pere eût promis la dot, tant sur le bien paternel que maternel, qui appartenoit à ses enfans, il est tenu de la payer seul : si un pere a dit dans le contrat de mariage qu’il donne la dot sur les biens paternels et maternels, sçavoir si la donation semble faite à proportion de moitié, ou suivant le bien du pere et de la mere, si le pere est totalement pauvre, il semble que la dot est donnée sur les biens qui doivent appartenir aux fils ou aux filles, mais si le pere a des biens sussisans, en ce cas on doit reputer qu’il a donné comme de son pairimoine ; car il pouvoit selon ses facultez donner la dot à sa fille, et faire consentir les fils s’ils veulent joindre une part de leur bien ou la totalité à la liberalité du pere pour la dot, afin qu’en effet il appaçoisse ce qu’il pretend donner, et ce qui doit être pris sur le bien des fils, l. si pater 7. C. de Dor. promiss. 5. nuda pollicit. si dixerit pater in instrumento dotali ex bonis paternis, & maternis dotem dare, utrum pro dimidia parte videatur datio facta, an pro rata portione utriusque substantiae : Si penitus inopiâ detentus est, ex illis rebus dotem videri datam que ad filios vel filias pertineat, si vero substantiam idoneam possideat pater, in hoc casu quasi de suo patrimonio dedisse intelligitur, poterat onim secundum suas vires dotem pro filia dare, et consentire filiis quando voluerint partem, vel totam suam substantiam paternae liberalitati pro dote aggregare, ut reverâ appareat quid ipfe velit dare, et quid è substantiâ filiorum proficiscatur.

Le frète aussi n’étoit point obligé de doter sa seur sur la succession de sa mere, l. cum plures. 12. ff. de admin. et pericul. tut. Tutor non dabit dotem sorori pupilli sui à suo patre natae ; etiam aliter nubere non possit, nam et si honestè ex liberalitate tamen fit, que arbitrio pupilli servanda est.

Les dernieres paroles de cet Arrest, pour cause et sans tirer à consequence, nous marquent que la Cour se fonda sur des motifs particuliers, et qu’il ne doit point être allégué pour exemple.

En effet la mere n’ayant point parlé au contrat, c’étoit la seule obligation du pere, et la mere n’ayant rien promis elle ne s’étoit point obligée, tale as alienum totum patrimonium afficit, l. si fideicommissum. ff. 5. 1. ff. de judiciis, ce que le pere promet pour le mariage de sa fille procede de sa pure liberalité, s’il avoit acquité sa promesse de son vivant ses enfans ne s’en pour-roient plaindre : Cette stipulation ( pour telle part qu’elle pouvoit demander en la succession maternelle ) pourroit être considérée comme une décharge et une liberation de la mère.

Aussi le frere alné prévoyant bien qu’il ne pouvoit engager ses freres à cette contribution, il demanda qu’en payant il fût subrogé au droit de la soeur pour la portion qui luy appartiendroit sur la succession de sa mère le cas échéant, ce qui recevoit encore de la difficulté, car la seut ne le pouvoir subroger à un droit qu’elle n’avoit point, parce que suivant l’Article 252. la fille mariée par ses pere ou mere ne peut rien demander à ses freres, outre ce qui luy fut promis en la mariant ; il suffit que l’un ou l’autre layent mariée, il n’est pas necessaire qu’ils promettent tous deux : or la mere n’ayant rien promis, il n’y a point d’ouverture à demander une subrogation aux droits de la fille

Il est vray que le pere peut reserver sa fille à la succession de sa mère, mais outre qu’il ne la point fait, il y a de la différence entre l’un et l’autre cas ; car la réservation faite par le pere n’engage point la mere à payer quelque chose de son vivant, mais en promettant une somme tant sur son bien que sur celuy de sa femme, il l’engageroit à payer de son vivant si cette romesse pouvoit valoir sans le consentement de la femme. Pour refoudre cette difficulté il faut dire que cette promesse du pere n’engageroit point la mère de son vivant, mais qu’elle D peut valoir à l’effet qu’aprés le décez de la mere, la fille ou ceux qui seroient subrogez à son droit pûssent reprendre son mariage avenant sur les biens matornels.

Cet Article a réglé que les freres contribuent au mariage des seurs pro modo emolumenti, Il restoit à sçavoir s’ils pouvoient être contraints solidairement, comme pour toutes les autres tharges de la succession : Cette question a été traitée sur l’Article 351. lorsque Godefroy composa son Commentaire elle étoit encore douteuse : il étoit de ce sentiment que les freres étoient tenus solidairement à la dot promise par le p et, mais quand les seurs avoient été mariées par les frères, l’obligation solidaire ne pouvoit être exercée contr’eux qu’en vertu l’une stipulation expresse : mais on n’a point eu d’égard à cette distinction, sur cette raison que le mariage avenant étant une dette de la succession, l’obligation solidaire avoit lieu comme pour toutes les autres charges.