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CCCXCVIII.

Donation n’est sujette à doüaire.

La femme ne peut avoir doüaire ne conquest sur les biens donnez à son mary.

La premiere partie de cet Article est inutile, la Coûtume s’en étant expliquée fort nettement en l’Article CCCLXXX. Elle est même mal conçûë ; car il ne falloit pas dire en teimes

generaux, que la femme n’a point de doüaire sur les biens donnez à son mary, non feulement elle le peut avoir sur les immeubles qu’elle luy a donnez en don mobil, mais aussi il luy appartient sur les biens donnez à son mary par le Contrat de mariage.Coquille , sur l’Artide premier du Titre du Doüaire de la Coûtume de Nivernois, en propose la question ; s’il avient, dit-il, qu’un parent qui n’est ascendant donne en faveur de mariage, on demande si cet héritage est sujet à doüaire ; Car il se trouve qu’en même temps le mariage a effet et le doüaire aussi ; toutes les conditions faites en faveur de mariage ayant cette condition inherente, si les nopces s’ensuivent, l. plerumque de jure dot. Et dans les Contrats toutes les con-ditions étant purifiées, elles ont un effet retroactif au jour du Contrat, l. filiusfamil. de verb. oblig. d’où il resulte que la donation a un effet plus ancien que la celebration du mariage, et par consequent les biens donnez sont sujets au doüaire ; cela doit avoir lieu pour lés autres donations, comme pour celle qui est faite pour le don mobil, comme je By déja remarqué sur l’Art. CCCLXVII. et c’est pourquoy pour éviter toute ambiguité, il falloit dire comme en l’Art.

CCCLXXX. que la femme n’a point de doüaire sur les donationffaites depuis les épousailles.

C’est perpétuellement l’esprit de la Coûtume, d’affoiblir et de resteindre les droits des femmes, et de ne leur donner aucune part aux biens de leurs maris qui leur sont échûs constant leur mariage, s’ils ne proviennent de leur mutuelle collaboration. Il ne s’ensuit pas toutofois que quand l’héritage a été acheté, pour y donner part à la femme il faille examiner cujus respectu, aut labore, aut pecunia res quesita sit, aut si sibi quis nominatim stipulatus sit ; il suffit que l’achapt soit fait constant le mariage, pour produire un droit de conquest à la femme, nam, Argentré inquit Argentr. Art. 4il. gl. 1. n. 3. et si certum sit plus industriae in viris esse, tamen mulieris est asservatio partorum ; mais pour les choses données depuis le mariage, n’y ayant point de communauté entre les gens mariez, elle ne peut y pretendre part T ce titre-là ; elle est encore excluse par ce même Article de tout droit de conquest ; de sorte qu’il n’est point neces-faire de discuter si la donation a été faite en contemplation du mary ou de la femme, ny de distinguer si elle a été faite à P’heritier en ligne directe, ou à l’heritier en ligne collaterale, comme en la Coûtume de Paris, Article 246. ou si cette difference d’heritiers est considerable ou non, ce que Mr d’Argentré a traité sur l’Article 418. de la Coûtume de Bretagne, l. 1. de quelque qualité que soit le donataire, et quelque soit le motif de la donation, pourvû qu’elle soit faite au mary, elle luy appartient toute antière.

Cet Article n’a pas lieu seulement pour les donations entre vifs, mais aussi pour les testamentaires, la raison de l’exclusion étant égale pour l’un et pour l’autre ; et c’est pourquoy par la Coûtume de Paris, les choses données entrant dans la communauté, la disposition pour les donations entre vifs a été étenduë aux legs testamentaires ;Ricard , Artide 246. ce que j’ay déja remarqué sur l’Article CCCxxIV.

Me Josias Berault apporte deux limitations à cet Article ; la premiere, pour les donations. remunératoires, suivant un ancien Arrest de l’année 1592. ce qui semble contraire à l’intention de la Coûtume, qui ne veut en aucune maniere étendre ny augmenter les droits des femmes ; la donation faite en termes generaux pour recompense de services, ne laisse pas de passer pour une liberalité : et bien que le donateur fût en quelque façon obligé à quelque bien-fait, si toutefois le donataire n’avoit point d’action pour la demandor, et le donâteur ne pouvant être forcé à donner, ce seroit toûjours une pure liberalité qui ne changeroit pas la nature et la qualité ordinaire de la donation, est enim donatio id quod nullo jure cogente conceditur, 1. Doüarii D. de Donat.

La deuxième limitation rapportée par Bérault, est pour la donation faite par la femme à son mary pour son don mobil ; il n’y avoit pas d’apparence de la reputer un conquest, car elle auroit repris par cette voye ce qu’elle avoit donné : d’autre part elle ne pouvoit y demander doüaire, son mary n’en étant pas saisi lors du Contrat de mariage : cependant comme il suffit que ce bien appartienne au mary lors des épousailles pour acquerir doüaire à la femme, on a jugé suivant l’Arrest remarqué parBerault , que le doüaire étoit dû, et neanmoins l’on v a apporté cette restriction, que la femme et les enfans n’y avoient droit que quand la chose donnée en don mobil se trouvoit en la succession du mary ; que s’il l’avoit venduë, la femme ay les enfans ne pouvoient troubler les acquereurs ; et cette distinction entre les heritiers et les acquereurs est fondée sur cette raison, que le don mobil étant fait au mary pour supporter les frais du mariage ; il pouvoit être que le mary l’avoit aliené pour fournit aux frais du mariage : Ainsi jugé en la Grand-Chambre le 26. de Juin 1646. pour Me Marin le FévreAvocat en la Cour, contre le sieur Laudasse ; plaidans Maurry, et Lyout. Autre Arrest du 14. de Janvier 1647. pour du Toupin, au Rapport de Mr de Vigneral.