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CCCCXXX.

Executeurs de Testamens de quoy saisis et à quoy tenu.

Les executeurs testamentaires sont saisis durant l’an et jour du trépas du défunt des biens meubles demeurez aprés le decez, pour l’accomplissement du te-stament, jusques à la concurrence des legs et autres charges en faisant au prealable inventaire, appellez les heritiers et en leurs absence les plus prochains parens : si mieux l’heritier ne veut saisir l’executeur testamentaire des legs et charges en argent ou en essence.

On a cherché dans le Droit Romain l’origine des executeurs testamentaires ; mais ce qui est dit en la l. Si quis sepulchrum i2. 8. Funus de Roligios. et sumpt. funeb. D. l. quidam p6.

S. 3. et l. à plurib. 1o7. de legat. et en plusieurs autres dont l’on se sert pour le prouver n’y ont pas beaucoup de rapport, la Loy S. D. de alim. legat. y est plus conforme : et suivant l’observation de Mr Cujas sur cette Loy, Bartole à pris occasion d’écrire et d’inventer plusieurs choses touchant les executeurs testamentaires, et sa doctrine et ses traditions. quoy qu’elles fussent de son invention et ne fussent fondées sur aucune Loy, n’ont pas laissé d’être reçûës et suivies par tout : l’usage en a été introduit afin que les dernieres volontez des mourans ne demeurassent pas sans execution, et que le payement des legs ne ût pas retardé par l’avarice et par la longueur affectée des heritiers : Mais nos Coûtumes de France leur ont donné beaucoup plus de pouvoir qu’ils n’en avoient par le Droit Civil ; voyezTronçon , sur l’Article 297. de la Coûtume de Paris ; de laLande , sur l’Article 290. de la Coûtume d’Orléans ;Ricard , des donat. p. 2. c. 2.

Sur cet Article l’on peut traiter ces matières ; 1. Quelles personnes peuvent être nommées pour l’execution d’un testament ; 2. De leur devoir et pouvoir : Et en troisième lieu des actions. qu’elles peuvent exercer :

Toutes personnes peuvent être nommées et employées à cette charge ; les hommes et les femmes, les Laiques et les Ecclesiastiques, et même les mineurs, suivant le sentiment de s plusieurs Docteurs.

Les femmes soit qu’elles soient mariées ou qu’elles ne le soient pas peuvent exercer cettt tharge, parce que ce n’est pas un office public, et même le testateur peut avoir ordonné certaines choses qui conviennent à leur sexe ; l. à filio 15. de alim. legat. D. mais à l’égard de li femme mariée les heritiers ne seront pas tenus d’accepter sa nomination, si son mary ne l’autorise, ne pouvant s’obliger sans son autorité et son consentement.

Non seulement un Ecclesiastique seculier, mais même un Religieux profez peut en faire la fonction pourvû qu’il soit autorisé par son Superieur, Cap. ult. de testament. m 6. c. Guy Papé est d’opinion contraire en sa Decision 563. mais la pluspart des Docteurs sont d’un autre avis.

Pour les mineurs quoy que cela fût autrefois en usage il n’est pas juste de les y recevoir, parce qu’ils s’engageroient à une rendition de compte dont ils poutroient être restituez, et c’est pourquoy les heritlers et les créanciers pourroient s’y opposer La qualité de legataire ne forme point d’empeschement à cette nomination, comme je l’ay remarqué sur l’Artcle CCCeXII.

Le devoir et le pouvoir des executeurs testamentaires est expliqué par cet Article ; Iss doivent être saifis dans l’an et jour du trépas du défunt des biens meubles demeurez aprés le decez du défunt, pour l’accomplissement du testament, jusqu’à la concurrence des legs et autres charges, et leur devoir consiste à faire auparavant toutes choses un inventaire des meubles et d’y appeller les heritiers, ou en leur absence les plus proches parens.

Toutes ces conditions que la Coûtume leur impose sont justes : Ils ne doivent point mettre la main à la chose qu’aprés un inventaire et en la presence des heritiers ; et quoy qu’il soit en leur pouvoir de faire la delivrance des legs, ils ne doivent point yproceder qu’aprés l’avoir déclaré aux heritiers ou les avoir dûëment appellez, afin qu’ils puissent opposer à l’etecution du testament s’ils en ont quelque juste caule ; et c’est leur interest d’y apporter ces precautions, afin que tout ce qu’ils auront fait ne leur soit point contredit lors qu’ils rendront leurs comptes

Les executeurs testamentaires peuvent exercer dans l’an toutes les actions qui tendent à l’execution de leurs charges ; mais comme cet Article ne leur donne que la saisine des meubles du défunt, ils ne pourroient pas faire vendre les immeubles, fous ce mot de meubles il faut entendre largement tout ce qui est mobilier, comme l’argent comptant, les promesses, les obligations, les revenus des terres, et les arrerages des rentes Quant au payement des dettes du défunt, cela ne dépend point de la fonction de l’executeur testamentaire, et si P’heritier pour demeurer saisi de tous les meubles et pour en empes-Echer la vente, offroit de consigner entre les mains de l’executeur testamentaire les sommes à quoy se monteroient les legs, il y seroit recevable, parce que l’execution testamentaire n’a interest qu’à faire executer les volontez du défunt.

Les legataires doivent recevoir leurs legs par les mains de l’executeur testamentaire, ou de vheritier, rem legatam propriâ authoritate occupare non potest, l. Non est dubium C. de legat. Sil en use autrement jure suo. cadit. Cujas en ses Comment. sur cette Loy ; Tiraqueau dans son Traité, le mort saisit le vif ; Jul.Clari . l. 3. sentent. 8. Testamentum, c. 88. Decius Cons. 438. in fine, et Cons. 243. GuyPapé , quest. 609. cum notis. Faber in Cod. Fabriano, l. 3. t. 19. defin. 4. le testateur neanmoins peut ordonner par son testament que le legataire de sa propre autorité prenne possession de la chose qu’il luy a léguée.

L’observation de ces Maximes est particulièrement necessaire en cette Province en consetuence de l’Article precedent, qui ne permet au mary de donner à sa femme que jusqu’à la concurrence de la moitié de la valeur des héritages et biens immeubles qu’il possede au temps. de sa mort. S’il étoit permis à la veuve legataire universelle des meubles de son mary de se saisir de son legs de son autorité privée, on ne pourroit connoître si le legs excederoit la moitié de la valeur des immeubles de son mary. Feu Mr Jeun Basin Procureur en la Cour ayant donné tous ses meubles à Catherine le Duc sa femme, elle n’attendit pas qu’il fût mort, étant malade dans une sienne maison de campagne elle envoya promptement à Roüen pour se saisir de ses meilleurs meubles, et s’étant aussi saisie des clefs, lors que l’on proceda au Repertoire des écritures, elle prit plusieurs papiers qu’elle fit jetter dans un lieu fecret ; la prouve de tous ses faits ayant été faite par le frère du défunt, et elle-même les ayant avoüez par ison interrogatoire, par Sentence des Requêtes du Palais le testament fut declaré nul à son égard ; dont ayant appellé la Sentence fut confirmée ; par Arrest en la Chambre des Enquetes, au Rapport de Mr de la Place, le 13. de Juillet 1660.

Autre Arrest pareil sur ce fait au Rapport de Mr de Tiremois Herqueville, en la Chambre des Enquêtes du 7. Mars 1679. Me Eustache Louvel Huissier au Parlement avoit donné par son testament à Barbe Vauquelin sa femme le tiers de ses meubles outre le tiers qui luy ppartenoit de fon chef : aprés la mort de son mary elle entra dans son cabinet d’où elle en leva plusieurs choses : François Louvel soûtint contre elle et contre Eustache Louvel son frere, que vû-les soustractions par elle commises elle devoit être privée des meubles que son mary luy avoit donnez par son testament : Par Sentence du Vicomte elle fut condamnée en trente mille livres sur lesquelles il luy en fut donné un tiers, et on la priva du tiers à elle donné par le testament de son mary, et ledit Eustache Louvel condamné à payer la moitié des trente mille livres : Toutes les Parties ayant appellé le Bailly condamna ladite Vauquedin en six mille livres envers François Louvel, et la priva du tiers qui luy avoit été donné toutes les Parties appellerent encore de cette Sentence, et par l’Arrest la Cour en infirmant la Sentence condamna ladite Vauquelin à rapporter la somme de six mille cinq cens livres pour les soustractions par elle faites de l’argent, argenterie, et autres meubles de ladite succession, et privée du tiers à elle donné par le testament de son mary, Si l’heritier doit perdre sa part en ce qu’il recele, voyezLoüet , l. R. n. 48. par l’Arrest t de ladite veuve Basire, la veuve ne fut pas privée de prendre part en ce qu’elle avoit recelé, parce que le testament fut déclaré nul ; mais la Cour en a fait un Reglement, Article 84du Reglement de 1666

L’executeur testamentaire ne peut pas demander recompense des peines qu’il a prises pour faire executer les dernieres volontez de. son amy, il luy doit ce service en reconnoissance de l’honneur qu’il luy a fait, mais s’ù a fait des frais il n’est pas exclus de les mettre en compte ; cela fut jugé en la Chambre des Enquêtes le 18. de Mars 1637. au Rapport de Mr de Vigneral, entre le sieur Marquis de Bourry et Jean Gilles : l’executeur testamentaire avoit payé les legs, et les heritiers étant absens il avoit envoyé des persones pour leur donner avis de la mort de leur parent ; sur le remboursement qu’il demandoit de ses frais, il fut dit que son office étant purement gratuit et charitable il ne pouvoit demander ses peines et vacations, mais qu’il seroit remboursé de ses frais : autrement petsonne ne voudroit accepter l’execution d’un testament, c’étoit l’interest des testateurs et des legataires.