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CCCCXLVI.

Ce n’est donner et retenir, quand l’on donne la proprieté d’aucun héritage, retenu à soy l’usufrait la vie durant ou à temps, ou quand il y a cause de constitur, ou precaire, auquel cas vaut telle donation.

Cet Article étoit necessaire, parce qu’autrefois la tradition réelle et actuelle des choses donmées étoit abfolument requise pour la validité des donations, mais apresent par le Droit Coû-tumier il suffit que la proprieté et la possession de droit soit transferée sans qu’il soit besoin pour cet effet de saisine, de nantissement, ou de quelques autres solemnitez : La translation de la proprieté et de la possession a été renduë dépendante de la volonté des parties, et c’est pourquoy la Coûtume admet la retention d’usufruit pour une tradition réelle à l’effer de donner accomplissement à la donation ; de sorte qu’aprés la mort du donateur le donataire demeure faisi de plein droit de la chose donnée, et il pourroit intenter complainte contre l’heritier qui voudroit luy contester sa possession

Lors que l’on a donné entre vifs la proprieté d’un héritage, la clause de constitut ou precaire n’empesche pas la translation de la proprieté, mais lors que l’on ne donne qu’une joüissance recaite, non seulement le donateur demeure proprietaire, mais même les fruits peuvent être prrêtez par ses créanciers, comme il fut jugé sur ce fait. Le sieur Baron de Villars donna au siour de Fautereau son fils une Terre par forme de precaire, et tant qu’il plairoit à son pere : Le sieur d’Epreville, creancier du sieur de Villars, fit saisir les fermages de cette terre, et pour maintenir sa saisie il alléguoit que celuy qui donne par precaire demeure toûjours proriétaire de la chose, et que par consequent cette terre appartenant encore à son debiteur il avoit pû en saisir les fruits : Le sieur de la Marc pretendoit au contraire, que la donation l’avoit rendu seigneur de la terre, et que quand même la clause de precaire en conserveroit la proprieté au donateur, les fruits et la joüissance ne pouvoient luy être ôtez par ses créanciers : Le Juge du Ponteaudemer l’avoit maintenu en la joüissance des fruits échûs et à échoir : Sut l’appel du sieur d’Epreville par Arrest du 18. de Mars 1617. la Sentence fut cassée, entant que l’on auroit ajugé au sieur de la Mare les fruits à échoir, et confirmée pour les fermages. échûs comme étant meubles. Cette joüissance precaire laissée par un pere à son fils ne pouvoit pas empescher les créanciers du pere d’exercer leurs actions et de saisir les fruits, elle ne le pourroit pas même à l’égard d’un étranger qui ne pourroit pas obliger les créanciers à se pourvoir par la saisie réelle, cela n’a lieu que pour les acquereurs qui possadent à titre onereux et non pour les donataires.