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CCCCXLVIII.

Insinuation de donations.

Toutes donations de choses immeubles faites entre vifs, de pere à fils en faveur de mariage, ou cause pitoyable, doivent être insinuées et acceptées dans les quatre mois suivant l’Ordonnance, fors et excepté les donations faites aux puisnez en Caux.

La Coûtume a parlé cy-devant des personnes qui sont capables de donner entre vifs, elle a réglé la portion et la qualité du bien dont on peut disposer, elle a même expliqué le temps et l’état où il falloir être pour pouvoir donner valablement ; maintenant elle prescrit la forme et la solemnité qu’il faut garder aux donations entre vifs, en quoy nos Reformateurs ont mité la méthode des Jurisconsultes Romains pour les testamens : Ils ont traité premièrement de la qualité de la personne, et en suite ils sont descendus à la solemnité de l’acte : Si queramus an valeat testamentum, in primis inquirere debemus an qui fecerit testamentum habuerit factio-nem ; Deinde si habuerit requiremus, an si secundùm regulas juris civilis testatus sit : l. 4. D. de testament

Cet Article établit deux solemnitez qui sont absolument necessaires pour faire valoir une lonation, l’acceptation et l’insinuation. L’acceptation est necessaire entre le donateur et le lonataire, et l’insinuation entre le donataire, les heritiers et les créanciers du donateur.

La nécessité de l’acceptation est établie par le Droit Romain, en la I. Nec ambagi, C. de lonat. l. Absenti, eod. et par le Droit Canonique dans le C. Si tibi absenti de prab. in 6. L’Oronnance de 1539. est expresse aux Art. 132. et 133. et la Declaration de l’année 1549. aprés l’acceptation le donateur ne peut plus se repentir ny revoquer ce qu’il a fait ; et de la part du donateur l’acceptation doit être expresse, l’Acte doit contenir le mot d’acceptant, et l’acceptation doit être signée du donataire ; et si ces deux solemnitez manquent la donatlon est imparfaite, le défaut de solemnité ne pouvant être suppleé par aucune équipollence : Il est vray queMonthelon , chap. 29. rapporte un Arrest du Parlement de Paris, par lequel il avoit été jugé que l’insinuation requise par le donataire valoit d’acceptation, mais il s’étoit trompé, son erreur a été rélevée par Me Julien Brodeau en son Commentaire fut Mi Loüer, I. D. n. 4. où il asseure que Monthelon avoit pris cet Arrest à contre sens ; l’insinuation ne peut valoir d’acceptation, parce qu’il faut accepter avant que d’insinuer, et c’est l’acceptation et non l’insinuation qui engage et qui lie les volontez du donateur et du donataire les uns vec les autres, et qui parfait et accomplit la donation ; le consentement du donateur ne suffit pas, celuy du donataire est necessaire, et c’est pourquoy il faut qu’il soit exprés et formel pa l’acceptation ; bien que l’acceptation expresse soit si absolument requise, on en dispense néannoins les donations faites par Contrat de mariage, à l’égard desquelles on admet l’accepta-tion par equipollence, la presence des conjoints et la consommation du mariage verifiant asses l’acceptation des dons qui leur sont faits par le Contrat : Les Arrests du Parlement de Paris. qui l’ont jugé de la sorte sont rapportez par Mr Julien Brodeau en son Commentaire sur MrLoüet , 1. D. n. 4. et par M. Jean Marie ;Ricard , des Donat. n. 835. et suivans. Dans le Parlement de Tolose l’on fuit aussi cette jurisprudence ; Mr deCambolas , l. 5. c. 7.

On n’a pas la même indulgence pour les mineurs, leur âge ne les dispense point de la rigueur de l’Ordonnance, et le défaut d’acceptation nuit au mineur comme au majeur ; et quoy que l’Ordonnance ne parle point expressément des mineurs, on ne peut dire qu’ils en soient exceptez, quia statutum est prohibitorium, et qu’il s’étend contre toutes sortes de personnes quelques favorables qu’elles puissent être ;Monthelon , Arrest 101.Bouguier , Arrest 2. Brodeau sur M.Loüet , 1. D. n. 58.Ricard , des Donat. n. 844. ce qui a lieu même contre l’E-llise, quoy que Mr deCambolas , l. 5. c. 7. estime que les donations en faveur de la cause pieuse loient valables sans acceptation, suivant la Loy Si quis donaverit, C. de sacro. Eccles. Augustinus qui est une Constitution qu’Antonius Augustinus a le premier donnée au public ; mais cette Constitution n’a point été suivie

Puis que l’acceptation est requise même à l’égard des mineurs, il faut sçavoir par qui elle peut être faite pour eux ; le pere peut l’accepter pour ses enfans en qualité de legitime administrateur et le tuteur pour ses mineurs, sans être obligé de prendre l’avis des parens, ny qu’il ait besoin d’un pouvoir special, et il a toûjours assez d’autorité quand il s’agit de leur bien et de leur utilité,Loüet , 1. D. n. 55. mais au moins en ce cas l’acceptation doit être signée par le tuteur, autrement la donation n’est point valablement acceptée, suivant l’Arrest remarqué par MrLoüet , 1. D. n. 58. Le défaut d’acceptation qui pourroit être allégué par l’heritier ou par un creancier ne pourroit être opposé par le tuteur qui auroit donné à son mineur, parce qu’il étoit de son devoir et de sa diligence de luy faire créer un curateur à l’effet d’accepter la donation,Brodeau , ibid. Me JeanRicard , des Donat. n. 865. est d’avis contraire, parce, dit-il, que si le pere ou le tuteur eussent voulu donner la perfection à ce qu’ils avoient commencé, ils n’eussent pas manqué d’apporter leurs soins à faire créer un curateur à l’effet de cette acceptation. On répond que le pere et le tuteur s’étant une fois engagez ne peuvent plus se resilier, et s’ils n’ont pas accompli ce qui étoit requis pour leur ôter le moyen de se repentir contre l’interest de leur mineur, ils n’en peuvent tirer avantage à son prejudice ; aussi le même Auteur avouc que la chose donnée ne peut pas être rétirée des mains du donataire, non pas directement à cause de la donation, mais par une autre raison qui resulte de ce que le tuteur est responsable de sa negligence, ce qui revient à la même chose.Ricard , des Donat. p. 1. c. 4. sect. 1. a traité cette question, si le mineur qui est capable de signer peut valablement accepter ; Et aprés avoit rappoité les raisons de part et d’autre, et qu’il a conclud pour la negative, il dit que cette question est encore problematique au Palais.

On demande si les Notaires ont le même pouvoir d’accepter pour les mineurs ; Mais l’on ne doute plus aujourd’huy que ces acceptations ne sont pas suffisantes.

Il en est de même à l’égard des majeurs, les acceptations faites par les Nutaires pour eux sont de nulle consideration, et elles n’ont effet que du jour qu’elles ont été ratifiées par les donataires en personne, ou par Procureur specialement fondé du vivant du donateur, et que einstrument de la donation soit inseré en la note de ladite acceptation suivant l’Ordonnance : Brodeau en son Commentaire sur MrLoüet , 1. D. n. 4.Ricard , n. 865.Coquille , quest. 165 ce qui a été jugé en ce Parlement en la Chambre des Enquêtes, le 3. de Février 1653. au Rapport de Mr Salet, entre Thomas Doublet et Toussaint Doublet. Une donation acceptée par un Tabellion fut déclarée nulle, quoy que l’insinuation en eût été requise par un Procureur du Bailliage au nom du donateur et du donataire.

Il y a eu neanmoins des Arrests en ce Parlement, par lesquels une donation acceptée sans procuration par un parent du donataire a été déclarée bonne, parce que depuis le donataire en avoit requis l’insinuation par Arrest du 12. de Juillet 1649. au Rapport de Mr de le Place en la Chambre des Enquêtes : Cet Arrest étoit contraire à l’Ordonnance, mais l’Artes rapporté par Monthelon nous avoit fait tomber dans cette erreur que l’acceptation requise par le donataire valoit d’acceptation, et il me souvient que dans la plaidoirie d’une cause qui fut appointée au Conseil sur cette même question on ne s’appuya que sur l’autorité de cet Arrest que l’on croyoit être véritable : On peut induire de l’Article CCLXXXVI. que l’acceptation n’est point suppleée par l’insinuation requise par le donataire ; par cet Article la donation du tiers de Caux faite par le pere en faveur de ses puisnez n’est point sujette à insinuation. du vivant du donateur, mais elle le doit être six mois aprés sa mort, et en ce cas l’insinuation.

vaut d’acceptation : or si dans les regles et suivant l’usage de la Province l’insinuation esit valu d’acceptation, il eût été super slu d’en faire une disposition particuliere, au contraire il faut conclure de-là que si dans un cas si favorable l’acceptation est suppleée par l’insinuatiom par un privilege particulier, dans toute autre rencontre l’insinuation ne peut valoir d’acceptation : que si l’on a jugé depuis que le Notaire, quoy qu’il soit personne publique, ne peut accepter valablement pour un absent, suivant l’Arrest de Doublet dont je viens de parler, nonobstant que l’insinuation en eût été requise au nom du donateur et du donataire par un Procureur du Bailliage de Roüen qui étoit encore une personne publique, un parent a beaucoup moins de pouvoir et de qualité pour accepter avec effet une donation : Il est si fort ne-sessaire que celuy qui accepte pour un autre ait une qualité suffisante, que suivant le sentiment deRicard , des Donat. n. 848. l’acceptation faite par une femme mariée sans l’auro-ité de son mary ne seroit pas valable, non plus que celle d’un mineur sans le consentement et l’approbation de son tuteur. Un Prêtre avoit donné à ses petits neveux certain héritage. qu’il avoit acquis, cette donation n’avoit point été acceptée, mais le pere des mineurs ayant fait une transaction avec le donateur pour quelques autres affaires il étoit dit en ces termes, sans déroger à la donation des enfans d’un tel, dont les parties sont demeurez contens et ont signé : On pretendit que cela valoit d’acceptation, le Juge declara la donation valable. Barbey pour l’Appellant conclud qu’elle étoit nulle faute d’acceptation, suivant l’Ordonnance de 1539 Art. 132. et les Arrests remarquez par MBouguier , 1. D. et la Coûtume requerant expressément l’acceptation elle ne pouvoit être suppléée. Durand pour les mineurs répondoit que leur pere comme leur tuteur naturel et legitime avoit pû accepter valablement pour eux cette donation, que les paroles de la transaction avoient la même force qu’une acceptation expresses étant dit sans déroger à la donation dont les parties sont demeurez contens : C’étoit l’accepter assez expressément que de n’avoir point voulu y déroger, n’étant pas nécessaite que le terme d’accepter y fût employé : Par Arrest du 7. d’Aoust 1664. la donation fut confirmée.

Un Seigneur fit donation à un particulier de la joüissance d’une terre sa vie durant, cette donation ne fut point acceptée par le donataire ny insinuée, mais il joüit du revenu de cette terre durant plusieurs années que le fermier luy paya, car il n’en joüit point par ses mains aprés plusieurs années on luy contesta cette donation, et on luy demanda même la restitution des joüissances : le donataire disoit que la joülissance valoit bien par équipollence une acceptation, et à l’égard de l’insinuation les heritiers du donateur n’étoient point capables de l’opposer : On répondoit pour l’insinuation que pendant la vie du donateur et du donataire elle pouvoit être faite, mais non aprés le décez de l’un ou de l’autre quand les quatre mois sont passez ; dans le fait le donateur étoit decedé avant que l’insinuation fût faite, pour l’aceptation depuis l’Ordonnance non seulement elle a été jugée nécessaire, mais de l’essente même de la donation. Il restoit à sçavoir si cette acceptation peut être suppleée par équipolsence, et si cette joüissance est équipollente à une acceptation ; Il n’y a qu’un cas ou l’on upplée l’acceptation, qui est le Contrat de mariage, la faveur de ce Contrat étant si grande qu’elle supplée même le nantissement et la realisation, la donation étant faite en contemplation du mariage, si le mariage ne s’accomplit point quand il y auroit acceptation elle ne seroit pas bonne ; mais d’avoir reçû les fermages de cette métairie par les mains d’un fermier, ce n’est ny acceptation ny équipollence : si le donataire se fût mis en possession et qu’il eûr joûy par ses mains, cela eût pû faire une difficulté considérable : Par Arrest du Parlement de Paris. du 21. de Janvier 1620. au Rapport de Mr de Saintot, la donation fut infirmée, et le donafaire déchargé de la restitution des joüissances.

Quand on dit que l’acceptation est de l’essence de la donation, il ne faut pas conclure de-là que l’on ne puisse accepter depuis que l’acte est fait, mais cela veut dire que la donation ne peut jamais valoir sans acceptation ; quand la donation est faite à un absent, il n’est pas neressaire que le Notaire accepte pour luy pour en induire qu’elle seroit nulle, eo ipfo, et que l’on ne pourroit par aprés faire une acceptation, et qu’il faudroit recommencer ou avoir une pouvelle signature du donateur ; car bien qu’il soit vray que le donateur puisse revoquer une dlonation qui n’est point acceptée sans donner aucun temps au donataire pour l’accepter, non pas même celuy de quatre mois, néanmoins il est sans doute que tant que le donateur et le lonataire vivent, le donataire peut accepter sans en parler au donateur, et il n’a pas besoin l’un nouveau consentement ou d’une nouvelle signature, pourvû qu’il n’ait point revoqué, nais il faut que l’acceptation soit dans le corps de la donation, ou que l’on la transcrive, et qu’au bas de cette copie ou de la minute on mette que le donataire l’a acceptée ; mais lors que celuy qui étoit absent veut accepter la donation, il est absolument necessaire que l’instrument de la donation soit inseré dans l’acceptation, l’Ordonnance de 1549. y est expresse en ces termes, pouroû que l’instrument de la donation soit inseré en la note, acte et instrument de ladite acce-pration : et quoy que suivant la remarque deRicard , des Donat. p. 1. c. 4. sect. 1. il ait été jugé au Parlement de Paris que l’instrument de la donation est reputé suffisamment inseré Sans l’acte de la donation lors qu’elle est faite au pied du Contrat de donation, parce que ces leux actes étant incorporez l’un dans l’autre n’en composent qu’un seul, neanmoins l’Ordonnance est si expresse au contraire que cela reçoit beaucoup de difficulté

L’acceptation est necessaire pour faire valoir la donation entre le donateur et le donataire, car étant acceptée le donateur est obligé de delivrer et de delaisser la chose donnée, et ce dessaisissement actuel de la proprieté de la chose donnée est une des marques les plus essentielles d’une donation entre vifs faite sans déguisement et sans fraude.

Mais Pinsinuation est particulièrement necessaire contre les creanciers du donateur, et même contre les heritiers. On a réglé par trois Ordonnances la forme des insinuations : La premiere de l’année 1534. Art. 132. contient que toutes donations doivent être insinuées et enregistrées aux Jurisdictions ordinaires des parties et des choses données : La seconde est de Henry Il. Art. 2. pour laver la difficulté pour les donations remunératoires, et cette Ordonnance contient que sous le nom de donations seront comprises et sujettes à l’insinuation les donations faites par Contrat le maniage et autres donations entre vifs, bien qu’elles ne soient simples, ains remuneratoires où autrement : La troisième est l’Ordonnance de Moulins de l’année 1566. Art. 10 elle ajoûre en l’Art. 58. qu’elles seront insinuées dans les quatre mois dn jour de la datte d’icelles, autrement qu’elles seront nulles, tant à l’égard des creanciers que de l’heritier du donateur.

Il ne sera pas inutile d’examiner comment et dans quel temps l’insinuation doit être faite, quelles personnes sont recevables à opposer ce défaut, et si l’insinuation est necessaire en touses sortes de donations, et enfin en quelle forme elle doit être faite : ra forme des insinuations est que les donations soient publiées et enrégistrées aux Greffes des Jurisdictions où les choses données sont situées. Il ne suffit pas que l’insinuation soit employée sur le Contrat, il faut encore qu’elle soit enrégistrée pour éviter aux frabdes et afin que l’on puisse en avoir connoissance, et c’est pourquoy par Arrest en la Chambre de l’Edit de nois de Juillet 1629. entre le sieur de Vaux S. Clair, et le sieur de l’Isle, une insinuation qui ne contenoit point l’enrégistrement de la donation fût déclarée. nulle : et par Arrest du Parlement de Paris il a été jugé qu’encore que la donation eût été faite en Jugement le man-quement d’insinuation la rendoit nulle ;Loüet , I. D. n. 22. Il faut aussi qu’elle soit lûs publiquement en Audience les Assises tenantes, et si les quatre mois étoient prests à expirer avant le jour des Assises, on peut faire publier la donation en un jour extraordinaire, à la charge de reiterer cette publication aux prochaines Assises Le donataire a quatre mois pour faire insinuer sa donation s’il est demeurant dans le Royaume, et six mois s’il est absent et hors du Royaume, et les obligations contractées par le donatour entre la donation et l’insinuation faite dans les quatre mois, ne peuvent avoir d’hypothe-que au prejudice du donataire, parce que l’insinuation en ce cas a un effet retroactif ; ainsi jugé par Arrest en la Grand. Chambre du 26. de Juin 1626. Il en seroit autrement si l’insinuation avoit été requise aprés les quatre mois, elle ne serviroit au donataire que du jour qu’elle auroit été faite, et les dettes contractées par le donateur seroient préférables à la donation.

Il y a des personnes qui ne sont pas recevables à opposer le défaut d’insinuation, le donareur ne le peut alléguer, car il n’a point d’interest à l’insinuation qui n’est point requise pour son regard, mais seulement pour les créanciers et pour les heritiers, et par la même raison il ne peut revoquer la donation avant l’insinuation : On a fait cette question, si celuy qui avoit signé au Contrat de donation et depuis avoit acquis les choses données pouvoit objecter le défaut d’insinuation : Un Gentilhomme avoit été present et avoit signé au Contrat de mariage d’un sien domestique auquel on faifoit donation de quelques immeubles, ce Gentilhomme qui avoit acquis les heritages donnez étant troublé par les enfans du donataire, leur opposoit que la donation n’avoit point été insinuée ; les enfans répondoient que cette défense étoit mal seante en sa bouche, les Loix n’ont ordonné l’insinuation des donations que pour les rendre notoires et publiques, et pour éviter les fraudes et la surprise : or il n’importoit point par quelle voye l’on ait eu connoissance de la donation, ou par celle de la publication, ou pour avoir signé au Contrat, il suffit que l’on en ait eu une parfaite connoissance : celuy qui a signé à l’acte de donation ne peut se plaindre d’avoir été surpris en achetant ce qu’il n’ignoroit point n’appartenir plus à son vendeur à cause du don qu’il en avoit fait, et l’insinuation ne fen auroit pas mieux informé que son propre fait et sa signature : Le Juge de Tinchebray voit ajugé l’héritage aux enfans, dont l’acquereur ayant appellé la Sentence fut confirmée par Arrest en l’Audience de la Grand. Chambre du 24. de Février 1668. Coquille étoit d’un sentiment conforme à cet Arrest, Quest. 165. Me Jean Ricard est d’opinion contraire, par cette raison que l’insinuation étant désirée pour empescher les fraudes et afin que la proprieté des choses ne demeurât pas dans l’incertitude, ceux lesquels y ont été presents ne sont pas obligez d’en faire un autre jugement jusqu’à ce qu’elle ait été suivie d’insinuation, qui est une cormalité nécessaire, et il cite un Arrest du Parlement de Paris qui la jugé de la sorte ; il s’aide aussi de l’autorité de Mr le President du Faure en son Code, de Donat. que sub modo, defin. 8. de Donat. par. 1. c. 4. sect. 3. gl. 1. n. 1. 49. le seigneur qui a en sa saisine un Contrat de donation et a recû les lots et ventes ne laisse pas de se prevaloir du défaut d’insinuation s’il se rencontre qu’il y ait interest en une autre qualité : En effet il semble que cette science d’un particulier et sa signature en un acte ne dispense pas le donataire d’accomplir ce qui est prescrit par la

Loy pour faire subsister un acte, et celuy qui acquiert la chose donnée peut dire qu’il ost en bonne foy quoy qu’il n’ait pas ignoré la chose, parce qu’il s’est appuyé sur l’autorité de la Loy qui déclare nulles les donations non insinuées, de sorte que la science et la certitude que l’on a de la donation ne doit pas excuser ces manquemens de solemnitez qui se rencontrent en l’acte : La Cour se porta à confirmer la donation par la qualité de l’acquereur, c’étoit un Gentilhomme qui avoit acquis ce qu’il sçavoit bien avoir été donné à son domestique, que si ce même Gentilhomme avoit revendu ce même héritage à un tiers, l’exception des enfans ne leur eût pû servir contre luy.

Puis que le donateur ne peut pas se prevaloir du défaut d’insinuation, il semble que fes heritiers ne peuvent pas l’objecter, parce que celuy qu’ils representent ne l’auroit oû faire, quoy que l’Ordonnance de Moulins, Article 58. dispose en termes exprés, qu’à faute d’insinuation seront et demeureront les donations nulles et de nul effet et valeur, tant pour le regard du creancier que de Pheritier du donnant. L’on n’a pas laissé de douter longtemps. en ce Parlement, si les heritiers étoient recevables à proposer cette nullité : Mais enfin il a été jugé plusieurs fois suivant l’Ordonnance que l’insinuation étoit requise tant à l’égard des eritiers comme des creanciers ; ce qui est fondé sur ces raisons, que l’heritier n’est pas cense contester le fait du défunt, mais accuser seulement la negligence du donataire : et d’ailleurs lheritier a un pareil interest que les creanciers que la donation soit insinuée, car en acceptant ne succession il s’engage à payer toutes les dettes dont elle est chargée : Il est donc juste qu’il soit informé des donations faites par le défunt avant que de se déclarer heritier, parce qu’ils gnorent souvent ce qui s’est passé dans leurs familles, et que par cette raison ils ont besoin d’en être instruits ;Coquille , Quest. 165.Bacquet , des Droits de Justice, c. 21. n. 36. et suivans.

Dans les Coûtumes où le mary peut donner à la femme les heritiers du mary ne peuvent objecter à la femme le défaut d’insinuation, car elle auroit cette exception contr’eux, que le mary étant le maître et ayant la direction des actions de sa femme il étoit de son devoir de requerir l’insinuation : Tout administrateur de la personne et des biens d’autruy doit veilles à la conservation des actions de celuy qui est sous sa conduite. On a en suite traité cetti question, si la femme ne doit pas en tout cas faire insinuer dans les quatre mois aprés le decez de son mary : Me Jean Ricard a soûtenu que Mr Loüet s’étoit trompé lors qu’il avoit ssuré en la l. I. n. 1. que les heritiers n’étoient pas recevables à opposer le défaut d’insinuation à la femme, pourvû qu’elle eût fait insinuer la donation dans les quatre mois aprés la mort du mary et non autrement ; et aussi que MrLoüet , 1. D. n. 4. avoit luy.-même réconnu son erreur et déclaré que l’Arrest avoit été rendu contre son avis, que l’heritier du mary étoit du tout non recevable à objecter à la femme le manquement d’insinuation, et à se prevaloir de ce qu’elle ne l’avoit pas faite depuis qu’elle étoit devenuë libre, et ainsi qu’il falloir rendre garde de n’expliquer pas ce que dit cet Auteur sous le nombre 1. de la I. I. par le Chap. 4. de la l. D. comme avoit fait son Commentateur, vû qu’au contraire le contenu en la l. 1. doit être corrigé par ce qu’il a dit sous la I. D.Ricard , n. 1244. Je m’engagerois inutilement à démeler cette difficulté, parce que suivant nos Maximes elle ne peut naître en cette Province où les donations du mary à la femme sont generalement défenduës. en tout temps.

Les Receveurs des Amendes ne sont point des parties capables d’objecter le manquement l’insinuation. Arrest du 27. de May 1609. entre Marguerite le Roy veuve du Tenneur et tutrice de ses enfans, et Baumer Receveur des Amendes : l’avancement de succession fait par de Tenneur à ses enfans n’avoit point été insinué, il fut depuis executé à mort et condamné en de grosses amendes ; le Receveur des Amendes voulut debattre la donation faute d’insinuation, nonobstant son contredit elle fut confirmée, quia de hpotheca non acebatur ; la dona-tion ne peut être annullée faute d’insinuation suivant l’Ordonnance de Moulins, que par l’horitier ou par le creancier, mais le Fise n’est creancier ny heritier.

Il y a donc des personnes qui ne sont pas recevables à objecter le défaut d’insinuation, mais s il y en a peu qui soient dispensées de la rigueur de l’Ordonnance, ou qui soient restituables pour avoir ômis cette solemnité : Il est sans doute que les donations faites par le Roy aux particuliers ou par les particuliers au Roy n’y sont point comprises, la question a été longtemps problematique.

On a douté à l’égard des mineurs pour sçavoir s’ils en pouvoient être dispensez, ou en tout cas s’il y avoit lieu de les restituer contre le défaut d’insinuation : Les Arrests du Parlement de Paris sur ce sujet ont été fort differens en quelques cas et sur des circonstances particulieres ; les mineurs ont été relevez du défaut d’insinuation suivant la l. Minorib. C. de donat. ante nupt. quoy qu’ils ne pûssent l’être du défaut d’acceptation ; ces Arrests ne pouvoient servir de loy, parce que la pluspart portoient cette clause, sans tirer à consequence : aussi quand la question a parû sans aucunes circonstances particulières et dans les termes generaux elle tté jugée contre les mineurs, parce que les Loix leur ont bien accordé de la protection et des privileges pour conserver ce qui leur appartient, mais quand il s’agit d’acquerir ou de rendre leur condition meilleure ils n’ont jamais été dispensez du droit commun, et c’est maintenant une jurisprudence certaine ; voyez Brodeau en son Commentaire sur M.Loüet , l. D. n. 58. et S8.Ricard , des Donat. part. 1. c. 4. sect. 3. gl. 3.

L’on pretend néanmoins qu’il faut faire distinction entre les heritiers et les créanciers, et que si par quelques Arrests on avoit jugé que les mineurs n’étoient point restituables, sauf leur recours contre leurs tuteurs ou curateurs, c’étoit alors que les donations étoient contestées par les créanciers du donateur, mais qu’il ne s’en trouvoit point qui eussent été rendus. au profit des heritiers, parce que comme le donateur ne pourroit pas arguer la donation par ce défaut, son heritier qui est tenu de ses faits ne la pourroit pas contester : cette question. s’offrit en la Chambre des Enquêtes du Parlement de Paris entre Mr le Prince de Guimené d’une part, et Mr le Comte de Rochefort Abbé de Vendôme d’autre, sur la validité d’une donation faite par feu Mr le Duc de Monbason audit sieur Comte de Rochefort, on alléguoit pour nullité contre cette donation qu’elle n’avoit point été insinuée : Par Arrest du S. de Septembre 1655. aprés une plaidoitie de trois Audiences les parties furent appointées au Conseil, et cependant on ordonna que par provision la donation seroit executée. On allégua lors de la plaidoirie un Arrest donné en la même Chambre le 18. d’Aoust 1640. au Rapport de Mi Gilpert, pour une donation faite à un mineur sans insinuation contre l’heritier du donateur.

La Jurisprudence de ce Parlement n’est pas si incertaine, les mineurs en cette rencontr n’ont aucun privilege, soit que le défaut d’insinuation leur soit objecté par les créanciers ou par les heritiers.

I n’y a point de doute que les rustiques et les ignorans ne soient comptis sous l’Ordonnance.

Il ne reste plus qu’à éclaircir ce point, si toutes espèces de donations doivent être nécesfairement insinuées

Bien que l’Ordonnance de 1539. se fût expliquée en termes generaux, et que par ces mots, toutes donations, on ne dûst point faire de distinction sur la nature et la quasité des donations, néanmoins comme celles qui sont faites pour recompense de services ou en faveur de mariage ne passoient pas dans le sentiment de plusieurs pour de véritables donations, Henty Il. fit ane Ordonnance en l’année 1549. par laquelle il déclara que sous le nom de donations l’on devoit comprendre celles qui sont faites par Contrats de mariage et toutes autres, bien qu’elles ne fussent simples : et l’Ordonnance de Moulins, Art. 58. veut que toutes donations faites sentre vifs mutuelles, reciproques, onereuses en faveur de mariage, et autres de quelque forme et qualité qu’elles puissent être faites entre vifs soient insinuées aprés les quatre mois, le tout à peine de nullité, tant à l’égard de l’heritier que du creancier.

Lors de la Reformation de la Coûtume on empluya cet Article pour Coûtume nouvelle, mais l’on ne se contenta pas de dire en termes generaux comme on avoit fait par l’Ordonnance de Henry Il. et par celle de Moulins, que les donations d’immeubles faites entre vifs en faveur de mariage devoient être insinuées dans les quatre mois. Nos Reformateurs previrent encore fort prudemment que ces paroles, en faveur de mariage, ne fetoient, pas cesser toutes les difficultez, et que l’on pourroit douter si les donations faites en directe seroient sujettes à la forme de l’insinnation : ce fut pour cette raison qu’ils s’expliquerent en cette manière, que les donations de pere à fils en faveur de mariage devoient être insinuées, excepté tou-tefois celles faites par les peres à leurs puisnez en Caux.

L’on peut remarquer par la lecture des Arestographes du Parlement de Paris que ces paroles, de pere à fils, ont été ajoûtées soit à propos pour prevenir cette célèbre question que l’on a formée au Parlement de Patis, à sçavoir si les donations faites par pete et mere en faveur de mariage de leurs enfans, soit fils ou filles, sont sujettes à l’insinuation à l’égard des creanciers : Dans la troisième et quatrième Partie du Joutnal du Palais cette matiere est doctement traitée, et l’Auteur y a rapporté les Arrests qui ont decidé, que non seulement les donations faites par pere et mere en faveur du mariage de leurs enfans ne sont point sujettes à l’insinuation à l’égard des créanciers, mais même que les donations de cette qualité ne sont point reductibles à la quantité des biens que les peres et meres peuvent donner à leurs enfans suivant leurs conditions et facultez au temps qu’ils les ont mariez, Entre les raisons et les autoritez dont cet Auteur se sert pour prouver que par toute la Franee l’Article 58. de l’Ordonnance de Moulins a lieu, il cite l’Art. CCCCXLVIII. de la Coûtume de mandie qu’il appelle la sage Coûtume, parce qu’en effet il n’y a gueres de cas importans qu’elle n’ait prevûs ; mais comme la disposition de cet Article est contraire à la proposition qu’il veur établir, qué la donatlon de pere à fils en faveur de mariage n’est point sujette à l’insinuation, il ajoûte que cette disposition particulière étant contre le droit commun, Bérault, fameux Commentateur de cette Coûtume sur cet Article, en excepte la dot des filles, et en rapporte un Arrest du 8. Mars 1600. rendu au Parlement de Normandie contre les créanciers du pere donateur, et que dans l’espèce de cet Arrest le seul motif, ainsi que l’obsorve ce Commentateur, fut que l’Ordonnance des insinuations n’avoit point parlé des dois, mais seulement des donations, et sur cet Arrest le même Auteut fait ces observations qu’il a été donné depuis l’Ordonnance de Moulins et qu’il justifie deux choses ; la premiere, que l’Ordonnance ne comprend point les avancemens d’hoirie faits par pere et mère dans le Contrat de mariage de leurs enfans ; la seconde, que les dots des filles ne sont pas plus privilegiées que ce qui est donné aux mâles en Contract de mariage par leurs pere et mere On ne pouvoit donner à nôtre Coûtume plus à propos qu’en cette rencontre cet éloge, d’avoir sagement prevâ les cas les plus importans, puis qu’en effet elle a suppleé ce qui semploit manquer à la disposition de l’Ordonnance, et qu’elle s’est expliquée si nettement pour les donations en faveur de mariage qu’il n’y a point eu lieu parmy nous de douter, comme on a fait ailleurs, que les donations en faveur de mariage, même celles de pere à fils, ne fussent sujettos à l’insinuation, et l’on peut soûtenir qu’en ce faisant nos Reformateurs ont mieux entendu le véritable sens de l’Ordonnance ; car les pretextes dont on s’est servi pour eluder sa disposition, en n’y comprenant que les donations faites en faveur de mariage par des collateraux ou par des étrangers, me paroissent peu solides : car encore qu’il y ait une presom-ption naturelle que les peres et meres en mariant leurs enfans leur fassent quelques avance mens, néanmoins comme ces donations et ces avancemens peuvent être plus ou moins grands, et qu’ils peuvent même comprendre tous leurs biens, il est à propos afin que les étrangers ne soient pas surpris, que ces donations soient renduës publiques et notoires ; et c’est pourquoy nôtre Coûtume qui a voulu prevenit autant que les lumières de la prudence le pouvoient permettre, les fraudes, les tromperies, et les mauvaises explications que l’on pouvoit donner à les dispositions, ne s’est pas contentée d’avoir ordonné dans l’Article CCXLIV. que si le pere promis à l’un de ses enfans en faveur de mariage de luy garder sa succession cette promesse oit insinuée, elle a encore jugé nécessaire en expliquant l’Ordonnance d’y ajoûter que les donations de pere à fils en faveur de mariage étoient sujettes à l’insinuatlon.

Mais parce que l’Auteur du Journal en citant l’Arrest remarqué par Berault sur cet Artis cle y a fait des reflexions qui ne sont pas conformes à l’esprit de nôtre Coûtume, il est important de faire observer qu’encore que la dot promise à la fille ne soit point sujette à l’insi-quation, lon ne doit pas conclure de l’Arrest remarqué par Berault que lOrdonnance de Moulins ne comprend point les avancemens d’hoitie faits par pere et mère dans le Contrat de mariage. de leurs enfans, et que si la dot des filles n’y a point été comprise ce n’a pas été par cette raison qu’elle soit plus privilegiée que ce qui est donné aux mâles dans un Contrat de mariage, mais que l’Arrest est fondé sur une autre consideration qu’il est necessaire de faire remarquer

Il n’y a pas d’apparence en Normandie de soûtenir que lOrdonnance de Moulins ne comprend point les avancemens d’hoitie faits par les pere et mère à leur fils dans leur Contrat de mariage, puis que cet Article qui les y comprend expressément déclare que c’est conformément à l’Ordonnance, ce que la Coûtume avoit déja déecidé par l’Artirle CCXLIV.

Il est vray que cela n’a pas été étendu à la dot, et que sous le mot de fils les filles n’ont point été comprises, mais la raison en est apparente. En Normandie les filles ne succedent point tant qu’il y a des mâles ou descendans des mâles, elles sont seulement reputées créancieres naturelles de leur pere ; in tam necessariis conjunctisque personis sub liberalitatis nomine ebitum naturale persolvitur : l. Vnica, C. de impon. lucrat. descript. Et Pontanus sur l’Art. 89. de la Coûtume de Blois, dit que hoc casu pater proprié donare non intelligitur, sed magis anticiare tempus in debito rest tuendo : lors que leur pere les a mariées et qu’il n’a point acquité les comesses qu’il leur a faites elles viennent sur ses biens dans l’ordre et l’hypotheque de eurs Contrats de mariage, s’ils sont en bonne forme et s’ils ont été reconnus suivant le Reglement de 1600. ce qui ôte aux creanciers tout fujet de se plaindre ; car outre qu’ils ont ù avoir connoissance des Contrats de mariage, qui doivent necessairement avoit été rendus publics pour acquerir hypotheque, on peut encore leur opposer qu’ils ont dû prevoir que les filles mariées pouvoient être creancieres de leur pere par cette presomption naturelle, que les peres et meres dotent toûjours leurs filles en les mariant, et c’est par cette raison que le Droit Romain les exemproit de l’insinuation, l. 31. 6. de jure dot. D’ailleurs à l’égard du gendre, la promesse faite par le pere est plûtost un Contrat et une obligation qu’une donation : Contractus sunt potius quam donationes, nempe pensationes onerum matrimonii ; & hoc jus semper obrinuit ut dotes non insiuuarentur actis sive gestis publicis,Cujac . Ad l. 11. c. de dot. promiss.

Pour la reduction de la dot les creanciers anterieurs au mariage n’ont pas interest de la denander, parce que la dot n’étant reputée qu’une dette du pere, la fille n’en peut être payée sur ses biens que dans l’ordré de son hypotheque ; et par ce même principe que les filles ne sont que de simples creancieres, les créanciers posterieurs à leur Contrat de mariage ne pouvoans ignorer cette qualité, ne sont pas admissibles à demander la reduction, parce qu’ayant contracté avec le pere depuis le mariage de sa fille ils ne peuvent se plaindre que le pere ait tromis une dot excessive à sa fille pour les frauder, ny se prevaloir de la croyance qu’ils ont euë que le pere n’auroit donné que proportionnément à ses facultez, puis que par la notorieté du Contrat de mariage ils ont pû en être pleinement informez. Il est vray que l’on peut répondre que par cette raison les avancements d’hoiries doivent être exempts de l’insinuation, puis que la presomption n’est pas moins violente : mais il y a cette difference qu’ordinairement les peres ne font pas de grands avantages à leurs filles lors qu’ils ont des fils, et que d’ailleurs étant un droit public que les filles ne sont reputées que creancieres pour leur dot, et que leur hypotheque ne se prend que du jour de leur Contrat de matiage quand il a été reconnu suivant le Reglement de l’année 1600. personne ne peut être trompé que volontairement.

Par ce même principe ce que le pere donne à sa fille aprés l’avoir mariée par augmentation de dot peut valoir sans l’insinuation, parce que ces donations ne pouvant avoir leur effet par a Coûtume qu’en cas qu’elles n’excedent point la legitime de la fille, elles sont considerées comme un supplément qui doit avoir les mêmes prerogatives que son principal : On jugea neanmoins le contraire par un Arrest le 17. de Juin 1662. dont j’ay déja parlé ailleurs. Sur un appel du Juge de Coûtance une donation faite par un pere par son testament à ses filles mariées de son propre, non insinuée et n’ayant pas vécu trois mois aprés son testament, fut declarée nulle, les Juges étant dans cette croyance qu’il n’est permis au pere de donner à sa fille qu’en la mariant, et que cette augmentation de dot étoit contre la Coûtume, d’où ils concluoient qu’il ne falloir point ajoûter grace sur grace, et qu’il ne falloit pomt approuver ces donations si elles n’étoient revétuës. de toutes les solemnitez necessaires pour les donations qui seroient faites à des étrangers, telles que sont les filles en Normandie, et de faize Juges en la Grand. Chambre qui jugerent incidemment un partage de la Chambre des Enquêtes, il n’y en eut que quaire qui fussent d’avis contraire, Mr d’Amiens Rapporteur, Mi de Monfort Compartiteur, à l’avis duquel il passa entre Hainel et Valières : mais ayant fait voit ailleurs que le pere peut donner à sa fille autrement qu’en la mariant, et cette maxime établie par nombre d’Arrests, et même étant cettain que si ces donations étoient reputées pour de vérit ables iberalitez elles seroient contraires à l’Art. CCCexXXI. qui ne permet point de donner à celuy qui descend du donateur en droite ligne, et que par cette raison pour leur donner force on les 2 regardées comme un supplément de legitime, il me semble que ce qui n’est point necessaire pour la legitime ne l’est point pour le supplément de cette même legitime : En ce cas les filles ne peuvent être reputées étrangetes, parce qu’en leurs personnes il se rencontreroit un obstacle essentiel à la validité de la donation, pour être descendantes du donateur en droite igne ; les autres circonstances que le pere avoit donné de son propre par testament, et qu’il n’avoit point vécu trois mois, ne peuvent avoir été le motif de l’Arrest ; car si ces circonances eussent produit une nullité elle n’auroit pû être Effacée par l’insinuation, mais ces con-ditions requises par la Coûtume n’ont pas lieu pour les dons que les peres font à leurs filles pour leur legitime.

Cette Maxime que je viens d’établit que les dots promises par les peres et meres à leurs enfans en les mariant ne sont pas de véritables donations en Normandie, et que par conse quent elles ne sont point sujettes à l’insinuation, n’a pas lieu seulement en Normandie, elle été autorisée par plusieurs Arrests du Parlement de Paris qui ont considéré ces donations comme l’acquit d’une obligation naturelle et morale :Brodeau , en son Commentaire sur Mr Loüer I. D. n. 6t.Ricard , des Donat. part. 1. c. 4. sect. 3. gl. 1.

Cela donc ne reçoit point de doute entre le donataire et les heritiers du donateur, mais la difficulté est restée à l’égard des creanciers du donateur posterieurs à la donation, plusieurs ayant estimé qu’il falloir faire différence entre les heritiers et les créanciers, ceux-cy ayant pû ignorer la donation dont ils ne pouvoient avoir connoissance que par les actes publics dont l’insinuation est le plus notoire : Cette question est debatuë de part et d’autre par Me Jean Ricard au lieu preallégué, qui conclud que ce combat de raisons demandoit un Arrest solemnel pour terminer la question, pour sçavoir si les donations qui sont faites en faveur de ma-riage par les peres à leurs enfans sont exempts d’insinuation aussi-bien à l’égard des créanciers que des heritiers du donateurs

Elle n’est pas si malaisée à decider en Normandie à l’égard des donations que le pere fait à ses fils en faveur de mariage, alles sont indispensablement sujettes à l’insinuation par la disposition expresse de cet Article. Pour le don du pere à la fille comme il n’a pas l’essence de la véritable donation qui est la pure liberalité du donateur, non enim est beneficium, sed officium facere quod debeas, quoy que la fille n’ait pas d’action contre son pere pour la pourvoir, on ne doit pas reputer ce qui est promis par le pere que comme une obligation pour la validité de laquelle il suffit qu’elle soit reconnuë ou passée devant Notaires.

Et dautant que suivant cet Article la donation du pere au fils doit être insinuée, cela fit naître cette question singuliere pour le doüaire d’une veuve. Campion avoit deux fils, et aprés avoir marié son ainé il leur fit une démission generale de tous ses biens, rétenant seulement une pension, les enfans partagerent la succession et en joüirent quelque temps : le puisné mourut le premier et sans enfans, et le pere par aprés, et enfin le fils ainé : La veuve de l’alné ayant pretendu doüaire sur la succession entière du pere, il luy fut contredit par les creanciers du puisné, soûtenant que pour le partage du puisné c’étoit une succession collaterale, sur laquelle il ne luy étoit dû auoun doüaire : Il fut répondu par la veuve que la donation n’ayant point été insinuée la proprieté n’en avoit point été transmise ny acquise aux enfans : En effet si ce pere depuis sa démission avoit contracté des dettes les enfans n’eussent pû contredire le droit et l’hypotheque des creanciers vâ le défaut d’insinuation, que ce même manquement peroit à son benefice, et que le pere s’étoit conservé la proprieté de son bien, et son puisné étant mort avant luy il étoit demeuré saisi de la proprieté des mêmes biens dont il avoit fait vancement à ses enfans, cette donation étant un avancement de succession dont la proprieté de s’acquiert que par l’insinuation : Il fut repliqué par les creanciers qu’entre les freres ce Contrat n’étoit point sujet à insinuation, et que c’étoit une succession partagée entr’eux en consequence de la démission qui leur en avoit été faite par leur pere, ce qui leur en avoit pleinément transféré la proprieté, et ils en étoient entrez en joüissance, que le pere n’avoit pù obliger son partage à ses dettes, et comme le pere n’auroit pû succeder à son fils puisné au prejudice de son ainé, il étoit sans difficulté que c’étoit une succession collaterale sur laquelle cette veuve ne pouvoit avoir doüaire : Par Arrost en la Grand-Chambre du premier de Mars 1849. au Rapport de Mr Auber, la veuve fut deboutée de sa demande. Chopin a été d’avis que partis hereditariae datio fratri facta non eget insinuatione de utili.And . dom. l. 3. c. 1. t. 4. n. 8. Quoy qu’il soit vray qu’en vertu d’un avancement les enfans ne soient pas abfolument proprietaires, et que honobstant les partages qui en ont été faits entre les frores ils puissent en changer l’ordre aprés le decez de leur pere, lors qu’il est arrivé quelque changement par la mort de quelque ftere, comme il fut jugé en la Cause des sieurs le Forestier Ozeville, où l’alné fut reçû à prendre preciput nonobstant que les freres eussent artagé l’avancement qui leur avoit été fait par leur pere, néanmoins à l’égard des créanciers quand le peré a donné la proprieté les enfans la peuvent affecter à leurs dettes, suivant les Arrests que j’en ay remarquez ailleurs ; et comme le frere ne pourroit opposer le manquement d’insinuation, parce qu’à son égard c’est un partage, aussi sa veuve n’est point feceva-ble à y demander un doüaire.

Autre Arrest sur ce fait du 1S. de Fevfier 1653. au Rapport de Mr Fermanel, aprés en voir consulté la Grand. Chambre : Le Sauvage au droit de Collete Morel sa mère demandoit le tiers des héritages de Thomas Morel son pere à Boesset dernier acquereur d’iceux Cet acquereur representa que Pierre Quesney avoit donné à Thomas Morel son neven et son heritier presomptif par son Contrat de mariage la moitié de ses immeubles, et Morel en étant devenu proprietaire en vertu de cêtte donation, le Sauvage son petit-fils ne les pouvoit posseder au droit de sa mere que comme étant devenuë heritière de Thomas Morel son pere, et par consequent qu’il pouvoit demander le tiers sur les autres biens de son pere, vû qu’il joüissoit de ceux qui luy avoient été donnez : mais le Sauvage répondoit que sa mere ayant sor-vécu Thomas Morel son pere, elle étoit devenuë heritière dudit Quesney son grand oncle, et par cette raison il possedoit ces héritages non en vertu de la donation qui avoit été faire à son ayeul, fhais comme hieritier de sa mere qui avoit succedé à son onde, parce que E donation qui avoit été faite à Thomas Morel son ayeul n’ayant point été, insinoée elle étoit nulle et ne luy avoit pû acquerir ny transmettre la proprieté des choses données : la raison de douter étoit que cette donation avoit été faite à l’heritier presomptif, mais cet heritier tant mort avant le donatéur son oncle, sa fille prenoit ce bien non comme son heritière, mais comme venant de son chef à la succession de son grand oncle, de sorte que les acquereurs des héritages donnez ne se pouvoient prevaloir de la donation faite à leur vendeur à cause du défaut d’insinuation que lheritière du donateur étoit recevable à leur opposer : par l’Arrest la donation fut déclarée nulle. Autre Arrest au Rapport de Mr Côté du 23. de Juin 665. entre le Pelletier et de l’Epine

On a douté fort long-temps si le don mobil que la femme fait au maty par le Contrat de mariage suivant l’usage de Normandie, quand ce don mobil consisteen héritage étoit sujet à insiquation : Il paroit par les Commentaires de Me JosiasBerault , que lors qu’il écrivoit cette difff culté n’avoit pas encore été pleinément decidée au Palais : Il rapporte véritablement des Arrests par lesquels la donation faite par la femme à son futut mary par le Contrat de mariage d’une somme de deniers à prendre sur ses immeubles n’étoit point sujette à infinuation, et quoy qu’il dûst tenit suivant ces Arrests que l’insinuation n’étoit point necessaire pour la donation des immeubles, puis que lon avoit jugé que les deniers donnez à prendre sur les immeubles dffectoient les immeubles nonobstant le défaut d’msinuation ; néanmoins il avoit ajoûté qu’il en seroit autrement de la donation d’immeubles, ce qui avoit fait tombet dans lerreur presque tous les Juges subalternes que l’on a eu beaucoup de peine à détromper, encore qu’il y ait ong-temps que ce né soit plus une chosé douteusé, la question ayant été deoidde par un’treatrand nombre d’Arrests dont j’en rapporteray quelques-uns. Marguerite lEeuyer donna pour don mobil à Jacques le Noir le tiers de ses héritages ; Marie le Noit issué de ce mariage fut nariée à Nicolas Regnaud, auquel on donna aussi le tiers des héritages de Marie le Noir qui étoient ceux de Marguerite l’Ecuyer sa mere, ce qui fut fait du consentement dudit le Noit son pere qui remit le don qui luy avoit été fait. Regnaud ne fit point insinuer son Contrat de mariage ; et aprés la mort de Marle le Noir sa femme sans enfans, un nommé l’Ecuyur son heritier contredit la donation vâ le défaut d’insinuation : Régnaud et le Févre anquel il avoit cedé son droit alléguerent qu’en ces sortes de donations l’infinuation n’étoit point requise, n’étant faite au mary que pour luy aider à supporter la dépense et les charges du manage : par la Sentence du Juge de Longueville les défenses de Regnaud avoient été jugées pertinentes, ce qui fut confirmé par Arrest du 8. de Juin 1636. en l’Audience de la Grand. Chambre.

De qu’il y avoit de particulier étoit que le Noir avoit remis le don qui luy avoit été fait, ce qui n’étoit pas contredit par ses heritiers.

Autre Arrest en la Grand-Chambre du 4. de Juillet 1645. entre les nommez Coton, plaidans Baudry et le Févre : On jugea que ce n’étoient pas des donations, mais des pactions du mariage, sous la foy desquelles il avoit été accompli. Autre Arrest en la Chambre de l’Edit du 29. de Juillet 1650. Caruë plaidant pour du Tresor Ecuyer sieur de Larturie, appellant d’une Sentence qui déclaroit la donation nulle faute d’insinuation, et de la Lande pour e sieur de S. Clair de Vaux, la Sentence fut cassée et la donation declarée valable. Voyez ls Arrests de Mr Loüer, 1. D. n. 22. et les Plaidoyers de Mr Servin, tom. 2. Sponsalitia largitas est ppecialu contractus.

Autre Arrest par Rapport du 21. de Juin 1853. entre Bonnemain Plongeon, et le Cert.

Aotre Arrest du 24. de Juillet 1653. La question fut encore decidée en termes plus avantareux en l’Audience de la Grand. Chambre le 8. de Juin 1663. une femme qui avoit des meu-oles et des immeubles avoit donné ses meubles et l’usufruit de tous ses immeubles à son maty : le Vicomte et le Bailly ayant suivi l’opinion de Berault avoient declaré la donation nulle Pur Arrest les Sentences furent cassées, et la donation de l’usufruit de tous les immeubles reduite aun tiers de lusufruit, entre Marc Hodierne ayant épousé Jeanne Vandin Appellant, et François Vandin lntimé, plaidans Theroude et Lyout. La Cour jugea nettement la quesion, quoy que la femme eût des meubles dont le mary avoit profité L’opinion de Berault fut suivie par un Arrest du 14. d’Aoust 1649. au Rapport de Mr de Sainte Helene ; on jugea même que la femme étoit recevable à debattre le don mobil qu’elle avoit fait pour le défaut d’insinuation. Un frère en mariant sa seut heritière de sa mere donna au mary le tiers des héritages appartenant à sa seur pour son don mobil, le mary vendit tout dle bien de sa femme à Groscol qui stipula un remplacement des deux tiers sur une rente de douze aens livres qu’il bailla au mary en la presence et du confentement de sa femme qui signa an Contrat : aprés la mort du mary la femme voulant rentrer en la possession de ses herita ges, l’acquereur soûtint qu’elle devoit se contenter pour ses deux tiers à cette rente de douze cens livres qu’il s’obligeoit de luy faire valoir, et même d’en bailler caution : la femme et le tuteur des enfans demanderent le remplacement entier, le mary n’ayant pas fait insinuer le Contrat de mariage, refusant d’accepter aucune rente, l’acquereur suivant la Coûtume en’Article CCCCexL. étant obligé de quiter l’héritage ou d’en payer lestimation : Le Juge Sans s’expfiquer davantage avoit ordonné qu’il seroit fait une estimation : Sur l’appel du tuteur il fut dit en reformant la Sentence qu’il seroit fait estimation de tout l’héritage, et que sor le prix le tuteur seroit payé en deniers, si mieux l’acquereur n’aimoit quitter le fonds.

Mais depuis on a donné des Arrests contraires, et afin que l’on n’en dautât plus la Cour en f a fait un Reglement, Article 74. du Reglement de 1666.

On a pareillement agité la question, si ce qui est donné à un Prêtre pour luy servir de Tître est sujet à insinuation ; Par Arrest du 23. de Juillet 1623. on jugea que cette espèce de donation en devoit être dispensée, entre Vautier ayant épousé la veuve d’Estienne de Lastelle, et Blondel. Cette même question ayant été plaidée en l’Audience de la Chambre de l’Edit elle fut appointée au Conseil le 30. de Mars 1650. Brodeau en son Commentaire sur M.Loüet , I. D. n. 56. dit avoir été jugé au Parlement de Paris que ces donations faites par un pere son fils pour luy servit de Titre étoient dispensées de lansinuation, mais que cela n’auroit pas Fresne de lieu pour la donation faite par un oncle à son neveu, qui fut jugée nulle faute d’insinuaon. Voyez du Fresne en son Journal de l’impression de 1652. 1. 7. t. 33.Ricard , des Donat. part. 1. c. 14. sect. 3.Boniface , tom. 1. l. 2. t. 18. c. 2.

Les donations pour causes pitoyables doivent être insinuées suivant cet Article, cependant lors qu’elles sont faites à condition de célebrer des Services on les considere comme des Contrats synallagmatiques, et sur cette consideration on les dispense de l’insinuation. Baudart un mois avant que de se faire Renigreux dans les Croisiers de CaEn leur donna trente-sept livres de rente qui composoient tout son bien maternel : aprés sa Profession les Religieux firent executer les biens de l’obligé à la rente : le Petit, sieur de S. Jean, heritier maternel de Baudart s’y étant opposé, par Sentence du Bailly de Caen la rente fut ajugée aux Croisiers : le Petit sur son appel fit ajourner les heriters paternels pour y contribuer à proportion, et il proposoit pour moyens d’appel qu’il étoit fondé en la disposition expresse de l’Ordonnance et de la Coûtume, qui desirent que les donations onereuses et pour causes pitoyables soient insinuées ; et contre les heritiers paternels il s’aidoit de l’Arrest du Cesne rapporté par Bérault ur l’Article CCCCXII. où j’ay aussi remarqué celuy. cy : Par Arrest du 29. de Juillet 1665. ni Cour mir sur l’appel et mandement hors de Cour. L’heritier paternel s’appelloit Baudart.

Par la Jurisprudence du Parlement de Paris, les donations à charge de Fondations sont dispensées de l’insinuation : VoyezRicard , part. 1. c. 2. sect. 3. n. 1182. Mantica, l. 6. t. 3.

L’insinuation n’est necessaire que pour les immeubles, et non pour les meubles.

La Coûtume ne s’est point expliquée sur la qualité du Juge devant lequel l’insinuation doit être requise, ny du lieu où elle doit être publiée et enregistrée ; mais les Ordonnances y ont suffiamment pourvû par l’Art. 132. de l’Oidonnance de 1639. les donations doivent être insinuées et enrégistrées en nos Cours et Jurisdictions ordinaires des parties et des choses données.

Ces paroles, en nos Cours et Jurisdictions brdinaires, ont fait naître ces deux questions : la première, si les Vicomtes étoient capables de tecevoir des insinuations, et si elles étoient valables lors qu’elles avoient été publiées et enregistrées aux Greffes de leurs Jurisdictions : Il sem-ble que l’on n’en peut douter lors que la donation est faite à des totutiers et de terres rotures ; car l’Ordonnance prescrivant de faire ces insinuations dans les Jurisdictions ordinaires et les Vicomtes étant de cette qualité ils sont expressément compris dans sa disposition, et les Baillifs leur opposent inutilement qu’ils n’ont point d’Assises, puis que l’Ordonnance ny la Coûtume n’ont point requis que cette insinuation se fasse aux Assises.

C’est neanmoins un usage certain que les insinuations non seülement he fe peuvent faire ue devant le Bailly, mais il est encore nécessaire qu’elles foient lues aux jours d’Assises, et odefroy qui avoit du panchant à rendre les Vicomtes competers de connoître des insinuations convient que c’est l’usage commun, et Bérault a remarqué un Arrest de l’année 1629. don-né pour servir de Reglement, suivant lequel les insinuations doivent être faites devant le Bailly.

En consequence de ces mêmes paroles, Jurisdictions ordinaires, les Officiers des Seigneurs ont pretendu que les insinuations pouvoient êtte faites en leurs Sieges lors que les parties avoient leurs domiciles, et que les choses données y étoient situées : la question en fut plaidée en l’Audience de la Grand. Chambre l’11. Roust 1678. entre la Demoiselle de Maloisel appellante, et Me de Maloisel Docteur en Medecine intimé, et par l’Arrest qui intervint la donation faite à l’appellante par un de ses freres fut declarée nulle, parce qu’elle n’avoit été insinuée que dans une Haute-Justice, plaidans de Cahagnes, et Greard. Cette question est decidée par ce terme exprés de l’Ordonnance, en nos Cours et Jurisdictions ordinaires, d’oû I resulte que l’insinuation ne peut être faite que devant les Juges Royaux : Iste textus declarat coram quo judice insinuatio fieri debeat. En nos Couts, ergo coram judicibus Regiis & sic non valeret insinuatio facta coram judicibus Baronum vel aliorum Dominorum :Rebuf . tract. de donat. nsin. gl. 5. Et par l’Article 2. de l’Ordonnance dé 1548. l’insinuation doit être faite en la Jurisdiction Royale. Il faut encote remarquer que tout Juge ordinaire n’est pas competent de recevoir les insinuations, il doit être le Juge ordinaire des parties.

Pour le lieu où linsinuation doit être faite par les termes de lArticle 132. de l’Ordonnance le 1539. on la doit faire en deux lieux, au domicile des parties, et dans le lieu de la situation les choses données. Godefroy a traité cette question, et il estime que lon ne peut se dispenser d’enregistrer les insinuations en ces deux lieux, fuivant le sentiment de Mr Bourdin sur cet Article de l’Ordonnance.Rebufe , au lieu preallégué, dit que plusieurs étoient aussi de ce sentiment, lors que le damicile du donateur étoit en un lieu, et la chose située en un autre lieus mais il répond que cela est véritable quand la chose est située au lieu du domicile, et qu’en ce cas finsindation doit être faite devant le Juge des parties et de la chose, et que quand la chose est située ailleurs il suffit de la faire devant le Juge de la chose : Cette difficulté est levée par l’Ordonnance de Henty Il. de l’année 1548. Art. 2. qui ordonne que l’insinuation se fasse n la Jurisdiction Royale dans les lieux où les choses sont assises, et nous le pratiquons de la sorte.

Comme les Bailliages de Normandie sont composez de plusieurs Vicomtez il ne suffiroit pas que l’infinuation fût faite dans un siege principal du Bailliage, si ce n’étoit pas dans la Vicomté où les choses données sont assises : C’est aussi le sentiment deBacquet , des Droits de Justice, c. 21. n. 3979. l’insinuation ne doit pas être faite dans le Siege capital et general de la Prevôté, Bailliage ou Seneschaussée, mais au Siege particulier de la Prevôté, Seneschaur sée ou Bailliage de l’assierte des choses données, et si elles sont situées dans une Haute-Justice sinsinuation fe doit faire au Siege du Bailliage dans lequel la Haute-Justice est enclavée.

Si la donation est faite d’une rente foncière elle sera infinuée au lieu de la situation de l’heritage sur lequel elle est dde : Si c’étoit une rente constituée, Bacquet au lieu preallégué, n. 398. dit qu’il faut insinuer la donation au domicile du donateur et du donataire, et du debiteur de la rente : Il suffiroit, à mon avis, d’en faire l’insinuation aux lieux de la situation des biens du debitent.