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CCCCLVIII.

L’an et jour de la clameur de l’héritage dcreté, quand commence à courir.

L’an et jour de la clameur de l’heritage decreté, commence à courir du jour de l’adjudication par decret, et derniere renchere et adjudication d’icelle, encore qu’il en fût appellé et l’appellation indecise, pourvû que le decret soit passé devant le Iuge ordinaire, au ressort duquel l’héritage est assis.

Conformément à cet Article il a été jugé en l’Audience de la GrandeChambre du Parle. sent de Paris au mois de Juin 1657. que l’an et jour du retrait court du jour de l’adjudication et non du jour de l’Arrest qui la confirmée, parce que l’Arrest qui confirme nihil dat, sed datum significat, et par cette raison il a un effet retroactif.

Il est sans doute que l’on peut clamer une adjudication par dectet, mais on a revoqué en doute si les encheres étant mises sepatément sur chaque piece de terre le fignager seroit obligé de retirer le tout, et si l’adjudicataire peut l’y forcer : On a jugé au Parlement de Paris que le lignager avoit cette faculté de retirer ce qu’il voudroit, parce que c’étoient autant de ventes differentes, l. Si duos quis servos de contrah. empt.Chop . Coût. d’Anjon, l. 1. Art. 4 Cela n’auroit pas lieu en cette Province, les encheres mises separément. ne font des ventes differentes que quand il y a divers adjudicataires ; mais quand celuy qui a mis des enche-res differentes demeure seul adjudicataire du tout, ce n’est qu’une feule et même adjudica ation ; et particulièrement à l’égard d’un lignager : en tout cas pour avoir cette faculté par un lignager de retirer ce qu’il voudroit, il faudroit que l’on eût fait une adjudication distincte et separée sur chaque enchere.

Les diligences que l’on fait pour donner la petfection à un decret, et pour parvenir à l’adjudication étant en si grand nombre et si publiques, la lecture en eût été su-persluë. Si l’héritoge avoit été vendu à charge de decret, et que la lecture de ce Contrat eût été faite, et qu’en suite l’acheteur fût demeuré adjudicataire suivant son Contrat, le dignager ne doit pas se regler sur le temps de cette adjudication volontaire, mais sur le temps. que le Contrat de vente a été lû, parce que le Contrat fait la véritable vente, et que le decret et l’adjudication ne sont que l’execution du Contrat, et qu’ils n’ont été faits que pour la seureté de l’acquereur et pour purger les hypotheques : si neanmoms ce Contrat de vente n’avoit pomt eu d’effet, parce qu’un autre se seroit rendu adjudicataire, en ce cas l’an et jour du retrait ne commenceroit à courir que du jour de l’adjudication ; suivant cet Article. Bérault ra pporte un Arrest qui l’a jugé de la sorte : Il a été pareillement decidé par deux Arrests rapportez par Brodeau fut M. Loüer, l. D. n. 26. qu’un héritage étant vendu à la charge du retrait, l’an du retrait eourt du jour de l’ensaisinement, infeodation ou notification du Contrat, et non du jour de l’adjudication par decret ; la raison est que le decret volontaire qui ne se fait que pour purger les hypotheques ne change point la nature du Contrat, nihil novum adjicit ; le droit de proprieté est asseuré à l’acquereur par le Contrat de vente.

Puis que le retrayant entre en la place de l’adjudicataire il doit demeurer chargé de toutes les risques et supporter toutes les pertes qui peuvent arriver, et c’est pourquoy par Arrest du 16. de May 1631. il fut jugé qu’un adjudicataire n’étoit point tenu de bailler caution au retrayant qui le dépossedoit de l’évenement de l’appel d’un decret qui pouvoit être cassé. juivant, les Articles precedens les héritages ou les autres choses immeubles qui ont été, venduës sont retrayables dans l’an et jour de la lecture, la Coûtume en cet Article en excepte les ventes par decret, dont l’an et jour du retrait commence à courir du jour de l’adjudication et dernière renchere, encore qu’il en fût appellé, et que l’appellation fût indecise, pourvû que le decret soit passé devant le Juge ordinaite, au ressort duquel l’héritage est assis.

Mais parce que les adjudications par decret ne sont point sujettes à lecture à cause de leur notorieté, quelques-uns avoient crû que par la même traison les ventes des biens des mineurs, lors qu’elles étoient faites par autorité de Justice, et aprés des proclamations n’avoient point besoin de lecture : Car la notorieté publique étant l’unique motis qui a porté nos Législateurs à E retrancher la lecture, comme une solemnité super sluë pour les adjudications par decret ; il semble qu’il y a lieu d’étendre cette exception à la vente des biens des mineurs, puls que les pro-clamations qui se font publiquement ne les rendent pas moins notoires et connuës : Or puls qu’il y a une identité de raison, il doit y avoir une identité de droit.

L’on represente au contraire que lors qu’il s’agit de l’interpretation des Coûtumes, les cas bmis ne sont jamais suppléez par équipolence, ny par aucune autre voye, parce que l’on presume que tous ces cas obmis n’auroient pas échappé à le mémoire des Legislateurs s’ils les avoient sestimez equitables : Ce qui est encore plus certain, lors que l’on a déja fait quelque dérogation à la Loy generale et que l’on y a mis quelque exception : Car alors l’on ne doit plus douter que toutes les autres exceptions que l’on voudroit ajoûter ne soient vehuës en la pensée des Legislateurs, et qu’ils n’ayent fait reflexion sur tous les autres cas qui pouvoient avoir quelque relation ou connexité avec celuy qui est excepté ; mais les termes dont la Coûtume s’est expliquée en cet Article, marquent si visiblement son intention qu’il n’est pas possible de l’étendre à d’autres cas, il n’est pas dit que les ventes faites en jugement ou aprés des procla-mations ne seront point sujettes à la lecture, il n’est parlé que de Padjudication par decret et dernière renchere ; ce qui ne peut être appliqué ny expliqué de la vente des biens des mineurs.

Aprés tout il y a grande différence entre la forme et les effets des adjudications par decret et des ventes judiciaires des biens des mineurs, et celles-cysont beaucoup moins notoires que celles des decrets. Il ne s’y fait point de saisie, point d’établissement de Commissaires, point de publication de bail judiciaire, et enfin le mineur n’est point depossedé : toutes les diligences, les encheres et l’adjudication se doivent faire dans un temps prefix et si certain, qu’il n’est pas du pouvoir du Juge de le proroger.

Il n’y a rien de semblable en la vente du bien des mineuts ; il est vray qu’il se fait quelques proclamations, mais la vente n’a pas de terme prefix, elle se peut remettre pout attendre des encherifseurs, ce qui rend ces ventes moins notoires.

Aprés tout ; s’il étoit véritable que la notorieté seule d’un Acte ou d’un Contrat fût suffisante pour dispenser de la lecture, il s’ensuivroit que dans toutes rencontres où la notorieté feroft aussi certaine que par un detret, la lecture ne seroit point necessaire. Le Notaire. ou le témoin qui a signé à un Contrat de vente, en a sans comparaison une certitude plus grande et plus infaillible que celle que l’on peut avoir d’une adjuditatlon par decret : la connoissance de celle-cy n’est fondée que sur une presomption de droit que l’on ne peut pas ignorer cû ui est rendu si public : Mais la certitude d’un Contrat de vente qu’un Notaire a reçû, ou auguel un témoin a signé, ou qu’un parent a approuvé, est fondée sur leur propre fait et non aur des presomptions, et des vraysomblantes, que si la lecture n’est introduite que pour rendre la vente notoire ; elle est supersluë à l’égard de ces personnes-là, nam qui certus est, amplius certiorari non debet : Cependant l’on n’oseroit pas soûtenir qu’ils ne fussent pas admissibles au retrait aprés l’an et jour si le Contrat n’avoit pas été lû, nonobstant la connoissance qu’ils en avoient euë.

Berault sur l’Article CCCCLVI. a rapporté un Arrest qui a jugé cette question, dont voicy le fait : Thomas du Jardin tuteur des enfans de Pierre du Jardin, fit proclamer quelques heritages appartenans aux mineurs, et aprés deux proclamations faites à l’issué des Messes Parois-siales, Denis Bense s’en rendit Adjudicataire ; mais n’ayant point fait faire la lecture de son Adjudication, dix ans aprés ce même tuteur au nom de son fils mineur voulut retiter ces mêmes héritages ; le Vicomte l’ayant debouté de sa demande en retrait sur son Appel à la Cour, il representa que l’Adjudication n’ayant point été lûë, quoy qu’elle eût été faite en Justice, il étoit recevable à son action ; et par l’Arrest l’Adjudicataire fut condamné de luy en faire re mise : et Me Josias Berault ajoûte que l’on eut égard à deux Arrests, par lesquels il avoit été jugé qu’un rétrayant étoit recevable à retirer un héritage vendu, bien qu’il eût une parfaite connoissance du Contrat, parce qu’il n’avoit point été lù, et qu’une fille avoit été reçûë à retirer nonobstant qu’elle eût été presente à la vente et qu’elle eût reçû une partie du vin, et que même elle eût asseuré l’acheteur qu’elle n’avoit pas intention de clamer. M. Jacques Godefroy qui rapporte aussi cet Arrest, y ajoûte que cet Arrest avoit terminé deux grandes difficul-tez ; la premiere que le tuteur même est recevable à retirer l’héritage qu’il avoit vendu au nom de ses pupilles ; l’autre que la disposition de cet Article est speciale pour les Adjudications par decret, et qu’elle ne s’étend point aux autres Adjudications faites en Justice : Cette même uestion ayant été agitée devant le Juge d’Argentan en l’année 1677. entre Dame Marie de Medavid de Roussel, Abbesse d’Almeneche, et Thomas Bougon demandeur, pour retirer des héritages appartenans à des mineurs vendus en Justice aprés deux proclamations, par Sentence le retrayant fut debouté de sa demande par ces deux raisons ; la premiere, que la lecture n’étoit point necessaire pour ces sortes de ventes ; et la seconde, que le retrayant étoit un des parens qui avoient deliberé : Mais sur l’Appel de Bougon la Cause de la Dame Abbesse n’ayant point été trouvée soûtenable, elle fut obligée de s’accommoder et de remettre l’héritage.