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CCCCLXXXV.

Signification de clameur au détenteur de l’héritage est ruallable.

Et où l’acheteur seroit demeurant hors la Vicomté où sont assis lesdits herigages, il suffira de la signifier aux detenteurs desdits héritages, soit Fermier, Re-ceveur ou autre-

La Coûtume d’Orléans, Article 368. est conforme à cet Article. Il étoit juste d’ordonner que quand l’acquereur n’est point domicilié sur les lieux ny dans la Vicomté où les choses qque l’on veut retiret sont assises le rettayant ne fût pas obligé de l’ajourner à son domicile, mais qu’il pûst signifier le retrait au détentair de l’haritage ; car si le retrayant étoit tenu d’ajourner l’acquereur en son domicile il seroit quelquefois obligé d’aller plaidor si loin qu’il luy seroit plus avantageux de renoncer à fonaction, où même le temps fatal du retrait se pourroit écouler : Pour éviter ces inconveniens la Coûtume en faveur du rettait lignager et feodal et contre la regle ordinaire, que tout ajournement pour être valable doit être fait à personne ou domicile, permet au retravant de s’adresser au détenteur de l’héritage lors que l’acquereur n’est point resseant dans la Vicomté, et l’acquereur n’est point recevable à demander son renvoy devant le Juge de son domicile, comme il fut jugé sur ce fait en l’Audience de la Grand. Chambre le 10. de Janvier 1653. Vautier Bourgeois de Roüen avoit acquis quelques héritages situez au Boucachard qui est dans le détroit de la Vicomté du Ponteaudemer, Olivier Cabut voulant retirer ces héritages signifia le retrait au détenteur d’iceux, et le fit ajourner devant le Juge du Boucachard ; Vautier se pourvût à la Cour en reglement de uges, et concluoit par Heusé son Avocat que la Cause devoit être renvoyée devant le Vicomte de Roüen son Juge naturel, suivant la Maxime qu’actor sequitur forum rei : Je répon-lois pour Cabut que la Coûtume en cet Article avoit dérogé à la regle ordinaire en permerant au retrayant de s’adresser au détenteur de l’héritage lors que l’acquereur étoit resseant hors la Vicomté, et même quand la Coûtume ne l’auroit pas expressément décidé que l’action en retrait étant plus réelle que personnelle il en faudroit plaider devant le Juge du térritoires par l’Arrest ses Parties furent renvoyées devant le Juge du Boucachard.

Berault Il a même été jugé par un Arrest rapporté par Berauit, donné entre Puchor et Bauquemare, qua Iacquerour pouvoit refuser de plaider devant le Juge de son domicile, et demander le renvoy devant le Juge des lieux où shéritage étoit situé.

Il eût été soit à propos que nos Reformatours se fussent étendus davantâge pour asseurer la validité des ajournemens à l’égard de la competence des Juges, car ils ont laissé dans l’incertitude si lors qu’il n’y a point de détenteur de l’héritage l’acquereur qui n’est point resseant dans la Vicomté peut être ajourné devant le Juge de la chose, ou s’il faut le poursuivre devant de Juge de son domicile, ou bion si lors qu’il est resseant dans la Vicomté il le faut ajourner devant le Juge de la personne ou devant aeluy de la chose ; c’est à dire s’il doit être appellé devant le Bailly quand il est da condition noble, ou si le Vicomte en est competent quand il s’agit d’une terre roturiere

La décision de ces diffioultez dépend de cette question, si l’action en retrait est personnelle ou réelle ; Si on la repute personnelle l’acquereur ne pourra être ajourné que devant le Juges de son domicile et de sa personne t si au contraire on la tient réelle l’action sera poursuivie devant le Juge de la chole.

Nos Auteurs ne s’accordent pas sur ce sujet, les raisons de l’une et de l’autre opihion sont rapportées par le Commentateur de M’Loüet , l. R. n. 52. Quelques-uns estiment que l’ajournement doit être fait à l’acquereur en son domicile, d’où l’on induit que cette action est plus personnelle que réelle ; d’autres afseurent que c’est une regle generale en France qu’il est au choix du retrayant de faire ajourner l’acquereur devant le Juge de sa personne ou de la fituation de la chose venduë, parce que l’action en retrait est une action mixte en laquelle la per-sonne comme étant plus noble atdre régullerement la chose, et de-là vient que Messieurs des Requêtes du Palais en sont competens. Par la Coûtume d’Anjou, Article 382. tout retrait Grimauder se doit inteuter en la Jurisdiction où la chose est sipute. Grimaudet, du Retrait lignager, l. 1. c. 4. pour prouver que l’action est réelle dit qu’elle descend de la Coûtume et qu’elle regarde la chose venduë, qu’elle peut être poursuivie non seulement contre le premier acquereur, mais aussi contre tous seconds acquereurs et autres possesseurs, et que partant il convient de la juger réelle, ou plûtost de la qualité de celle que l’on appelle en droit in rem scripta : C’est aussi le sentiment deTiraqueau , S. 8. gl. 5. et de nos deux Commentateurs, Berault etGodefroy , sur les Articles 484. et 485.

Cet Article rend encore la question plus problematique, car la Coûtume approuvant l’ajoulnement fait au détenteur de l’heritage que l’on pretend retirer ; elle semble mcliner davan-tage à la réalité, et les Arrests lont expliquée de cette manière ; car en la Cause du sieur le Bruman Lieutenant du Bailly de Caux au Neuschâtel, il fut dit par Arrest du 20. de Juillet 1635. qu’il avoit été bien jugé en refusant la retention d’une action en retrait lignager, et l’ayant renvoyée devant le Juge de la Ferté dans le détroit duquel les héritages vendus étoient situez, comme cette action étant plus réelle que personnelle, et par l’Arrest de Puchot et de Bauquemare dont je viens de parler, on tint l’action tellement réelle que le possesseur de l’heri-tage vendu quoy qu’il eût été ajourné à son domicile par le retrayant se ft neanmoins renvoyer devant le Juge de la chose, la Cour ayant trouvé que le Juge du Défendeur n’en étoit bas competent. Et par un autre Arrest du 10. de Decembre 1658. entre la Demoiselle Baillard retrayante à droit de sang, et Bouchard Défendeur, il fut jugé que le lignager du pre-mier vendeur peut valablement signifier le retrait au second acquereur qui est en possessions quoy que le premier acquereur dont le Contrat donnoit ouverture au retrait fût resseant dans à Vicomté : l’on disoit que la Coûtume permettoit bien de signifier le rétrait au détenteur de l’héritage vendu lors que l’acquereur ne demeuroit pas dans la Vicomté, d’où il s’ensuivoit à contgerio qu’il ne le pouvoit pas quand lacquereur avoit son domicile dans la même Vicomté. La Demoiselle Baillard soûtenoit qu’en consequence de ces Article elle avoit pû s’adresser au second acquereur qui n’étoit qu’un simple détenteuugomme un fermier ou un receveur, sed sibi possidobat, et que l’action en réttait étoit plus réelle que personnelle, le Vi-comte avoit ajugé à la Demoiselle Baillard les fins de son action, et le Bailly ayant jugé la contfaire, sur l’appel de la Demoiselle Baillard la Sentence du Vicomte fut confirmée, plaidans de l’Epiney, et Lyout.

Cependant si l’on examine les paroles de cet Article, l’on ne peut pas en induire que l’action en rétrait soit réelle, au contraire les termes marouent qu’elle ne l’est pas, et où l’ache-teur seroit resseant, &c. Il s’enfuit donc que quand l’acheseur n’est point resseant hors la Vicomté, il ne peut être ajourné qu’à son domicile ou à sa personne, la Coûtume ne permettant de faire l’ajournement au détenteur qu’en cas que l’acheteur n’ait point son domicile dans la Vicomté de la fituation des choses. Que si l’ajournement doit être fait à la personne ou au domnicile, il faut que le demandeur suive la Jurisdiction du défendeur, ce qui montre que l’action est personnelle ; car si elle étoit réelle, non seulement il seroit toûjours en la hiberté du etravant de s’adresser au détenteur du fonds ; mais aussi en quelque lieu que l’acquereur eût son domicile, et de quelque qualité qu’il pût être, il seroit tenu de plaider devant le Juge de la chose ; et cependant suivant cet Article, le retrayant n’a la faculté de s’adresser au détenteur que quand l’acquereur est resseant hors la Vicomté, ce qui n’est point contraire à la jurisprudence des Arrests. Celuy de Cabut étoit dans les termes exprés de cet Article : l’héritage vendu étoit situé au Boucachard, qui est un Siege de la Vicomté du Ponteaudemer, et Vautier acquereur étoit un Bourgeois de Roüen. Ainsi l’ajournement fait au detenteur étoit va-lable suivant cet Article dont le sens est que quand l’acquereur est resseant hors la Vicomté, on peut s’adresser au detenteur ; mais quand l’acquereur y est domicilié, on doit l’ajourner à son domicile et devant son Juge. Car cet Article n’est à proprement parler qu’une exception à la regle, que tout ajournement doit être fait à personne ou à domicile : Or la Coûtume exceptant que ce seul cas, elle confirma la regle pour tous les autres ; et l’on a remarqué c7dessus que cette exception portée par cet Article, a pour fondement qu’il seroit rigoureux d’aller chercher bien loin un acquereur pour le faire ajourner, et que puis que l’action en retrait ne tend que pour avoir un héritage, on peut s’adresser à celuy qui en est detenteur : et bien que l’Arrest de la Demoiselle Baillard paroisse contraire à cette explication, néanmoins il ne le détruit point. Car il y avoit cela de particulier que l’on ne considera pas le second cquereur comme un Fermier ou comme un simple detenteur, mais comme le véritable pro priétaire, et que par consequent c’étoit une partie capable de contester ou de consentir l’effen du retrait ; c’étoit à luy à recevoir le remboursement, et il eût été inutile de s’adresser au premier acquereur, puis qu’il n’avoit plus d’interest en la chose. i l’on considere cet Article comme une exception à la regle generale, que tout ajournement doit être fait à personne ou domicile ; il s’ensuyra que la Coûtume repute cette action personnelle, autrement cet Ariicle seroit inutile, car si l’action est réelle l’ajournement peut toûjours être fait au detenteur de la chose, soit que l’acquereur soit resseant dans la Vicomté, ou qu’il ait son domicile ailleurs, l. ult. C. ubi in rem, act. et l. 1. C. ubi de hered. agi oportet.

Et neanmoins l’action ne peut être personnelle, puis que l’acquereur et le retrayant n’ont fait aucun Contrat ny aucun Acte entr’eux qui produise aucune action personnelle l’un contre l’autre, et si elle étoit purement de cette qualité, l’on ne pourroit agit ny contre le tiers posses-seur ny contre le successeur singulier de l’acheteur, car presque toutes les Goûtumes de France appellent une action personnelle celle qui suit la personne et non la chose, ny le successeur singulier, l. cum cui, C. de act. et oblig. et cependant la pluspart de ces Coûtumes disposent que l’action en retrait lignager doit être traitée devant le Juge de la chose. Bourbonnois, Article 427. Maine, 3972. Anjou, 382. et que l’ajournement peut être fait aux possesseurs.

Pour concilier cette difficulté on a reputé cette action mixte, et comme il y avoit quelque chose de personnel et quelque chose de réel, on a composé cette action que l’on appelle actionem personalem in rem scriptam, que datur contra tertium possessorem, & in consequens, elle reut être formée devant le Juge de l’acquereur et de la chose, uterque judex adiri potest et rei Tiraq vendita & emptoris, qui convenitur, prout actor elegerit ; Tira4. de retr. gent. 8. 8. glos. 3. n. 9.

Et toutefois lors que les lignagers veulent retirer, ou que les acquereurs veulent s’approprier pour exclure les lignagers, il faut garder ce qui est prescrit par les Coûtumes de la situa-tion des choses, ubi enim ft questio juris manantis à re immobili, aut circa ipsam rem competenta observanda sunt statuta loci in quo res sita est, l. Si sine herede. 5.Lucius , D. de administ. tut.

Il est fort important de former l’action en retrait devant le Juge qui en est competent, et le ne s’y tromper pas, car c’est une question douteuse si l’ajournement donné devant un Juge ncompetent, proroge l’action et interrompt la prescription : Par la Loy accusaturus, D. Ad leg. Jul. de adult. L’on ne peut corriger son erreur lors que le temps fatal est expiré, accusaturus adulterii, si quid circa inscriptionem erraverit, si tempora largiantur, emendare non prohibetur me causa aboleatur. D’où il s’ensuit que si les temps sont passez, on ne peut plus recouvrer l’action.. La Glose sur la Loy Si pater C. ne de stat. de feud. dit la même chose, congestatio non jure facta pro non facta habetur, et talis contestatio etiam ad interruptionem non prodest Cette question s’offrit end’Audience de la Grand. Chambre, entre Me Guillaume Durand Ecuyer, sieur de Bondeville, Lieutenant general au Bailliage de Caux ; Bernard de la Croix, et Me. Gommé Avocat : De la Croix étoit demandeur en rettait lignager contre Gommé adjudicataire des héritages ayant appartenu au beaupere dudit de la Croix, et il l’avoit ajourné devant le Juge de Cany qui n’en étoit pas competent. Gommé n’y ayant point comparu, de la Croix obtint les fins de son action, par Sentence donnée par contumace le 18. de Novembre 1675. Dans cet intervalle le sieur de Bundeville fit signifier un rettait feodal pour une partie desdits héritages, à quoy Gommé fit réponse que de la Croix les avoit retirez à droit de sang, et que la Cour étoit saisie fut son appel, ce qui donna lieu à renvoyer les Parties en la Cour. Gommé ne conclud point à son appel, et de Cahagnes pour le sieur de Bondeville soûtint que l’action en retrait lignager de de la Croix étoit frauduleuse, et qu’en tout cas elle étoit nulle par deux moyens ; le premier, parce que l’ajournement étoit nul ayant été donné devant un Juge incompetent ; le second, que de la Croix n’avoit point consigné dans les vingtequatre heures aprés la Sentence qu’il avoit obtenuë, ce qu’il étoit tenu de faire. Maurry répondoit que l’incompetence du Juge ne rendoit point l’action nulle, et qu’elle avoit l’effet l’interrompre la preseription, que le défaut de consignation dans les vingt-quatre heutes ne pouvoit être objecté, elle n’est necessaire que quand l’acquereur lors de l’ajournement consent.

de faire la remise et de recevoir son argent ; mais quand il ne fait point de réponse son silence passe pour un refus, et en ce cas il faut suivre la disposition de l’Article CCOCXCII. qui nontient que a’il y a eu refus et depuis obeissanee le garnissement doit être fait dans les prochaine Pleds, si c’est une rotute, ou dans les prochaines Assises si c’est une terre noble : Or il n’avoit pû faire la consignation dans les prochains Pleds à cause de l’appel que Gommé Iuiy avoit faie signifier avant les Pleds : Par Arrest du 2. de Juillet a676. il fut dit à bonne cause l’action en rétrait feodal du sieur de Bondeville. Il passa à l’avis des Juges qui estimoient Jue l’incompetence du Juge rendoit l’action nulle, et qu’elle n’interrompoit point la preseri otion ; car pour l’autre moyen touchant le défaut de consignation on ne s’y arrêta point, ceux qui étoient de l’opinion contraire à l’Arrest disoient que quand l’ajournement ne seroit pas valable la sigmification du rétrait interrompoit la prescrlption, et n’étoit pas aneantie par l’incompetence du Juge, et sur cela l’on citoit m Arrest donné au Parlement de Dijon entret Mr le Prefident de Grémonville et le fieur Busqueti Le fief de Gtemonville est mouvant de la Comté d’Eu ; Mr de Gremonville avoit signifié un retpait foodal pour quelques héritages vendus par le sieur Busquet, et donna l’ajournement devant le Juge de Gtomonville ; mas le sieur Busquet étant aussi retrayant au nom de ses enfans, il fit ajourner aux Requêtes du Palais Mr de Gremonville qui n’y comparut point, mais sur le reajournement qui luy fut donné aprés l’an et jour il objecta au sieur Busquet que son exploit étoit nul, n’ayant pû Evoquer aux Requêtes du Palais de Roüen une Cause qui étoit du ressort du Parlement de Daris, et que par consequent le second ajournement n’ayant été fair qu’aprés l’an et jour il n’étoit plus recevable à son action : L’affaire ayant été renvoyée au Parlement de Dijon, le sieur Busquet obtint Arrest à son profit. Il y a un Arrest conforme dans la premiere partle du Journal des Audiences, l. 1. c. 126. de l’impression de 1652. par lequel un demandeur en retrait lignager qui avoit fait ajourner l’acquereur par devant un Juge incompetent fut reçû à retirer, quoy que durant la contestation sur l’incompétence l’an et jour fût expité, et le motif de l’Arrest fut que l’ajoumement étant libellé il avoit interrompu la prescription annale et prorogé l’action à un an du jour de l’interruption, et que tel est l’usage de France, que citatiol libellata impedit prascriptionem etiam coram judice incompetente facta, suivant un ancien Arrest : du Parlement de Paris rapporté au Style de proceder où du Moulin l’a noté exprés en marge, verbo, servir d’interruption : En effet quoy qu’un acte ne puisse produire aucun effet, néanmoins la demande libellée portée par un exploit est quelque chose de distinct et separé qui peut bien subsister encore que l’ajournement ne soit pas valable.