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CCCCXCIII.

Lignager ayant renoncé à la clameur non recevable.

Tout lignager qui a renoncé à user de ses droits de clameur, soit lors du Contrat ou aprés, n’y peut revenir.

Suivant cet Article le lignager capable du droit de retrait, lequel y a renoncé, n’y est plus recevable, car il est permis à un chacun de renoncer au droit qui est introduit en su faveur ; mais pour fonder la fin de non recevoir et pour faire valoir la renonciation, il faut faire ces distinctions : La première, si la renonciation a été faite par uno clause expresse en aveur de l’acquereur, en ce cas le lignager n’est plus admissible, car l’on ne peut demander un droit auquel on a renoncé, et bien que cette rénonciation ait été passée avant le Contrat lle ne laisse pas de valoir, dautant que l’on peut renoncer à un droit qui est à venir et à l’esperance que nous en avons, l. Quod servus, ff. de condict. o causam : La seconde, qu’encore que cette Chassanée renonciation ne soit faite qu’en faveur du vendeur l’acheteur s’en peut servir. Chassanée a tenu Masuer la negative.Tiraqueau , de retr. gent. 8. 1. glos. et. n. 14. et fequent. Masuér, et Grimauder estiment que cette renonciation profite à l’acheteur, ce qui me paroit raisonnable ; car apparemment le vendeur n’ayant désiré cette renonciation que pour trouver plus aisément un acheteur, et sur la foy de cette renonciation l’ n="1216333">acheteur ayant acheté plus cherement, cette action luy doit être utile n’ayant été exigée que pour son avantage ; et quand le lignager auroit simplement consenti à la vente suivant l’opinion deTiraqueau , de retr. gent. 8. 1. glos. 9. n. 135. ce consentement ne doit point être superslu, n’ayant été récherché, par l’acheteur que pour

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s’asseurer contre le retrait. Du Moulin a écrit au contraire, que le Seigneur qui donne son consentement à la vente d’un héritage qui est mouvant de son Fief ne se prive point du retrait feodal, in consuetud. Paris. Art. 13. n. 8. et sequent. Pour décider cene question l’on doit considerer les termes du consentement des parties ; car si le lignager avoit simplement consenti à la vente sans faire mention du retrait, ce consentemont ne l’excluroit pas de son droit ; mais s’il paroit que l’acquereur ne l’a requis que dans cette vûë et à dessein de l’exclure du retrait, ce qui est vraysemblable lors que son consentement ne pouvoit servir qu’à cet effet, l’acquereur peut justement opposer la fin de non recevoir, mais le lignager pourra retiter au nom de ses enfans.

Quand le vendeur auroit offert de vendre à son parent et qu’il l’auroit refusé cela ne luy porteroit point de prejudice, pouvant alors mêtre pas en état d’acheter, et ayanupris son temps pour amasser son argent.

On ne peut induire une renonciation de la presence du vendeur ou de la signature au Contrat de la vente, car elles n’ont jamais force de consentement quand la personne presente ne peut empescher l’acte qui se passe, l. Cajus, ff. de pigneras. act.

Si le plus proche lignager avoit été sommé par un parent plus éloigné de declarer s’il vouloit acheter et qu’il eut déclaré qu’il ne le vouloit faire, seroit-il recevable aprés que ce parent Masuer Grimauder auroit formé l’action en retrait : Masuer,Benedicti , Boyer et Grimaudet n’estiment pas qu’il y fût recevable, mais quand même il auroit passé cette déclaration en Justice il y pourroit être reçû en remboursant les frais s’il y venoit dans le temps fatal.

Puis que le lignager qui a renoncé à ses droits n’y peut revenir, il semble que celuy qui a cedé son droit n’y soit plus admissible, bien que cette cession foit nulle et inutile, et que même elle ait été jugée telle ; car les cessions de droits faites contre la prohibition de la Loy, bien qu’elles n’ayent point d’effet ne laissent pas de rendre le cedant indigne de son droit : Le tuteur qui prend cession d’actions contre son pupille ne peut plus agir aprés la tutelle finie, nonobstant que la cession n’ait point eu d’effet durant fa gestion, l. Minoris, C. qui dare tut. poss. Si l’usufruitier durant son usufruit vend le fonds sujet à son usufruit il retourne au propriétaire, quoy que la vente n’ait point eu d’effet, l. 8i ususfructus, D. de jure dot. mais cette. cession de droits de rettait lignager n’ayant rien contre : les bonnes moeurs, quoy qu’elle ne soit pas approuvée par la Coûtume, n’emporte pas la perte du droit du lignager. on a demandé si lheritier de celuy qui a renoncé au retrait lignager, peut intenter l’action e retrait au prejudice du desistement fait par celuy qu’il represente : En 1649. les nommez Madeline et Fouquet firent échange entr’eux de quelques héritagesa mais dans la même année Madeline rettoceda à Fouquet le fonds qu’il avoit eu de luy en contr’échange avec d’au-tres héritages qu’il luy vendit.

Thomas Madeline ayant intenté l’action de retrait contre le premier Contrat, pretendie que la retrocession faite de la contr’échange étoit une fraude ; mais aprés quelques procedures le retrayant se desista par une transaction moyennant une somme que le défendeur en retrait luy paya pour le rembourser de ses frais : En 1671. le petit-fils de Thomas Madeline. intenta tout de nouveau l’action de retrait, mais y ayant été jugé non récevable, sur son apel de Meherent son Avocat disoit que suivant l’Article CCCCLXI. lors que l’un des compermu-tans ou personne interposée pour luy rachete l’échange qu’il a baillée dans l’an et jour il y a ouverture à la clameur dans les trente ans : Or la rettocession de la contr’échange ayant été faite dans l’an et jour, ce Contrat d’échange n’étoit qu’un Contrat masqué et déguisé pour cacher un véritable Contrat de vente : tout ce que l’on pouvoit objecter étoit qu’étant heritier de son ayeul il étoit tenu de ses faits, et ainsi comme Madeline s’étoit desisté de son action en rétrait moyennant une somme de deniers qui luy avoit été payée, il ne pouvoit plus exercer l’action le retrait. a ces objections l’Appellant répondoit qu’il falloit distinguer en sa personne la alité de parent d’avec celle d’heritier, que s’il n’avoit point d’autre qualité que celle d’heritier la transaction faite par son ayeul luy lieroit les mains ; mais agissant en qualité de parent Il y venoit jure suo et jure sanguinis. De Prepetit répondoit pour l’lntimé que suivant cet Ar ticle tout lignager qui a renoncé à user de ses droits de clameur n’y peut revenir : Or l’Apellant est véritablement censé avoir renoncé à son droit de retrait, puis qu’il se porte he-ritier de son ayeul qui s’étoit desisté moyennant une somme de son action en rétrait, ayant laissé l’acquereur en la possession paisible de son fonds, ce que l’Appellant comme son heritier est obligé d’entretenir ; qu’il ne falloit point separer la qualité d’heritier de celle de parent, cela eût été bon si du vivant de son ayeul et avant la succession échûë ou depuis sa mortayant repudié son heredité il étoit venu au retrait : Par Arrest en l’Audience de la Grand-Chambre du 7. de Février 1673. la Sentence fut confirmée.