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CCCCC.

Fraude en la vente, comment fait ouverture à la clameur.

Tout Contrat de vente où il y a fraude commise au prejudice du droit de retrait appartenant aux lignagers, ou aux Seigneurs feodaux, est clamable dans trente ans.

Quand on allégue qu’un Contrat est frauduleux il faut prouver la fraude ; mais l’Ordonnance de Moulins n’empesche point que cette preuve ne se fasse par témoins, car elle ne regarde que les contractans qui doivent s’imputer s’ils n’ont point rédigé par écrit toutes leurs actions, et il seroit absurde de rétendre contre un tiers en fraude duquel les contractans l’auroient point employé toutes leurs conditions : Il n’y a point de nullité ny de fraude qu’on ne pûst couvrir par cette voye ; il ne faudroit plus parler de Contrats frauduleux, cette sorte de preuve ne se fait point par écrit, in omnibus ea sola probatio sufficit quae haberi potest ; ainsi ugé au Rapport de Mr du Moucel le mois de Juin 1622. et pareil Arrest au Parlement de Paris dans la seconde partie du Journal d’Audience, l. 2. c. 21. et par Arrest en la Chambre des Enquêtes du 24. de Février 1620. le nommé Bazant fut même reçû à faire publier des Censures Ecclesiastiques pour prouver une fraude. Autre Arrest du 23. de May 1618. au Rapport de Mr d’Ety.

Par autre Arrest du 13. de Decembre 1658. il fut jugé qu’en cas de fraude le retrayant est reces vable à la prouver, tant par témoins que par Censures Ecclesiastiques. Loüin ayant rétité et revendu quatorze jours aprés un héritage qu’il avoit fiefé par rente rachétable à la nommée Miferé, elle voulut prouver qu’avant le retrait Guillard acquereur avoit fait paction avec Loüin de tacheter de luy cet héritage, et que Loüin n’y avoit fait aucun profit : le Juge ayant refusé de la recevoir à la preuve de ses faits, quoy que Loüin alléguât qu’ayant rétiré au nom de ses enfans mineurs il n’avoit pû en disposer à leur prejudice, néanmoins par Arrest en reformant la Sentence, ladite Miseré fut reçûë à la preuve de ses faits de fraude, tant par émoins que par Censures Ecclesiastiques, plaidans Lyout et Theroude Il est vray que par Arrest, au Rapport de Mr de Vigneral, du 26. d’Aoust 1656. entre de S. Martin, sieur de Conteville, et le Monnier, la Cour refusa la preuve par Censures Ecclesiastiques, et il fut dit seulement vû que les declarations du vendeur et de l’acquereur étoient contraires, la preuve de la fraude seroit faite par les Tabellions et par les témoins instrumentaires, et par les Avocats qui avoient concerté le Contrat, mais il y avoit du particulier. on ne peut aussi tirer en consequence un Arrest du 22. de Février 1657. par lequel on cassa ne Sentence du Bailly qui accordoit des Censures Ecclesiastiques pour la preuve de faits de fraude ; car en cette Cause l’appel étoit de ce que l’Instance étant attachée devant le Vicomte de rétrayant s’étoit pourvû devant le Bailly pour obtenir des Censures Ecclesiastiques : on soûtenoit que n’étant point saisi du négoce il n’avoit point été competent d’accorder les Censures ; il est vray que l’Appellant concluoit aussi qu’elles ne pouvoient être accordées que pour les cas de l’Ordonnance ; mais la Cour ayant cassé la Sentence du Bailly qui en étoit incompetent, on ne peut dire que cet Arrest ait décidé la question, et je pense qu’il la faut regler par les circonstances particulieres du fait.

lay remarqué sur l’Article CCCCLXXVIII. qu’il ne suffit pas que l’on ait eu dessein de commettre une fraude, il faut qu’elle ait été consommée et executée ; cela fut encore jugé dans cette espece, ou bien qu’il parust par une promesse que le preneur à fieffe seroit tenu de racheter la rente fonciere au denier vingt, lors que le bailleur le désireroit ; neanmoins cette pa-ction n’ayant point été executée, il n’y avoit pas ouverture au retrait sur le pretexte de la fraude : Par Arrest en l’Audience de la Grand. Chambre du 23. de Novembre 1656.

Il fut jugé le 4. de Mars 1622. que quand on a enflé le prix du Contrat, cela donnoit ouverture au retrait, mais non pas à la commise de l’héritage ; et le sieur de Costentin l’ayant soûtenu contre Campion, il en fut debouté.

Mais il paroit rigoureux que l’on ait étendu contre les enfans la peine de la fraude commie par le pere pour les exclure du retrait ; Dennequin et Chapel avoient déguisé un Contrat le vente sous le titre d’échange : Mr de Couronne Conseiller en la Cour ayant clamé à droit seodal, et prouvé la fraude ; Dennequin pour éluder le retrait feodal, déclara retirer au nom le ses enfans, soûtenant qu’il étoit preferable : Par Arrest rendu par Rapport du 14. de May 1625. ledit Dennequin en haine de la fraude fut debouté de son action, et le Seigneur feodal luy fut preferé.