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CCCCCXII.

Deniers donnez à mineurs reputez immeubles.

Deniers donnez à enfans mineurs d’ans pour être employez en achat de rente ou heritage, sont reputez immeubles pendant la minorité des donataires, et tiennent lesdits deniers donnez et héritages qui en sont acquis, nature d’acquests.

Cet Article nous fait connoître que quand la Coûtume s’est departie des regles ordinaires, pour faire que la seule destination change la nature des choses, et convertisse des meubles en ûmmeubles, elle ne s’y est portée qu’en faveur de la dot et de la minorité ; car en cet Article elle déclare expressément que les deniers donnez à des mineurs pour être employez en achapr de rente ou herttage, ne sont reputez immeubles que pendant la minorité des donataires, pour montrer qu’elle n’en change pas la nature : Elle ajoûte aussi que ces deniers don-nez et les héritages qui en sont acquis tiennent nature d’acquest, ce qui est fondé sur la même raison que la seconde partie de l’Article precedent.

Par les Constitutions des Empereurs le tuteur est tenu d’employer les deniers appartenans à ses mineurs en achapr d’héritages ou de les bailler à interest, l. Quoties, D. de administ. tut.

Covarruvias est d’un sentiment contraire, quia nec pietatis causâ licet usuras exercere, C. super eo de usur.Covarr . to. 2. var. resol. l. 3. c. 2. DuMoulin , de contract. usur. n. 55. et quest. 76. 42 fortement soûtenu le contraire, et c’est un usage cettain que pour les rentes constituées au profit les mineurs, le tuteur peut valablement stipuler le rachapt dans un temps sans que l’on puisse pretendre cette paction usuraire : Arrest du Parlement de Paris de l’année 1622. en la cinquième Chambie des Enquêtes ; mais aussi-tost aprés la majorité l’interest cesse.

I y a de l’apparence qu’autrefois en cette Province on jugeoit le contraire ; car outre l’Arrest rapporté par Berault il s’en trouve un du 23. de Février 1509. par lequel des deniers ap-partenans à des filles mineures ayant été baillez en rente à charge d’en faire le raquit lors qu’elles se matieroient, le Contrat fut cassé, et l’obligé décharge de l’interest. Autre Arrest du 8. de Février 1530-

Berault a suivi l’autorité de ces anciens Arrests, mais aujourd’huy l’usage est contraire.

Elisabeth le Moyne, veuve d’un nommé le Moyne Marchand à Caen, bailla à interest pupillaire au denier quatorze la somme de quatoize cens livres à Nicolas Grimout Ecuyer, sieur de la Mothe, à condition de rendre cette somme dans trois ans : aprés ce terme le sieur de la Mothe en obtint une prolongation, aprés laquelle sur l’action de cette tutrice pour repeter les quatoize cens livres, le sieur de la Mothe allégua que ce Contrat étoit usuraire, s’aidant de l’Arrest remarqué par Berault : Je dis pour la tutrice que l’alienation du soit principal pour les constitutions de rentes étoit véritablement requise pour ne tomber pas dans le crime l’usure, mais 1’y avoit des exceptions à cette regle : Premierement pour les Marchands des Villes où il y a Bourse, qui peuvent bailler de l’argent en depost pour un temps : En second lieu pour les mineurs, ce que l’on permet en leur faveur par ces raisons ; l’une pour faciliter le mariage des filles ; lautre afin d’avoir de fargent prest pour traiter d’un Office ou de quelqu’autre employ ou pour entrer dans le commerce, et comme on ne poutroit pas retiter l’argent des mineurs s’il étoit perpetuellement aliené, on a permis en leur faveur de le bailler avec interest pour un certain temps : d’ailleurs comme le tuteur est responsable des constitutions qu’i fait,, on luy doit souffrit de faire valoir les deniers des mineurs à condition de les repeter : l est vray que quelques-uns ont estimé que cela se devoit faire par l’autorité du Juge et aprés des, proclamations, mais ces formalitez ne sont necessaires que pour le tuteur, et pour se décharger de la mauvaise collocation, et il n’est pas raisonnable de charger les mineurs de ces tais inutiles ; et neanmoins pour faire connoître que l’Intimée ne vouloit repeter les deniers de ses mineurs que pour son asseurance, elle consentoit que le sieur de la Mothe en continuât l’interest en baillant bonne et suffisante caution : Par Arrest du 22. de Février 1652 aprés la déclaration de ladite le Moyne, la Cour ordonna que les deniers demeureroient aux sains du sieur de la Mothe en baillant bonne et suffisante caution. Et afin que l’on n’en doutât plus par le Reglement fait pour les tutelles, la Cour en l’Article 40. en a fait une dispo-sition expresse. La jutisprudence du Parlement de Paris est conforme ; car quoy qu’un particulier. qui avoit fait un Contrat de constitution de certains deniers appartenans à une mineure, à condition de les rendre quand elle seroit mariée ou Religieuse, refusât de faire le rachapt pretendant que le principal n’étoit point exigible ; neanmoins par Arrest du 12. d’Avril 1652. le debiteur fut condamné à faire le rachapt. De laLande , sur l’Art. 191. de la Coûtume d’Orléans, ajoûte qu’en faveur des pupilles et pour la conservation de leurs biens qui sont en la garde des Loix on a introduit cette Maxime, que les deniers pupillaires puissent être baillez en rente avec cette charge que le constituant ne les poutra amortir durant leur minorité : un vendeur peut aussi stipuler que l’acheteur qui se constituë en rente pour le prix de son achapt n’aura la liberté de a racheter que dans unecertain temps, parce que cette convention fait une partie du prix, I. Fundi partem TS. D. de contrah. empt.

On a demandé si ce privilege introduit en faveur des mineurs pouvoit être étendu aux communautez : Noel le Coq avoit pris des Paroissiens du Menibus quatorze cens livres, constituez en cent livres de rente, à condition de rendre, ce capital toutefois et quantes : Sur l’action formée par ces Tresoriers quatre ans aprés ce Contrat contre le sieur le Coû, pour obliger à la restitution des quatorze cens livres, il y fut condamné : Sur l’appel je remarquay la difference qu’il y avoit entre les mineurs et les Communautez qui n’avoient point de raison ny de faveur particuliere pour être dispensez contre ce droit commun, et qu’au contraire les Communautez Ecclesiastiques étoient encbre défavorables, quia pietatis causa non licet usuras exercere, C. super eo de usur. ce que j’appuyois par. l’autorité de duMoulin , de usurquest. 13. Par Arrest en la Grand. Chambre du 17. de Juin 1667. la Sentence fut cassée, ledit le sCoû déchargé de restituer le principal, si mieux lesdits Tresoriers n’aimoient imputer sur le fort principal les arrerages qu’ils avoient reçûs, Theroude plaidant pour les Treloriers.