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CCCCCXLI.

Cas auquel elle ne peut avoir recompense.

Si le dot a été vendu par la femme pour redimer son mary n’ayant aucuns biens, de prison, de guerre, ou cause non civile, ou pour la nourriture d’elle, de son mary de ses pere, mere, ou de ses enfans en extréme nécessité, elle ne le pourra retirer, sauf le recours de la femme sur les biens du mary où il parviendroit à meilleure fortune, et non sur les biens des acquisiteurs.

Quelque favorable que puisse être la cause de la dot, celles qui sont exprimées en cet Article et pour lesquelles on a permis l’alienation le sont encore davantage : Le Velleian même ne forme point d’obstacle, et si la femme emprunte de l’argent pour acquitter les dettes de son pere, et que les deniers y ayent été actuellement employez, la pieté paternelle l’emporte sur tout autre consideration, ne scilicet pater ejus propter solutionem vexaretur, non ent tuta Velleiano, l. Si pro aliquo ar. 8. Ad Senat. Consult. Velleian

Les Docteurs tiennent unanimement que l’obligation d’un fils de famille mineur pour retirer son père de prison est valable : Et ces Docteurs non plus que les Arrests du Parlement de Paris ne distinguent point entre la cause de l’obligation si elle est civile ou criminelle : M Loüer, l. a. n. 9. rapporte un Arrest par lequel il a été jugé que le creancier pour la rançon du pere étoit preférable aux enfans qui avoient renoncé à sa succession, tant pour le doüaire que pour la restitution de la dot et autres conventions matrimoniales : Et Monthelon en cite un autre, par lequel un mineur qui s’étoit obligé pour retirer son pere de prison fut déclaré non receable en ses Lettres de restitution, Arrest 130

Toutes ces Maximes sont pieuses et charitables : Cependant cet Article ayant expressément liffité les cas ausquels l’alienation de la dot est permise ; je douterois fort que hors les cas qui sont exprimez, une alienation des biens dotaux pût être soûtenuë. En la Chambre de la Tournelle le 30. de Juillet 1635. la Demoiselle de Mainiere ayant demandé la permission de ven-dre quelque partie de son bien pour subvenir aux frais du procez criminel que l’on faisoit à son mary qui étoit prisonnier, Mr le Procureur General s’y opposa, disant que la Coûtume ne per nettoit ces alienations que pour retirer son mary de prison, ce qui s’entend de la detention our des interests jugez et non point des frais de procedure : La consequence en seroit perilleuse, on dépoüilleroit aisément une femme de son bien sur ce pretexte ; la Cour appointa la cause au Conseil,

Cet Article ne prescrit point de solemnitez pour ces sortes d’alienations ; il est neanmoins d’un usage notoire que pour y parvenir il faut un decret du juge et une déliberation de parens : Et par Arrest du 13. d’Aoust 1638. au Rapport de Mr Duval Coupeauville, la vente du bien d’une femme faite par un mary aprés en avoir obtenu la permission du Juge, et qui étoit causée pour subvenir à la nourriture de la femme fut déclarée nulle, et les heritiers renvoyez en la possession de l’héritage vendu ; l’Arrest fondé sur ces deux raisons, premierement que la emme n’y avoit point signé, sa signature étant necessaire à peine de nullité, et la seconde que femme étoit morte dés le lendemain de la vente causée pour alimens.

Une femmelen l’absence de son mary acheta un tonneau de Sidre que le Marchand fit apporter en la maison du mary où il fut consumé par la famille : elle se fit depuls sepater de piens, et le Marchand l’ayant poursuivie pour le payement de son sidre, disant qu’il le luy avoit livré pour la nourriture d’elle, de son mary, et de ses enfans, et que par consequent suivant cet Article elle avoit pû y obliger tous ses biens : La femme répondoit qu’il devoit connoître sa condition, et que n’étant pas separée elle ne pouvoit s’obliger, que tout ce qu’elle avoit tacheté étoit pour son mary et pour son compte, et il s’aidoit inutilement de cet Article qui n’a lieu que dans la necessité du mary ; et aprés tout il eût fallu un decret de Justice pour pouvoir engager son bien : Par Arrest du 30. de May 1656. la femme fut absoute de la demande du creancier

Mais l’autorité du mary sera-telle necessaire pour ces sortes de ventes de la même manière qu’elle est requise par l’Article CCCCCXXXVIII. pour les autres alienations ;S. Augustin . Augustin en son Epitre 199. remontroit à une femme qu’elle ne pouvoit disposer d’aucune chose sans la permission de son mary. Nihil de tua veste, nihil de tuo auro, vel argento, vel quacunque petuniâ, aut rebus ullis terrenis tuis sine arbitrio ejus facere debuisti. Il semble neanmoins que quand la vente est faite pour les causes exprimées dans cet Article, l’autorité du mary n’est pas absoument necessaire, elle est abondamment suppleée par l’autorité du Juge et par la déliberation des parens ; l’amour et la charité maritale couvrent ce defaut, quia justa & honesta causa est, I. Mutus, Sd. 8. 5. D. de jure dot. il y en a une décision formelle dans la Coûtume d’Auvergne, c. 1. des Donat. Article 7. VoyezLoüet , l. a. n. 6. et le President Fabry en son Code defin. 16. et 21. La femme peut s’obliger en l’absence de son mary pour doter sa fille, parce qu’elle y est naturellement obligée.Mornac . Ad l. 2. D. Ad Senat. Consult. Velleian. Tronçon lur la Coûtume de Paris, Article 223.