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’ORIGINE et la cause des ventes et subhastations publiques, fut établie par les Romains pour faire cesser la peine introduite par la Loy des douze Tables contre les debiteurs insolvables ; car au lieu de la leur faire souffrir en leurs corps, elle fut transferée de la personne sur les biens : Consensu publices ditTertullien , in Apologetico, crudelitas illa erasa est, et in pudoris notam capitis pona conversa, inventâ bonorum proscriptione, et suffundere maluerunt san-guinem quam effundere

Entre les moyens d’acquerir il n’en est point aujourd’huy de plus frequent que celuy des ventes judiciaires, c’est pourquoy il est important qu’elles se fassent dans les formes : C’est la matière et le sujet de ce Titre, où la Coûtume déclare toutes les formalitez qui sont requises pour la validité et la perfection d’un decret : Et afin que les creanciers ne soient pas surpris. si ces ventes étoient faites si secretement ou avec tant de precipitation qu’ils n’en pourroient avoir connoissance, ou que ne se trouvant point d’encherisseurs les biens fussent vendus à trop vil prix, la Coûtume a requis plusieurs solemnitez et donné divers delais avant que de pouvoir proceder à une adjudication finale.

Ce fut sans doute par un motif de commiseration pour les debiteurs, et pour empescher que les decrets ne fussent trop frequents par la facilité que l’on trouveroit à les poursuivre, que nos Reformateurs établirent tant de formalitez pour reprimer par la difficulté de les observer exactement, l’avarice et la duteté des creanciers inexorables, rarâ id accedere voluerunt, & ut consideratè fieret comparaverunt : Cependant l’experience a fait connoître qu’il étoit plus utile et pour les créanciers et pour les debiteurs de n’être pas si serupuleux pour les fornalitez : autrefois on fe rendoit même ingenieux à trouver des defectuositez dans les decrets, et il falloit être fort versé dans ces matieres pour ne s’y tromper point ; mais enfin l’on a reconnu par l’experience que la pluspart de ces scrupuleuses solemnitez non seulement sont supersluës, mais encore onereuses aux debiteurs et aux creanciers, c’est pourquoy il seroit beaucoup plus utile d’abreger ces longueurs et de ne s’arrêter pas à des pointilles pour faire serdre les frais à un saisifsant lors que sa dette est legitime.

Pour éviter aux grands frais qui sont inévitables par la longueur et par le nombre des procedures, le Parlement de Paris a autorisé les licitations qui se font entre les cécanciers ou aprés quelques proclamations, les biens sont ajugez ou aux creanciers pour le payement de lieurs dettes, ou à ceux qui font la condition meilleure.

En cette Province on a tenté d’introduire cet usage : Pierre et Pierre de la Barre ayant fait abandonnement de leurs biens à leurs creanciers, les Seyndies des créanciers presenterent Requête pour être permis de les faire liciter entreux, et par Arrest ils furent renvoyez devant les sieurs Bulteau et d’Espaigne Marchands pour faire la licitation en leur presence, lesquels étoient utorisez de recevoir les encheres qui seroient faites tant par les créanciers que par autres personnes, et de passer outre aux adjudications, ordre et distribution des deniers, tant de la icitation que des arrerages des rentes, fermages, loyers de maisons, qu’autres effets desdits de la Barre. Les Greffiers du Bailliage de Roüen s’étant rendus opposans à l’execution de l’Arrest, Greard leur Avocat remontroit que ces Marchands avoient étendu si loin l’execution de l’Arrest qu’ils prenoient qualité de Commissaires de la Cour, ils décernoient des Mande mens aux Sergens pour faire des Proclamations pour être les héritages saisis pendant quarante jours, et être en suite procedé aux autres diligences comme si c’étoit un decret en forme, et même que des creanciers avoient obtenu des Lettres en la Chancellerie pour faire ajourner es opposans devant ces Marchands, ce qui dépoüilleroit les Demandeurs de leurs fonctions rdinaire : ; ils n’empeschoient pas que les creanciers ne fissent entr’eux telle licitation qu’ils aviseroient bien, et qu’ils ne reglassent l’ordre de leurs hypotheques ; mais tout ce qui se fait par forme de Justice entre des parties qui contestent entr’elles doit être fait devant les Juges ordinaires : les Parties pouvoient bien prendre des Arbitres, mais la Cour n’avoit pas le pouvoir de donner la qualité de Commissaires à des personnes qui n’avoient aucun caractere pu-blic : De Cahagnes pour les Seyndies des creanciers répondoit que leur obligé leur ayant fait n abandonnement de ses biens, on ne pouvoit pas empescher qu’ils n’en fissent la licitation entr’eux, à quoy le ministere de Justice n’étoit point necessaire, et les Juges n’avoient point droit de se formaliser s’ils faisoient cesser leurs profits pour conserver leur bien : Par Arrest du 14. d’Avril 1673. il fut dit que sans s’arrêter à la Requête des Greffiers l’Arrest du 3. de Decembre 1672. seroit executé sans tirer à consequence, et neanmoins la Cour fit défenses ausdits Bulteau et d’Espaigne de prendre la qualité de Commissaires de la Cour, ny de decerner des Mandemens, ny de proceder par adjudications, mais seulement par ventes volontai-res qui ne purgeroient aucunes hypotheques. Cet exemple sera neanmoins suivi rarement en ette Province, soit à cause que les creanciers conviennent difficilement de ces licitations, ou à cause qu’elles ne purgent point les hypotheques, et que les creanciers qui n’y auroient point été appellez pourroient saisir les biens licitez

Autrefois on doutoit si les decrets faits en Normandie sans y avoir observé les solemnitez rescrites par l’Ordonnance des criées étoient valables : Et Chopin en sa Preface sur la Coûtume d’Anjou, p. 2. d. 5. dit en avoir plaidé la Gause au Parlement de Taris pour le decret de la terre de Lanquetot, qui fut appointée au Conseil ; mais depuis ce temps-là nôtre Coûtue ayant été reformée par l’autorité du Roy, on n’est point obligé de garder d’autres formes que celles qui sont ordonnées par ce Titre, de sorte que nous pouvons dire des Decrets ce que Mr d’Argentré dit de ses Appropriances, que ut semel rité sunt apposita, nulla cujusquam de absentia, de ignorantia aliisque causis excusatio admittitur Protheorematit. des Appropr.