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CCCCCLXXVIII.

Decret ne fait préjudice aux rentes foncieres et Seigneuriales, sinon pour les arrerages.

Decret ne peut être passé au préjudice des rentes Seigneuriales ou foncieres et anciennes, pour faire perdre les rentes à ceux à qui elles sont dûës, ( supposé ) encore qu’ils ne soient opposans audit decret : mais perdent seulement les arrerages échûs jusques au jour qu’il les auront demandez, et sauf à l’encherisseur à faire revenir les derniers emportans deniers.

Voicy encore une autre prerogative que la Coûtume donne aux rentes Seigneuriales et foncieres, que le decret n’en purge point le fonds lequel y est affecté ; le proprietaire qui a ignoré le decret ou qui a négligé de s’y opposer souffre seulement la perte des arrerages : Il faut encore remarquer que quand le Seigneur ou le proprietaire de la rente fonciere ne s’est point opposé au decret, les arreérages n’en sont dûs que du jour de la demande, comme il a été jugé par Arrest, au Rapport de Mr Cormier, le 22. de Novembre 1634. suivant l’au de Bérault, et contre l’opinion deGodefroy . Suivant les Loix Grecques et Romaines on ne souffroit la verte de ses droits que par le laps du temps qui devoit être assez long pour donner le loisir à a conservation d’iceux ; mais la Coûtume n’exempte de la rigueur du decret que les rentes Seigneuriales et foncieres.

La Coûtume de Paris est conforme à la nôtre pour les rentes Seigneuriales et pour les arrerages, Article 355. quia debentur in recognitionem Dominii : Mi lePrêtre , Cent. l. c. 62. mais pour les rentes foncieres on observe à Paris l’Article 13. de l’Ordonnance des Criées et il faut s’opposer au decret ; parce, dit Brodeau en son Commentaire fut M.Loüet , l. C. n. 19. qu’elles ne sont point dûës de droit commun et ordinaire in vim de la Coûtume, mais par un titre particulier qui tombe dans la prescription.

Sur la question de sçavoir s’il est necessaire de s’opposer pour les servitudes, l’on a fait ditinction sur la qualité des servitudes.

Il y a des servitudes apparentes et continuës, ou quasi continuës ; il y en a de latentes et discontinuës : les servitudes apparentes et continuës sont celles qui sont tellement visibles qu’elles ne se peuvent cacher, et qui subsistent de par soy sans autre ministere de l’homme, comme le droit de vûës, de goutières ; car encore que pour leur premiere fondation le fait de l’homme soit requis, neanmoins depuis qu’ils sont formez et établs ils n’ont plus besost d’être confirmez, que etsi an principio acquisitionis fuctum requirant hominis ad formarionem ssisuccessivos tamen hominum actus non exigunt, sed ipsa per se rerum ipsarum nota servitutes consera vant ; Baldis in l. 2. C. de seroit. et aqu-

Les servitudes discontinuës et latentes sont qua facto Aominis exeroentur ; comme d’aller et venir, passer et repasser pour puiser de l’eau au puits de la maison d’outruy, et autres semblables

Pour les servitudes apparentes et continuës, comme elles sont tellement visibles que l’adudicataire n’a pû les ignorer, encore que l’on ne se soit point opposé pour la conservation d’icelles, elles ne sont point purgées par le decret, la chose n’étant censée venduë qu’en l’étas Celsus où elle se trouve, cum suo habitu, statu, qualitatibus, suivant le sentiment du Jurisconsulte Celsus, l. Qus fundum, D. quemadm. servit. Amitt. fundus qualiter se habens cum in suo habitu possessus est, jus non deperit, nec refert justè necent possident, qui palem possider : quid enim aliud sunt, dit le même Jurisconsulte en la l. Quid aliud, de verb. signif. jura pradiorum, nisi pradin qualiter se babentiâ, ut bonitas, salubritas, amplitudo ; mais pour les servitudes latentes et discontinuës il est necesfaire de s’y opposer pour les conserver, quia nonnisi facto hominis exercentur. VoyezLoüet , d. 5. n. 1. LePrêtre , Cent. l. c. 62. servitus non est pars substantiae, seu fundi, sed accidens ; et il y a grande différence inter jus seroitutis et proprietatis reien Normandie comme le decret ne se passe point au prejudice des droits réels, et qu’il ne purge que les droits et actions hypothecaires, je n’estime pas qu’il fallût s’opposer pour les servitudes prediales ; car on a étendu cet Article à tous les droits réels, au doüaire, au tiers des enfans, et même au Titre d’un Prêtre

Le nommé Roüillard en mariant sa fille à Elie luy donna quatre mille livres, dont il en paya douze cens livres comptant pour le don mobil, et pour le surplus il se constitun en deux oens livres de rente, étant stipulé qu’en cas de rachapt le pere d’Elie en demeureroit caution, et que pour cet effet il seroit appellé au rachapr : Les enfans de Roüillard en firent le rachapr entre les mains du mary sans y appelles son pere ; les héritages d’Blie, pere et fils, étant saisis réellement, Anne Roüillard s’opposa pour être colloquée lur les blons du pere et du fils : Les creanciers du pere luy objecterent que le pere n’ayant point été appellé au rachapt olle n’avoit point d’hypotheque sur ses biens : Durant cette contostation les héritages de Roüillard, frère de cette femme, furent aussi saisis réellement, mais étant sous la puissance de son mary elle ne s’y étoit point opposée ; mais prevoyant qu’olle ne seroit point payée sur les néritages de son mary, elle interpella l’adjudicataire des biens de son frère de luy faire valoir sa rente, son frère en étant responsable pour l’avoit mal rachetée rque fa rante étant fonciere elle n’avoit point perdu son hypotheque par le decret, et qu’on ne luy pouvoit reprocher qu’elle ne s’y étoit point opposée, parce qu’étant sous la puissance de son mary elle étoit in apable d’agir : L’adjudicataire alléguoit pour sa défenfe qu’il falloir faire difference entre une rente constituée par le pere, mere ou freres pour la dot d’une fille et qui subfistoit encore, et une rente qui a été rachetée ; la premiere est une véritable rente fonciere qui ne peut être purgée par le decret, et pour laquelle on peut agir contre l’adjudicataire comme possedant les biens lesquels y sont affectez ; mais lors qu’elle a été rachetée ce n’est plus qu’une simple rente pour laquelle on doit s’opposer au decret, autrement on ne peut plus inquieter l’adjudicataire, et cette rente lors qu’elle a été rachetée n’est plus fonciere, et on ne peut en de-nander que cinq années ; et pour montrer que ce n’est plus une rente constitude on ast tent de discuter les biens de celuy qui a reçû le rachapt avant que de retourner sur celuy qui l’a fait ; son exception qu’elle n’avoit pû agit vivente marito n’étoit pas valable les decrets étane de droit public, et ils se passent au prejodice des mineurs, fauf leur retouts contre leurs tuteurs, contr et les absens, et generalement contre toutes personnes : Par Arrest du 23. de évrier 1663. au Rappoet de Mr du Houley, le ficus du Rocher adjudicataire fut absous de a demande de ladite Roüillard.

Il faudroit tenir suivant cet Arrest que la rente dotale rachetée par le pere ou les fteres entre les mains du mary perd absolument toutes les prerogatives de la rente fonciere, et que uand la femme pretend retourner sur les biens du pere ou des frères ce n’est plus que pour remander une simple rente, laquelle par consequent a pû être purgée par le decret.

Pour le doüaire il n’est point purgé par le decret, ny par consequent le tiers des enfans : Arrest, au Rapport de Mr de Fermanel, du 21. de Fevtier 5683. pour Catherine Burnen ontre Hedou : Elle demandoit son doütire sur les biens de son mary qui avoient été decrotez, on le luy avoit ajugé en essence, et à faute d’avoir donné caution de payer le tiors des dettes ancetieures de son mariage, il avoit été ordonné par Sentonce renduë par contumace que le tiers seroit decreté : Depuis s’étant presentée elle avoit soûtenu avec ses enfans qu’elle n’avoit pû leur faire prejudice par une mauvaise procodure : Par Arrest elle fut condamnée à refonder les dépens de la contumace, et Hedou adjudicataire condamné à luy quitter le tiers, dont recompense luy fut ajugée sor las derniers empottans deniersEn donnant cette prerogaiive aux rentes Soignouriales et fonciores de n’ôtre point purgées par le decret, il n’étoit pas raisonnable que l’adjudicataire fût troublé pour les arrerages échus vant l’adjudication, parce qu’autrement on auroit de la peine à trouver des enchtrisseurs.

Ce fut par cette raison que les Empereurs ordonnerent la même chose pour les adjudicataires des biens qui étoient subhastez, comme on l’apprend de la l. 6. Cod. de jure et fide hasta fisc. et l. ult. C. de censib. quand un héritage étoit vendu et subhasté par le Perequateur, le preneur et adjudicataire n’étoit point tenu des arrerages precedens, ce qui ne se pratiquoit pas au commencement, comme on l’apprend de la l. Prediis. D. de jure Fisci : mais les Empereurs ayant remarqué que personne ne vouloit encherir les héritages de ceux qui étoient ede vables au Fisc, par la crainte d’être recherchez pour les tributs ou autres redevances dont on ignoroit la quantité, Valentinien fut contraint d’ordonner que ceux qui acheteroient du Fisc à l’encan ne seroient tenus de payer aucune chose outre le prix de leur adjudication, et qu’ils ne pourroient être poursuivis pour les arrerages precedens ; ce que la l. 1. de jure Fisci Loyseau Cod. Theodos. exprime fort amplement : C’est de-là, dit Loyseau du Deguerp. l. 2. c. p. n. 10. que l’on a appris en France qu’il faut s’opposer pour les arrerages des droits Seigneuriaux, bien qu’il ne soit necessaire de s’opposer pour la continuation d’iceux.

Au decret de quelques héritages qui étoient tenus de la Haute-Justice de Berville qui appartenoit à Messire Loüis de Grimouville, sieur de la Mailleraye, sur la demande qu’il fit de plusieurs rentes Seigneuriales, elles luy furent contredites par quelques creanciers, ce qui donna lieu de condamner les derniers emportans deniers à bailler caution : Le sieur de la Mailleraye ayant depuis obtenu l’effet de sa demande pour être payé des arrerages échûs, lors de l’état il fit execution sur le fonds obligé ; l’adjudicataire soûtint qu’ayant garny ces arrerages-là il devoit s’addresser aux derniers emportans deniers ; au contraire le Seigneur disoit qu’il pouvoit s’addresser sur son fonds, et que le decret ne l’avoit point purgé des arrerages puis qu’il s’étoit opposé pour en être payé, on le jugea de la sorte aux Requêtes du Palais : Sur l’appel par Cheron adjudicataire, par Arrest en la Chambre des Vacations du 24. de Sea ptembre 1661. en infirmant la Sentence, on ordonna que le Seigneur s’addresseroit aux derniers emportans deniers pour les arrerages échâs lors de l’état, et pour les arrerages échûs depuis l’adjudicataire fut condamné de les payer ; la raison de l’Arrest fut que l’adjudicataire ayant garny ses deniers il n’avoit point tenu à luy que le Seigneur ne fût payé, et il n’étoit pas juste de luy faire porter la peine du mauvais procez que les creanciers avoient fait au Seigneur en l’obligeant d’aller chercher sa recompense sur les derniers emportans deniers ; plai-dans Maurry pour Cheron, et moy pour le sieur de la Mailleraye.

L’adjudicataire n’est point tenu de racheter les rentes Seigneuriales et foncieres, par ces deux raisons ; la première, parce que n’étant pas rachetables de leur nature le proprietaire ne pourroit être contraint d’en recevoir le rachapt ; l’autre raison est en faveur de l’obligé, qui ne peut être aussi contraint de fournir des deniers pour le rachapt à l’adjudicataire quand il Loyseau n’en a point été chargé ;Loyseau , du Deguerp. l. 3. c. 9.

On demande pourquoy le creancier d’une rente constituée peut s’opposer pour le principal de sa rente, puis que le debiteur d’icelle ne peut être contraint de la racheter : On répond que le debiteur même a un notable interest que cela soit, autrement il demeureroit toûjours engagé, et le creancier ne le déchargeroit pas ; ainsi il pourroit arriver que son héritage auroit été decreté et que neanmoins il seroit encore inquieté, bien que l’obligé consentit que l’adjudicataire ne payât point le principal le creancier l’y pourroit contraindre.

La Coûtume de Bretagne, Article 270. de l’ancienne, et Article 180. de la nouvelle, est conforme à cet Article

Le decret purge toutes les hypotheques au prejudice du mineur, et il ne peut demander a cassation du decret quoy que son tuteur ne s’y soit point opposé ;Loüet , 1. D. n. 32.