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DE LOY APPAROISSANT

C E mot, loy, signifie procez, comme anciennement entre les Romains quand ils disoient lege agere, et estoit ditte apparoissant ou apparente, parce que quand on vouloit obtenir vn mandement du iuge pour faire adiourner quelqu’vn en telle matière, il falloit qu’il apparust auiuge par vn tesmoin, qu’on faisoit comparoir par deuant luy, du droit pretendu par le demandeur, autrement n’eust accordé ledit mandenient. Ladite loy apparoissant estoit quelquesfois terminee par bataille c’est à dire par. duel : ce qui auoit lieu quand la querelle touchoit la proprieté et estoit d’efforcee, comme appert par le chapitre de possession non mouuable à la fin au vieil liure coustumier, et mesmes en querelles qui passoent y dix sols, comme on void audit vieil coust. chap. de querelle de possession, et en la glo, et au chap. de Court et en la glose aussi-Et en tels combats on ne tendoit pas à mort d’homme, mais seulement à faire reconoistre la dette au de ffendeur afin d’en auoir satisfaction.

Et partant en cas que le champion se rendist ou fust déconfit, il n’aduenoit pas souuent qu’il perdist vie ou membre, mais estoit quitte par amende ciuile, et pour payer la chose pourquoy la bataille estoit gagee, ainsi le dit la glose audit chapitre de querelle de possession. La forme de ces combats est descrite teut au long audit vieil Coustumier chapitre de suite de meurdre. Mais le ROy Philippe par ces ordonnances abolit ces combats ou duels, argumens de l’inclination aux armes qu’auoyent les anciens Normans. Cecy est dit pour n’ignorer ce qui est de l’antiquité. Il faut maintenant venir à l’usage present de la loy apparoissant,


LX.

Chacun est receu dans les quarante ans à demander par action de loy apparoissant estre déclare proprietaire d’héritage qui luy appartient, oû qui a appartenu à ses predecesseurs ou autres desquels il a le droit, et dont il et ses predecesseurs ont perdu la possession depuis lesdits quarante ans.

Quand nous auons perdu la possesssion d’vnhéritage à nous appartenant il n’y a point d’autre recours que la voye proprietaire : c’est pourquoy apres que la Coustume a parlé de haro et autres pouruois possessoires, elle vient à la loy apparoissant, qui est en droit rei vindicatio, par laquelle nous demandons à estre declarez seigneurs de la chofe et qu’elle nous soit restituee. Et partant il faut con-Clurre, non comme quelques vns par ignorance de droit à etre enuoyez en la proprieté et possession, car la proprieté et seigneurie est à nous, nec res que acloris est magis eius fieripotestemais à estre maintenus en la proprieté et enuëyez c0me proprietaires en la possession laquelle auoit esté sur nous et à nostre preiudice vsurpée, et ce suiuant le s sic itaque discretis instit. de act. et ibi lo-fab. et in 5. omnium actionum eod. tit.

Il faut que le demandeur monstre son titre et iustifie de sa possession par quarante ans et dont les dernières annees soyent depuis quarante ans : autrement s’il n’a iouy depuis quarante ans videtur ius suum habuisse pro derelicto. Et s’il ne iustifie de son titre, au lieu d’iceluy il faut prouuer la possession precedente et continué par et puis quarante ans : car par icelle s’acquiert la prescription, laquelle vaut de titre, comme il sera dit au titre de prescriptions. Le titre du demandeur n’est sufsisamment monstré iustifiant seulement qu’il a eu la chose par contrat valable adtransferendum dominium, mais il faut en outre montrer que son auteur en estoit seigneur par des moyens qui concluent necessairement seigneurie selon Bartole et la glose in l. cumres in verb. in vacuam C. de probat.

Arrests’est donné à la chambre des Enquestes le 4. de Decembre 1609. au rapport de monsieur Vigor entre Gabrielle Masselin fille et heritière de defunt Iulian Masselin appellante du Bailly d’Eureux à Orbec, et Claude leMagnen intimé, dont le fait estoit tel. Ladite Masselin auoit obtenu vne loy appare nte pour reuendiquer plusieurs héritages qu’elle disoit auoir appartenu à son pere, voulat prouuer qu’il en auoit perdu la possession depuis quarante ans, et qu’elle estoit fille dudit Masselin. Le defendeur offroit prouuer que la demanderesse a uoit vn frere viuant : partant qu’elle estoit non receuable, sur laquelle fin de non receuoir de mandoit au prealable luy estre fait droit et subordinément denioit la possession de la demanderesse et vouloit prouuer la sienne. La demanderesse ne denioit auoir vnfrere viuant, mais disoit qu’il estoit absent de long tems et nonobstant ce elle estoit habile a obtenir ladite loy apparête et signoit en preuue à faire de ses faits. Le deffendeur sur ses fins de non receuoir s’appointe en droit et subordinément en preuue de ses faits. Par le bailly à Orbec les fins de non receuoir sont iugees pertinentes, la demandere sse deboutce de sa clame ur auec despens. Sur l’appel d’icelle la Cour par ledit arresteasse la sentence en reformant appointe les parties sur leurs essections de signatures en preuues respectiues des faits par eux articulez par leurs escrits, et à cette fin renuoyees par deuant autre iuge que celuy dont estoit appellé despens reseruez.

Arrestaesté donné à l’audience le 12. Iuillet 1611. entre Thomas le Maire d’vne part, et Ieanne Mout on tutrice des enfans de defunt Clement Coquerel et d’elle d’autre part sur ce fait. Clement Goucel ayant obtenu vne clameur de loy apparente pour reüendiquer quelques héritages dot il auoit perdu la possession le 29. Ianuier 15 88. obtient sentence contre le tuteur des enfans dudit Coquerel detenteurs d’iceux héritages, par laquelle ledit Goucel est enuoyé en possession des héritages vendiquez auec restitution de fruits et leuces depuis la signification de la clameur en remboursant par iceluy Goucel le tiers des deniers payez par le pere des deffendeurs à l’acquit des dettes dudit Goucel. Ledit le Maire qui auoit espousé la fille dudit Goucel long tems apres ayant trouué cette sentence entre les escritures de son defunt beaupere obtient vn mandement du Bailly de Quatremares qui auoit donné ladite sentence pour faire asaigner par deuant luy ladite Mouton tutrice des enfans de Coquerel pour voir declarer ladite sentence executoire. La tutrice s’en de ffend disant que cette sentence n’a iamais sortyeffet et n’a esté executee et est tousiours son mary demeuré en possessiondes héritages, et partant que ledit le Maire deuoit prendre vne nouuelle loy apparente. Le Maire dit qu’il estoit encor en tems pour demander l’execution d’icelle sentence attendu que toutes sentences sont executoires iusqu’a trente ans, et que quand il prendroit tout de nouueau vne autre loy apparente on ne luy pourroit dénier vne autre pareille sentence, qui seroit donc chose supersluë : et que la possession que le deffendeur auoit cüe ayant esté interrompué par ladite sentence ne luy pouuoit seruir pour exclurre le demandeur. Autrement-seroit sic’estoit contre yn tiers qui eust esté en cette possession, caralors il faudroit prendre la voye reelle. Le iuge auoit déclaré le demandeur non receuable saufa se pouruoir par voye decente. Sur l’appel la Cour par ledit arrest a ordonné que ladite sentence du 29. Ianuier 1585. sera executee selon sa forme et teneur, l’intimé condamné aux despens, plaidans Sallet et Poignant.


LXI.

La connoissance de loy apparoissant appartient au Bailly royal et haut iusticier.

La connoisance de la clameur de loy apparente appartient auBailly, soit royal, ou haut iusticier, au territoire duquel est assis l’héritage soit noble ou roturier.

La clameur de loy apparente fe pouuoit obtenir par l’ancien stile de proceder par mandement du Bailly, par deuant lequel on amenoit à l’intant en tesmoin, qui deposoit que par quarante ans il auoit veu l’impetrant dudit mandement ouses predécesseurs dont il estoit heritier ioüir de l’héritage, lequel deuoit estre borné et mentioné audit mandement : et n’estoit plus en apres ce tesmoin receu adeposer en la cause : ainsi ne seruoit-il que pour obtenir ledit mandement.

Mais cette comparution de tesmoin a esté depuis trouuce estre une formalité supersluë, dont on n’vse plus maintenant, se contentant le demandeur en quelcques lieux de prendre seulement vn mandement du Bailly, qui n’équipolle quevocationi in ius, ou bien on obtient lettres en la Chancellerie, qui n’ont point noplus d’autre vertu que pour faire venir le possesseur en iugement.

En clameur de loy apparente l’assignation doit estre faite au possesseur ou detenteur soit fermier ou autre L. officium de rei vind. l. 2. C. bi in rem. act. qui se faisoit anciennement à l’assise et non à autre iour extraordinaire pour y instruire et iuger la cause, comme on fait les autres ordinaires. Qui est a raison de l’importà. ce d’icelles et de la frequente assitance qui se trouue à l’asçise : sinon en cas qu’0 eust obtenu lettres en la Chancellerie pour proceder par briefues interualles.

Mais à present que la iurisdiction du Bailly est ordinaire, et qu’il la tient tous les iours ainsi que le Viconte, lesdites causes tant en l’instruction que iugement sont traitees indifferément aue c les matieres attribuees audit Bailly sans lettres de brefues interualles.


LXII.

Durant la suitte de loy apparoissant le deffendeur demeure saisi, sauf la question des fruits, sien fin de cause il decheoit.

Durant le procez le deffendeur ne doit estre depossédé, presumitur enim pro possidente, et par les mesmes lettres de clameur de loy apparente le demandeur le reconnoist possesseur qui actore non probante alisoluitur. Si le desendeur est condamnéa quitter l’heritage, ne l’ayant point quitte il sera condamnable en amende et à faire executer le iugement dans certain delay, et à faute de ce faire sera condamné par emprisonnement de sa personne suiuant l’ordonnance de l’an S3S. art. 96. Que si par ces moyens on ne luy peut faire quitter la possessiont de la chose, manu militari ci auferri potest I. qui restituere de rei zind. Ce queIo. fab . in l. 2n. C. de offic. milit. iud. entend par des huissiers ou sergens qu’on y enuoyera : ausquels si le possesseur ne veut obeir et commet quelque rebellio, en faut faire rapport à la Cour, laquelle, en cas qu’il soit besoin de main forte, fera executer le iugement par le Bailly, auquel cela est enioint par les ordonnances-Imbert aux inltitutions forenses liu. 1. chap. 64. Sur la difficulté de l’executiond’vn arrest l’ay veu pratiquer vn autre moyen par arrest du grand Conseil donné en audience le 1i. Mars 1596. au profit du sieur de saint Felix Procureur general du Roy. au Parlement de Thoulouse sur vne execution d’arrests touchant vne legitime demandee sur quelques terres possedees par le sieur de Rabat, qui auoit empesché le demandeur d’entrer en la possession et iouyssance d’icelles à luy adiugees pour sa legitime, Surquoy fut dit que le sieur de Rabat feroit executer les arrests dedans six mois, autrement et à faute de ce faire, et apres le tems passé, ledit sieur de saint Felix permis se mettre en possession d’autres terres appartenantes audit sieur deRabat, plaidans maistre François loly et maistre Pierre Camus.

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SAVF LA QVESTION DES FRVITS.

Bone fidei possessor facit omnes fructus suos l. bona fidei C. de acq. rer dom. a tempore autem litis contestata minime, quia ex tunc presumitur mala fidei possessor, qui de perceptis et percipiendis tenetuy l. generaliter et ibiDeci , de rec. Iu. Doctores in 5. si quis a no domino instit, de rer. diu, et inl sifiindum C. de rei cind. Maintenant par les iugemens et arrests on condâne ordinairement le possesseur à la restitution des fruits du iour de la signification. des lettres de clameur de loy apparente, et non des fruits anterieurs, qui est suiuant l’ordonnance de l’an 1539. art. 94.