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ARTICLE CXVIII.
L Es fruits adjugez au Seigneur ne lui sont acquis, s’ils ne sont engrangés avant que le vassal presente son aveu ou forme délivrance.
Non seulement les fruits naturels tombent dans la saisie feodale, & le Seigneur les fait siens par la saisie feodale, mais encore les fruits civils dans leur echeance ; tels que sont les arrerages des rentes & redevances Seigneuriales, & fermages.
Le Seigneur en saisie feodale, faite faute de foy & hommage, aveu non fourni & droits Seigneuriaux non payés, ne gagne les fruits & ne les feit siens à moins qu’ils n’ayent êté enlevés de dessus la terre, sciés & engrangés avant que le vassal ait fait la soy & hommage, presenté & fourni aveu, & payé les droits Seigneuriaux, ou formé sa demande en mainlevée de la saisie feodale, aprés avoir dûe ment fait ses offres ; en sorte qu’il ne suffiroit pas pour acquerir & donner les fruits au Seigneur en consequence de sa saisie feodale, que les fruits fussent en maturité, même siés & coupés, ou tombés des arbres sur la terre : il faut qu’ils soient actuellement serés, engrangés & écueillis ; car dés que le vassal en faisant son devoir trouve les fruits encore sur la terre, en quelque saison & de quelque manière qu’ils y soient, ils lui appartiennent, sans que le Seigneur y puisse rien prétendre, & même quand ils seroient actuellement dans la charette, sur des chevaux ou autrement, pour les porter & mettre dans la grange ou en un autre endroit, selon la qualité des grains & fruits.
a l’égard des buis taillis & des étangs, le Seigneur n’aura que ce qu’il aura pris & enlevé au moment que le vassal aura fait & rempli tous les devoirs de vassal : & même si le vassal avoit commencé à couper ses bois taillis ou à pécher ses étangs avant la saisie feodale, le Seigneur n’y pourroit rien prétendre, pas même dans ce qui resteroit à couper ou à pécher.
Le Seigneur qui a une fois opté les fermages au lieu des fruits naturels, ne peut varier ni changer son option ; Arrêt du Parlement de Roüen du premier Mars 1663 ; c’est pourquoi les fermages des héritages réunis ou saisis feodalement sont acquis au Seigneur, si pendant que les fruits sont encore sur le champ il a fait signifier au fermier qu’il s’arrêtoit & s’en tenoit aux fermages, à moins que le vassal ne baille aveu avant que les fruits soient engrangés par le Fermier ; Art. 19 du Reglement de 1666 ; mais en cas d’option des Fermages par le Seigneur, ils lui appartiennent du jour de l’écheance, quand même ils n’auroient pas encore été payés au Seigneur au jour que le vassal s’est mis en état de satisfaire aux causes de la saisie feodale ; Arrêt du même Parlement du 8 Juin 1660 ; mais d’un autre côté le Seigneur n’auroit pas les Fermages échus & dus au jour de la saisie feodale, mais seulement ceux qui échéroient pendant la saisie feodale, Le Vassal doit en outre avoir les fruits, nonobstant la vente que le Seigneur en auroit fait, pourvû que le vassal se presente & remplisse tous ses devoirs & engagemens de vassal avant que les fruits ayent été enlevés, serrés & engrangés par l’acheteur, à la charge néanmoins par le Seigneur de désinteresser l’acheteur, si la vente avoit été faite maturis frictibus, & de bonne foy, & non autrement.
Sur le fondement de la disposition de nôtre Article, quoique par l’Article 525. les fruits, grains & foins pendans par les racines, soient réputés meubles aprés le S. Jean-Baptiste, & les pommes & raisins le premier Septembre, neanmoins le Seigneur qui a sait saisir feodalement le Fief de son vassal, & qui s’est fait adjuger les fruits, & pris possession du Fief, ne gagne les grains & fruits s’ils ne sont enlevés, engrangés & serrés avant que le vassal ait fait cesser les causes de la saisie feodale, ou en consequence de ses offres ait demandé mainlevée de la saisie feodale.
Il n’est pas permis au Seigneur de couper pendant la saisie feodale les bois de haute futaye, mais s’il en tomboit par vetusté, tempête ou autrement, sans aide d’homme, ils lui appartiendroient ainsi & de la même manière que les autres fruits de la terre ; mais quant à l’émondage, il ne pourroit pas le faire, parce que sa
Joüissance est momentanée, & qu’il se peut faire que le vassal laisse ses arbres, sans les faire émonder.
Le Vassal qui a obtenu mainlevée de son Fief, n’est point tenu d’entretenir les baux que le Seigneur auroit faits pendant la saisie feodale des terres & héritages faisans partie & dépendans du Fief.
Le Seigneur n’a rien dans les meubles du Vassal, nonobstant qu’il ait saisi feodalement le Fief dans les manoirs, bûtimens & maisons duquel ils sont, ni encore moins les bestiaux, quand même ils seroient trouvés pacageans sur les terres & herbages du Fief saisi lors de la saisie feodale, Sentence de réunion, & prise de possession.
Le Seigneur fait les fruits siens pendant la saisie feodale, nonobstant que le vassal y eut formé opposition, à moins que le moyen d’opposition ne fût fondé sur le desaveu formel & précis qu’il feroit du Seigneur saisissant, & qu’il ne déclarât positivement qu’il ne le reconnoit point pour Seigneur.
Si le Vassal recueilloit les grains & fruits avant leur maturité, apprehendant la saisie feodale, il seroit obligé de les restituer au Seigneur saisissant, ou l’estimation. d’iceux, à dire d’Experts & gens à ce connoissans.
Les profits des Arriere-Fiefs ou Vavassories, qui écheroient pendant la saisie feodale, comme sont les droits de Relief & de Treizième, appartiendroienr au Seigneur saisissant, d’autant qu’ils font partie des fruits du Fief saisi.
Le Seigneur pendant la saisie feodale doit se comporter en bon père de famille. & joüir du Fief saisi, comme seroit un usufruitier, & en propriétaire incommutable, sans pouvoir changer ni déteriorer les fonds, lieux & bâtimens ; il est même tenu d’entretenir les batimens des menuës reparations, cultiver les terres, & veiller aux droits du Fief : en un mot, faire tout ce qu’un bon père de famille fait en faisant valoir son propre bien.