Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


ARTICLE CXXII.

P Eut neanmoins le Seigneur blâmer l’aveu de son vassal trente ans aprés qu’il lui est presenté ; & cependant le vassal jouit, & les fait les fruits siens.

C’est du jour de la presentation de l’aveû que les trente ans donne au Seigneur pour blâmer l’aveu commencent, & non du jour que le vassal à comparu aux prochains plaids de la presentation de l’aveu, ni du jour qu’il auroit été assigné aux autres plaids, sans neanmoins que la saisie feodale qui avoit été faite faute d’aveu non fournis durit & subsistât pendant tout ce temps-là ; le vassal joüit de son fief & autres heritages librement comme s’il n’y avoit point eu de saisie feodale ; mais aprés les trente ans finis & expirez, le Seigneur ne seroit plus recevable à vouloir blamer l’aveu, il seroit tenu pour blamé & pour reçû ; & ce temps de trente ans pour fournir blames contre un aveu est atal, sans neanmoins qu’il se compte de momento ad momentum, mais civilement ; de sorte que les jours des termes n’y sont point compris ; mais d’un autre côté cette prescription de trente ans courre, tant contre le mineur que contre le majeur, même contre l’absent, l’Eglise & le Roy, parce que cette prescription est une prescription statuaire.

Il faut en outre remarquer que quoique le blâme d’aveu se prescrive par trente ans, néanmoins les rentes & redevances Seigneuriales dûës par le fief ou par l’héritage roturier, pour raison uquel l’aveu a été presenté, & dans lequel le vassal a obmis des rentes & redevances Seigneuriales, ne se prescrivent que par quarante ans ; de manière que le Seigneur aprés trente ans n’est pas à la verité recevable à blamer l’aveu, mais il peut demander le payement & continuation des rentes & redevances Seigneuriales jusqu’à quarante ans, Arrét du Parle, nent de Roüen du 2. Aoust ; 66s.

Le vassal de son côté n’a pas trente ans pour reformer l’aveu par lui baillé & fourni, quand même il se seroit trompé, & qu’il y seroit lesé, il n’a que dix ans du jour qu’il l’a fourni & baillé en majorité, & encore faudroit-il des Lettres de Rescision obtenuës en Chancellerie, fondées sur des erreurs de fait & sur la lesion, & aprés ces dix ans le vassal feroit non-recevable en ses Lettres & en sa demande à revenir contre l’aveu ; car un aveu fourni par le vassal & reçû par le Seigneur, est un acte synnalagmatique & obligatoire de part & d’autre entre le Seigneur & le vassal, & contre lequel on ne peut revenir que par je benefice des Lettres du Prince, & dans le temps prescrit pour pouvoir reclamer contre des actes faits par majeurs & entre majeurs, bien entendu qu’on air des moyens de rescision.

Des que le Seigneur a reçû l’aveu de son vassal, il est obligé de prendre son fait & cause contre tous les Seigneurs qui pretendroient que quelques portions des choses, rentes, redevances & droits contenus & portez en l’aveu, seroient de leur Seigneurie, releveroient d’eux & appartiendroient à leur Seigneurie, sinon & à faute de ce, le vassal demeurera déchargé envers ce Seigneur de la mouvance & directe pour ce dont le seigneur seroit évincé par les autres Seigneurs.

Des aveux presentez, blâmez & reçûs sont de grande consideration pour prouver une mouvance, une directe, une censive, une justice, la consistance d’un fief, l’étenduë, les dépendances d’une Seigneurie, les rentes, charges, corvées, servitudes & autres redevances Seigneuriales, & de quels cens, rentes, & redevances Seigneuriales un héritage roturier est chargé envers une Seigneurie.