Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


ARTICLE CXLIII.

T Out homme condamné à mort par Justice, banni du Royaume, ou condamné aux Galeres à perpétuité, confisque le Fief & son heritage au profit de son Seigneur aux charges de droit, qui sont payer les rentes Seigneuriales, foncieres & hypotheques, même les dettes mobiliaires, discussion faite préalablement des meubles.

Tout homme condamné à mort par Justice, banni du Royaume, oi condamné aux Galeres à perpetuité, confisque le Fief & son héritage au prosit de son seigneur.

C’est un premier principe dans nôtre Coûtume, que qui confisque le corps. confisque les biens routes les fois qu’il y a confiscation de corps, c’est-à-dire que la confiscation de corps emporte de plein droit la confiscation de biens c’est pour cette raison que quiconque est condamné par la Justice à la mort naturelle ou à la mort civile, qui est le bannissement perpetuel, & les galeres à perpétuité, confisque tous ses biens, meubles & immeubles, nobles ou roturiers, au profit du Roy ou des Seigneurs de Fiefs, chacun en droit sal.

Le Roi Iean octroya aux peuples d’Aquitaine, de n’être point sujets à la confiscation si ce n’étoit pour crime de leze-Majesté divine ou humaine ; ce qui a encore aujourd’hui lieu dans toutes les Provinces qui se regissent par le Droit écrit ; nous avons plusieurs Coûtumes qui en usent de même, comme Bretagne, le Maine, Anjou & autres ; mais il en est autrement dans nôtre Coûtume, la confiscation de biens y a lieu lorsqu’il y a confiscation de corps par le Jugement.

Il n’y a point de confiscation, sans un jugement de condamnation à la peine qui emporte la confiscation de biens ; mais nonobstant que la confiscation fut obmise dans le dispositif du Jugement, elie ne seroit pas moins acquise au Roy ou aux Seigneurs, parce qu’elle est ordonnée par la Coûtume, & que le Jugement ne fait que la declarer acquise aux Seigneurs.

Tout Juge, tant Royal que de Seigneur, qui a le pouvoir de condamner à la mort naturelle ou à la mort civile, telle qu’est la condamnation au bannissemert perpetuel ou aux galeres à perpetuité, peut ordonner la confiscation des biens uu condamné, pourvû que ce soit un Juge residant dans le Royaume ; car un jugement de condamnation de mort naturelle ou civile, rendu par un juge d’un Prince étranger contre un François, sujet du Roy, pour un crime commis dans les Etats du Prince étranger, n’emporteroit point de confiscation des biens situez en France, les biens du condamné appartiendroient à ses heritiers, qui seroient actuellement regnicoles, comme s’il n’y avoit point eu de condamnation, & les heritiers les partageront entre eux suivant la Coûtume qui les regit, parce que les jugement rendus par des Juges de Princes étrangers, n’ont point d’execution En France.

Les condamnations à la mort en fait de guerre, n’emportent point de confiscation de biens, nion plus que les condamnations à garder prison perpe-tuelle.

Le Iuge Haut-Justicier peut condamner au bannissement perpétuel & hors du Royaume ; Arrét du Parlement de Roüen du 21 Decembre 1632 ; il pourroit méme condamner aux galeres.

Le bannissement à temps hors l’etenduë d’un Bailliage, ou d’une Vicomté, ou d’une Justice de Seigneur, ou hors la Province, ou hors le ressort du Parlement, n’emporte point de confiscation de biens, non plus que les galeres à temps ; il faut que la condamnation au bannissement ou aux galeres soit a perpetuité, parce qu’il n’y a que cette condamnation qui emporte mort civile, dont l’effet produit la confiscation de biens comme la mort naturelle.

Par une condamnation de mort naturelle ou civile, renduë dans une Province où la confiscation de biens n’a point lieu, les biens situez dans une Province où la confiscation de biens est prononcée par la Loi ou la Coûtume du Pays, comme en Normandie, ne sont point confisquez : de la même manière que la confiscation adjugée dans une Province où la confiscation a lieu, ne peut s’étendre sur les biens situez dans une Province où par la Loi ou la Coûtume elle n’a point lieu.

La confiscation de biens d’un condamné par Sentence à mort naturelle ou civile, qui decéderoit pendant l’appel de cette Sentence, ou avant l’execution de l’Arrét confirmatif de la sentence, n’auroit aucun effet ; Arrét du même Parlement du 10 Fevrier 1632.

Le crime se prescrit par vingt ans, même la Sentence par contumace non executée ; mais si la Sentence ou autre Jugement a été executée par effigie, le crime, la peine & les condamnations, tant afflictives que pecuniaires, ne pourroient le préscrire que par trente ans ; & à l’égard de l’execution du Decret de prise de corps par emprisonnement de l’accusé, elle n’interromproit point la préscription de vingt ans qui est la préscription du crime, si on n’avoit point fait de poursuites pendant vingt années depuis que l’accusé seroit sorti des prisons, par Evasion ou autrement ; Arrêt du même Parlement du 8 n 1660.

Les biens donnez par un pere à son fils en avancement de succession, ne tombent point dans la confiscation des biens du fils prononcée contre lui pour son propre crime, parce que ces biens ne sont point censez appartenir incommurablement au fils ; il seroit même permis à un pere ou autre, voyant que son fils ou sun heritier est accusé & prévenu de crime qui emporteroit la confiscation de biens par la condamnation de mort naturelle ou civile, de disposer de ses propres biens par donation, aliénation ou autrement, en faveur de toute autre personne, sans que cette disposition ou aliénation pût être attaquée & combattuë par le confiscataire, comme faite en fraude de la confiscation ; Arrêt du même Parlement du y Mars 1608.

Le Roy peut, par sa plenitude de puissance & autorité Royale, remettre la peine & la confiscation de biens au préjudice des Seigneurs de fief, par quelque

Sentence, Jugement ou Arrét que la condamnation de mort naturelle ou civile soit portée, & le Jugement de condamnation, quand bien même il auroit été prononcé au condamne, pourvû toutes fois que la condamnation n’eût point été executée réellement, & que le Seigneur confiscataire n’eût point disposé des biens confisquez ; Arrét du même Parlement du 26 Mars 1626.

Les Lettres de Rappel de bannissement ou de Galeres à temps, ne sont presque point connuës ni reçûës dans l’etenduë du Parlement de Normandie, l’im-petrant de pareilles Lettres auroit beaucoup de peine à les faire enteriner & enregistrer ; aussi l’obtention de ces sortes de Lettres est tres-abusive.

Un bannissement à temps ne priveroit point un Curé de la Cure, ni autre Beneficier de son Benefice ; Arrét du même Parlement du 26 Mars 1604.

Le Seigneur confiscataire joüiroit de l’usufruit qui appartiendroit à un condamné au Bannissement ou aux Galeres à perpetuité, jusqu’à ce que le condamné fût mort.

Les Juges d’Eglise ne peuvent ordonner aucune confiscation de biens, parce qu’ils ne peuvent donner aucun Jugement de mort ni de peines afflictives, pas même au Blême, Foüet, Bannissement ou les Galeres à temps ; Arrêt du même Parlement du 14 Novembre 1539.

Aprés un crime capital commis, le coupable ne peut plus vendre, aliener, donner, lequel & disposer de ses biens, soit à titre gratuit, ou à titre onereux, & cette prohibition quiest pour ainsi dire légale, commence à die crimi-nis Commissi, elle est pour ainsi dire née avec le crime ; mais à l’égard des crimes & délits le gers, le coupable est seulement interdit de disposer de ses biens à titre gra : uit & de la liberalité, à die commissi criminis & delicti, comme par donAtion ou TestAment, & non à titre onereux, comme pour vente, échange & autres Contrats d’alienation de cette qualité, pourvû neanmoins qu’il n’y ait point de collusion entre le vendeur & l’acquereur, & que l’acquereur n’eût pas une parfaire connoissance du crime ou delit du vendeur avant la vente ; tout cela dépend des circonstances particulieres du fait ; cette même maxime doit servir de regle au confiscataire pour sçavoir quelles dispositions, que le coupable feroit depuis son crime commis, pourroient être opposées au confiscataire.

Quoiqu’en Normandie les substitutions soient non seulement inconnuës, mais encore qu’elles n’y ayent point lieu l Article 54. du Reglement de 1666, neanmoins il serait permis de faire des deffenses par une espece de substitution, d’aliener & hypotequer les biens que la Coûtume permet de donner, une telle condition apposée à la donation seroit permise ; & dans ce cas les biens donnez à cette condition & sous cette condition expresse, ne tomberoient point dans la confiscation des biens de ce donataire condamné.

La Jurisprudence est certaine en Normandie, que les biens confisquez appartiennent aux Seigneurs de Fief dens la mouvance desquels ou dans la directe ou cencive de squels sont situez les biens confisquez nobles ou roturiers, sans distinction s’ils sont Seigneurs, Bac, Moyens ou Hauts Justiciers ; car dans nôtre Coutume la confiscation est regardée comme un profit de fief, & non comme un profit de la, Iustice Seigneuriale, Tous les biens du condamné tombent dans la confiscation, meubles & immeubles, nobles, roturiers, propres ou acquêts, Offices, rentes, effets mobilier, billets, promesses ou obligations, & tous autres biens tels qu’ils soient, & de quelque nature qu’ils soient ; il faut dire la même chose des biens en bourgage & en franc-aleu, parce que nonobstant que ces biens soient exempts des droits de fief, néanmoins ils sont dans une mouvance & une directe ; ce qui suffit dans nôtre Coûtume, suivant laquelle la consiscation de biens appartient aux Seigneurs de sie l’in uim de la directe & de la mouvance, & non in uim de la Justice qui se trouver ait annexée au fief ; car quand même le fief n’auroit point de Justice. la confiscation de biens ne seroit pas moins acquise au Seigneur du fief dans la mouvance ou directe duquel seroient les terres & héritages consifquez ; & chaque Seigneur de fief prend pour ce qui est de sa mouvance ou directe, même les rentes foncieres ou hypoteques, meubles meublans & autres effets qui se trouvent dans l’etenduë de son fief, quand même le condamné n’y auroit pas eu son véritable domicile, de manière que les enfans d’un condamné n’ont aucune légitime à demander sur les biens consisquez.

La confiscation des biens des Ecclesiastiques Seculiers appartiennent aux Seigneurs de fief, & non aux Evéques Diocesains des Ecclesiastiques, soit meubles ou immeubles.

La confiscation appartient au Seigneur dominant & immediat du fief, & qui l’étoit au semps du crime commis, & non à celui qui l’étoit au temps de la condamnation ; parce que le Jugement de condamnation qui adjuge la confiscation, ne fait dans les grands crimes, & tels que ceux qui meritent la mort naturelle ou la mort civile, que déclarer le droit acquis par le crime in oim consueJudivis.

On ne peut demander la confiscation de biens, qui appartiendroit au Roy ou aux autres Seigneurs, qu’aprés le Jugement de condamnation, à peine de nullité du don ; & si la condamnation est par contumace, la confiscation de biens ne pourra être demandée au Roy & aux Seigneurs de fief qu’aprés les cinq ans du jour du Jugement de la condamnation, sans même que les Receveurs du Domaine du Roy ou des Seigneur s pussent se mettre en joüissance des biens confisquez qu’aprés les cinq années ; Art. 30. & 31. du Titre 17. de :’Ordonnance de 1670.

Le premier d’entre plusieurs donataires du Roy, des biens confisquez comme de tout autre don, est préferable aux autres donataires, pourvû que son Brevet de don ait été vérifié & régistré dans les six mois du jour de l’obtention, verbo enim fit gratiae.

Un mari ne peut confisquer le bien de sa femme, ni la femme le bien de son mary, ni la doüairiere ou autre usufruitier le fonds & la proprieté du bien dont l’un & l’autre ne joüissent que par usufruit ; l’usufruitier du fief dominant telle que seroit la doüairiere, n’auroit pas même l’usufruit des héritages qui seroient réunis au fief par la confiscation, parce que cette réunion se fait ex nobà causa, qui n’a rien de commun avec l’ancien usufruit ; cette doüairiere pourroit encore moins prétendre quelque chose dans les autres immeubles ou meubles qui reviendroient par la confiscation au Seigneur du fief, duquel cette même doüairiere joüiroit par usufruit.

La mort d’un condamné par contumace dans les cinq ans de sa condamnation, fait tomber les condamnations tant corporelles que pecuniaire, & même la representation de l’accusé qui se met en état & en prison dans les cinq ans produit le même effet.

Aux char ges de droit, qui sont payer les rentes Seigneuriales, foncieres & HypoTeques, le tout pro modo emolumenti, & non au de-là de la valeur des biens dont ils profitent, ni solidairement lorsqu’il y a plusieurs Seigneurs confiscataires ; car ils ne sont point heritiers du défunt, & ils n’ont point les biens à titre uniVersel, mais à titre singulier : mais quant aux creanciers, ils peuvent agir hypotecairement contre chaque Seigneur & sur chacune pièce de terre & d’héritage ou autre immeuble dont il est détempteur, & qui appartenoit au debiteur avent la confiscation, sauf son recours contre les autres Seigneurs confiscataires comme lui : cependant quant aux meubles, il seroit prudent au Seigneur confiscataire d’en faire faire repertoire, c’est-à-dire inventaire, ou du moins un état, pour en constater la quantité, la qualité & la valeur ; par ce moyen un Seigneur confiscataire ou son ayant cause, sera à couvert des poursuites des creanciers d’un condamné, si aucuns se trouvoient par la suite.

Le Seigneur confiscataire peut quand bon lui semble quitter, délaisser & abandonner les biens qui lui sont venus par confiscation, en payant les arrerages des rentes & autres charges annuelles échuës pendant sa joüissance, encore qu’ils excedent le revenû ; mais il n’est pas tenu personnellement de payer les dettes mobiliaires qui étoient dûës par fon vassal, censitaire & tenancier lorsqu’il est entré en joüissance, sauf aux creanciers à se pourvoir sur les biens abandonnez par le Seigneur suivant leur privilege & hypoteques. Art. 22. 23. & 24 du Reglement de 1686.

La femme du condamné doit être payée sur les biens confisquez, de sa dot, reprises & autres conventions matrimoniales generalement quelconques suivant ses privilege & hypoteque, elle prend même la moitié des héritages situez en bourgage à titre de communauté, nonobstant la confiscation des biens de son mari d’autant que la confiscation des biens de son mari ne donne point atteinte à la, societé ou communauté pour la moitié qui appartient à la femme au jour de la condamnation du mari, dans ces sortes de biens où elle a moitié par la Coutume ; si cependant elle étoit separée de biens d’avec son mari au jour de la condamnation de son mari, elle ne pourroit pretendre sur tous les biens confisquez que ses conventions matrimoniales, comme sa dot, reprises & doüaire, & non la moitiè des biens qui auroient été acquis en bourgage pendant le mariage.

Les enfans prennent pareillement leur tiers coutumier sur les héritages & immeubles confisquez, avant que le Seigneur confiscataire puisse rien prétendre sur les héritages & immeubles sujets au tiers coutumier, qui est le tiers de tous les héritages & immeubles, de quelques nature qu’ils soient, nobles, roturiers, en bourgage ou en franc-aleu, & tous autres immeubles dont le mari étoit saisi au jour de son mariage qui lui sont échus en ligne directe pendant son mariage ; la mère de ces enfans doit pareillement joüir de ce tiers de biens pour son doüaire pendant sa vie, & la proprieté réservée aux enfans qui se tiendront à leur tiers coutumier, sans que la confiscation des biens du pere puisse nuire ni préjudicier au droit de la mère doüairiere, & au droit des enfans pour leur tiers coûtumier, sur les biens sujets au doüaire & au tiers coutumier, qui sont les mêmes biens pour l’un & pour l’autre ; mais si le pere, dont les biens ont été confisquez, avoit constitué un doüaire préfix, ce doüaire se prendroit sur tous les biens du condamné, meubles ou immeubles, acquets ou-propres, avant que le Seigneur confiscataire pût rien avoir sur les biens du condamné.

Les interéts civils adjugez à une femme ou à des enfans pour assassinat commis en la personne de son mari & de leur pere, doivent être pris sur les biens confisquez avant que le Seigneur confiscataire y puisse rien prétendre, aprés toutefois discussion faites des meubles & effets mobiliers du condamné, qui sont prenables de cette dette, comme étant une dette mobiliaire ; mais s’il ne sont suffisans, la veuve ou les enfans sont en droit de se pourvoir sur les heritages & immeubles.

Il faut ici remarquer en passant, que des interéts civils de cette qualité ne peuvent être saisis ni par les créanciers du mari, ni par les créanciers de la femme ou des enfans, sauf à eux à se pourvoir sur leurs autres biens, s’il y en a, parce que ces interets civils sont comme le prix du sang du mari & du pere ; Arrét du même Parlement du 10. Janvier 1651.

Même les dettes mobiliaires, discussion faire préalablement des meubles.

Comme par nôtre Coûtume les dettes mobiliaires se prennent sur les meubles & effets mobiliers, indéfiniment & sans qu’on puisse profiter d’aucune chose meubles & effets mobiliers, que les dettes mobiliaires d’un defunt n’ayent été payées, & que les immeubles ne sont sujets aux de ttes mobiliaires que les meubles & effets mobiliers n’ayent été discutez & épuisez, il s’enfuit que les terres, héritages, & autres immeubles qui tombent dans la confiscation, ne sont prenables pour raison des dettes mobiliaires que an subsidium, & aprés que par la discussion des meubles & effets mobiliers il paroitra évidemment que les meubles & effets mobiliers ne suffisent pas pour payer les dettes mobiliaires.

Par Arrét du Parlement de Paris du 27. Juillet 1626. il a été jugé dans une affaire de Normandie, qu’un condamné par contumace, depuis mise au néant, par sa representation dans les prisons, & enfin condamné au dernier supplice par Arrét, avoit été incapable des successions à lui échûës pendant la condamnation par contumace ; cet Arrêt est rapporté parBardet , dans son Recueil d’Arrêts, Livre 2. Chap. 90.