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ARTICLE CXLIV.

A U Roy seul appartient les confiscations des condamnez pour crime de Leze-Majesté, encore que leurs heritages ne soient im-mediatement tenus de lui.

Il y a deux crimes de Leze-Majesté divine, & le crime de Leze-Majesté humaine.

Le crime de Leze-Majesté divine est par rapport à Dieu & à Sa Majesté divine, comme de proferer des blasphêmes & des injures attroces contre Dieu & ses Saints, attenter à la gloire de la Divinité par des écrits impies, faire & dire publiquement des impietez contre Dieu, ses Saints & la Religion, diffamer la pureté des Saints, critiquer & scandaliser ouvertement & de dessein prêmedité l’Eglise, & autres crimes de Religion de cette qualité, comme magie, sortilege, héresie, & schisme.

Ces crimes sont capitaux, & la connoissance en appartient au Juge Royal laic, & non au Juge d’Eglise, quoique ce soit crimes de Leze Majesté divine.

Le crime de Leze-Majesté humaine est par rapport au Roy, tant au premier chef qu’au second chesf crime de Leze-Majesté humaine au premier chef est de vouloir attenter, ou attenter réellement à la propre personne du Roy, à sa vie, à son honneur, à sa gloire, ou à son Royaume, ou pour fait de trahison, intelligence avec les ennemis de l’Etat, leur fournir de secours, armes, munitions ou autres choses pendant la Guerre, rebellion avec port d’Armes contre le Roy, servir chez les Ennemis, & autres faits de cette nature, qu’on ne peut pas aisément exprimer, parce qu’il n’est pas à présumer qu’ils y air des Sujets assez mauvais, perfides & indignes qui puissent les commettre, ce crime est capital, & mérite les peines les plus grandes & les plus extraordinaires.

Le crime de Leze-Majesté humaine au second chef est le crime qui regarde. les interêts du Roy & de l’Etat, comme est le crime de fausse Monnoye, duel, concussion, peculat, & autres crimes de cette qualité ; ce crime est pareillement Capital.

Il n’y a aussi que les Juges Royaux laies qui puissent connoître du crime de Leze-Majesté humaine dans l’un & l’autre cas, & jamais le Juge d’Eglise.

La confiscation de biens pour crime de Leze-Majesté divine, appartient aux Seigneurs de fief dont relevent immediatement les héritages nobles ou roturiers du condamné, ou qui se trouvent dans l’etenduë de son fief & de sa directe ou censive, au lieu que la confiscation de biens pour crime de Leze-Majesté humaine appartient au Roy seul, privativement aux Seigneurs particuliers imme-diats du fief & héritages consisquez, & encore bien que le Roy n’en fût que le Seigneur mediat, les meubles & effets mobiliers du condamné, appartiennent aussi en ce cas au Roy seul ; mais tout cela ne doit s’entendre & ne doit avoir lieu que pour les crimes de Leze-Majesté humaine au premier chef, & non pour les crimes de Leze-Majesté humaine au second chef, autrement les Seigneurs particuliers de fief souffriroient un trop grand préjudice par cette pré-rogative, qui n’a été accordée au Roy que ix odium implacabile du crime de Leze-Majesté humaine au premier chef ; & d’ailleurs ces biens ne laisseroient pas d’être sujets dans le cas du crime de Leze-Majesté humaine, quoiqu’au premier chef, aux dettes des légitimes creanciers du condamné ; & jamais nos Rois n’ont voulu profiter des biens d’autrui qu’aux charges de droit & de la Justice, qui sont entr’autres choses que xemo fiat locupletior ex jactura alterius, aussi ne voit-on point contester en pareille occasion au nom du Roy les créances des légitimes & véritables creanciers d’un condamné pour crime de Leze-Maiesté humaine, soit au premier chef ou au second chef.

Quoiqu’une condamnation renduë dans un Royaume n’ait point d’autorité ni d’execution dans les pays étrangers, néanmoins dans le cas du crime de leze Majesté humaine, principalement au premier Chef, les Princes se font ladessus raison, les uns aux autres, parce que c’est une cause qui leur est commune & qui les regardent tous ; c’est pourquoi ils veulent bien que le Prince contre lequel le crime à été commis, se saisisse des biens & héritages situez dans leurs Etats, même les meubles & effets mobiliers, qui s’y trouveroient, principalement lorsque ces Princes ne sont point en guerre.

Le crime de fausse monnoye est seulement reputé un crime de Leze-Majesté humaine au second Chef, & par consequent la confiscation des biens du condamné en appartient aux Seigneurs de Fief pour ce qui s’en trouvera dans leur directe ou mouvance.