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ARTICLE CXLVII.
P Areillement les heritages, ayans appartenu aux bâtards, reviennent aux Seigneurs en pure proprieté après leur décès, aux charges de droit, comme dit est, si lesdits bâtards n’ont été légitimés par octroy du Prince, enthériné, appellés ceux qui y doivent être appellés, ou qu’ils n’ayent enfans procréez en loyal mariage.
Il y a quatre dispositions dans cet Article, qui toutes quatre concernent le droit de bâtardise.
La première sur ces paroles : Pareillement les héritages, ayans appartenus aux bâtards, reviennent aux Seigneurs en pure proprieté aprés leur déces.
Le Droit de batardise est pareillement un droit de Fief, & non de Iustice ; ainsi quoiqu’un Seigneur de Fief n’ait point de Justice annexée à son Fief, il ne jouit pas moins du droit de bâtardise le cas arrivant.
Le Seigneur ne peut prétendre à droit de bâtardise, que les terres nobles & heritages roturiers, ou rentes Seigneuriales ou foncieres étans dans la mouvance ou dans la censive de son Fief ; quant aux autres biens, tels que sont les meubles & les rentes hypoteques ou constituées, ils appartiennent au Roy, Arrét du Parlement de Roüen du 27 Avril 1624 ; il faut dire la même chose des Offices ainsi si le Roy étoit seul seigneur de Fief, il auroit tous les biens d’un bâtard, tant meubles qu’immeubles : les immeubles comme Seigneur de Fief, & les meubles, rentes hypoteques ou constituées, Offices & tous autres effets mobiliers comme Roy & à cause de la Couronne ; Arret du même Parlement du 11 Fevrier 1609 ; & la raison pour laquelle le droit de batardise est plus étendu en faveur du Roy que des Seigneurs particuliers de Fief, est qu’il s’agit de l’état de la personne d’un suet de Roy, qui ne pourroit être changé en légitime sans l’autorité du Prince, à moins que les pere & mere en se mariant ne le reconnussent, ce que les Seigneurs. particuliers de Fief ne peuvent faire ; d’où vient que le droit de bâtardise ne passe point aux Engagistes du domaine du Roy, si ce droit n’est expressément contenu dans le contrat d’engagement, pas même aux Appanagistes, s’il n’y a clause expresse au contraire.
Le droit de bâtardise n’a lieu qu’au cas que le batard vienne à décéder sans avoir disposé de ses biens, soit par donation entre vifs ou à cause de mort, ou par testament, eû égard aux biens & à la qualité de biens, dont il a pû disposer suivant la Coûtume ; car un bâtard peut disposer de ses biens, soir par donation entre vifs, soit à cause de mort ou par testament, comme une personne dont l’état est legitime, en un mot le droit de bâtardise n’est ouvert qu’au cas que le bâtard décéde ab intestat, & sans avoir donné ses biens ; mais s’il avoit disposé de ses biens au-de là de ce qu’il est permis de donner entrevis ou léguer par testament par la Coûtume, cet excedent tomberoit dans le droit de bâtardise, & même il faudroit que l’acte qui contiendroit la disposition fût revétu de toutes les formalités requises & necessaires pour les donations entre vifs, ou à cause de mort, ou pour les testa mens.
La seconde partie est sur ces termes : aux charges de droit comme dit est ; c’est à dire ainsi & de la manière qu’il se pratique dans le cas de desherance & aux termes du précedent Article de nôtre Coûtume.
Il faut donc tenir pour certain que quiconque profite du droit de bâtardise, soit le Roy ou son donataire, soit les Seigneurs particuliers de Fief, il doit payer toutes les dettes du batard, de quelque nature & qualité qu’elles soient, mais toûjours pro modo emolumenti de ce qu’il retire de la succession ; & s’il y a plusieurs Seigneurs qui profitent du droit de bâtardise, ils contribueront entre eux au payement des dettes pro modo emoitmentè ; cependant le Roy en prenant les meubles, effets mobiliers, rentes hypoteques ou constituées, Offices & autres biens, autres que les héritages & rentes Seigneuriales & foncieres qui seroient de la mouvance ou la censive d’un Seigneur particulier de Fief, seroit tenu de payer seul toutes les dettes personnelles & mobiliaires du batard ; & à l’égard des rentes Seigneuriales & foncieres dont les héritages seroient chargés, elles setoient payées par chaque Seigneur de Fief qui possederoit ces héritages, parce que des detres de cette qualité sont des charges réelles, Comme le droit de bâtardise est un droit de Fief, la douairiere ou autre usufruitier du Fief jouiroit par usufruit des héritages réunis & consolidés au Fief par le droit de bâtardise.
La troisième partie consiste dans ces paroles : Si lesdits batards n’ont été legitimés par octroy du Prince, enteriné, appellés ceux qui y doivent être appellés.
Un bâtard cesse d’être bâtard par deux manières ; l’une, par un mariage l’absequent des pere & mêre du batard, sait & célebré suivant les formalités de l’Eglise & des Ordonnances, & lors duquel le batard a été reconnû par les pere & mere pour leur enfant ; mais il ne faudroit pas que cet enfant fût un batard adulterin, le mariage subsequent ne pourroit le legitimer propter labem ortûs.
L’autre, par Lettres de légitimation du Roy, données en la grande Chancellerie au grand Sceau, & entherinées au Parlement & en la Chambre des Comptes, les parties interessées presentes ou dûement appellées, qui est celui du pere ou de la mere, ou l’un & l’autre du bâtard qui demande l’entherinement des Lettres de légitimation, & les heritiers presomptifs & parens du pere ou de la mere, ou des pere & mère du batard ; cette legitimation sert moins aux bâtards pour l’utile que pour l’honneur ; car rarement & difficilement donne t’on dans l’ordre judiciaire les successions legitimes & ab intestat du pere ou de la mere, ou de l’un ou de l’autre, à leur bâtard : on leur accorde quelquefois une portion des biens ou des alimens ; un batard ainsi legitimé suecederoit encore avec plus de peine aux parens qui auroient donné leur consentement à l’enterinement des Lettres de lé gitimation ; mais est-il toûjours vray que des bâtards ainsi légitimés ne sont point sujets au droit de bâtardise, par rapport au Roy & aux Seigneurs particuliers de Fiefs, leurs biens retourneroient à ceux qui les auroient fait légitimer.
Les enfans adulterins ou de Prêtres ne peuvent obtenir de Lettres de legitimation.
Il n’y a que le Roy qui puisse légitimer un bâtard par Lettres patentes : le Pape ne le peut faire in temporalibus, mais seulement in spiritéalibus, par rapport aux benefices.
Le bâtard non légitimé ne peut prendre le nom & les Armes de son pere naturel, ni encore moins prendre la qualité d’Ecuyer sous prétexte que son pere étoit Gentilhomme.
La quatrième & derniere, est au sujet de ces termes : qu’ils n’ayent enfans procréez en loyal mariage ; eût comme il est permis aux bâtards de se marier, les en fans qui naîtront de leur mariage leur succederont en tous leurs biens & droits, comme si leur pere n’eût point été bâtard, sans que le Roy & les Seigneurs particuliers de Fiefs puissent dans ce cas prétendre aucun droit de bâtardise.