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ARTICLE CXLVIII.

L Es héritages & biens, tant meubles qu’immeubles, des Aubains & Etrangers, appartiennent au Roy après leur mort, aux charges de droit, comme dit est, encore qu’ils soient tenus d’autres Seigneurs, s’ils n’ont été naturalisés & qu’ils ayent des heritiers legitimes regnicoles.

Les héritages & biens, tant meubles qu’immeubles, des Aubains & Etrangers appartiennent ai Roy aprés leur mort, aux charges de droit, comme dit est, encore qu’ils soient tenus d’autres Seigneurs.

Ces deux mots Aubains & Etrangers sont mots synonimes, qui signifient la même chose ; on entend par ces termes des personnes qui ne sont point nées dans le Royaume comme sujets du Roy, mais comme sujets d’un Prince étranger.

Le droit d’Aubaine est parmi nous un droit de succeder aux biens, tant meubles qu’immeubles, nobles où roturiers, & tous autres tels qu’ils soient, qui se trouvent en France appartenir à un Aubain ou Etranger au jour de son déces ; ce droit est Royal & appartient au Roy seul privativement & à l’exclusion des Seigneurs particuliers de Fief, même quant aux héritages nobles ou roturiers étans dans la mouvance & à la censive du Fief des Seigneurs, ils n’ont rien dans tous les biens des Etrangers directement ni indirectement, ils appartiennent tous au Roy comme Roy ; aussi ce droit est un droit de la Couronne, dont le fonds ne pourroit être donné, concedé & aliéné par le Roy, mais seulement les biens à lui échus par droit d’Aubaine.

L’Aubain ou Etranger peut bien vendre, aliéner, échanger, ceder & transporter, même donner entre vifs, mais il ne peut disposer de ses biens par donation à cause de mort, où par testament ; parce que la faculté de faire testament est du droit particulier du Royaume dont on est sujet, & que l’Aubain ou Etranger n’a point ; au lieu que les autres actes, & en particulier la donation entre vifs faite aux termes de la Coûtume, sont du droit des Gens, qui est communicable à tous les habitans d’un Royaume, tels qu’ils soient ; les Aubains ou Etrangers ne peuvent pareillement recevoir des donations à cause de mort, ou des legs en leur faveur, mais seulement des liberalitez par donations entre vifs.

L’Aubain ou Etranger ne succede point, mais les enfans d’un Etranger, legitimes succédent a leur pere quoique non naturalisé ; Arrêts du Parlement de Normandie des 21 Août 1677, & 29 Janvier 1677.

Le droit d’Aubaine n’a lieu qu’aprés la mort de l’Aubain ou Etranger, & à la charge par le Roy de payer toutes les dettes du défunt, de telle nature qu’elles soient, le tout néanmoins jusques à concurrence des forces de la succession, & pro modo emolumenti, S’ils n’ont été naturalisez, & qu’ils ayent des heritiers regnicoles.

Il n’y a que le Roy qui puisse naturaliser ou donner des Lettres de naturalité, ces Lettres s’obtiennent en la grande Chancellerie au grand Sceau, & elles doivent être verifiees & enrégistrées en la Chambre des Comptes, & au Bailliage.

Royal du domicile de l’Aubain.

Les enfans d’un pere ou d’une mere François de nation, nés hors le Royaume & en pays étranger, ne sont point reputés étrangers, pourvû qu’ils viennent demeurer en France, parce qu’ils sont censés avoir conserve un esprit de retour Arrét du même Parlement du 39 Iuin 1652.

Un Etranger naturalise, venant à décéder sans enfans ou heritiers regnicoles, de Roy lui succederoit à l’exclusion des Seigneurs particuliers de Fief, qui voudroient prétendre la succession à droit de deshérance, parce que le Roy n’est point reputé avoir donné des Lettres de naturalité contre lui-même ; Arrêt du même Parlement du 13 Fevrier 1644 ; mais à l’égard des biens des enfans d’un Etranger naturalisé, qui décedent sans enfans & sans heritiers, appartiennent au Roy & aux Seigneurs feodaux, chacun en droit soi, à droit de deshérance ; d’autant que dans ce cas il n’y a plus d’Aubaine, & que les enfans d’un Etranger naturalisé ont succedé à leur pere comme personnes capables des droits du Royaume, & ont possedé les biens qu’ils laissent aprés leur mort, comme véritables François, & par consequent leur succession tombe dans le droit commun, qui est le droit de deshérance faute d’enfans & d’heritiers, du moins regnicoles.