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ARTICLE CLXXII.

D’Echange faite d’héritage contre heritage n’est dû Treiziéme, s’il n’y a eu argent baillé de part ou d’autre, auquel cas est dû Treizième de l’argent ou de l’estimation du Fief baillé avec argent, encore que l’héritage soit de plus grande valeur que l’argent, & sera dit le Treiziéme au Seigneur dont est tenu le Fief baillé sans solde.

Quoique cet Article semble ne parler que des Contrats d’échange de Fiefs & Terres nobles, néanmoins sa disposition ne regarde pas moins les échanges d’heritages roturiers.

Il est donc cerrain, generalement parlant, qu’il n’est point dû de Treizième pour échange d’héritages contre héritages, soit héritages nobles, soit héritages roturiers, ou que l’échange soit faite d’héritages nobles contre héritages nobles, ou d’heritages nobles contre héritages roturiers, ou roturiers contré ro’uriers.

Il n’est point pareillement dû de Treizième pour échange d’héritages contre des redevances & rentes foncieres non amortissaules, comme rentes de Fieffe ou de Bail d’héritage non amortissables, parce que ces redevances & rentes tiennent lieu de fonds & d’héritage ; voila quelle est la disposition de cet Article à cet égard. Il y a pourtant une Déclaration du Roy du é Mars 5674, par laquelle le Rey aordonné que les droits ne seroient pas moins dus pour les contrats d’échange d’héritages que pour les contrats de vente d’héritages, pour sdit cette Déclaration ) prevenir les fraudes qui se pratiquent à la faveur des échanges pour frustrer les Seigneurs de leur droit de Treizième ; mais il ne paroit pas que cette Déclaration ait eu beaucoup d’execution, & principalement dans l’etenduë de cette Coûtume qui porte une difposirion précise & expresse au contraire.

Il y a cependant une exception de cette disposition, qui est que s’il y a eu arçent baillé de part ou d’autre dans le contrat d’échange, il sera dû Treizième de l’argeur baillé, ou de l’essimation de l’héritage baillé avec l’argent, encore bien que l’héritage loit de plus grande valeur que l’argent ; de manière que dans ce cas il seroit à l’option du Seigneur de prendre son droit de Treizième sur le pied de la somme de deniers payés pour soulte d’échange, ou sur le pied de l’estimation de l’heritage donné en échange, quand même l’héritage seroit de plus grande valeur que l’argent baillé pour soulte d’échange : ce seroit à lui à voir lequel parti lui Rroir le plus avantageux ; mais il ne peut pas pretendre le Treizième de la soulte de deniers & de la valeur de l’héritage, il ne peut avoir que l’un ou l’autre ; Arrêts du Parlement de Roüen des premier Iuiller 1é6z, & 25 Iuillet 1673 : & dans ce cas le Treizième appartiendroir au Seigneur dans la mouvance & directe duquel seroit situé l’heritage baillé sans soulte de deniers, & non au Seigneur duns la mouvance & directe duquel seroit l’heritage, pour raison duquel il auroit cté baillé soulte de deniers.

Il seroit da Treizième pour échanges d’héritages contre des rentes foncieres & de fieffe ou de bail d’héritage amortissebles, où de rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, ou pour chores mobiliaires ; Arrét du même Parlement du 21 Août 1523 ; parce qu’un contrat de cette qualité est plûtot un contrat de vente qu’un contrat d’échange ; mais dans ce cas le Treizième ne seroit dû que pour les rentes ou choses mobiliaires données en contrechange, si mieux n’aimoit le Seigneur être payé de son Treizième sur le pied de l’estimation de l’héritage.

Il est permis de vendre ou d’aliéner par contrat d’échange son Fief pour le noble, & ensuite vendre le domaine utile non fiené à celui qui avoit acquis le fief duquel relevoit le domaine utiie non fieffe, sans qu’il soit dû de Treizième au Seigneur dominant du fief aliéné ; Arrêts du même Parlement des 14 Mars 162é, 13Mars 1631, & 8Août 1636 : par un autre Arrét du même Parlement du 7 Jangier, & beaucoup d’autres qui ont suivi, tel est l’usage constant du Parlement de Roüen & de toute la Province ; & il n’a point encore été changé nonobstant que les Seigneurs de Fief ayent toujours crié & crient encore journellement contre cette manière de contracter, qu’ils disent être un dol évident pratiqué afin de frauder par un acquereur le droit de Treizième au Seigneur, & que les contractans appellent de leur côté bonus dolus, & un usage de tout temps pratiqué dans la Province.

Cette conrestation s’étant trouvée au Parlement de Paris en 1728. l’usage de Normandie bien loin d’y être adopté & suivi, il a été condamné par un Arrrêt du 15. Mars 1728. en la Grande Chambre ; sur productions respectives des Parties, au Rapport de Monsieur de Vienne, les Sieurs Robillard & du Chauvin, Parties ; par cet Arrêt il fut jugé qu’un pareil Contrat devoit le droit de Treizième au Seigneur, comme fait en fraude du droit de Treiziéme ; & que l’Acquereur ne devoit pas moins le droit de Treizième pour raison de cette acquisition, que si les choses faisant partie de son Contrat, avoient été expressément venduës par un seul & même Contrat, directement & sans détour ; j’avois écrit en l’Instance pour soutenir l’usage. de Normandie & la Jurisprudence du Parlement de Roüen, mais nos raisons ne purent frapper le Parlement de Paris.

a l’occasion du contrat d’échange on peur remarquer que la voye de rescision pour déception d’outre moitié de juste prix, n’y a point lieu, quoiqu’elle ait lieu dans les contrats de vente en faveur du vendeur, & non de l’acquereur, suivanr la Loi 2. au Cod. de rescinaendà venditione ; parce que l’échange n’est point une vente, mais une subrogation d’une chose en la place d’une autre, & dans lequel contrat les deux parties contractantes n’ont point d’autre intention que ba-bere pensationem aeei suaee in re similis qualitatis ; ce qui ne se peut dire de la vente, dans laquelle on donne & abandonne une chose, un héritage, un fonds pour de l’argent & des deniers comptans.