Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


ARTICLE CCLXXIV.

C Elui qui est jugé & separé pour maladie de lépre, ne peut succeder, & néanmoins il retient l’héritage qu’il avoit lorsqu’il fut vendu, pour en joüir par usufruit, tant qu’il est vivant, sans le pouvoir aliéner.

On donna le nom de Ladres à ces malades, aux voyages d’Outremer, parce qu’on les mettoit dans un Hopital auprés de Jerusalem, dont S. Lazare, que l’on appelloit autrefois S. Ladre, étuit le Patron : Chez les Juifs, celui qui se croyoit atteint de la Lepre, se devoit presenter au Prêtre qui devoit le visiter & juger s’il en étoit malade ou non ; & si le Prêtre jugeoit qu’il en étoit arteint, ce malade étoit obligé de se tetirer du commerce des autres hommes, & habiter hors du Camp, & hors des Villes, quand les Juifs eurent des Villes ; Levir. chap. 13. On a suivi en cela la Loy de M-yse dans les bas siécles en plusieurs lieuës de l’Europe, & notamment en France, on y réputoit ces sortes de malades comme morts, tant que leur : maladie duroit ; ils étoient même tenus par les Reglemens du Royaume de prendre la qualité de Laares, dans lesActes publies qu’ils passoient ; il leur étoit même défendu d’aspirer à aucune Charge publique, & s’ils en avoient, ils étoient obligez de s’en défaire, comme il paroit par un Arrest de l’Echiquier de Normandie, pour un Sergent du Bailliage du Ponteau-de-mer.

La disposition de cet Article est à present inutile, nous ne connoissons plus il y a tres-long temps de Lepreux ; autrefois c’étoit une maladie fort commune, & d’autant plus dangereuse qu’elle se communiquoit ; c’est pourquoi il y avoit des lieux destinez & separez pour y resserrer ces sortes de malades, qu’on appelloit Leproseries ou Maladreries.

Ceux qui étoient attaquez de cette maladie, retenoient à la vérité leurs biens, tant qu’ils vivoient, & ils en joüissoient par autrui ; mais ils ne pouvoient nonseulement vendre, aliéner, engager, hypothequer, ni en disposer par donation entre-vifs, ou à cause de mort, ou par Testament, pas même ob pias causas, ils en avoient seulement la joüissance pendant leur vie, mais encore ils étoient incapables de succeder.

Nul n’étoit réputé Lepreux, qu’il n’eûr été jugé tel par le Juge ; en consequence de la visite & avis des Medecins & Chirurgiens, & qu’il n’eur été re-clus & séparez en vertu d’un Jugement donné en consequence ; & c’est le Juge Laique qui connoissoit cette Police, & non le Juge d’Eglise.

Tout ce que nous pouvons tirer de cet Article pour l’usage d’à present, est que nôtre Coûtume répute tous ceux qui sont dans la dépendance absoluë d’autrui, incapable de disposer de leurs biens, principalement au profit des person-nes qui ont ce pouvoir absolu, tels que sont des Directeurs, Confesseurs, Medecins, Chirurgiens, & autres personmes de cette qualité, qui ont un empire plus que despotique sur l’e sprit des malades.