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TITRE XI. DE SUCCESSION EN PROPRE & ancien Patrimoine, tant en ligne directe que collaterale.

ARTICLE CCXXXV.

L E mort saisit le vif, sans aucun ministere de fait ; & doit le plus prochain habile à succeder, étant majeur, déclarer en Justice dans quarante jours après la succession échuë, s’il entend y renoncer ; autrement s’il a recueilli aucune chose, ou fait acte qu’il ne puisse sans nom & qualité d’héritier, il sera tenu & obligé à toutes les dettes ; & où l’héritier seroit mineur ; le Tuteur doit renoncer ou accepter dans ledit tems en la forme ci-dessus par l’avis des parens.

Nos vieux Praticiens auroient mieux dit, que la Loy saisit le vif qui est l’héritier présomptif, légitime & ab intestat du défunt, que de dire que le mort saisit le vif ; car ce n’est point la mort qui saisit l’héritier des biens d’un défunt, c’est la Coûtume ; mais ce Brocard est si ancien, qu’il seroit difficile, pour ne pas dire impossible, de le réformer ; quoiqu’il en soit, il est toujours certain que ce Brocard de notre Droit François, n’a lieu que dans les successions legitimes & ab intesiat, & non dans les legs & dispositions testamentaires qui ne Saisissent point les légataires, il faut que les légataires demandent la délivrance de leurs Legs à l’héritier légitime & ab intestat ; car tous nos biens sont déferez, ou par la disposition de l’homme, ou par la loy ou Coûtume ; la disposition de l’homme comprend les donations universelles entre vifs ou à cause de mort, & les legs universels par testament suivant la qualité des biens dont il est permis de disposer par la Coûtume ; & la Loy & la Coutume comprennent toutes les successions légitimes & ab intestat déférées par la Loy ou par Coûtume, soit parce qu’il n’y a point de disposition de l’homme, ou parce que la disposition est nulle, ou parce qu’elle passe les bornes de ce qui peut tomber dans la disposition.

On appelle succession, le droit de succeder à tout ce qui appartient au défunt duquel on est héritier légitime & ab intestat, cessant les dispositions du défunt, S’Il y en a, qui doivent subsister si elles sont valables, pour la quantité des biens dont le défunt a disposé ; car le surplus des biens est déféré à titre de succession légitime & ab intesiat, & à droit universel, à celui qui se porte héritier du défunt.

Nous ne connoissons en Normandie que de deux sortes de successions, la succession directe & la succession collaterale ; la succession directe vient des ascendans aux descendans, ou des descendans aux ascendans en ligne directe ; & la succession collaterale vient aux plus proches parens, ou aux parens paternels ou aux parens maternels.

En matière de succession, il n’y a à proprement parler que de deux sortes d’immeubles, des propres & des acquests ; car les conquefis, s’il y en a dans la succession, ils sont compris dans la dénomination d’acquet>s ; il y a en outre les meubles & effets mobiliers.

Les propres sont ceux qui appartenoient au défunt par succession, & les acquests sont ceux que le défunt avoit acquis & qu’il a laissez sans avoir fait souche, En ligne directe descendante, les propres & les acquests vont d’un même pas, & il n’y a aucune différence dans le partage qui s’en fait dans cette succession, hors le préciput des ainés : mais en ligne collaterale, il y a beaucoup de différence ; car dans cette succession, las propres se reglefit à la vérité comme dans la succession directe descendante, mais les acquests ont leurs regles particulieres.

Ce titre ne parle que des propres, tant en ligne directe descendante, qu’en ligne collaterale, & non des acquests.

Les institutions d’heritier ni les substitutions, n’ont point lieu en Normandie pour les parts & portions que la Coûtume donne à chaque heritier ; art. 54. du Reglement de récé, c’est-à-dire, qu’on ne peut instituer héritier celui à qui la succession ou partie des la succession appartient par la Coûtume ab intestat, ni le grever & charger de substitution au profit d’un autre, quand même ce seroit au profit de ses enfans ; il faut que cet héritier légitime ait la succession entiere, où la portion afférante & héréditaire qui lui appartient dans la succession, libre & non chargée de substitution ou fideicommis, ce qui a lieu tant en ligne directe qu’en ligne collaterale : cependant il est permis à un donateur entre vifs ou par testament, d’ordonner que les choses par lui données, passeront aprés la mort du donataire à celui ou à ceux qu’il aura nommez par l’Acte, art. 55. du même Reglement, bien entendu hors le cas de succession ; & même pour que la disposition de cet art. 55. ait lieu, il faut que celui qui est chargé & grevé par la donation ou le testament de vendre les biens donnez ou leguez à un autre, ne soit point héritier légitime & ab intestat dans les biens donnez ou léguez ; un pareille disposition ne seroit admise que d’étranger à étranger ; car en ce cas il est permis à un donateur de mettre & apposer relle condition & telle charge qu’il juge à propos à sa libéralité, soit par Acte de donation entre vifs ou par testament.

Il y a encore une autre observation à faire en cet endroit, qui est que si un

donateur ou un testateur s’étoit servi du mot d’institution d’heritier, en disant : institué un tel pour mon héritier, la disposition ne seroit pas pour cela nul, elle se convertiroit en donation ou legs, pour la part & portion dont le donateur ou testateur pouvoit disposer par la Coûtume.

Le mort, pour ne nous point écarter des termes de nôtre article de Coûtume, soit qu’il soit décedé de mort naturelle ou de mort civile, saisit le vif sans aucun ministere de fait, son héritier plus proche & habile à lui succeder, soit héritier absolu ou pur & simple, soit héritier par benefice d’Inventaire, cependant nul n’est héritier qui ne veut ; car parmi nous, il n’y a point d’heritiers necessaires, ils sont volontaires.

La maxime que le mort saisi le vif, ne peut s’appliquer aux Seigneurs féodaux succedans à leurs Vassaux par droit de deshérance ou de batardise, ces Seigneurs ne sont point saisis de plein droit des biens du défunt, ils n’ont que l’action pour se faire adjuger les biens ; & à proprement parler, ils ne sont point héritiers, mais de simples successeurs à des biens vacans ; aussi ne sont-ils tenus des dettes du défunt, que jusqu’à la valleur des biens.

Ce n’est pas assez d’être héritier présomptif, ou un des héritiers présomptifs d’un défunt par le degré de parente, pour lui succeder dans tous ses biens ou dans une portion de ses biens ; il faut en outre être habilite à succeder, c’est-àdire, n’avoir point d’incapacité en sa personne, qui rende l’héritier présomptif, inhabile & incapable de succeder.

L’héritier présomptif, majeur de la majorité coutumiere, qui est de vingt ans accomplis dans nôtre Coûtume, est obligé de declarer sa volonté en Justice dans quarante jours, à compter du jour de la succession ouverte & échûë, s’il veut & entend accepter la succession ; autrement la succession est reputée jacente & non apprehendée, & la possession des biens ne lui est point acquite pour pouvoir exclure un héritiere plus proche, qui surviendroit aprés ce délai ; Arrests du Parlement de Roüen, des premier Août 1618, & 1é Janvier 1665.

Cependant il faut convenir que depuis l’Ordonnance de 1667, qui au titre 7. A4 réglé les délais pour faire Inventaire, & pour déliberer si on appréhendra la succession ou si on y renoncera, les quarante jours marquez par cet article de Coutume, doivent être réglez suivant l’Ordonnance de r6o7, qui étant une Loy posterieure & superieure à la Coûtume, doit prévaloir pour fixer le délai pour se porter heritier ou renoncer à la succession, & de quel iour commence ce délaiL’absence de l’héritier présomptif n’empécheroit pas qu’il ne fût reputé & censé saisi des biens de la succession ; mais en cas d’une longue absence, & dans l’incertitude si l’absent est vivant ou mort, ses coheritiers, & même ses plus proches heritiers, peuvent demander d’être envoyez en possession des biens de la succession par provision, ou en tout cas en donnant caution ; Arrest du même Parlement du 16. Fevrier 1és ; ; & même aprés un absence capable de faire présumer la mort de l’absent, l’absent est reputé mort du jour de son départ, & qu’il a disparu dans le publie ; Arrest du même Parlement, du 11 Août 166, mais nul n’est reputé mort, qu’aprés cent ans d’absence, du jour de son absence, à moins que d’avoir des nouvelles certaines de sa mort ; & c’est à celui qui articule la mort, à justifier le fait, autrement l’absent sera réputé vivant tant qu’il n’y aura pas cent ans d’absence ; on peut faire en ce cas un partage provisionnel, & à la charge du retour de l’absent.

La capacité pour succeder se regle au tems de l’échéance & ouverture de la succession, d’où vient qu’on ne considère point les incapacitez qui ont précedé la naissance de l’héritier présomptif, pourvû qu’elles ne subsistent plus au tems de l’ouverture & de l’échéance de la succession, & de la mort de celui auquel on succede.

Il faut du moins être conçû au jour de l’ouverture de la succession, sans qu’il soit nécessaire d’être né, un posthume hérite ; mais il ne suffit pas d’être conçû & né au jour du décés de celui de cujus bonis agitur, ni même d’être le plus proche parent du défunt pour lui succeder, il faut encore être le plus habile à lui succeder ; car l’incapacité de l’héritier, ruine & annéantir tout le droit que la proximité donne.

L’incapacité en matière de succession, est fondée, principalement sur le defaut de la naissance, ou sur l’incapacité personnelle de celui qui veut succeder ; l’incapacité de naissance est par rapport aux étrangers non naturalisez, bâtards & aux filles dans notre Coûtume, qui ne peuvent succeder tant qu’il y à des mâles, mais cette incapacité n’est pas absolue, perpetuelle & irrévocable ; l’incapacité personnelle se tire de la personne, comme celle des Religieux ou Religieuses, Prosez canoniquement & suivant les Ordonnances, les condamnez à des peines capitales, & qui emportent la mort naturelle ou la mort civile, les exhéredez, & ceux qui se sont rendus indignes de la succession par leur propre fait Outre les bâtards qui sortent d’une conjonction illicite, il y a ceux qui naissent d’un mariage nulle & non valablement contracté, & qui ne peut produire des effets civils ; car il faut que le mariage duquel on est né, ait été contracté suivant les loix & les maximes du Royaume ; un mariage pourroit même être valable & subsister, quo ad fedus matrimonii, & non quo ad effectus civiles, c’està. dire, sans produire les effets ordinaires civils d’un mariage legitime & valablement contracté ; & dans ce cas, des enfans nez d’un tel mariage, n’auroient point la capacité & l’habilité de succeder à leur pere & mere, ni aux parens de leur pere & mère ; tels sont les enfans sortis d’un mariage clandestin, ou fait in extremis.

Un Tuteur par avis de parens peut apprehender une succession pour ses mineurs, ou y renoncer pour eux dans le tems de la Coûtume ou de l’Ordonnance.

L’héritier présomptif, encore qu’il n’ait pas renoncé à la succession, n’est pas censé hériter, s’il n’en a fait acte ou pris qualité, art. 43. du Reglement de 1666. ainsi quand notre article dit que l’heritier presomptif habile a succeder, doit declarer en Justice S’il entend renoncer à lu succession, le mot doit n’est point dans ce cas d’obligation, mais de pouvoir & de faculté, ainsi on peut toûjours & en tout tems renoncer rebus integris, nonobstant que notre Coûtume dans le present article 235. porte la renonciation à une succession, doive être faite dans les quarante jours à compter du jour de l’échéance de la successionUn héritier présomptif majeur, est reputé avoir fait Acte d’héritier, & n’être pas recevable à renoncer à la succession, s’il a recueilli & profité des effets de la succession animo aereais, s’il a diverti & recelé les meubles & esfets de la succession, ou s’il a fait & passé des Actes qu’il ne pouvoit pas faire sans le nom & la qualité d’héritier, comme vendre, faire des baux, ou recevoir & donner quittances aux débiteurs de la succession ; car pour rendre un héritier presomptif, héritier, nonobstant sa renonciation à la succession, il faut rapporter la preuve évidente & concluante de faits précis & capables de rendre heritier celui qui prétendroit faire valoir sa renonciation ; car des actes d’héritier non unt tam facti queim animi, des faits legers ou nécessaires ne seroient pas suffisans pour rendre un héritier celui qui ne voudroit pas l’être ; c’est pourquoi dans le doute, il vaudroit mieux décider pour la renonciation, que pour la qualité d’héritier.

L’acceptation d’une succession, se fait en deux manieres : l’une en déclarant verbalement ou par écrit que l’on se porte héritier, l’autre en faisant des actes d’héritier par une volonté déterminée, une intention & un esprit d’être héritier, ou du moins des actes qui ne pouvoient être faits que comme héritier ; car une seule declaration faite qu’on accepre une succession, n’empécheroit pas de changer de volonté, & de renoncer à la succession, pourvû que les choses soient entieres, que l’on n’ait pas encore mis la main a la chose, & qu’on ne se soit pas immiscé dans les biens & effets de la succession, Il y a davantage : on estime, on le repete, que quoique notre article porte qu’il faut accepter une succession dans les quarante jours aprés la succession échûë, si on est majeur, ou renoncer à la succession dans le pareil delai, néanmoins tant qu’un autre héritier ne se sera point porté héritier, qu’il ne se sera point mis en possession des biens de la succession, & que la succession fera encore jacente & non apprehendée, il pourra accepter la succession sans qu’un autre parent plus éloigné puisse la lui contester, sous prétexte qu’il ne s’étoit pas declaré dans les quarante jours ; un Tuteur même, qui se trouveroit dans le cas de n’avoir pas accepté la succession pour son mineur dans les quarante jours, pourroit revenir & apprehender la succession, encore qu’un autre parent plus éloigné eût pris la place & eût accepté la succession, de plus, le mineur devenu majeur, pourroit faire la même chose ; mais il faudroit se pourvoir par Lettres du Prince, si son Tuteur avoit mal à propos renoncé à la succession, ou pour n’y avoir pas renoncé, ou y avoir renoncé hors les quarante jours, & les choses n’étant plus entieres.

Les Actes d’héritier qu’on feroit aprés avoir valablement renoncé, ne rendroient point celui qui a renoncé à la succession, héritier, ni même les recelez & divertissemens qu’il auroit faits depuis sa renonciation ; on n’auroit qu’une simple action pour se faire faire raison des recelez & divertissemens, il faudroit que cela se fût passé avant la renonciation.

Il faut qu’une renonciation à une succession soit pure & simple, nibil dato, nihil accepto ; car une cession de sa portion héréditaire, ou de toute la succession, ou une renonciation faite aliquo accepto, est un véritable Acte d’héritier, & une acceptation de la succession.

Un Acte de renonciation doit être fait, suivant cet article, en Justice, & éovam Pratore ; & même l’usage est de les faire en personne à l’Audience, & avec serment qu’on a rien diverti & recelé directement ni indirectement ; il faut méme qu’il y en ait minute : Donc dans notre Coûtume, une renonciation faite au Greffe, hors la presence du Juge, ou devant Notaire ou Tabellion, ne vaudroit rien, elle seroit informe & nulle ; ce qui est dure, principalement si la renonciation avoit été faite rebus integris, avec minure de l’Acte, & dans le temps. de la Coûtume, qui est dans les quarante jours ; car une renonciation doit être faite dans les quarante jours, ou du moins dans le délai prescrit par l’Ordonnance de 168y, au Tit. 7. autrement elle est nulle.

Dans notre Coûtume une personne n’a point d’héritiers, que ceux que la Coûtume lui donne.

Un homme vivant n’a point d’héritiers, de la même manière qu’en fait de succession on ne represente point une personne vivante, oiventis nulla representatio ; il faudroit en ce cas venir à une succession de son chef, & non par droit de representation.

Dans notre Coûtume, tant qu’il y a des mâles, tant en succession directe qu’en succession collaterale, les filles ne succedent en aucuns biens de la succession.

Or nous ne connoissons que de trois sortes de biens, des propres, des acquêts & des meubles ; les propres & les acquêts ne consistent que dans des immeubles, qui sont ou nobles ou roturiers.

Quant aux propres, il y en a de paternels & de maternels ; les propres paternels retournent toujours aux héritiers paternels, & les propres mâternels aux héritiers maternels, sans qu’au défaut d’une ligne ils puissent passer à une autre ligne, ils appartiendroient en ce cas au Seigneur de Fief à droit de deshérance, boc est durum, sed est Lex scripta.

Les successions se prennent & se partagent tam activi quâm passivè en l’état qu’elles sont, & comme elles se trouvent au jour de l’’écheance & de l’ouverture de la succession.

Les héritiers d’un défunt sont tenus solidairement de ses dettes envers ses Créanciers, encore qu’il n’y eût que des meubles & effets mobiliers dans la succession, ou quand un des héritiers n’auroit eû que des meubles & effets mobiliers en son lot, & point d’immeubles, lesquels l’auroient assujetti aux dettes hypothecairement envers les Créanciers : mais la contrainte par corps, qui auroit pû être prononcée contre un défunt, ne pourroit être prononcée contre l’héritier.

Par l’Ordonnance de 1667. au titre 7. l’héritier présomptif a trois mois pour faire inventaire, à compter du jour de l’ouverture de la succession, & quarante jours pour déliberer, à compter du jour que l’inventaire aura été parachevez Le Juge d’Eglise ne peut jamais connoître des contestations concernans la succession succession des Ecclesiastiques, non plus qu’il ne peut prendre connoissance des contestations qui regardent les successions des personnes laiques.

Un héritier par benefice d’inventaire n’est pas moins héritier qu’un héritier absolu, ou pur & simple, à la réserve que les biens personnels ne sont point sujets aux dettes de la succession, & qu’il ne confond point ses propres créances.

L’action en partage doit être intentée devant le Juge du lieu où le défunt avoit son domicile, encôre que les biens de la succession foient situez en diverses Jurisdictions.

Les imbecilles, furieux & interdits, ne succedent pas moins que les autres personnes, même les enfans mineurs comme les majeurs, & les absens comme les présens.

Les héritiers légitimes & ab intestat, purs & simples, ou par bénefice d’inventaire, sont tellement saisis de la succession de plein droit, qu’ils n’ont besoin d’aucune Sentence ni jugement de délivrance.

Pour renoncer à une succession, soit directe ou collaterale, il n’est pas nécessaire de faire faire inventaire, il faut qu’on n’ait point diverti & recelé, ni fait acte d’héritier.

On se peut porter héritier de deux manieres, ou héritier absolu, c’est-à-dire, pur & simple, ou héritier par bénefice d’inventaire ; toute la difference qu’il y a entre l’un & l’autre, c’est que l’héritier absolu ou pur & simple confond ses droits dans la succession, & est tenu des dettes du défunt en son propre & privé nom & sur ses biens personnels ; au lieu que l’héritier béneficiare ne confond point les droits & créances qu’il peut avoir contre la succession, que ses biens personnels ne sont point exposez aux dettes de la succession, & qu’en faisant les fruits & revenus de la succession fiens, il n’en doit qu’un compte aux Créanciers ; mais il ne peut pas empécher que les Créanciers de la succession ne se vangent sur les biens de la succession, tant meubles qu’immeubles, & jusqu’à duë concurrence des biens de la succession, ses droits & créances, s’il en a, conservées suivant leurs privileges & hypotheques.


ARTICLE CCXXXVI.

L A succession directe, est quand l’héritage descend en droite ligne, comme de pere aux enfans, & d’autres ascendans en même degré.

La succession directe n’est pas seulement des pere & mère à leurs enfans & descendans de leurs enfans, mais encore des enfans ou leurs descendans à leurs pere & mere & autres ascendans.

En Normandie on succede jusqu’au septième degré inclusivement ; art. 41. du Reglement de 1é6é, car au huitième degré il n’y a plus de parenté capable de déferer une succession ; ce qui a lieu tant en ligne directe qu’en ligne collaterale ; ce sont les Seigneurs de Fief qui succedent en ce cas par droit de ligne éteinte ou deshérance ; ce qui fait que dans nôtre Coûtume la réprésentation, même en directe, n’est pas infinie, elle est bornée & limitée en ligne directe au septiéme degré inclusivement, mais en ligne collaterale, la réprésentation n’a lieu qu’au premier degré, c’est-à-dire, du neveu ou niece avec l’oncle ou la tante, pour pouvoir succeder par souche, & non par tête à la succession de l’oncle commun ; ce qui n’empéche pourtant pas que lorsqu’il s’agit d’une succession collaterale, on n’y puisse avoir droit jusqu’au septième degré inclusivement, non par répresentation, mais par parenté, lignage & égalité de degré.

Il y a cette différence entre la succession en ligne directe des pere, mere, & autres ascedans aux enfans & leurs descendans, & la succession en ligne directe des père, mere, ayeul, ayeulle & autres ascendans, aux enfans & leurs descendans, que celle-là est duë & déférée par l’ordre de la nature, au lieu que celle-ci est contre l’ordre & le veux de la natures & qu’elle n’a lieu que lorsque l’ordre de succeder, établi par la nature, est troublé par la mort prémature des enfans avant leur pere & mere, & autres ascendans, bien entendu si ces enfans n’ont point d’autres héritiers, même collateraux ; car dans nôtre Coutume aucuns biens, soit des propres, soit des acquests, soit des meubles, ne remontent tant qu’il y a des héritiers ou collateraux du défunt.

Que les enfans soient en la puissance de leur pere & mere ou autres ascendans, ou qu’ils soient émancipez, ils succedent à leurs pere, mere ou autres ascendans, pourvû qu’ils soient légitimes & capables de succeder.


ARTICLE CCXXXVII.

L E fils aîné, soit noble ou roturier, est saisi de la succession du pere & de la mere après leur déces, pour en faire part à ses puinez, & fait les fruits siens jusqu’à ce que parrage soit demandé par ses freres, s’ils sont majeurs lors de la succession échuë, & s’ils sont mineurs, l’aîné est tenu leur rendre compte des fruits depuis le jour de la succession échuë, encore que partage ne lui ait été demandé, parce que par la Coutume il est Tuteur naturel & légitime de ses freres & soeurs.

Le fils ainé, soit noble ou roturier, est saisi de la succession du pere & de la mere aprés leur déces, pour en faire part à ses puinez.

Quoique le fils ainé, noble ou roturier, majeur ou mineur, soit saisi de toute la succession des pere & mere par leur décës, & des le jour de leur déces, ce n’est que quant à la possession & à la jouissance ; car à l’égard de la proprieté, ses freres puinez y ont leur part héreditaire & afférante habituellement & par indivis, encore faudroit-il que le frere ainé fût capable & habile à succeder ; car s’il avoit quelque incapacité personnelle qui le rendit inhabile à succeder, il ne seroit saisi de rien, ni de sa portion héreditaire, ni de celle de ses freres puinez il est vrai qu’en ce cas le frere qui lui succederoit immédiatement, & qui n’auroit point d’incapacité personnelle pour succeder, prendroit sa place & entreroit en ses droits pour être saisi de toute la succession des pere, mere & autres ascendans, & à la charge d’en faire part à ses freres puinez : de plus, l’ainé n’est saisi des biens que jusqu’au partage des successions, lors duquel il est tenu d’en faire part à ses freres puinez, & leur en donner leurs portions suivant la Coûtume ; & voilâ une premiere prérogative que le frere ainé à sur ses cadets.

Et fait les fruits siens jusqu’à ce que partage soit demandé par ses freres, s’ils sont majeurs lors de la succession échuè.

C’est ici une seconde prérogative du frère ainé sur ses puinez ; cette prérogative est, que si ses freres puinez sont majeurs de majorité coutumière, c’est-gdire de vingt ans accomplis, il jouit pleinement & fait les fruits & revenus siens, des parts & portions héréditaires & afférantes de ses freres puinez dans tous les biens de leurs pere & mere & autres ascendans, jusqu’à ce qu’ils lui en nient demandé partage, sans qu’il foit tenu de leur en rendre compte, ni méme les nourrir & entretenir ; il seroit seulement tenu de payer les arrerages cour ans des rentes foncieres & hypotheques ou constituées de la succession, même les dettes mobiliaires ; car pourquoi les cadets majeurs ne provoquentils pas un partage ; ce seroit une négligence de leur part, dont leur frere ainé profiteroit ; sauf aux Créanciers des freres puinez à demander partage, comme exerçans les droits de leurs débiteurs.

Le fils ainé, outre la pleine jouissance des parts & portions afferantes de ses puinez majeurs dans les successions des pere & mere communs, tant que partage ne lui en est point demande par ses freres puinez, a le droit d’exercer & intenter toutes les actions qui appartiennent aux successions communes ; il a droit d’agir contre les débiteurs, recevoir, donner quitances, faire des baux & tous autres actes de pleine jouissance & d’un possesseur qui fait les fruits siens, sans que les puinez aprés le partage puissent trouver à rédire, à ce qu’il a fait, ni inquièter ni rechercher les débiteurs qui auroient payé & luidé leurs mains en celles du frère ainé, bien entendu qu’il ne touchera point aux fonds, & qu’il ne les degradera & ne les déteriorera point.

L’ainé fait pareillement les fruits siens de la part & portion de son puiné, majeur de vingt ans, lequel est absent, à moins que l’absence ne soit pour le service du Roy, comme de servir dans ses troupes ; Arrest du Parlement de Roüen, du 5. Mars 1678 ; le frère ainé profiteroit même de la portion héréditaire & afferante de son cadet majeur, mais insensé & sans Curateur, en lui fournissant des alimens ; Arrest du même Parlement, du 21. Mars 1673. ce qui cependant ne durerait que jusqu’à ce qu’il eût été donné un Curateur à l’insensé ou imbécile ; car en ce cas cet insensé jouiroit du privilege des mineurs, & son frère ainé ne jouiroit de sa porrion héréditaire qu’à la charge d’en rendre compte à qui il appartiendroit.

La demande en partage, formée par les puinez par exploit, fait cesser la jouissance du frère ainé, & dés ce moment-là le frère ainé cesse de faire les fruits siens, sans qu’il suit nécessaire de présenter des lots pour le priver de la jouissance de tous les biens des successions communes, même des fruits non recueillis, ou qu’au jour de la demande en partage, ils fussent réputez meubles par rapport à la saison, comme celle de saint Jean Baptiste pour les bleds & grains, & du premier Septembre pour les pommes, raisins & autres fruits.

Les prérogatives données par cet article à l’ainé, n’ont lieu que dans les successions directes, & non dans les successions collaterales ; ces mêmes prérogatives n’auroient pas lieu s’il n’y avoit que des filles héritières, la soeur ainée n’est ni saisie des parts & portions EN ses soeurs puinées, majeures ou mineures, ni ne fait point siens les fruits de leurs portions héréditaires & afferantes dans les successions de leurs pere & mère communs, chaque portion, quoiqu’individuë & non partagée, appartient à chacune des soeurs par indivis, nonobstant qu’aucune d’elles n’ait provoqué le partage ; la raison de cette décision est, que notre article ne parle que du fils ainé & non de la fille ainée, si cependant le fils ainé n’avoit laissé qu’une fille pour tous enfans & heritiers, elle auroit comme réprésentant le fils ainé, les mémes prérogatives que son pere avoit par cet article.

Pour en quelque façon indemniser la négligence des freres puinez majeurs, à ne point demander un partage à leur frere ainé, & de souffrir par-là que leur frere ainé jouisse pleinement de leurs revenus sans être obligé de leur en rendre compte, nôtre Coûtume veut que l’action en partage soit imprescriptible, sauf la perte des fruits & revenns de ceux qui quoique majeurs, ne demandent point partage.

La demande en partage doit être marquée par quelque acte, comme exploit ou assignation ; car une simple demande verbale ne feromipas cesser la jouissance au frere ainé ; mais si le frère ainé contestoit mal à propos la demande en partage, il seroit tenu de rendre & restituer les fruits du jour de la demande en partage, & non du jour de la condamnation seulement.

Outre & pardessus les prérogatives établies par cet article en faveur du fils ainé, la Coûtume lui en donne éncore cinq autres.

La première, de pouvoir oprer un Fief en chaque succession du pere & de la mere, avant que les deux successions soient partagées.

La deuxiême, de pouvoir se réserver le cher ménage ou principal manoir, court & jardin de la succession roturière.

La troisième, il doit être saisi des Titres, Lettres & Papiers de la succession, même des meubles ; il pourroit même demander le Tableaux de la famille.

La quatriène, les puinez doivent porter honneur au fils ainé, & relever de lui en partage.

La cinquième & dernière, est que l’ainé a le choix dans les successions dont les biens se partagent entre freres.

Et s’ils sont mineurs, l’ainé est rena leur rendre compte des fruits depuis le jour de la succession échuë, encore que le partage ne lui ait été demandé, parce qu’il est Tuteur naturel & légitime de ses freres & soeurs.

Lorsque les freres, puinez ou quelqu’uns d’eux sont mineurs de vingt ans, leur Frère ainé est à la vérité saisi de leurs parts & portions héréditaires & afférantes dans les successions pour en jouir jusqu’à ce que le partage lui ait été demandé, mais il n’en fera pas les fruits siens, il en sera comparable envers eux du jour de la succession échûé, jusqu’à leur majorité, encore même qu’on ne lui eût pas demandé partage ; la raison qu’en donne cet article, est que le frere ainé est le Tuteur naturel & légitime de ses freres & soeurs ; cependant il seroit bon que ce Tuteur, quoique nommé & donné par la Coûtume, pretât le serment devant le Juge, de bien & fidelement s’acquiter de la tutelle, on ne pourroit lui ôter cette tutelle, que pour grandes & importantes causes & raisons.

Le privilege de ces mineurs cesse à chaque majorité de l’un des mineurs ; de manière que du jour de la majorité d’un puiné, le frère ainé joüit & faire les fruits siens, de sa part & portion hereditaire & afferante dans les successions, jusqu’à ce que ce cadet, devenu majeur, ou autre frère majeur, ait demandé partage au frere ainé, mais il suffit que l’un des puinez ait demandé partage, pour interrompre la joüissance du frère ainé, & pour le rendre comptable des revenus & des biens envers tous les freres puinez, pourvû que celui qui provoque le partage soit majeur, car un mineur ne peut provoquer un partage, même de l’autorité ce son Tuteur ; quoiqu’on puisse le provoquer contre lui, ou pour mieux dire, contre son Tuteur, lequel sera tenu d’y entendre, avec l’avis des parens des mineurs bien & duëment homologué en Justice.

Pour qu’une demande en partage puisse interrompre la joüissance du frere ainé, il faut qu’elle soit formée par un exploit ou assignation en forme, à moins que le frere ainé ne consentit au partage, par un Acte signé de lui devant Notaire, ou sous signature privée.


ARTICLE CCXXXVIII.

P Areillement le fils du fils aîné est saisi de la succession de son ayeul & de son ayeule, à la representation de son pere, pour en faire part à ses oncles, & fait les fruits fiens, jusqu’à ce que ses oncles lui demandent partage ; & doivent les lots être faits par le dernier des oncles, le choix demeurant audit fils aîné.

Par la raison que la representation a lieu pour les prérogatives & droits d’ainesse, le fils du fils ainé, noble où roturier, est fais de tous les biens nobles ou roturiers, droits & actions des successions en ligne directe.

C’est sur ce principe. que le fils du sils ainé, comme representant son pere, joüit & fait siens les fruits & revenus des biens nobles & roturiers de la succession de son ayeul ou ayeulle, avec ses oncles majeurs de vingt ans, jusqu’à ce qu’ils lui en ayent demandé partage, ainsi & de la manière que son pere auroit fait.

La prérogative portée par cet article, s’étend à la fille du fils ainé en ligne girecte ; ensorte que le sexe ne préjudicie point en cette rencontre à cette fille, & elle joüira de tous les biens, tant nobles que roturiers de la succession de son ayeul ou ayeulle, commune avec ses oncles, & les fruits & revenus lui en appartiendront, jusqu’à ce que ses oncles majeurs luien ayent demande partage.

Cette même prérogative, aussi bien que tous les autres droits & prérogatives d’ainesse, ne passent pas seulement en la personne du fils ou de la fille du fils ainé, par la mort naturelle ou civile du fils ainé, ou autre incapacité personnelle, qui rende le fils ainé inhabile à succeder ; mais encore par la renoncia tion pure & simple du fils ainé, à la succession de ses pere & mère ; & alors le fils où la fille du fils ainé vient à la succession de son ayeul ou ayeulle arcc les autres cohéritiers, & y exerce tous les droits & prérogatives d’ainesse, non par representation de leur pere, mais jure suo & de sun chef, ainsi & de la manière qu’il auroit fait, si son pere eût ête mort au jour de l’ouverture de la succession.

Quoique le sils ou la fille du fils ainé fût mineur de vingt ans, il n’auroit pas moins les prérogatives de get article, que si l’un ou l’autre étoit majeur de vingt ans, il joisroit des biens de la succession, & en seroit les fruits siens par le ministère de son Tuteur, jusqu’à ce que ses oncles majeurs lui en eussent demandé partage ; mais si les oncles étoient mineurs, bien loin de profiter des revenus des biens, la jouissance le rendroit comptable envers ses oncles.

Le fils du fils ainé a pareillement les prérogatives contenuës dans cet article, en la succession collaterale de l’un de ses oncles frère de son pere, sans que ses oncles qui viennent à la succession avec lui, à la representation de son pere qui étoit le frère ainé du défunt de exius bonis agitaer, puissent contester son droit.

Generalement parlant, la representation d’une personne vivante, n’a point lieu suivant cette maxime triviale, que viventis nulla representatio, tant en ligne directe qu’en ligne collaterale.

De ce principe, suit trois décisions.

La premiere, que si un pere ou une mére ayant été exhéredés par son pere ou la mere pour une juste Cause, ses enfans qui ne l’ont point été, ne viennent pas à la succession de leur ayeul ou ayeule, avec leurs oncles, si leur pere ou mête étoit encore vivant au jour de la succession ouverte de l’ayeul ou ayeule, ils en seroient exclus par leurs oncles ; secus, si le pere ou la mere étoit mort naturellement au jour de louverture de la succession ; car la mort civile ne suffiroit pas ; par exemple, par une condamnation au bannissement per petuel, ou aux Galeres à perpetuité, ou par la Profession en Religion ; en un mot, il faut la mort naturelle, & dire que la representation n’a point lieu quand la personne que l’on represente est encore vivante.

La seconde, que les enfans de celui ou celle qui renonce à la succession de son pere où de sa mere, ne viennent point à la succession de leur ayeul ou ayeule avec leurs oncles ou leurs enfans, ni par representation, ni de leur chef ; parce qu’en ce cas, ils sont en degré plus éloigné que leurs oncles, où leurs enfans qui viendroient à la succession par representation de leur pere.

La troisième, que les enfans d’un frere vivant qui renonce à la succession de son frere ou tante, aliquo accepto, aut nibil accepto, ne viennent point à la succession de leur oncle ou tante, par representation de leur pere, avec les autres freres du frère décedé : Il faut cependant remarquer que la maxime, vivextis nuellau representatio, n’a pas lieu en Normandie, suivant la jurisprudence du Parlement de Roüen.

Et doivent les lors être faits par le dernier des oncles ; le choix demeurant audit fils ainé, Dans les successions, soit nobles ou roturieres, en ligne directe ou en ligne collaterale, c’est le dernier des enfans, qui fait les lors, & le fils ainé ou le sils ou la fille du fils ainé a le choix ; c’est pour cette raison que dans une succession commune entre le fils ou la fille du fils ainé & ses oncles, c’est le dernier des oncles, comme le plus jeune, qui fait les lors, & le fils ou la fille du sils ainé choisira ; car dans nôtre Coûtume on ne jette point les lots au sort dans les partages des successions.


ARTICLE CCXXXIX.

S’Il n’y a enfans de l’aîné, vivans lors que la succession l’écher, en ce cas, le second fils tient la place & a les droits d’aîné, & ainsi subsecutivement des autres.

Aprés cette disposition, il n’est pas douteux que le droit d’ainesse n’est pas personnel, ni attaché à une certaine personne, puisque non seulement il passe au second fils quand son frère ainé n’est pas vivant, lors de l’ouverture de la succestion, & ainsi successivement aux autres fils, mais encore parce qu’il est transmissible au fils ou à la fille du sils ainé ; c’est pourquoi si le fils ainé meurt sans enfans, lors de l’échéance de la succession, son frere puiné immédiatement entre en ses droits & prérogatives d’ainesse, & tient en tout la place de fils ainé de la maison ; & ainsi consecutivement des autres puinez, chacun suivant l’ordre de leur naissance.


ARTICLE CCXL.

E Ncore qu’il n’y eût qu’une fille de l’aîné, elle a par répresentation. de son pere en ligne directe, pareil droit de prérogative d’aînesse que son pere eût eu ; & en ligne collaterale aussi, pour le regard de la succession ancienne.

Cet article contient deux dispositions importantes & singulieres dans notre Coûtume, & en même tems trés-avantageuses à la fille du fils ainé.

L’une, que la fille du fils ainé, par representation de son père, a pareil droit & prérogative d’ainesse que son pere auroit eû dans une succession directe.

L’autre, que la fille du fils ainé a le même droit & prérogative d’ainesse en succession collatérale quant aux propres, que la Coûtume appelle succession ancienne, mais non quant aux acquêts ; de sorte que le sexe ne fait point de préjudice au droit d’ainesse de la fille dans le cas de cet article.


ARTICLE CCXLI.

P Ere & mere, ayeul ou ayeule, ou autre ascendant, tant qu’il y a aucun descendant de lui vivant, ne peut succeder à l’un de ses enfans.

Cette disposition est tres-desavantageuse aux pere, mere, ayeul, ayeule, & autre ascendant ; car aucun des ascendans n’est héritier mobilier, ni des acquêts de l’un de ses enfans ou petits enfans, decedé sans enfans, ni encore moins des propres, tant qu’il y aura un descendant des pere, mere, ayeul ou ayeule, ou autre ascendant, qui soit vivant & habile à succeder ; de sorte qu’un pere ou une mere ne succede point à un de leurs enfans, decedé sans enfans, lorsque cet enfant à laissé des freres ou des soeurs ; si ce sont des freres, ils succederont seuls à leur frere, à l’exclusion des pere ou mere, & des soeurs s’il y en avoit ; & si le frère n’avoit laissé que des soeurs, elles excluroient leur pere ou mére, de la succession de leur frere, de quelque nature que fussent les biens, même des meubles & acquêts ; car dans notre Coutume les successions ne remontent point, de quelques biens que soit composée la succession, soit propres, soit meubles, soit acquêts, tant qu’il y a un descendant des pere ou mère, capable de succeder ; il faut dire la même chose des ayeul, ayeule, ou autres ascendans, tant qu’il y aura des petits enfans habiles a succeder.

Il y a plus, c’est que les pere, mere, ayeul, ayeule ou autres ascendans, ne peuvent pas même succeder par droit de reversion & de retour aux biens par eux donnez à l’un de leurs enfans ou petits enfans en mariage ou autrement, tant qu’il y aura un descendant du donateur ; de manière que si l’enfant donataire vient à déceder sans enfans, les biens donnez ne retournent & ne viennent pas au donateur, mais aux freres du donataire ; & s’il n’y a que des soeurs, elles auront les biens donnez à leur frere par le pere, où la mere, où l’ayeul, ou l’ayeule, ou autres ascendans, à moins que par le Contrat de mariage, contenant la donation, la cause & stipulation de reversion ou retour n’y fût expres-sement portée en faveur de l’ascendant donateur, Arrest du Parlement de Rouen, du 13. Aoust 1637.

Il y a encore une observation à faire ici, qui est que quand même le frere on la soeur n’auroit laissé qu’un frere uterin ou une seur uterine, ce frère ou cette soeur excluroit les pere, mere, ayeul, ayeule ou autre ascendant, de la succession de ce frère décédé sans enfans, tant des proprés que des meubles & acquets, & le tout appartiendroit au frere ou à la soeur, sans avoir égard dans ce cas au double lien ; Arrest du même Parlement, du 17. Decembre 1649.


ARTICLE CCXLII.

L Es pere & mere excluent les oncles & tantes en la succession de leurs enfans ; & les oncles & tantes excluent l’ayeul ou l’ayeule en la succession de leurs neveux & nieces, ainsi des autres.

Si un enfant vient à déceder sans enfans, & sans frere ni seur, ce seront les pere & mere qui lui succederont, & non point son oncle ni sa tante, qui sont dans ce cas exclus de sa succession, de quelque nature que soient les biens, propres, meubles ou acquêts ; avec cette différence néanmoins par rapport aux propres, que le pere ne pourroit succeder qu’aux propres paternels, & la mere aux propres maternels ; car ce seroit les oncles & tantes du côté maternel, qui autroient les propres maternels, si c’étoit le pere qui succedât seul à ses enfans décedez sans enfans, ni frere, ni soeur : comme ce seroit les oncles & tantes paternels qui succederoient aux propres paternels, si c’étoit la mere qui succedit seule à ses enfans décedez sans enfans, ni frère ni soeur ; mais si les pere & mere succedoient conjointement & chacun pour moitié, le pere n’auroit rien dans les propres maternels, & la mere n’auroit rien dans les propres maternels ; les propres paternels appartiendroient au pere en totalité, & les propres maternels appartiendroient en totalité à la mere, le partage par moitié entre le pere & la mere ne s’étendroit que sur les meubles & acquets.

Les oncles & tantes du neveu & de la niece, ou autre arrière-neveu ou arrière nièce, décedé sans enfans & sans frere ni soeur, exeluent l’ayeul, ayeule ou autre ascendant de sa succession ; parce que les oncles & tantes tiennent lieu dans ce cas de descendans, & font plus proches parens de leurs neveux, nieces & autres arrière-neveux ou arriere-nieces, que les ayeul, ayeule, & autres ascendans.


ARTICLE CCXLIII.

L Es oncles & tantes excluent les cousins en la succession de leurs neveux & nieces.

Le Reglement de ré6é, art. 44. a expliqué cet article ; il porte que les oncles & tantes exCluent leurs enfans, & sont preéfêrez à leurs enfans en la succession aux propres de leurs neveux & nieces cousins de leurs enfans, mais qu’ils sont appellez concurremment à cette succession arce leurs neveux & nièces, enfans de leurs freres & soeurs ; la raison de cette disposition, est que les oncles & tantes sont plus proches en degré de parenté de leurs neveux & nieces, que leurs enfans ; préference néanmoins qui n’a lieu que pour les propres qui se trouvent dans la succession du neveu & de la niece, & non pour les meubles & acquéts, car dans ces derniers biens, les oncles & les tantes & leurs enfans y succedent. concurremment & par téte.


ARTICLE CCXLIV.

S I le pere ou mere, ayeul ou ayeule, ou autre ascendant, reconnoît l’un de ses enfans pour son héritier en saveur de mariage, & fait promesse de garder son héritage, il ne pourra aliéner ni hypothequer le-dit héritage en tout ou partie, ni les bois de haute futaye étans dessus, au préjudice de celui au prosit duquel il aura fait ladite disposition, & de ses enfans, pourvu que ladite promesse foit portée par écrit & insinuée dans le tems de l’Ordonnance, sinon en cas de nécessité, de maladie ou de prison.

Quoique cet article ne parle que des pere, mere & autres ascendans, ausquels il est permis de promettre leur succession à un de leurs enfans ou petits enfans ou à leur présomptif héritier, néanmoins la même chose est permise aux parens coilateraux ou autres personnes dont le donataire est seul & unique liéritier presomprit, comme par un frere, une soeur & autres en faveur de leurs héritiers présomptifs, Arrests du Parlement de Rouen, des 15. Decem. 1631. & 22. Fev. 1676. Un etranger pourroit même faire la même promesse à quiconque il voudroit, quand même le donataire ne seroit ni son parent ni son héritier présomptif : mais promefse qui ne pourroit exceder les bornes de ce qui est permis de donner entre vifs par la Coûtume ; ainsi il faut étendre la disposition de cet article à toutes personnes non prohibées & capables de donner, & en faveur de toutes sorres de donataires capables de recevoir une donation, sans considèrer si le cdonateur & le donataire sont parens, si la parenté est en ligne directe ou en ligne collareraie, si le donataire est héritier présomptif du donateur ou non, ou si c’est un étranger : en usi mot on peut promettre à qui on veut de lui garder sa suecession, en ce qui peut néanmoins tomber dans la donation par la Coûtume, il n’y a rien en cela qui soit contre la loi & les bonnes moeurs.

De plus, quoique nôtre article, dise qu’une pareille promesse peut être faite en faveur de mariage, cependant elle peut être faite pour toute autre cause, comme pour amitié, services & autres causes, & parce que telle est la volonté de celui qui fait la promesse, & hors mariage & Contrat de mariage, pourvû qu’elle soit faire par un acte authentique, c’est-à-dire paisé pardevant Notaire ou autre personne publique ; un acte sous signature privée suffiroir même, mais il seroit plus sûr qu’il fût reconnu devant Notaire ou en Justice par celui qui auroit sait la promesse, avant sa mort ; car on ne peut trop apporter de précautions dans un acte de cette importance, quoique d’ailleurs tres-favorable, n’étant que le pur effet de l’amitié, & ne saisant souvent, & pour ainsi dire que confirmer un droit qui étoit déja acquis, principalement si cerre promesse est faite à l’héritier présomptif par la Loi & par la Coutume ; aussi ces sortes de promesses se font ordinairement en saveur & par Contrat de mariage d’un héritier présomptif d’un parent ou autre ; & si on en fait pour d’autres causes & par autre dete, il saut roujours & nécessairement que ce soit par un acte eutre-vifs, & non par donation à cause de mort ni par testament, une telle promesse seroit nulle & de nul effet.

Or ces sortes de promesses peuvent être faites en trois sortes de manieres.

La première, en reconnoissant le donataire pour son héritier.

La seconde, en promettanr de lui garder sa succession.

La troisième & derniere, en lui faisant des-àpresent cette promesse en avancement d’hoirie, & de suc cession.

La simple reconnoissance pour son héritier, n’ajoûteroit rien au droit de l’héritier presomptif, si le donaraire étoit hérit ier presomptif du donateur par l’a Loi & la Coûtume ; c’est pourquoi une simple reconnoissance pour son heritier, est en ce cas peu necessaire ; il n’y auroit que dans le cas où la reconnoissance ce qui seroit faite par un étranger, en faveur d’une personne qui lui seroit étrangere, pour son heritier ; une pareille promesse ne laisseroit pas de faire un ti-tre de propriété habituelle dans les biens du donateur, pour les avoir au jour du décés du donateur, à l’exclusion de ses héritiers ab antestat, tels & er telle quantité qu’ils se trouveroient.

La promesse de garder sa succession, ne donne pas seulement l’espèrance, elle conserve encore & assure la succession au donataire, sans néanmoins que la proprieté en soit transferée au moment de l’acte au donataire, cette promesse n’a son effet que dans le cas du prédéees, & par le prédécés de celui qui l’a faite, ESPERLUETTEelle devient eaduque, si cet héritier contractuel vient à déceder avant le donateur, sans que la propriété habituelle qu’il avoit en vertu de la promesse dans les biens du donateur, passe à ses héritiers ou ayans cause, les clioses sont réduites comme s’il n’y avoit point eu de promesse de garder sa succession au donataire.

Mais il en est autrement de l’avancement de succession ; car l’avancement de succession en transfere à l’instant la propriété à l’héritier donataire, & l’héritier donataire devient Seigneur & maître de la chose donnée en avancement d’hoirie dés le moment de sa passation de l’acte, & il en fait les fruits siens, si par l’acte, Phéritier donataire doit entrer en joüissance des biens dés le jour de l’acte, & à l’instant de l’acte ; & il peut même l’alliener & l’hypothéquer Arrest du même Parlement, du a Août 1649, à moins qu’il n’y eut par l’acte uine prohibition d’alliener & d’hypothéquer les biens pendant la vie du donateur ; sans pouvoir toutefois confisquer les biens donnez en avancement d’i oi-rie, principalement au préjudice de celui qui a fait l’’avancement ou prome le, quand même la reversion en sa faveur, ou la prohibition d’ailiener & hypothéquer les biens donnez en avancement de succession, n’auroit pas été stipulée par l’acte ; Arrest du même Parlement, du 2y Juillet 1647.

Il est clair que les donations en avancement d’hoirie & de succession ne se font qu’en faveur d’un héritier presomptif, & non d’un étranger qui n’a ni droit ni espèrance dans la succession du donnteur.

En cns de prédéces de l’héritier présomptif avant le parent qui avoit promis de lui garder sa succession, ses héritiers ou créanciers ne peuvent rien prétendre dans les biens de la succession qu’on avoir promis de garder, parce que cet héritier présomptif est censé n’avoir jamais rien eu aux biens dont on l’avoir assûré, & que le premier engagement à cessé entièrement ; de munière que celui qui l’a fait, recouvre la liberté de disposer de son bien comme il auroit pû faire auparavant ; Arrêts du mêine Parlement, des 3 Juin 1654. & 18 Ianvier 1685.

Si cependant la dette avoit été contractée pour alimens nécessaires, elle pourroit être prise ix subsidium sur les biens de la succession future, nonobssant que l’héritier presomprif, auquel avoit été fait l’avancement de succession, fut mort avant le donateur ; Arrest du même Parlement, du 1o Fevrier 1656.

Quoiqu’il en soit, il faut décider dans la These generale, que l’héritier pré. somptif, auquel la donation en avancement d’hoirie a été faite, survive le donateur, pour que la donation ait lieu ; car si le donataire prédécede, la donation tombe & s’evanouit.

Un héritier présomptif, auquel on a promis de garder sa succession, peut rendre cette promesse inutile, en y renonçanr & en acceptant la succession en la seule qualité d’héritier, & comme s’il n’y avoit point eu de promesse de garder sa succession ; il tiendroit alors la succession de la Coûtume, & non de ce-lui qui lui avoit fait la promesse ; ce qui lui seroit permis, sans même que ses propres créanciers puissent s’en plaindre ni empécher que les dettes que celui qui avoit promis de garder sa succession, a contractées depuis sa promesse, ne fussent payées avant les dettes contractées par l’heritier présomptif, à moins qu’il n’apparût une fraude manifeste ; mais cet héritier présomptif ne pourroit renoncer à la promesse faite en sa faveur de lui garder sa succession, & à la succession tout ensemble, au préjudice d’une tierce personne, tels que seroient ses créanciers, une pareille renonciation seroit frauduleuse & nulle ; de sorte que ses créanciers pourroient prendre la successionpour la part & portion qui en reviendroit à leur débiteur, sans néanmoins pouvoir faire valoir la promesse de la succession ; ils prendroient la succession, comme s’il n’y avoit point reu de promesse de garder la succession, La promesse de garder sa succession à son héritier présomptif, est irrévocable, & même on ne seroit pas restituable à revenir contre une telle promesse, soit par Lettres de rescision ou autrement ; Arrests du même Parlement, du premier Fevrier r667, à moins qu’elle n’eût été indûëment extorquée par dol ou violence, ou autres mauvaises voyes ; ou si le donateur, qui étant garçon & n’ayant point d’enfans legitimes, venoit à se matier depuis la promesse de garder sa succession à son néritier préfomptif, qui étoit son frere, ou autre parent collateral, & qu’il ait des enfans de son mariage, par la maxime de droit, que surpeve-xientia liberorum euanescit donatio, la promesse de garder la succession seroit revoquée, mais les biens du donateur seroient néanmoins prenables in subsidium de la dot & doüaire de la femme du donataire, laquelle s’étoit mariée sur le fondement & l’assurance de cette promesse du donateur, de garder sa succession à son mari ; c’est pourquoi si les biens de son mari n’étoient pas suffisans pour la remplir de sa dot & de son doüaire, elle seroit bien fondée à s’adresser sur les biens du donateur, nonobstant son mariage & la naissance de ses enfans.

Le parent qui a promis de garder sa succession à son héritier présomptif, ne peut plus posterieurement à cette promesse, aliener, engager ni hypothequer les biens de la succession qu’il a promis de garder, ni en disposer, encore moins au préjudice de l’héritier présomptif auquel cette promesse a été faite.

La promesse faite par les pere & mere, ou autre ascendant, de garder sa succession à l’un de ses ensans & autre ascendant, a aussi effet pour les parts & portions qui doivent revenir aux autres enfans ; ensorte que cette prommesse engage les pere & mere ou autre ascendant, qui l’ont faite, envers tous les en-fans ou petits enfans, & leur lie tellement les mains, qu’ils ne peuvent plus obliger, hypothéquer ni alliener leurs biens au préjudice d’aucun de ses enfans ou petits enfans, étant de droit compris dans la promesse faite par l’aseendant de garder sa succession à l’un d’eux ; art. 45. du Reglement de 1666. Cela fondé sur ce qu’il n’est pas permis dans notre Coûtume, d’avancer un de ses héri-tiers plus que l’autre.

Le pere ou la mere, qui a promis de garder sa succession à son héritier présomptif, comme il ne peut plus alliener, hypothéquer ni engager ses biens en tout ou partie, il ne peut faire aucun acte qui rende sa promesse vaine & inutile ; cependant on pourroit prescrire contre le donateur ; & l’héritier préfomp-cription contre celui qui auroit preserit, parce que le cours de la prescription introduite par la Loy, ne peut être arrété par cette promesse de garder sa succession à son héritier présomptif.

La prohibition d’alliener, hypothéquer & engager ses biens par celui qui a promis de garder la succession à son héritier presomptif, au préjudice & nonobstant la promesse, n’a lieu que pour les immeubles, terres, maisons, hérita-ges, rentes foncieres & hypothéques, ou constituées à prix d’argent, & ne s’étend point fut les meubles, dont le donateur a indépendamment de la promesse ine entière liberté & pouvoir de disposer ; il peut même recevoir valablement l’amortissement ou rachat des rentes qui lui sont dûës, à la charge routefois d’en faire emploi, ou de donner caution ; & les débiteurs des rentes, qui en auroient fait le remboursement, seroient valablement déchargez, encore qu’il n’eûr point été fait de remploi, à moins que le donataire ne leur eût fait signifier sa donation, & fait des empéchemens entre leurs mains.

Celui qui a promis de garder sa succession à son héritier présomptif, ne peut même faire couper les bois de haute-futaye, étans sur les terres, ni les bois taillis & autres bois hors les faisons ordinaires, ni encore moins dégrader & deteriorer les lieux.

La seule présence & signature d’un pere, d’une mere ou autre ascendant, au Contrat de mariage de l’un de leurs enfans ou petits ensans, n’emporteroit pas une promesse de leur part de garder leur succession à l’’enfant qui se matieroit, il faut que la promesse soit expresse & formelle par le Contrat de mariage ou autre acte iolemnel & authentique.

Une promesse de garder une succession, ne peut être prouvée par témoins ; Il faut qu’elle soit par écrit.

Il faut en outre que la promesse de garder une succession à son présomptif héritier ou autre, foit insinuée dans le tems des Ordonnances faites au sujet. des insinuations, à peine de nullité ; & même tous les Contrats, Obligations & Engagemens faits par celui qui a promis de garder sa succession, avant l’insinuation du Contrat de mariage ou autre acte qui contient la promesse, sont va-lables, & le donataire en est tenu, quand même ils auroient été faits dans le tems que l’insinuation pouvoit être faite ; car l’insinuation n’a point à cet égard d’effer rétroactif ; ce n’est qu’aprés l’insinuation que le donateur à les mains liées & qu’il ne peut plus obliger, engager ni alliéner ses immeubles, soit à titre onéreux soit à titre gratuit, coime par forme de donation, legs ou autrement, quand même ce seroit en faveur de l’Eglise, des pauvres ou autres causes pieuses.

Il n’y a que trois cas dans lesquels un donateur de cette qualité a cette liberté, 1. En cas de nécessité, méis nécessité pressante, comme si dans un tems de famine le donateur avoit emprunté de l’argent ou vendu de ses immeubles pour vivre, ou qu’il eût fait de pareils actes pour se rédimer d’une accusation qui interessoit son honneur, sa réputation ou sa vie, ou pour quelqu’au-tre cas d’une nécessité urgente & extrême : on y peut ajouter un autte cas ; sçavoir, si le donateur s’est depuis la promesse marié dans les formes ordinaires au vû & au seù de toute sa familie ; car s’il survenoit des enfans, la promesse tomberoit, & quand il n’y en auroit point, sa veuve ne laisseroit pas de prendre sur les biens de son défunt mari, sa dot, reprises & doüaire, comme si le donateur n’avoit point fait de donation ni promis de garder sa succession, parce qu’on peut dire que cet homme lorsqu’il a fait cette donation & cette promesse, ne s’est point interdit le mariage, & qu’il est à présumer qu’il aimoir le donataire, mais qu’il s’aimoit ou qu’il aimoit les enfans qu’il auroit de son mariage, & sa veuve encore mieux que le donataire ; d’ailleurs il ne seroit pas juste que sa veuve qui étoit dans la bonne foi, perdit sa dot, ses reprises & son doüaire, mais toujours in subsidium des biens libres du mari. 25. Le donateur qui a fait une pareille promesse, peut alliéner, hypotequer & engager son bien nonobstant que la donation ait été insinuée, en cas de maladie ; pourvû qu’elle soit considérable & dangereuse, & que pour se faire soigner, le donateur soit forcé ou d’alliéner de son bien ou d’emprunter de l’argent ; il seroir bon que la cause du prét fût exprimée dans l’Obligation ou autre acte contenant le prét ; il faudroit en outre, que le fait de la maladie considérable & dangereuse, fût duë ment justifié. 30. En cas de prison, soit pour causes civiles ou pour causes criminelles, ou pour payer la rançon du donateur, étant en esclavage chez les ennemis du nom Chrétien, ou étant prisonnier de guerre.


ARTICLE CCXLV.

L Es héritages du côté paternel retournent toujours aux parens paternels, comme aussi font ceux du côté maternel aux maternels, sans que les parens d’un côté puissent succeder à l’autre, en quelque degré qu’ils foient parens, ains plutôt les Seigneurs desquels lesdits biens sont tenus & mouvans, y succedent,

En succession de propres, réprésentation a lieu jusques & compris le septiéme degré inclusivement, auquei cas la succession des propres est partagée par souches & non par têtes, même en ligne coltaterale, soit que les héritiers soient en pareil degré ou’en degrés inégaux ; art. 42. du Reglement de 1666, de maniere cependant que les propres paternels retournent toujours à titre de succession aux parens paternels, & les propres maternels aux parens maternels, quoiqu’ils soient parens plus éloignez du défunt, & que ceux d’un côté soient plus cloignez que ceux de l’autre côté, sans que les propres du côté paternel puissent jamais & en ancun cas retourner aux parens maternels, ni les propres ma-ternels retourner aux parens paternels ; c’est pourquoi à défaut d’héritiers du côté & ligne d’où les héritages sont venus, les patens de l’autre ligne n’y peuvent succeder, mais ils pasient & appartiennent aux Seigneurs desquels les hé-gritages propres sont tenus & mouvans tant en Fief qu’en roture ; en sorte que les héritiers paternels ne succedent jamais aux propres maternels, quand même il ne resteroit plus d’héritiers aux propres maternels ; ni les héritiers maternels ne succederoient point aux propres paternels, quand même il ne resteroit plus de parens du côté paternel, c’est aux Seigneurs de Fief à qui appartiendroient les propres de la ligne défaillante en toute proprieté, aux charges de droit, qui sont celles qui tombent sur le compte des Seigneurs qui prennent des biens par droit de deshérance & de ligne éteinte, qui est dans notre Coûtume un droit féodal & non de justice ; aussi notre article porte que dans ce cas les propres de la ligne défaillante, appartiendront aux Seigneurs desquels lesaits biens sont tenus & mouvans ; Arrest du Parlement de Normandie, du 30. Iuiliet 16zo.

Il faut être de l’estoc & ligne de l’acquereur pour pouvoit succeder aux propres, & il ne suffit pas d’être parent de celui de la succession duquel il s’agit, si les propres sont plus anciens que lui ; Arrest du même Parlement, du 20. DeCembre 1é55.

De plus les mâles & leurs descendans excluent les femelles & leurs descendans, des propres, tant en ligne directe qu’en ligne collaterale, quoique les femelles & descendans d’elles, soient plus proches en dégré de celui de cujus bonis agitur, que les mâles ; & tant qu’il y a des mâles, les femelles, quand même elles descendroient de mâles, ni les descendans d’elles ; ne peuvent succeder aux propres ; Arrest du même Parlement, du 17. Avril 1640. bien enten-du que les mâles & les femelles se trouvent dans la même ligne & souche, c’estGedire, du côté paternel s’il s’agit de propres paternels, ou du côté maternel s’il est question de propres matetnels ; car les mâles du côté paternel n’exeluroient pas les filles des propres maternels, ni les mâles du côté maternel ne pourroient pas exclure les filles du côté paternel.

Un acquét fait des deniers provenans de la vente d’un propre, est réputé propré du coté duquel étoit le propre vendu, lorsqu’il paroit que l’acquêt a été fait des deniers provenans de la vente d’un propre ; il faut dire la même chose des héritages étrangers, ou retirez par retrait lignager ou féodal, ou des remplois faits de deniers provenans de remboursemens & rachats faits de ventes qui appartenoient à des femmes ou à des mineurs, qui leur étoient propres.

Aprés le premier degré, il y a confusion & extinction de la dot en la personne de l’enfant héritier de ses pere & mere : par exemple, un fils s’est porté héritier de son pere & de sa mere, & en cette qualité il a succedé à la dot de sa mere en ce cas il se fait une confusion & une extinction de la dot en sa personne, de sorte que ce fils venant à déceder sans enfans, ses héritiers maternels ne peuvent demander cette dot comme un propre maternel à l’exclusion des héritiers paternels, les uns & les autres y succedent sans regarder ni considerer que la dot venoit originairement de la mère ; Arrests du même Parlement, des 15. Novembre 1646. & 23. Juillet 1670.

Lorsque les biens ont changé de nature & qu’ils ne sont plus réputez propres, on ne régarde plus leur premiere origine, on les partage en l’état qu’on les trouve lors de l’ouverture de la succession.

Si dans un partage on donnoir à l’un des ensans des biens maternels au lieu de la part qui lui étoit dûë sur les biens paternels, ces biens-là seroient reputez paternels & proceder de l’estoc & ligne paternelle ; parce que l’héritage subrogé prend la qualité de celui dont il tient la place ; & en ce cas la maxime à lieu, que subrogatum sapit naturam subrogati sans aucune stipulation, par la naturé de la chose ; ce qui a lieu tant en ligne directe qu’en ligne collaterale.

Une action qui est immobiliaire en la personne d’une femme conjointe par mariage, est aussi immobiliaire en la personne de l’héritier de la femme.


ARTICLE CCXLVI.

C E qui se doit entendre non seulement des biens qui descendent des pere & mere, mais aussi des autres parens paternels & maternels, pourvû que les biens fussent propres en la personne de la succession de laquelle il s’agit.

Un héritage ou autre immeuble n’est pas seulement réputé un propre, qui vient de la succession des pere & mere ou autre ascendant, mais encore l’rcritage on autre immeuble qui vient de la succession de parens collateraux, tant du côté paternel que du côté maternel ; de sorte qu’il y a des propres en ligne directe & des propres en ligne callaterale, pourvû toutefois & non autrement, que ces héritages & immeubles fussent propres en la personne de celui de la suecestsion duquel il s’agit ; c’est pourquoi la regle puterna paternis, materna mater. nis, n’a pas seulement lieu en ligne directe, elle a encore lieu en ligne collas terale.


ARTICLE CCXLVII.

L Es biens sont faits propres en la personne de celui qui premier les possede à titre successif.

Tous les biens immeubles échus par succession, sont réputez propres, sans qu’il y ait distinction de propres anciens & naissans, art. 46. du Reglement de 1666.

Or les biens immeubles, sont faits propres en la personne de celui qui les possede à droit succeisif tant en ligne directe qu’en ligne collaterale, de sorte que l’immeuble qui est acquét en la personne de l’acquereut ; est un propre en la personne & tans la succession de son héritier, ce qui a lieu non leulement en ligne directe, mais enc : re en ligne collaterale, Un acquët fait par un fils, décedé sans enfans ni héritiers collateraux Capables d’exclure les pere & mêre de ce fils, & lequel ac quêt a passé au pere ou à la nière, comme heritier de son enfant quant aux meubles & acquêts, devient propre en la personne du pere ou ce la mere, paree que le pere ou la mere tient l’immeuble de sun en ant à titre IucceIli, ainsi il se fait des propres duns les successions ascendan ës, comme il s’en fait dans les fuecessionsdescendantes, & un acquët fait par un sils décedé sans enfans, qui a passé en la perlonne de la mere, comme son héritière quant aux meubles & acquêts, est un propre paternel en la personne & en la succession de la mère ; & les héritiers paternels de la mere succedent à ce propre naissant en la personne de la mere, à l’exclusion de ses héritiers maternels, quoique plus proches en degré que les paternels ; Arrest du Parlement de Rouën, du 23. Mai 1623.

En Normandie, une donation d’immeubles, faite à son liéritier présamptif, avec promesse par le donateur de garder sa suceelsion au donataire, est un propre sen a personne du donataire, & non un acquét, soit que la donâtion ait éte faite à un héritier presomptif en ligne directe, soit qu’elle ait été ftite en ligne collaterale, parce qu’on regarde ces sortes de donations comme des Tuccessions antici-pées : mais à l’égard des donations iaitesd’étranger à étranger, ce sont des acquets en la personne du donataire, tant de disposition que de succession, Il a été jugé qu’un ayeul ayant donné à son petit fils sorti de la fille, des hér. tages, & ce petit fils étant mort sans enfans, ces héritages, comme propres appartenoient à ses soeurs consanguines, & non à son frere uterin, parce que nonobstant que ce petit fils comme sorti d’une fille, & les soeurs par leur qualité de fille, ne pussent pas succeder à cet ayeul, il falioit néanmoins regarder cette donation comme faite ratione sanguinis, comme un propre en la personne du donataire, & non comme un acquet ; Arrest du même Parlement, du 28. Mars 1622.

Dans notre Coûtume, & suivant la Jurisprudence du Parlement de cette Province, il n’y a point de propres conventionnels ou de stipulation, à la réserve des deniers mobiliers donnez en dot aux filles par pere, mere ou freres, lesquels sont prepres en la personne des filles dotées ; parce que les deniers doraux tiennent lieu aux filles de leurs portions héréditaires dans les successions de leurs pere-& mere ; autre chose seroit si une fille étoit dotée par un étranger, cette dot seroit un acquêt en la personne de la fille donataire : il est en outre permis à un donateur étranger au donataire, de stipuler que les choses données seront propres au donataire, tant de disposition que de succession.

C’est enfin une regle generale que tout immeuble de succession, est réputé propre & non un acquét.


ARTICLE CCXLVIII.

E N succession de propre, tant qu’il y a mâles ou descendans des mâles, les femelles ou descendans des femelles, ne peuvent succeder soit en ligne directe on collaterale.

Quoique ce soit une disposition generale de notre Coûtume, que les femel. les ou descendans des femelles, ne sont point admises aux successions directes & collaterales, tant qu’il y a des mâles ou descendans des mâles, & même qu’en succession de propres tant nobles que roturiers, elles n’y ont rien tant qu’il y a des mâles ou descendans des mâles, bien entendu pourvû que les mâles ou de scendans des mâles soient capables & habiles à succeder, il y a néanmoins quelques exceptions pour les successions en ligne directe.

La première, est que les filles succedent à leurs pere & mere avec leurs freres, si elles ont été réservées par leurs pere & mére à leurs successions ; & dans ce cas elles ont part égale aux meubles & aux héritages situez en bourgages ; part 51. du Reglement de 1666.

La seconde, si les freres au lieu de donner la dot promise par les pere & mere à leurs filles, veulent admettre leurs soeurs au partage des successions des pere & mere, & que les soeurs le veulent & y consentent.

La troisième, si les freres sont refusans de marier leurs soeurs, & leur donner une dot proportionnée à leur mariage avenant, elles viendront à partage. des biens des pere & mere communs jusqu’à concurrence de leur mariage avenant.

La quatriême, si le Fise ou les Créanciers sont subrogez à apprehender la part & portion du frère, & de se mettre en son lieu & place dans la succession, les soeurs de ce frere viendront à partage avec le Fise ou les Creanciers.

Mais il est à remarquer que ces differentes exceptions n’ont point lieu & ne s’étendent point aux luecessions coilaterales, ausquelles les filles ou leurs descendans ne sont point admises, tant qu’il y a des mâles ou descendans des mû-les, pas même à y demander mariage avenant.

Il n’y a donc qu’à défaut de mâles ou de scendans de mâles, que les filles ou descendans des filles viennent aux successions.


ARTICLE CCXLIX.

L Es filles ne peuvent demander, ne prétendre aucune partie en l’héritage de leur pere & mere, contre leur frere, ne contre leurs hoirs ; mais elles leur peuvent demander mariage avenant.

Par cet article, les filles & descendans des filles ne succedent point à leurs pere & mere où autre ascendant, tant qu’elles ont des freres ou descendans de leurs freres capables & habiles à succeder ; & au cas qu’elles n’ayent point été mariées par leur pere & mere, elles ne pourront demander à leurs freres oû descendans de leurs freres, que mariage avenant sur les biens de leur pere & mere ou autre ascendant, qui est leur legitime, & qu’elles prennent comme héritieres legitimaires, dans la succession de leur pere & mere ou autre ascendant, & non pas comme créancière, à la difference du tiers coûtumier que les ensans prennent comme créanciers de la succession de leur pere, & aprés avoir renoncé à sa succession, Le mariage avenant des filles, est le tiers des successions des pere & mère, ou autre ascendant pour toutes les filles, déduction faite des dettes des successions sujettes au mariage avenant, & ce tiers se divise & repartit entr’elles, pro xumero fororum, sans préciput ni prérogative, mais par égales portions.

Les freres ou leurs descendans, ont l’option pour le payement du mariage. avenant ; ou de le payer en essence, c’est à-dire, des biens de la succession, ou suivant l’estimation qui se fait par les parens communs, ou par des experts & grens à ce connoissans, dont les parties conviennent, par rapport aux forces de la succession, & aprés les dettes prélevées, dont le mariage avenant est tenu jusqu’à concurrence du tiers, Les freres, pour ne point payer de mariage avenant à leurs soeurs, ne peuvent obliger leurs soeurs à venir à partage des successions avec eux, ils ne peuvent se dispenser de leur donner leur mariage avenant ; il n’y a que les soeurs qui ont l’option, ou de prendre leur mariage avenant, ou d’entrer en partage avec leurs freres ; Arrests du Parlement de Normandie, des 17 May. 4664, & 13 Juin 1667 ; & art. 47. du Reglement de 1666.

Le mariage avenanr doit être payé avant les dettes du frère, même avant le doüaire de sa femme ; Arrest du même Parlement, du 8 Fevrier 1658.

Pour regler les interêts du magiage avenant, il faut distinguer que les interéts qui ont couru avant le mariage des soeurs, doivent être payez au denier vingt, & les interêts qui ont couru depuis leur mariage, doivent être payez au denier dix-huit, qui est le denier du Roy, en Normandie ; Arrêts du même Par-lement, des 27 Mars 1654, & 29 Juiler 1667.

Quand il n’y auroit qu’une seule fille ; elle auroit seule le tière des biens des successions des pere & mère ; mais dans ce cas, il faut que la portion des freres fuit aussi forte que le mariage avenant, sans que le mariage avenant de cette fille puisse exceder les parts & portions des freres, Le mariage avenant ne doit être payé, que les dettes & les charges des successions de pere & mere, n’ayent été prélevées & déduites.

Les filles ne sont point obligées de se pourvoir pour leur mariage avenant, par la voye de la saisie réelle, contre les acquereurs & tiers détempteurs des biens affectez à leur mariage avenant ; elles peuvent faire proceder par saisie & Arrest des fermages des terres & héritages ; Arrest du même Parlement, du 8 Fevrier 167s ; même per action & désistement de la proprieté, & possession des terres & héritages, sauf aux tiers détempteurs leur recours contre leurs vendeurs.


ARTICLE CCL.

L E pere & la mere peuvent marier leur fille de meuble sans héritage, ou d’héritage sans meuble ; & si rien ne lui fut promis lors de son mariage, rien n’aura.

Soit que les pere & mere soient nobles ou roturiers, il leur est permis de onarier leurs filles en meubles, ou en argent, & en autres effets mobiliers, ou en héritages & immeubles, nobles ou roturiers, où d’autre nature, cela est à leur choix & option ; & si leurs pere & mere ne leur ont rien promis en mariage, elles n’auront & ne prendront rien dans les successions de leurs pere & N9 mere, pas même des alimens, elles n’auront qu’une action contre leurs freres, pour pouvoir leur demander quelque chose sur les biens des pere & mêre communs : ni encore moins leurs maris & enfans ne peuvent pareillement rien prétendre dans ies successions de cette fille ainsi mariée.

Les ayeul ou ayeule ou autres ascendans ont la même faculté en mariant leurs petites filles, qu’auroient eù les pere & mère ; car si l’ayeul, ayeule ou autre ascendant n’a rien promis en dot à ses petites filles, elles, leurs maris & ensans ne pourront rien prétendre en leurs biens.

Les pere & mere ou autres ascendans ne sont point garants des deniers dotaux, pari eux payez comptans à leurs filles en les mariant, soit que le paye ment en ait été fait la veille des épousailles, ou depuis le mariage, quand méme le payement des deniers auroit été fait depuis & aprés les termes echûs ; de sorte, que lorsque le mari deviendroit insolvable, la fille ni ses enfans n’auroient aucun recours de garantie contre les pere & mere & autres ascendans, leurs héritiers où ayans cause, pour raison de cette dot ainsi payée en deniers comptans, soit que la femme ait signé à la quittance, ou qu’elle n’y ait pas signé ; Arrests du Parlement de Roüen, des 17 Septembre 163s, S Juillet 168y & I Iuillet 16é3.

Mais lorsque les pere & autres ascendans ont constitué sur eux une rente pour la dot de leur fille ou petite fille, & qu’ils ont fait le rachat ou amottissement de cette rente entre les mains du mari, lequel devient dans la suite insolvable, ils en demeurent garants & responsables envers la fille ou petite fille do-etée, ou leurs enfans, quand même la fille ou petite fille dotée, auroit signé à la quittance de remboursement ; Arrest du même Parlement, du 2o Novembre 4642, sans cependant pouvoir obliger le mari à donner caution, ou un emploi des deniers provenans du remboursement pour la sûreté de l’amortissement de la rente dotale ; parce qu’il dépend d’eux de faire ou ne pas faire le remboursement de la rente, & que s’ils veulent en faire l’amortissement, c’est à eux à en courrir les risques ; Arrest du même Parlement, du 1s Juillet 1644.

Un acquereur d’héritages chargez d’une rente dotale, qui veut faire le rechat de cette rente, & se liberer d’une dette de cette qualité, n’est pas pareil-lement recevable à demander caution, ou un emploi & remplacement au mari, il dépend de lui de faire ou ne pas faire ce remboursement, c’est son af-faire ; c’est pourquoi, s’il veut ainortir la rente, il faut qu’il suive les risques de la fortune du mari, mais s’il appréhende que le mari ne devienne insoivable, il ne doit pas faire l’amortissement d’une rente constituée en dot, puis-qu’il pourroit un jour être inquiété & recherché pour raison de cette rente Arrest du même Parlement, du 7 Mars 1670.

Ceux qui ont promis la dot en deniers comptans, peuvent encore moins demander caution ou emploi au mari, pour lui faire le payement de cet argent ; d’autant qu’ils sont obligez de payer cette somme purement & simple ment, & dans le tems marqué par le Contrat, sans pouvoir demander au mari d’autres sûretez, ni de nouvelles assurances ou cautions, à moins que par le Contrat de mariage, il ne fût stipulé & convenu que le mari ne pourroit recevoir les deniers dotaux de sa femme, qu’en donnant par lui caution ou remploi remploi ; Arrests du même Parlement, des à luin & 8 Août 1é62. lamais un pere naturel n’est garant de la rente constituée sur lui & par lui pour la dote de sa batarde, quoique le remboursement en eût été fait à son mari, depuis devenu insolvable ; Arrest du même Parlement, du 24 May 1656.

Les pere & mere sont obligez de payer l’intérét de la dote promise en deniers, à compter du jour de l’échéance du payement, encore qu’il n’y ait ni demande, ni Jugement de condamnation d’interêts, & nonobstant que suivant la jurisprudence du Parlement de Normandie & de toute la Province, une somme de deniers ne puisse jamais produire d’interêts ; nec ex mora, nec ex petitio-ne & condemnatione.

Les pere & mere pourroient donner une augmentation de dot à leur fille, si depuis son mariage ils étoient parvenus à une meilleure fortune, sans que les freres pussent y trouver à rédire ; tout ce que les freres pourroient faire, seroit si la première dot, & que l’augmentation de dot excedoient le tiers des biens des pere & mère, de se pourvoir en réauction dans l’année du décës des pere & mêre, aprés lequel tems ils seroient non-recevables en leur demande en réduction.

Quoique la fille mariée, à laquelle ses pere & mere n’ont rien donné ni rien promis en dot, ne puissent rien nemander contre eux ni contre leurs héritiers, néanmoins il n’est pas toujours en la liberté des pere & nière de ne rien donner à leurs fiiles ; car si aprés l’âge de vingt cinq ans ils ne vouloient pas con-sentir à un mariage avantageux de leur fille, elle seroit en droit de se pourvoir en Iustice pour les obliger de donner leur consentement à son moriage ; & si elle s’étoit mariée aprés avoir fait les sommations & requisitions nécessaires, & avoit contracté mariage suivant les formalités des Canons & des Crdon-nances, sans que ses pere & mere y eussent consenti & rien donné en dot, elle seroit recevable aprés leur mort à demander mariage avenant à ses freres ou héritiers & ayans cause ; elle ne perdroit pas en ce cas son mariage avenant ou sa légitime sur les biens de ses pere & mere, parce que s’étant mise en son devoir & satisfait aux Canons & aux Ordonnances, où ne pourroit pas lui opposer le défaut de consentement de ses pere & mere, & que ses pere & mere ne lui ont rien promis en dot & en mariage.

Le mari peur disposer des meubles & conquêts en bourgage ou ailleurs, ou dans les endroits où il y a une espèce de Communauté de biens, en faveur du mariage de ses filles sans que la mere soit recevable à s’en plaindre, quand méme elle n’auroit pas voulu signer au Contrat de mariage ; car c’est commune onuz inter maritum & uxorem dotare filiam, principalement si la somme promise en dot étoit payée, ou les héritages promis en dot, avoient été livrez du vivant des pere & mère ; & la femme ne pourroit pas aprés la mort de son mari demander une indemnité sur la part du mari dans les meubles & conquêts, ces sortes de biens se partageroient en l’état qu’ils se trouveroient lors du déces du mari ; mais si c’étoit une fille d’un autre lit du mari, il ne pourroit pas marier & doter cette fille aux dépens des meubles & conquêts dans lesquels la femme a un droit habituel, sans indemniser la femme de cet avantage.

Ce que le pere aprés la mort de sa femme donne ou promet en dot à ses filles en faveur de mariage, ne doit être payé que sur les biens du pere, sauf aux filles à prendre en outre leur mariage avenant sur les biens de la mere : mais si les filles sont mariées & dotées par les pere & mère, & que la dot ait été du vivant de la mére sur les meubles & conquéts faits pendant le mariage, le pere aprés la mort de sa femme ne pourra rien imputer de cette dot sur les propres de la mere, parce que cette dot a été payée & acquitée du vivant de la mère, des meubles & conquêts faits ex communi cullaboratione, dont le mari avoit la pleine disposition, & particulierement pour marier leurs filles ; Arrests du même Parlement, des 26. Mars & 17. Juillet 1658.

Si la dot promise conjointement par les pere & mere, n’a pas été payée & acquitée du vivant de la mére sur les meubles & conquêts faits pendant le mariage, elle se prendra sur les biens du pere & de la mere, chacun pour moitié ; Arrest du même Parlement, du 28. Mars 1662.

La dot promise par le pere seul à ses filles ou à une de ses filles, & non payée du vivant de la mere, doit être payée & acquitée sur la part du mari, dans les meubles & conquêts, & subsidiairement sur ses propres & non sur aucun des biens de la mere, soit sur sa part dans les meubles & dans les conquêts, soit sur ses propres ; ainsi dans ce cas la femme auroit une indemnité contre les héritiers de son mari au sujet de ses droits dans les meubles & dans les conquêts ; ce qui auroit même lieu, encore que la dot fût promise & constituée tant sur les biens paternels que sur les biens maternels, la mère ni ses héritiers ne seroient point tenus d’y contribuer, n’ayant rien promis & n’ayant point parlé ni signé au Contrat de mariage, & ne s’étant point obligée à la dot ; mais la fille ainsi dotée, aura indépendemment de cette dot, son mariage avenant sur les biens de la mère.

La contribution qui doit être faite par les pere & mere pour le payement de la dot par eux promise à leurs filles, doit êrre seulement faite à proportion des biens qu’un chacun possede en proprieté, & non par simple usufruit, tel qu’est le doüaire de la femme ; ainsi chacun n’estppas tenu de droit de la moitié de la dot promise, mais à proportion des biens que chacun a en pleine proprieté.

La femme qui s’oblige à la dot de ses filles conjointement avcc son mari ne peut être contrainte solidairement au payement de la dot, mais seulement ù en payer sa part & portion suivant les forces de son bien, à moins qu’aprés la mort de son mari elle ne se portât son héritière, car en ce cas elle seroit tenuë solidairement ; Arrest du même Parlement, du 5. Juin 1671. parce que suivant nôtre Coûtume, tout héritier est tenu solidairement des dettes de la succession, quand même l’héritier ne possedetoit que des meubles ou effets mobiliers ; ou bien si la mere s’étoit obligée solidairement par le Contrat de mariage avec son mar : pour toute la dot & un seul pour le tout, l’un & l’autre pourroient être poursuivis solidairement & un seul pour le tout, par les filles ausquelles la dot avoit été promise, ou leurs hritiers & ayans cause, sauf le recours de l’un contre l’autre.

Il n’est point nécessaire dans nôtre Coûtume de faire renoncer les filles par leur Contrat de mariage aux successions futures de leur pere & mere, il fussit qu’en les mariant on ne leur ait rien promis, ou qu’on leur ait payé ce qu’on leur avoit promis en mariage ; d’autant que les filles ne fuccedent point en Normandie tant qu’il y à des mâles, & qu’il est permis aux pere & mêre de leur donner en mariage ce qui leur plait, elles n’ont aucun droit ni aucune action pour pouvoir prétendre la moindre chose dans les successions de leurs pere & mere, pas même un suplément de légitime, dés quelles ont été mariées par leur pere & mere, & qu’on ne leur a rien promis en mariage, ou qu’on leur a payé ce qu’on leur avoit promis.

Une fille à laquelle les pere & mere ont promis en dot une certaine somme de deniers pour la part & portion qu’elle pourroit esperer en leurs successions, ne peut plus rien prétendre, non seulement dans les biens de ses pere & mere, situez dans la Province de Normandie, mais encore dans les biens situez dans une autre Coûtume qui appelleroit les filles aux successions de leurs pere & mere avec leurs freres, encore bien que cette fille ainsi mariée, fût mineure lors de son mariage, & qu’elle n’eûr pas expressément renoncé aux successions futures de ses pere & mere, & encore moins aux biens où elle auroit eû sa part par la Coûtume où ils étoient situez ; la raison de cette décision, est que les deniers promis en dot par les pere & mère, tiennent lieu à la fille de partage dans tous les biens de ses pere & mere en quelque lieu qu’ils soient fituez ; Arrest du même Parlement, du 30. Avril 1672.

Une fille mariée & dotée par ses pere & mere, n’est point tenuë des dettes de leurs successions, ce sont les freres qui en sont seuls tenus en qualité d’héritiers de leurs pere & mere : Si néanmoins la fille possedoit quelque héritage ou autre immeuble de la succession, elle pourroit être poursuivie hypothecairement par les Créanciers de ses pere & mère, antérieurs à son Contrat de ma-riage, sauf son recours contre ses freres, héritiers de leurs pere & mère ; mais si c’étoient des Créanciers postérieurs à son Contrat de mariage, ils ne pourroient pas valablement se pourvoir contre cette fille.

Le payement de la dot peut être preserit par rapport à la somme promise, par trente ans, comme une action personnelle, la prescription de quarante ans n’est point en ce cas requise & nécessaire.

On ne peut faire renoncer une fille à une suceession échuë, parce que c’est un droit acquis à la fille, dont on ne peut la priver, quand même cette renonciation seroit fai e par la fille en pleine majorité, & par son Contrat de mariage.

La dot promise par pere & mère, fe paye sur leurs biens suivant l’ordre & hypothéque des Contrats de mariage de chaque fille mariée par les pere & mére, d’autant qu’en ce cas les filles n’agissent qu’en qualité de Créancier des succeisions de leurs pere & mere, & non comme héritieres ; Arrest du même Parlement, dua2. Fevrier 167S. Mais il en est autrement du mariage avenant, les filles qui n’ont point été mariées du vivant de leurs pere & mere, ont hypotheque pour leur mariage avenant, & en sont payées par égales portions dans le tiers des biens de chaque succession des pere & mère, sans priorité d’hypotheque entre elles sur ces biens, parce qu’elles ont leur mariage avenant, non pas comme Créancieres de leurs pere & mère ; mais comme héritieres légitimaires.

C’est un usage constant en Normandie, de donner au mari une portion de la dot de la femme, au cas que la femme vienne à déceder avant son muri sans enfans ; & quelquefois on accorde ce don sans la clause de survie du mari, & qu’il y ait enfans ou non : cela s’appelle Cion nobté, qui est pour recompenser le mari des frais & de la dépense qu’il a été obligé de faire, ou qu’on présume qu’il a faite pour rechercher la femme en mariage ; de maniere que le mari en restituant la dot aux heritiers de sa femme qui décede sans enfans, retient cette portion de dot en toute propriété pour lui appartenir irrévocablement : or le don mobil doit être payé sur le pied qu’il a été accordé & reglé par le Contrat de mariage, sans cependant pouvoir exceder le tiers de la dot ; & le surplus de la dot, le don mobil prélevé, sera propre à la femme, & le mari tenu de le payer & restituer aux heritiers de la femme, avec les interêts du jour du décës de la femme. Mais si par le Contrat de mariage il n’est point parlé de don mobil, ni marqué ni dit quelle quantité des deniers dotaux sera réputée dotale & propre à la femme, le don mobil sera du tiers des deniers dotaux, lequel appartiendra en toute propriété & sans retour au mari qui aura survécu à sa femme, & les deux autres tiers seront réputez deniers doraux & propres à la femme : Arrers du même Parlement des 5.

Fevrier 3653, & 31 Mai 1676. Il semble que le don mobil ne devroit être accordé au mari, qu’au cas qu’il survéeût safemme, & qu’il n’’y eût point d’enfans du mariage ; cela dépend des conventions du mariage.

Ce qui reste à payer des deniers promis en dot, au jour du décës de la femme, doit être appliqué & imputé sur la partie des deniers, stipulée propre à la femme ; & ce qui a été payé au mari sur la fomme promise en dot, doit être imputé sur le don mobil, parce que le mari est censé avoir été payé de ce qui lui appartenoit pour son don mobil sur les deniers par lui recus sur & tant moins de la somme promise en dot ; Arrét du même Parlement du S Janvier 3659.

Si la somme promise en dot ne peut être payée en entier par l’insolvabiliré des successions des pere & mère de la fille, qui avoient promis la dot, le tiers de ce qui pourra être payé appartiendra au mari pour son droit mobil, & les autres tiers seronr payez à la femme, & lui seront propres comme faisant partie de sa dot Arrét du même Parlement du S Mars 1668.

Lors du payement de la somme promise en dot par le Contrat de mariage, on ne peut changer la nature & la qualité des deniers promis en dot ; il faut s’en tenir au Contrat de mariage, sans qu’il soit permis d’augmenter ou diminuer ce tni a été donné & accordé au mari pour don mobil, ni à ce qui a été stipulé propre à la femme, des deniers promis en dot ; Arrêt du même Parlement du 3.

Fevrier 1639.

Le don mobil n’est pas réciproque, il se donne & s’accorde seulement au mari, & non à la femme ; on ne connoit point en Normandie de preciput réciproque entre conjoints par mariage, Lorsque la future épouse n’apporte point de deniers en dot, mais seulement des héritages & immeubles, il est permis d’ameubler par siction & par convention une partie de ces héritages & immeubles jusqu’à concurrence de la somme convenuë pour le don mobil du futur époux ; & le cas arrivant les héritiers de la femme, en reprenant tous les héritages & immeebles apportez en dot par la femme, seront tenus de payer au mari la somme convenuë pour le don mobil, si mieux ils n’aiment que le mari ne prenne des héritages & immeubles, jusqu’à dûé concurrence du don mobil, sur le pied de l’estimation, & le surplus des héritages & immeubles rendus aux heritiers de la femme.


ARTICLE CCLI.

L Es freres peuvent, comme leur pere & mere, marier leurs soeurs de meubles sans héritages, ou d’héritages sans meubles, pourvû qu’elles ne soient déparagées ; & ce leur doit suffire.

Il est permis aux freres, comme aux pere & mère, en mariant leurs soeurs de leur donner en dot des meubles où des immeubles, au choix des freres, mais il ne leur est pas permis de ne leur rien donner, ainsi que l’article precedent le dit en faveur des pere & méres les freres sont obligez de donner à leurs soeurs, ou promettre en dot des meubles & effets mobiliers, où des héritages & immeubles, du moins jusqu’à concurrence de leur mariage avenant ou legitime, sans que les soeurs puissent forcer leurs freres à leur donner l’un plûrot que l’autre, c’est-à. dire de l’argent comptant, des meubles & autres effets mobiliers, plûtot que des facritages & autres immeubles, ou des héritages & autres immeubles, plûtot que de l’argent comptant, meubles & autres effets mobiliers, cela dépend des freres, & les soeurs doivent être contentes ; tout ce que les soeurs peuvent faire, est de se faire doter jusqu’à concurrence de leur mariage avenant ; car il n’est pas permis aux freres d’en rien diminuer, à moins que les soeurs pleinement majeutes, avec les maris qu’elles épousent, ne se contentassent de ce qui leur seroit promis ou donné en dot par leurs freres, pour leur mariage avenant ; car en ce cas, elles ne pourroient plus revenir, & dire que la dot qui leur a été donnée ou promise par leurs freres, n’étoit pas équipolente à leur mariage. avenant ; mais quoiqu’il en soit, si les freres ont marié leurs soeurs pour peu de chose, quand même cette dot seroit bien au dessous de leurs mariages avenant ; les soeurs ne peuvent plus leur demander le suplément de leur mariagre avenant, pourvû que les freres ne les ayent pas déparagées en les mariant, Arrests du Parlement du Roüen, des 23 Décembre 1551, & premier Août 1628, ce qui auroit lieu, quand même elles auroient été mineures lors de leur mariage : Si cependant il paroissoit une inégalité considerable entre la dot & le mariage avenant, & que la seur fût déparagée, il seroit juste d’écouter les plaintes de ce tre soeur ; il y auroit même lieu d’obtenir des Lettres de Reicision ; Arrét du mênie Parlement, du 14 Avril 1666.

Quoique les soeurs soient mariées sans le consentement de leurs freres, & sans avoir été par eux dotées, cela n’empéche pas qu’elles ne soient en droit de leur demander leur mariage avenant ; car le mariage avenant est dû aux filles par leurs freres, soit qu’elles se marient ou demeurent filles : si elles se faisoient Religieuses, leur dot de Religion seroit prise sur leur mariage avenant.

Il faut tachet que les filles en se mariant ne se dépuragent point, c’est-à-dire ne se dépareillent & ne se méfalient point, ce qui est assez difficile en Normandie où les filles, qui ne sont pas des heritieres, n’apportent pas assez de bien en dot pour pouvoir trouver des maris de leur qualité & condition : on y voit souvent des Demoiselles mariées à des roturiers, à la faveur que ces roturiers ont du bien ; mais toujours est-il deffendu aux freres de déparager & mésalier leurs soeurs, sous prétexte qu’ils leur donnent peu de chose en mariage, & qu’un mari d’une condition inégale, se contonte d’une dot au dessous du mariage avenant de sa femme.

La dot des filles ayant été reglée par les pere & mere, ne peut êtré diminuée par les freres en mariant leurs soeurs ; il faut qu’elle sait payée suivant qu’elle aura été arbitrée par les pere & mère, par Acte entre-vifs, où par Testament, Arrest du même Parlement, du Ii Juillet 16éz. Si cependant cette dot étoir excessive, & au-dessus du tiers des biens des pere & mèré, les freres seroient en droit de la faire réduire au tiers des biens des pere & mère.

Les freres qui ont marié leur seur, & qui lui ont promis une dot, peuvent être poursuivis solidairement, & un seul pour le tout, au payement de la dot, encore bien que par le Contrat de mariage ils ne se soient pas obligez solidairement à la dot ; Arrêts du même Parlement, des 27 Juin 16542. 27 Mars 1655. & 18 Août 1666.

Le frere qui a constitué sur lui une rente pour la dot de sa soeur, & qui veut faire le rachat & amortissement de cette rente, ne peut obliger sa seur ni son beaufrere, de lui donner caution ou remploi, pour sureté du remboursement, tout ce qu’il peut faire pour se liberer furement ; est de donner en payement des héritages de la succession au denier vingt ; Arrest du même Parlement, du & Novembre 1633. Cependant, si la dot étoit promise en deniers comptans3 le frere ne pourroit pas obliger sa seur ni son mari à prendre des héritages en payement.

Les ireres sont garans de la dot par eux promise à leurs soeurs, & par eux payée au mari & a la femme ; & même ils seroient garants de la dot promise en deniers par les pere & mere, & pryée par les freres au mari & à sa femme, si le mari devenoit insolvable ; Arrests du même Parlement, des 5 May 1688, & 16 Aout 167z, ce qui auroit même lieu, quoique la femme qui auroit parlé & signé dans la quitrance, fût separée de biens d’avec son mari ; Arrêts du même Parlement, du 18 May i650 ; jusques-là que la femme qui n’auroit signé la quitrance du payement de sa dot, ou du rembour sement de la rente à elle constituée en dot par ses frères, fait par ses freres à son mari qui devient duns la suite insolvable, n’est point obligée de discuter les biens de son mari avant de poursuivre ses freres, elle peut agir directement en garantie contre ses freres ; elle n’est pas même obligée de sommer & interpelier ses treres de sormer opposition au decret des biens du mari, afin de les conserver ; c’est à eux de veiller, & de se presenter au décret, si bon leur semble, & non à la seur Arrét du même Parlement, du 11 Août 1672.

Si le frère a baillé & donné à sa soeur une rente en payement de sa dot, ou du matiage avenant, il demeure tellement garant de la rente, que si le débiteur de la rente ne la paye point, la soeur n’est pas obligée de s’attaquer à ses immeubles, & les faire vendre par decret ; elle peut s’adresser à son frere pour l’obliger à reprendre la rente ; Arrest du même Parlement, du 11 Avril 1646, Le frère qui n’auroit rien reçû, ni rien eu des successions de ses pere & mere, ne seroit point tenu de doter ses leurs, ni de leur donner mariage avenant, quand bien même il seroit héritier de successions collaterales, dont il auroit beaucoup profité, parce que ses soeurs n’avoient rien dans ces successions.

Si la fille est mariée par son Tuteur, le Futeur doit stipuler que les deux tiers de la dot promise en deniers comptans, seront propres à la femme, & assurer les deniers dotaux ; autrement il seroit garant & responsable de la dot en cas d’insolvabilité du mari, Une batarde mariée par son pete naturel, & depuis legitimée par un mariage subsequent, peut demander mariage avenant à ses freres ; Arrest du même Parlement du premier Fevrier 1646.

La dot qui est propre à la femme, est toûjours reputée propre aux héritiers de la femme quant aux propres, & cette dot leur retourne, quand même la dot consisteroit en deniers, dont il n’auroit point été fait d’emploi ; car l’action pour repeter la dot contre le mari, est immobiliaire, & passe aux héritiers des propres de la femme, & non aux héritiers des meubles & acquêts,


ARTICLE CCLII.

L A fille mariée par son pere ou mere, ne peut rien demander à ses freres pour son mariage, outre ce qui lui fut par eux promis, quand ils la marierent ; & si d’ailleurs aucune chose lui a été promise en mariage, ceux qui l’ont promis, ou leurs hoirs, sont tenus le payer, encore qu’ils ne fussent tenus la doter.

La fille mariée par son pere ou mere, ne peut rien demander à ses freres pour son eariage, outre ce qui iui fut par eux promis quand ils la marierent.

Quoique la fille mariée par son pere ou par sa mere, ou par l’un & l’autre, ne puisse rien demander à ses freres pour sa dot, outre & par dessus ce qui lui a été promis en dot, néanmoins il est permis aux pere & mere, ou au pere, ou à la mere, de donner à leur fille mariée, & depuis son mariage, quelqu’autre chose, soit en meubies ou en immeubles, par donation entre vifs, ou par testament, le tout néanmoins jusqu’à concurrence du tiers de leurs biens, sans que les freres y puissent trouver à rédire ; Arrests du Parlement de Normandie, des 2S Juillet 1614, 22 Juin 1622, 17 Juillet 1629, 12 Iuillet 163s, 24 Mars 4642, 2May 1651, 11 May & 20 Juillet 1658. Et il est indifferent si la chose donnée par pere & mere, ou par pere ou mêre, depuis le mariage de leur fille, lui est donnce ou à ses enfans ; tout ce que les freres pourroient faire, seroit de faire réduire ce qui a été donné à la soeur, tant par le Contrat de marizge, que depuis son mariage, sur le pied de son mariage avenant, dans les successions de pere & mere, ce qui leur est permis, quand même les pere & mere auroient fait consentir les freres aux donations ; Arrests du même Parlement, des Fevrier 165a, & 12 Fevrier 167r.

Il ne seroit pas permis aux pere & mere, ou au pere & à la mere, aprés avoir marié ou doté leurs filles, de les réserver gratuitement & par un nouvel acte à partager en leur succession avec leurs filles ; Arrest du mmême Parlement, du 2.

May 1651. cela ne se peut faire que par le Contrat de mariage.

Si donc une fille avoit été mariée par ses pere & mere, ou par son pere ou par sa mère, sans lui avoir rien donné ni promis, elle n’aura rien dans leurs successions, & elle ne pourra demander ni mariage avenant, ni legitime, ni aucune autre chose à ses freres, quoiqu’héritiers des pere & mere, pas même des alimens, tous les biens des successions des pere & mere appartiendront aux freres mais si on lui avoit promis quelque chose en dot, elle ne pourroit demander à ses treres que ce qu’on lui a promis.

Et si d’ailleurs aucune chose lui a été promise en mariage, ceux qui sont promis o & leurs boirs, sont tenus le payer, encore qu’ils ne fussent tenus la doter.

Ces paroises doivent s’entendre des donations qui seroient faites en faveur de mariage à une fille par un étranger de la famille, où autre parent qui n’étoit point tenu de la doter, une pareille donation seroit valabie, & le donateur ou les heritiers seroient tenus de payer la somme promise en dot, ou livrer l’héritage ou autre immeuble promis, pourvû que cette donation eût été insinuée, & quelle n’excedût pas le tiers des biens du donateur.


ARTICLE CCLIII.

F Ille mariée ne peut rien demander à l’héritage de ses antecesseurs, hors ce que les hoirs mâles lui donneront & octroïeront à son mariage.

Cet article décide une difficulté qui pouvoit arriver, sçavoir si une fille ayant été mariée par ses freres, pouvoit demander quelque chose dans les successions de ses aneêtres, comme ayeul ou ayeule ascendans, & cet article dit que n’n 5 & qu’elle pourroit seulement demander à ses freres ce qu’ils fui ont promis & octroyé en dot par son Contrat de mariage, sans pouvoir rien prétendre dans les biens de ses ancêtres, encore bien que par son Contrat de mariage elle n’eur pas renoncé à leurs successions ; car il faut raisonner des successions des ancétres des filles, comme des successions de leurs pere & mère.

Il faut ici remarquer que tour ce qui est donné ou premis par les freres à leurs soeurs, leur est propre, & que leur héritier aux propres y succede, & non l’héritier aux acquêts ; & même qu’une rente acquise des deniers doraux d’une fille, est un propre en sa succession, & non un acquêt, pourvû que le Contrat porte que l’acquisition a été faite des deniers provenans de la dot de la seur mariée par son frère.


ARTICLE CCLIV.

S I pere & mere ont donné à leurs filles, soit en faveur de mariage ou autrement, héritages excédans le tiers de leur bien, les enfans le peuvent révoquer dans l’an & jour du déces de leursdits pere & mere, où dans l’an & jour de leur majorité, & se doit faire l’estimation dudit tiers, eû égard aux biens que le donateur possedoit lorsde ladite donation ; & où la donation seroit faite du tiers des biens présens & à venir, l’estimation dudit tiers se fera eû égard aux biens que le donateur à laissez lors de son déces ;

Les pere & mere ou le pere ou la mere, ne peuvent avantager toutes leurs filles, soit en faveur de mariage ou autrement, que du tiers de leurs biens meubles & immeubles, au préjudice des freres, héritiers des pere & mere ou du pe-re ou de la mere, donateurs ; & s’ils donnent au-de-là du tiers, la donation est sujette à réduction au tiers, sans néanmoins être nulle ; car aprés la réduction elle subsistera pour le tiers ; & encore faut-il que les freres pour pouvoir faire ordonner cette réduction se pourvoyent contre leurs soeurs majeures, dans l’an & jour du décés des pere & mere, & si eiles sont mineures, dans l’an & jour de leur majorité, qui est vingt ans accomplis ; après lequel tems les freres seroient non recevables en leur demande, & la donation subsisteroit en son entier, à moins qu’il n’y eût des nullitez, auquel cas la donation tomberoit en son entier.

Une fille pour éviter la demande de son frère en réduction, ne seroit pas recevable à demander à venir en partage des biens des pere & mere, donateurs, il faut qu’elle soustre la réduction de la donation au tiers des biens du donateur.

Si un pere n’ayant que des filLes leur avoit donné tous ses biens, soit en faveut de mariage ou autrement, & que depuis la donation ce pere se remariâ : & qu’il eût des enfans mâles, la donation sera sujerte à la réduction au tiers des biens du donateur, bien entendu si les freres nez du nouveau mariage se pourvoyent en réduction dans le tems marqué par la Coutume ; mais si ces nouveaux enfans n’étoient que des filles, elles auroient nonobstant la donation une portion égale à leurs freres dans la succession du pere commun, parce qu’en ce cas les filles seroient héritières de leur pere, & qu’il n’est pas permis d’avantager un de ses héritiers plus que l’autre.

Le Tuteur des freres pourroit en leur nom intenter l’action en réduction de la donation faite à la soeur, sans attendre la majorité de ses mineurs.

La présence & la sigmature des freres au Contrat de mariage de leurs soeurs, ne pourroit pas les empécher de demander la réduction des donations faites par les pere & mère à leurs filles par leur Contrat de mariage & en faveur de mariage ; Arrest du Parlement de Normandie, du 14. Mars 1633.

Il ne suffit pas aux frères de se pourvoir en réduction de la donation dans l’an & jour du décés du pere ou de la mere, s’ils sont majeurs, ou dans l’an & jour de leur majorité, s’ils sont mineurs au tems de la mort du donateur ; il faut en outre qu’ils ayent fait faire inventaire des meubles & titres de la succeision de leurs pere, mere ou autres ascendans, auquel inventaire les freres doivent appeile r leurs soeurs ou leurs maris, sans quoi ils ne seroient pas recevables en leur demande en réduction de la donation & de la dot de leurs soeurs ; art. 48. du Reglement de 1666.

Le frère nonobstant l’aliénation faite par sa seur & son beaufrere, des héritages ou autres immeubles à eux donnez en mariage par les pere & mere, peut agir en réduction de la donation si elle excede le tiers des biens du donateur ; & s’il réussit, il pourra déposseder l’acquereur des héritages.

Les soeurs dont la dot a été réduite au tiers, doivent les fruits & revenus des héritages & autres immeubles qui ont excedé le tiers qui leur est resté, du jour du décës des pere & mère ; mais il ne seroit point dû d’interêts des deniers qui auroient composé la dot des soeurs, pas même du jour de la demande en réduetion, ces deniers dotaux seroient en ce cas stériles.

Pour parvenir à la réduction, il faut faire une estimation des biens ; & cette estimation doit être faite du tiers de tous les biens tant meubles qu’imme ubles du donateur, eû égard aux biens que le donateur possedait lors de la donation, à moins que la donation n’eût été faite du tiers des biens présens & à venir, auquel cas l’estimation du tiers de tous les biens sera faite, eû égard aux biens que le donateur avoit au jour de son déces ; on réduira par cette estimation la donation au tiers de tous les biens, lequel sera donné à toutes les soeurs, ou s’ils onr le tiers par leurs mains, elles seront conservées dans la proprieté & possession commune d’icelui.

Une pareille estimation ne se peut faire que sur le vû & le dépouillement de P’inventaire fait aprés le déces des pere & mère, & des pieces & titres y conrenus ; ce seront des parens ou amis, des experts & gens à ce connoissans, qui pourroient faire une estimation de cette qualité, La réduction des donations faites par les pere & mere à leurs filles en faveur de mariage, ne peut être demandée par les freres, lorsque les filles ont été réservées à partage par leur Contrat de mariage ; car alors elles ont une part égale à leurs freres dans les meubles & immeubles roturiers, soit qu’ils soient ituez en bourgage ou hors bourgage : mais à l’égard des Fiefs & biens nobles, les filles, quoique réservées à partage, n’y prennent rien tant qu’il y a des freres & descendans des freres.

Les freres ne peuvent demander la réduction des donations par eux faites à leurs soeurs, sous prêtexte qu’ils auroient donné en dot plus que leur tiers dans les successions des pere & mere, d’autant qu’il ne leur est pas permis de venir contre leur propre fait, & qu’ils ont pû donner à leurs soeurs plus qu’il ne leur appartenoit dans les successions des pere & mère ; Arrest du même Parlement, du 1t Aoust 1612. Si cependant le frere qui auroit doté sa soeur, étoit mineur lors de la dot promise, & qu’il fût laisé considérablement par la donation, ou que la donation eût été faite par Gol, fraude, force ou violence, il pourroit revenir en réduction de la donation.


ARTICLE CCLV.

E T s’ils ont promis en mariage de leurs filles, or, argent ou autres meubles qui soient encore dûs lors de leur décès, les enfans ne seront tenus les payer après la mort desdits pere & mère, sinon jusqu’à concurrence du tiers de la succession, tant en meubles qu’im-meubles.

Une donation faite par pere ou mère à leur fille en faveur de mariage, en deniers comptans & payez, ou en meubles livrez du vivant dés pere & mere, ne peut être révoquée ni réduite au tiers du bien du donateur sur la poursuire des freres, parce que toutes choses ont été confommées du vivant des pere & mère, ou du pere ou de la mere, qui auroit doté la fille, & payé & livré la dot promisse en deniers comptans ou en meubles : mais si les deniers ou les meubles pro-mis en dot par les pere & mère à leurs filles, sont encore dus & non livrez au jour du décës des pere & mère, les freres pourront faire réduire la dot au tiers des biens meubles & immeubles de la succession de celui qui adoté, comme si la dot avoit été promise en des héritages & autres immeubles.

L’estimation des biens qui doit être faite dans le cas de deniers ou de meubles promis en dot par pere & mere où par pere ou mêre à leurs filles, & non payez ni livrez au jour du décés des pere & mere ou du pere ou de la mere, qui ont promis la dot, sera faite de tous les biens meubles & immeubles, eû égûrd aux biens du donateur au tems de son déces, & non au jour de la donation ; pour les deniers promis en dot, être ensuite payez, & les meubles promis être livrez s’ils sont en essence, sinon la juste valeur aux filles, jusqu’à concurrence du tiers de tous tes biens de la succession, rant meubles qu’immeubles ; Ar-rests du Parlement de Roüen, des 25 Aoust 1664. & 4. May 1863.

La demande en réduction de la dot des filles en deniers non payez ou en meubles non livrez au jour du décës des pere & mere qui ont promis une dot de cette nature, est perpétuelle, & elle dure tant que les soeurs ne demandent point à leurs frères le payement des deniers ou la livraison des meubles, à la difference de la demande en réduction de la dot des filles en héritages ou autres im-meubles, qui doit être formée dans l’an & jour du déces de celui qui a doté, si les freres sont lors majeurs, ou dans l’an & jour de leur majorité, s’ils sont mineurs au tems de la mort du donateur ; Arrest du Parlementide Roüen, du 29 Mars 1645.


ARTICLE CCLVI.

L Es filles n’ayant été mariées du vivant de leurs pere & mere, pourront demander part audit tiers.

Par la raison que toutes les filles, soit celles qui ont été mariées du vivant des pere & mère, soit celles qui n’ont été mariées que depuis la mort de leurs pere & mere, ou qui sont restées filles, n’ont toutes ensemble qu’un tiers dans les successions des pere & mére communs, s’il y a des ireres ou descendans des freres ; ce tiers doir être partagé entre elles par égales portions & par têtes 3 & les filles qui n’ont point été mariées du vivant des pere & mere, ont non seulement part aux biens des pere & mère, mais encore elles peuvent demander leur part & contingent dans ce tiers à leurs soeurs mariées & dotées, si les freres ne faisoient pas leurs poursuites & diligences pour faire réduire les dotes des soeurs mariées au tiers des biens des successions des pere & mere, jusques-là que les freres feroient garants & responsables envers leurs soeurs non mariées, de leurs parrs & portions dans le tiers que les soeurs mariées & dotées auroient aliéné ou hypothequé, sous pretexte que les pere & mere en les mariant, leur avoient promis ou donné en dot le tiers de leurs biens en un mot, la réduction du tiers de toute la succession des pere & mere, promis & donné par les pere & mère à une ou plusieurs de leurs filles en les ma-riant, profite aux autres filles non mariées du vivant des pere & mere, & ces filles ont leur part dans ce tiers.


ARTICLE CCLVII.

F Ille mariée, avenant que ses soeurs soient recuës à partage, fait part au profit de ses freres pour autant qu’il lui en est pû appartenir au tiers dû aux filles pour leur mariage, encore qu’il ne lui fût rien dû lors du décès de ses pere & mere.

Une fille peut venir à partage avec ses freres aux successions des pere & mere communs, en deux manieres, l’une si par le Contrat de mariage de cette fille les pere & mere l’ont réservée à partage ; l’autre, si les freres ont été condamnez à sui donner partage comme à ses autres soeurs, s’il y en a.

Dans le cas qu’une fille ou quelqu’autres filles ait été réservée par son Contrat de mariage ou autre acte aux successions des pere & mere, & qu’elle vien-nent & soit reçuë à partage, la part & portion que la fiile mariée avoit eû dans le tiers des biens des pere & mere pour sa legirime, profite à ses frères, sans que les autres soeurs reservées à partage y prennent rien, quoique la dot promise par les pere & mère à la fille, mariée & non réservée à partase, lui eut été entièrement payée du vivant des pere & mere, & qu’il n’en fût plus rien dû au jour du déces des pere & mère, desorte que dans le partage des biens de la succession, il faudra comprendre au profit du frère la part & portion que les soeurs réservées à partage, auroient eû dans le tiers de tous les biens des pere & mère.

C’est le frere qui profite de la part des filles mariées par les pere & mère, mais qui n’ont poinr été réservées aux successions, & n’estrobligé de donner à les soeurs réservées à partage, que ce qu’elles auroient eû dans la succeision, si les autres soeurs qui n’ont point été réservées à partage, avoient eû leurs parts & & portions dans le tiers des biens ; & c’est ici un avantage que la Coûtume a voulu faire aux freres sur leurs soeurs réservées par les pere & mére communs à partage.

Les filles admises à la succession des pere & mere & autres ascendans, partagent les meubles & les autres immeubles roturiers également avec leurs freres ; art. 49. & 51. du Reglement de ré66.

La fille mariée & non réservée à partage ne fait point part au profit de ses freres, & les freres ne peuvent prositer de cet avantage qu’à condition de rapporter par eux à la succession, à laquelle les autres filles ont été réservées à partage, ce que les soeurs mariées & non réservées à partage ont eû en dot, eû égard à ce qu’elles auroient eû dans le tiers des biens pour leur legitime ou mariace avenant, de la même manière que les soeurs réservées à parrage sont tenuës de rapporter à la succession à laquelle elles viennent, comme héritieres avec leurs freres, ce qui leur a été donné en dot par leurs pere & mere, ou moins prendre, & ce rapport augmente la masse & les forces de la succession.

La soeur mise en Religion & dotée par ses pere & mère, ne fait point part au profit de ses freres, pour autant qu’elle auroit eu au tiers du mariage avenant des filles, pour pouvoir par les freres précompter cette dot aux soeurs reservées à partage, ou aux autres soeurs non mariées, dans le tiers des biens du ma-riage avenant où legitime, parce que la Coûtume ne parle que des filles mariées, & non des filles Religieuses ; Arrests du Parlement de Normandie, des 4 Mars 1638, 9 Mars 1646 & 30 Juillet 1651.

Les deniers payez pour l’entrée d’une fille en Religion, laquelle s’est faire Religieuse depuis la mort des pere & mêre, doivent être pris sur les meubles qui lui appartiennent, & sur ce qui lui revient dans son mariage avenant ; Arrest du même Parlement, du 25 May 1672.

La part d’une fille Religieuse, qui revient à ses soeurs héritières de la mere commune, doit contribuer aux frais & à la dot de son entrée en Religion, & pour laquelle dot le pere commun avoit conslitué sur lui une rente au profit du Conyent ou Monastere ; Arrest du même Parlement, du 3o Juin 1655. Cependant si les frais d’entrée en Religion & la dot de la Religieuse, avoient été payez par le pere de son vivant, même de son argent, les biens de la mere n’y contribuéroient point, ce seroit une chose consommée, pour raison de laquelle les hicritiers du pere n’auroient point de repetition contre les héritiers de la mère.

a l’égard des filles qui n’ont point été mariées, ou qui ne se sont point sait Religieuses du vivant des pere & mere, & ausquelles les pere & mere n’on t fait aucun avantage, venant à déceder apreés la mort des pere & mèré, ce sont leurs freres qui prositent seuls de leur part & portion dans le mariage avenant, & non leurs soeurs qui les survivent, mariées ou non mariées : Mais si une fille ne prenoit rien dans le mariage avenant à cause qu’elle a été justement exhéredée par ses pere & mere, elle ne feroit point part à ses freres dans le maria-ge avenant, mais à ses soeurs ; ensorte que les soeurs non exheredées auroient le mariage avenant, ou le tiers des biens en entier, comme si leur seur exhéredée n’avoit jamais été in rerum natura ; il faut dire la même chose des fil-les qui renoncent purement & simplement aux successions des pere & mère.


ARTICLE CCLVIII.

L E pere peut en mariant ses filles les reserver à succession, & de leur mere pareillement.

Il y a cette difference entre les pere & la mere par rapport à la disposition de cet Article, que le pere ayant des enfans mâles & des filles, peut non seulement en mariant ses filles les reserver à sa succession, mais encore qu’il peut les réserver à la succession de leur mere, même à son insçû, sans sa participation & consentement, & contre sa volonté & consentement, mais il faut pour cela que ces filles soient enfans de l’un & de l’autre, & de leur mariage ; au lieu que la mere ne peut en mariant ses filles les réserver qu’à sa succession, & non à celle de son mari, père de ses filles ; cette même faculté appartient à l’ayeul ou ayeule, La réserve dont il est parlé dans cet Article, se peut faire non seulement par Contrat de muriage, mais encore par tout autre Acte, soit entre vifs ou par Testament, pourvu que ce soit avant ou lors du mariage des filles, & en termes. précis & formels ; Arrêts du Parlement de Roüen des ; Decembre 164x, & A8 Ianvier 1653.

Les pere & mere peuvent limiter & fixer le mariage de leurs filles en meubles ou en héritages, ou les :. server à partage.

Quoiqu’il foit permis aux pere & mère d’angmenter la dot de leurs filles apres les avoir inariées, le tout néanmoins jusques à concûrrence de leur mariage avenant ou leur légitime ; cependant ils ne peuvenr les réserver à leurs successions apres & depuis le mariage des filles, quand bien même la réserve auroit été faite lors du second ou autre mariage des filles, ou que les filles n’auroient rien eù en dot lors de leur premier mariage du chef de leurs pere & mêre ; Arrét du même Parlement du aS Janvier 1631.

Si néanmoins le pere seul sans la mere, ou la mere feule sans le pere, avoit consenti & parlé au Contrat de mariage de la fille mariée, celui des deux qui n’y auroit ni consenti ni parlé, pourroit lors du second mariage de sa fille, la doter où la réserver à sa succession ; Arrêt du même Parlement du 17 Juillet 1é29.

Un second mari, en mariant la fille de sa femme, sortie du premier mariage, ne peut réserver cette fille à la succession de sa mere, parce que ce mari est une personne étrangere à la succession de sa femme, de laquelle succession il ne peut disposer quoiqu’en faveur de la fille de cette femme ; d’autant qu’un tel avantage seroit fait au préjudice des frères de cette fille.

La réserve faite par pere ou mêre de leur fille à leurs successions, n’empéche point que les pere & mere ne soient les maîtres absolus de leurs biens, & qu’ils n’en puissent librement disposer ; sauf à la fille reservée à partage, à prendre la succession en l’état qu’elle se trouve au jour du décës des pere & mere, ou de s’en tenir à la légitime.

Il n’est pas permis aux pere & mere, au lieu de reserver leurs fiiles à leurs successions avant ou lors de leur mariage, d’arbitrer le mariage de leurs filles, & s’ils l’ont fait, les filles dont le mariâge aura été arbitré par les pere & mère, ne sont point tenuës, non plus que leurs freres, de s’en tenir à cette liquidation & estimation, les uns & les autres seront en droit de faire mettre la liqui-dation au tiers de tous les biens des pere & mére.

Les filles reservées à partage peuvent renoncer à cette reserve, & s’en tenir à ce qui leur a été donné ou promis en mariage par les pere & mère, sauf aux freres à faire réduire la dot, si elle excede le tiers des biens des pere & mère.

Si au temps que la réserve a été faite, le pere ou la mere n’avoit que des filles, & que d’un second mariage depuis contracté par le pere ou la mere, il survient des enfans mâles, : la survenance de ces enfans n’empéchera pas que la reserve n’ait lieu ; & les filles du premier lit reservées par leur Contrat de mariage aux Iuecessions du pere ou de la mere qui a convolé en secondes noces, seront admises au partage avec les freres du second lit, sans que les freres puissent prétendre que leurs soeurs du premier lit doivent avoir seulement un mariage avenant ; Arrest du même Parlement, du Mars 1610.

La réserve faite par un pere ou une mere en faveur de leurs filles à leurs sueCessions, au cas que le pere ou la mère décede sans enfans mâles, l’enfant mâle. qui sera né de leur mariage, venant à déceder avant le pere ou la mère, la reserve à partage aura lieu, & les filles ainsi reservées partageront entre elles toute la succession, à l’exclusion des filles nées du mariage de cet enfant mâle en sorte que dans ce cas, les tantes excluroient les niéces, quoique sorties d’un mâle ; Arrest du même Parlement, du 13 Mars 154.

Il faut que la réserve à partage soit formelle & expresse, pour lui donner effet ; Arrest du même Parlement, du s’Décembre 1644.

La réserve à partage ne lie point les mains du pere ou de la mêre qui l’a faite, celui ou celle qui a fait une pareille disposition pour ses filles, peut vendre, aliener, engager & hypotéquer ses biens ; car une telle reserve ne donne qu’une efpèrance aux filles, au profit desquelles la reserve est faite, dans les biens qui se trouveront au jour du décés du pere & de la mere, qui auroit fait la reserve, ce qui fait connoître que la reserve à partage ne vaut pas la promesse de garder la succession ; le pere ou la mère nonobstant cette réserve à partage, pourroit disposer de ses biens à titre gratuit ; parce qu’en un mot, une pareille reserve ne met les filles reservées à partage, que dans le droit de pouvoir succeder avec leurs freres aux biens que le pere ou la mere, qui aura fait la reserve aura, au jour de son décés, habilité à succeder : que les filles n’avoient point par la Coutume, à cause de leur fexe, & qu’elles n’ont trouvé que dans la disposition du pere ou de la mere, au lieu que la promesse de garder sa succession, lie les mains de celui qui l’a faite, du moins par rapport aux dispositions gratuites.


ARTICLE CCLIX.

L A mere aussi après le décés de son mari, peut en mariant sa fille, la réserver à sa succession, mais elle, ni pareillement le Tuteur, ne peuvent bailler part à ladite fille, ni la reserver à la succession de son feu pere, ains seulement lui peuvent bailler mariage avenant, par l’avis des parens, à prendre sur ladite succession.

Une mere en mariant sa fille aprés la mort de son mari, peut seulement la reserver à sa succession, sans pouvoir lui donner part dans la succession échûë de son mari, à titre d’héritière & de copartageante avec ses freres ; & même si la mere vouloit faire cette reserve du vivant de son mari, ce ne pourroit être que du consentement de son mari ; cependant si cette mére avoit convolé en ssecondes nôces, elle n’auroit pas besoin du consentement de son second mari, pour faire une réserve à partage dans sa fuccession en faveur de se fille du premier lit, parce qu’il est à présumer que ce second mari esperant avoir des enfans de son mariage, ou pour autres raisons, ne consentiroit pas que sa semme reservêt sa fille du premier lit à sa succession.

La mere, où le Tuteur d’une fille, s’il y en a un, ne peut bailler ni donner part à cette fille d’elle & de son défunt mary, dans la succession de son défunt pere, comme héririère de son père, si elie & des frères, sa mere, où son Tuteur, peut seulement lui donner matiage avenant dans les biens de son défunt pere, sur le pied du tiers des biens, & suivant le nombre des filles, & que le tout sera arbitré par l’avis par écrit des parens communs de tous les enfans tant freres que soeurs.

Il faut faire ici deux observations, l’une que les reserves des filles à parrage, n’ont lieu que pour les successions de pere & de mere, ou autres ascen-dans ; de maniere que les pere & mere ou autres ascendans, ne peuvent reserver leurs filles ou petites filles à une succession collaterale future ; l’autre, que les freres n’ont pas le pouvoir de reserver leurs soeurs à partage dans les succestions des pere & mere, ou autres ascendans, ni les recevoir à partage dans ces successions, contre la volonté de leurs soeurs ; cela dépendroit des soeurs, & les soeurs ont la tiberté de refuser cette reserve & ce partage.

Les freres puinez ont l’avantage du choix des lots sur leurs soeurs, quoique reservées à partage.


ARTICLE CCLX.

F Ille reservée à la succession de ses pere & mere, doit rapporter ce qui lui a été donné ou avancé par celui à la succession duquel elle prend part, ou moins prendre.

Puisque la fille reservée à partage dans les successions de ses pere & mere nvéc ses freres, vient aux successions comme cohéritière avec ses freres, il est juste qu’elle rapporte aux successions, lors du partage, ce qui lui a été donné par Contrat de mariage, ou autrement, ou par avancement d’hoirie, ou de suëcession par le pere, ou la mere, ou autre ascendant, les biens duquel il s’agit de partager ou moins prendre, & même elle sera tenuë de rapporter à la masse de la succession, non seulement les principaux des sommes qu’elle aura reçûës, ou les héritages ou autres immeubles, s’ils sont en essence, mais encore les interêts & fruits du jour de l’ouverture de la succession ; Arrest du Parlement de Normandie, du 2 Mars 1657 : à la difference des filles mariées en argent, meubles ou autres effets mobiliers, & non reservées à partage, lesquelles par la raison qu’elles ne sont point héritieres, que le rapport n’a lieu qu’entre Cohéritiers, & qu’elles ne viennent point à la succession de leur pere & mere avec leurs freres, elles ne sont tenuées à aucun rapport.

La fille reservée à la succession de ses pere & mere, est tellement tenué de rapporter ce qu’elle a reçûë en avancement de succession par son Contrat de maria-ge ou autrement, qu’elle ne peut s’en tenir à ce qui lui a été donné, pas même renoncer à la succession à laquelle elle a été réservée ; autrement les pere & mere pourroient faire des avantages indirects à une fille au préjudice de leurs autres enfans : cependant si elles déclaroient qu’elles aimoient mieux qu’on reglât leur dot sur le pied de leur mariage avenant, aux offres de rapporter l’ex-cedant, s’il y en avoit, & d’abandonner à leurs freres la succession entière du pere où de la mere, ou autre ascendant qui avoit fait en leur faveur la reserve au partage de ses biens, comme s’il n’y avoit point eû d’avancement de succession ni de réserve à partage, il seroit juste d’écouter & suivre leur déclaration ; car pourquoi forcer une fille à être heritiere sous prétexre d’une réserve à partage, pendant qu’elle ne demande que son mariage avenant dans les successions de ses pere & mere, ou autre ascendant qui avoit fait cette réserve, avec offres de tenir compte & déduire tout ce qui lui a été donné & avancé, soit en faveur de mariage ou autrement ; Cette diffieulté ne pourroit tout au plus être faite, que dans le cas que les filles ont été mariées comme heritieres & reservées à partage avec leurs freres aux successions des pere, mere, & autres as-cendans ; parce que la qualité d’heritieres, qui leur a été donnée, & la reserve à partage faite en leur faveur, ne leur permet pas de renoncer à la succession & à la reserve à partage, pour s’en tenir à ce qui leur a été donné en mariage & en avancement d’hoirie, mais quant aux filles qui n’ont point été mariées comme heritieres ni reservées à partage avec leurs freres, qui de droit & sans cette disposition les excluoient, elles ne sont point obligées de se tenir à leur dons fauf aux freres à le faire réduire au tiers des biens de la succession de laquelle il s’agit.

Une fille à laquelle les pere & mere ont fait don en la mariant, & dont les freres viennent à mourir, ses soeurs héritières de leurs pere & mere, ne peuvent obliger leurs soeurs à rapporter son don, lorsqu’elle déclare qu’elle se tient à son don, & qu’elle renonce à la succession de ses pere & mère, sauf à ses soeurs à demander contre cette autre soeur, sur les héritages & autres immeubles à elle donnez par son Contrat de mariage, leur légitime ou mariage avenant, ou un supplement, si les autres biens de la succession ne suffisoient pas pour les remplir de leur mariage avenant ou légitime.


ARTICLE CCLXI.

A Près le décès du pere, les filles demeurent en la garde du fils aîné, & si lors elles ont atteint l’âge de vingt ans & demandent partage, les freres les peuvent garder par an & jour pour les marier convenablement, & les pourvoir de mariage avenant.

Ce n’est pas assez que le pere soit mort, pour que les filles demeurent en la garde de leur srere ainé, il faut en outre que leur mere foit aussi morte & qu’elles ne foient point mariées ; car si elles sont filles, & que leur mere soit encore vivante, elles seront en la garde de ieur mere, & non de leur frère ainé ; & si elles sont mariées, eiles demeureront avec leurs maris, : De plus, dans le cas que les filles, soit nobles ou roturieres, sont en la garde de leur frère ainé, cette garde cesse à leur majorité qui est à vingt ans accomplis, à condition néanmoins que le frere ainé ou les autres freres, pourront les garder encore un an & un jour depuis leur majorité, pendant lequel tems elles sseront en droit de demander leur mariage avenant à leurs freres, & même on pourra les pourvoir par mariage, s’il se trouve des parris convenables pour la naissance & le bien, sans artendre la fin de cette année & un jour ; le tout méanmoins par l’avis des parens, sans que les freres puissent les rejetter sous prétexre que cet Article porte que les filles quoique majeure, & qu’elles demandent leur mariage avenant à leurs freres, les freres pourront encore les garder pendant un an & un jour, cela ne pourroit pas autoriser les freres à ne vouloir point écouter un tel mariage, soit par des raisons d’interét ou autres, les filles en ce cas seroient en droit de se pourvoir en Iustice, pour sur l’avis des parens faire condamner le procedé des freres, Le mot de Partage, dont se sert notte article, est impropre, parce que les filles qui n’ont point été mariées du vivant de leurs pere & mere ne viennent point à partage avec leurs freres, elles ne peuvent demander que mariage avenant ; à moins qu’on ne dise que la liquidation du mariage avenant ne soit une espèce de partage, dont l’opération est de donner le tiers de tous les biens à toutes les filles pour leur mariage avenant, & qu’elles prennent comme héritieres légitimaires, & non comme créancieres,


ARTICLE CCLXII.

M Ariage avenant doit être estimé par les parens eû égard aux biens & charges des successions des pere & mere, ayeul ou ayeule ou autres ascendans en ligne directe tant seulement, & non des successions échuës d’ailleurs aux freres ; & doivent ceux qui feront ladite estimation, faire ensorte que la maison demeure en son entier tant qu’il sera possible.

Cet article préscrit la manière d’estimer & liquider le mariage avenant des filles non mariées du vivant de leurs pere & mère. 1. Cette estimation & liquidation doivent être faites par les parens communs des freres & des soeurs, & dont les freres & les soeurs conviendront à l’amiable, ou en Justice, & quelquefois ie Juge en nomme d’office ; mais faut-il toujours que les parens soient en nombre égal de part & d’autre ; par exemple, un pour tous les freres, & un pour toutes les soeurs, & en cas d’avis differens, on conviendra & on nommera un troisième parent. 2.. Le mariage avenant doit être estimé eû égard aux biens & aux charges des successions sujetes au mariage avenant, & non par rapport à la condition. & à la qualité des filles. 3. Le mariage avenant ne peut jamais exceder le tiers des biens des successions sujetes au mariage avenant, déduction faire des dettes & charges des successions, ni pareillement exceder la valeur du lot de celui des freres, qui a eù le moins dans la succession, 4. Dans l’estimation & liquidation du mariage avenant, les meubles & héritages situez en bourgages, ne sont considèrez que comme les autres biens situez hors bourgages ; art. 51. du Reglement de 1666.

SS. La liquidation du mariage avenant doit être faite sur le pied des revenus des héritages, sans mettre en consideration les bois de haute futaye & les bûtimens, sinon qu’en tant qu’ils augmentent le revenu ; c’est en un mot sur la va-leur intrinseque, & non sur la valeur extrinseque ; quant aux terres & héritages nobles, ils ne seront estimez qu’au denier vingt ; art 25. du Reglement de 2666. 6S, Les biens doivent être estimez selon leur valeur au tems de l’ouverture de la succession, 7o. Le mariage avenant se prend sur tous les biens de la succession, meubles ou immeubles, féodaux, nobles, roturiers, en bourgage, en Franc-aleu, Offices, rente fonciere ou hypothéque, maisons & autres biens de la suecesiion : Mais si dans la succession il n’y avoit point d’autres immeubles, qu’un ou plusieurs Fiefs pris par les freres ainez, par précipur & droit d’ainesse, & que les freres cadets soient réduits à prendre le tiers des Fiefs en usufruit pour leur portion héreditaire ; comme en Caux, le frète ainé, & les autres qui ont pris des Fiefs, sont tenus de contribuer au payement du mariage avenant à proportion de la valeur des Fiefs, sans néanmoins que ces Fiels puissent entrer dans l’estimation du mariage avenant ; Arrests du Parlement de Roüen, des 25 Mars 1642, & 30 Juin 1668. 85. Le tiers des cadets peut à la vériré être à vie, comme si le fief que le frere ainé prend par préciput & droit d’ainesse, & les autres biens de la succession, sont situez en Caux ; mais à l’égard du mariage avenant, les filles l’ont toûjours en propriété, en quelque endroit que les biens soient situez, même en Caux, au payement duquel chaque frere contribuëra pro modo emolumenti. 90, Le frère ainé a la faculté de payer le mariage avenant en rentes, ou en héritages, encore bien que le mariage avenant ait été arbitré à une certaine somme de deniers. 10O. Si dans la succession il n’y a qu’un fief & point de rotures, il faudra restimer le mariage avenant en argent & deniers comptans ; si mieux n’aiment les soeurs que leur frere constituë sur lui une rente en leur faveur, & à leur profit, du principal de la somme à laquelle le mariage avenant aura été estimé, mais si dans la succession il y a des rotures, il sera permis au frère de se libe rer du mariage avenant en roturess jusqu’à duë concurrence & sur le pied qu’il aura été estimé, eu égard à tous les biens de la succession. 11o. Le mariage avenant se prend dans chaque succession des pere & mere, ayeul, ayeule, ou autre ascendant.

I20. Le mariage avenant a lieu, tant entre filles nobles, qu’entre filles roturieres. 13U. Le mariage avenant se prend seulement sur les successions en ligne directe, & non sur les successions collaterales, ou autres successions qui pourroient être échûës d’ailleurs aux frères ; mais quant aux successions en ligne directe, le mariage avenant s’y prend sur toute les successions des ascendans, bèré, mère, ayeul, ayeule & autres. 148. La liquidation du mariage avenant, doit être faite de manière, que le principal manoire demeure en son entier si faire fe peut.

I56. En attendant le payement du mariage avenant, le frère en doit l’interét. à ses soeurs au denier vingt jusqu’au jour de leur mariage, & depuis leur matiage, au denier du Prince, qui est en Normandie le denier dix-uit. 167. Si l’estimation du mariage avenant se fait en Justice reglée, elle sera faite aux frais communs des frères & des soeurs ; Arrest du même Parlement du 14 Mars 1éa8, mais toûjours par les parens de la famille, qui seront à cet esfet convenus entre les parties, où nommez par le Juge, quand même la liquidation du mariage avenant seroit faite avec l’acquereur du frere ou des freres, & non par des experts ; Arrest du même Parlement du a8 Avril 1667. Cependant, s’il ne se trouvoit point de parens, ou assez connoissans, ou qu’ils resusassent de faire cette estimation, en ce cas il faudroit convenir d’experts à l’amiable, ou en Justice reglée. 17o. Lorsqu’il n’y a que des rotures, des rentes & des meubles dans la succesion, on fait une masse du tout, & on en donne le tiers à toutes les soeurs, si elles sont en plus grand nombre que les frères ; mais s’il y a plus de freres que de soeurs, on donnera aux soeurs une part égale à chaque frère. 180. S’il se rencontre un Fief & des rotures dans la succession, & que ces rotures soient prises par les puinez au lieu de la provision à vie sur ce Tief, comme en Caux, le mariage avenant sera reglé pareil à la portion qui reste à chaque frère, aprés la contribution aux mariages avenans de ses soeurs, levée & déduire. 1o0. Si tour le bien de la succession consiste en un Fief, le tiers du Fief fera estimé au denier vingt, & chaque soeur aura en propriété autant que chaque frere puiné aura pour sa provision à vie, lorsque les freres puinez & les soeurs font en nombre égal.

Finalement les soeurs qui prennent leur mariage avenant, doivent supportez le tiers des dettes de la succession, puisqu’elles prennent le tiers des biens pour leur mariage avenant, & comme héritieres pour ce tiers.


ARTICLE CCLXIII.

L E Fisc, ou autre créancier subrogé au droit des freres ou l’un d’eux, doit bailler partage aux filles, & n’est reçû à leur bailler mariage avenant.

Le Fief, qui est aux droits des freres, comme par confiscation ou autrement, ou leurs créanciers, n’ont pas, la faculté des steres, de pouvoir donner mariage avenant avenant aux filles qui n’ont point été mariées par les pere & mère ; dans ce cus, les filles sont admises à partage avec le File où les créanciers, sans même aucun préciput ni droit d’ainesse de la part du Fisc ou des Créanciers, pere que cette faculté n’appartenoit qu’aux freres personnellement, & à leurs heritiers du sang ; elle n’est pas même comnunicable à l’acquereur de tous les droits successifs & biens des freres, il ne pourroit obliger les soeurs de son cedant ou de ses cedans à prendre leur mariage avenant, ni prétendre qu’elles ne peuvent venir à partage avec lui de tous les biens de la succession ; Arrest du Parlement de Normandie, du 15 Novembre 1663. Il se fait dans ce cûs un rappel par la Coûtume, des filles à la succession, ce qui cependant dépend des filles ; car elles pourroient s’en tenir à leur mariage avenant, sans que le Fife ou les Créanciers qui seroient aux droits des freres, pussent les obliger à venir au partage des biens de la succession, pour y prendte leurs parts afférantes, aux charges de droit.

La saisie réelle de tous les biens du frere qui doit le mariage avenant de ses Ioeurs, & qui n’a point encore été liquidé ni fourni, faite pour les dettes du frere où pour celles des pere & mere, donne pareillement droit aux soeurs de demander partage dans les biens des succeisions, sans qu’elles puissent être contraintes à se tenir au mariage avenant ; Arrest du même Parlement, du premier Fevrier 162 4. mais si le frere, aprés la liquidation du matiage avenant, avoit donné des héritages en payement du mariage avenant à ses soeurs, & que dans la saisie réelle de ses biens, faite pour ses dettes personnelles, on y eût compris les Féritages donnez pour le mariage avenant, les soeurs n’auroient que la voye de l’opposition afin de distraire, pour demander que les héritages fussent disraits en esfence de la jaisie réelle à leur profit, & non la facuité dé demander partage des biens ; mais d’un autre côté on ne pourroit pas les obliger à être payez de la valeur des héritages sur le prix de l’adjudication à l’état ou ordte qui en seroit fait ; il faut qu’elles ayent leur mariage avenant en essence, & les mêmes héritages qu’ils avoient eu pour leur mariage avenant avant le decret des biens de leurs freres.

Si de deux freres l’un a vendu sa portion héreditaire, & l’autre ne l’a point venduë ; l’acquereur du frere qui a vendu sa portion hereditaire, ne sera pas obligé de donner partage aux soeurs ; mais si l’autre frère qui n’a point vendu sa portion heréditaire, leur fait offres : de leur donner mariage avenant, elles ne pourront refuser ces offres ; parce que le frere qui n’a point vendu ; conserve la faculté qu’il avoit de donner mariage avenant à ses soeurs, à l’acquereur de son frère ; Arrest du même Parlement, du 23 Iuillet 1643.

L’acquereur des parts & portions heréditaires des freres, lequel à cause de cette acquisition est obligé d’admettre les soeurs à partage, ne peut les contraindre à prendre les dernieres aliénations, ni même à faire les lots ; Arrest du mé-me Parlement, du y Avril 1644 ; autre chose seroit pour le tiers coûtumier, parce que le tiers coûtumier n’est dû aux enfans que comme créanciers du pere, au lieu que le tiers des Filles venantes à partage, elles y viennent comme hériticres.


ARTICLE CCLXIV.

L E frère après l’an & jour, ne peut plus differer le mariage de sa soeur, pourvû qu’il se presente personne idoine & convenable qui la demande ; & s’il est refusant d’y enteudre sans cause legitime, elle aura partage à la succession de ses pere & mere.

Cet article fait deux choses, l’une d’obliger le frere à ne plus differer aprés l’an & jour le mariage de sa leur, s’il se presente un parti propre, avantageux & convenable à la seur & à la famille ; l’autre de punir le frère de son refus injuste, & sans cause ni raison légitiie, de ne vouloir entendre & donner les mains à un tel mariage, en donnant à la seur la faculté de venir à partage de la succession de ses pere & pere, ou autre ascendant, ou de demander son mariage avenant à son frere, ce qui dépend d’elle ; mais si elle vient à partage, elle y viendra comme héritiere, & contribuëra aux dettes pro modo emolumentâ Or cet an & jour commence du jour de la majorité de la seeur, qui est de vingt ans accomplis ; l’avis des parens fait beaucoup dans ces oecasions, pour faire approuver le procedé du frere, où le faire condamner ; souvent un frere refuse sans cause de marier ses soeurs ; mais aussi d’un autre côté, il ne faut pas don-ner dans les empressemens des filles, qui s’imagine qu’elles ne seront pas asseztôt mariées ; c’est à quoi les parens duëment assemblez doivent examiner, & voir si le parti qui se presente est convenable & sortable, tant par rapport à la naissance, que par rapport aux biens.


ARTICLE CCLXV.

S I la soeur ne veut aecommoder son consentement selon l’avis de ses freres & de ses parens sans cause raisonnable, quelqu’âge qu’elle puisse par après atteindre, elle ne pourra demander partage, ains mariage avenant.

L’article précedent punit le refus injuste du frère de ne point vouloir entendre au mariage de sa seur apres l’an & jour de leur majorité, s’il se présente un parti convenable & avantageux ; & cet article punit la seur, qui ans juste cause ne voudroit pas prendre en mariage le parti que ses freres & ses parens lui proposent & présentent ; cette punition est que quelqu’âge qu’elle puiise dans la suite avoir, elle ne pourra demander à son frère d’être admise à partage ces successions, mais seulement son mariage avenant ; parce que ce n’est point par le fait de son frère qu’elle ne se marie point, mais par son propre fait, ainsi on ne peut rien imputer au frère, il a rempli ses obligations : cependant comme les mariages doivent être trés-libres, il ne faut pas contraindre une fille à prendre un parti qu’elle ne veut point ; mais qu’arrivera-t-il de là : Il arrivera que le frere est disculpé, & que la seur ne peurra en tout tems lui demander que mariage avenant, & rien autre chose, ni encore moins à venir de partage.

Uine fille dont les pere & mere seroient morts, ne seroit pas privée de son mariage avenant pour s’être mariée sans le consentement de ses frères & sans l’avis de ses parens, à quelqu’âge qu’elle se fût mariée, sauf au Tuteur & parens d attaquer le mariage s’il y a quelque chose à rédire.


ARTICLE CCLXVI.

L E mariage de la fille ne doit être differé pour la minorité de ses freres, ains sera mariée par le conseil du Tuteur & des prochains parens & amis, lesquels lui bailleront mariage avenant, sans qu’ils lui puissent bailler partage ; & au cas qu’ils l’eussent baillé, le fils venant en âge, le peut retirer en baillant mariage avenant.

Il ne seroit pas juste que la minorité des freres pût retarder le mariage de leurs soeurs, lorsqu’il se présente un parti sôrtable, convenable & avantageux dans ce cas, il faut s’adresser au Tuteur des freres & des filles & à leurs parens & amis communs, pour aviser sur le mariage proposé ; on prend ordinairement six parens paternels & six parens maternels, & à leur déffaut on a recours à des amis, sans cependant que le Tuteur, ni les parens & amis, en approuvant le mariage & y donnant les mains, puissent donner autre chose à la seur qui se marie, que son mariage avenant, & non l’admettre au partagedes biens des fuccessions des pere & mere ; & s’ils l’avoient fait, les freres devenus majeurs & dans les dix ans de leur majorité de vingt ans, seroient en droit de faire révoquer cette promesse & cette convention, quoique faites par un Contrat de mariage, & ils seroient quittes de tout en donnant le mariage avenant à la seur ; & même la soeur ni son mari n’auroient aucun recours de garentie contre le Tuteur, les parens ou les amis, pour raison de la convention portée par le Contrat de mariage de la réserve de la Toeur mariée, à partage, pour la faire valoir ; il n’y auroit pas même lieu à aucuns dommages & interéts.


ARTICLE CCLXVII.

S I le Tuteur est négligent de marier la soeur de son pupille, étant parvenuë en ses ans nubiles, elle peut se marier par l’avis & déliberation des autres parens & amis, encore que ce ne soit du consentement du Tuteur, lesquels après avoir oüi ledit Tuteur, peuvent arbitrer mariage avenant.

Les ans nubiles de la fille sont à douze ans, & à quatorze ans au mâle ; desorte que l’un & l’autre sont censez capables de contracter mariage à cet âge par rappert aux loix de la nature ; mais parmi nous, tout mineur de vingt. cinqans ne peut contracter mariage sans le consentement exptés & formel des pere, mere, Tuteur ou Curateur, à peine de nullité du mariage ; & même les filles aprés vingt-cind ans, & les mâles aprés trente ans, sont tenus d’avoir le consentement de ces personnes, ou du moins le requerir, ainsi & de la maniere prescrite par les Crdonnances, Arrests & Reglemens, à peine de pouvoir être exhéredez ; Ordon-nance de 1639. mais le mariage seroit valable.

Suivant donc cet article, la fille nubile peut être mariée par l’avis, conseils & délibération des parens & amis de la famille, si le Tuteur de son frère est refusant de la marier, ou s’il ne veut pas donner son consentement au mariage ; & même les parens & amis ci-dessus nommez, pourront aprés avoir entendu le Tuteur dans ses prétenduës raisons, arbitrer le mariage avenant de cette fille, & lui en feront délivrance, sans que le Tuteur puisse contester ce mariage ni l’estimation du mariage avenant ; les parens & les amis n’ayant rien fait en cela qui ne leur soit permis par la Coûtume, le Tuteur doit s’imputer son injuste refus & son enté tement.


ARTICLE CCLXVIII.

F Ille ayant atteint l’âge de vingt-cinq ans, aura provision sur se sfreres, équipolente au mariage avenant, dont elle joüira par usufruit attendant son mariage ; & en se mariant elle aura la proprieté.

Suivant l’esprit de cet article, il y a deux cas dans lesquels une fiile qui n’a point été marice du vivant de ses pere & mere, peut demander une provision alimentaire pour se nourrir & entretenir jusqu’à ce qu’elle soit mariée, ou elle est mineure de ving-cinc ans, ou elle est majeure de vingt-cinq ans ; si elle est mineure de vingt-cinq ans, elle pourra demander en attendant qu’elle foit mariée, une pension annuelle pour sa nourriture & entretien, à prendre seulement sur les fruits & revenus des successions fujetes au mariage avenant, au lieu que si elle est majeure de vingt-cinq ans, elle sera en droit de se faire adjuger une provision annueile contre ses freres & sur leurs propres biens, équipolente à l’interêt ou au produtt annuel de son mariage avenant, dont elle joüira jusqu’à ce qu’elle soit mariée, ou du moins jusqu’à ce que son mariage avenant ait été liquidé, pour aprés son mariage ou la liquidation de son mariage avenant, joüir de son mariage avenant en toute proprieté.

Comme les filles, quoique majeures de vingt-cinq ans, n’ont que le simple usufruit de leur mariage avenant, jusqu’à ce qu’elles soient mariées, elles ne peuvent tant qu’elles ne seront point mariées, vendre, aliéner, engager ni hy pothequer leur mariage avenant, pas même le donner par donation entrevifs ; parce que le mariage avenant est une legitime que la loi veut qu’on se conserve pour sa nourriture & entre rien : mais si la fille majeure étoit recuë & admise à partage, elle pourroit vendre, aliéner, engager, hypothequer & donner sa portion héreditaire, encore bien qu’elle ne fût pas mariée, d’autant que la portion héreditaire est une universalité de droits, qui promet des biens plus que suffisans pour soutnir à ses aliinens & entretien ; Arrest du Parlement de Roüen, du 7. Juillet 1667, ou bien si elle avoit obtenu le tiers du bien contre le Fise ou contre les Créanciers étant au droits des freres ou d’un frere, ou dans le cas de vente & adjudication par decret de biens sujets au mariage avenant, elle pourroit pareillement vendre, aliéner, engager, hypothiequer, don-ner & disposer de ce tiers avant d’être mariée, mais non son mariage avenant.

Les freres ne peuvent se dispenser de donner sur les propres biens provision à leurs soeurs majeures de vingt-cinq an & non mariées, encore bien qu’elles ayent d’ailleurs de quoi subsister & s’entretenir, soit par leur industrie ou autrement ; & cette provision doit être arbitrée à proportion du mariage & suivant les forces de la succession, si mieux ils n’aiment faire liquider leur maria-ge avenant, & leur en abandonner la joüissance.


ARTICLE CCLXIX.

L Es soeurs, quelque nombre qu’elles soient, ne peuvent demander à leurs freres ni à leurs hoirs plus que le tiers de l’héritage, & néanmoins où il y aura plusieurs freres puînez, & qu’il n’y aura qu’une soeur ou plusieurs, lesdites soeurs n’auront pas le tiers, mais partageront également avec leurs freres puînez : & ne pourront contraindre les freres de partager les Fiefs, ni leur bailler les principales places de la maison, ains se contenteront des rotures, si aucunes y en a, & des autres biens qu’ils leur pourront bailler, revenant à la valeur de ce qui leur pourroit appartenir.

Trois dispositions dans cet article.

La première sur ces paroles ; les soeurs, quelque nombre qu’elles soient, ne peuvent demander à leurs freres ni à leurs boirs plus que le tiers de lbérirage Le mariage avenant des filies non mariées du vivant des pere & mere, n’est que le tiers des biens sujets au mariage avenant, & ne peut exceder le tiers des biens, en quelque nombre que soient les filles, & les filles ne peuvent demander que ce tiers contre leurs freres héritiers ou ayans cause, pour leur maria-ge avenant.

La seconde sur ces termes, & néanmoins où il y aura plusieurs freres puinez, & qu’il n’y aura qu’une siur ou plusieurs, lesdites soeurs n’auront pas le tiers, mais partageront également avec leurs freres puinez.

Quoique le mariage avenant ne puisse exceder le tiers des biens, il peut méanmoins être moindre que du tiers ; car s’il y a plus de freres puinez que de soeurs, en ce cas les soeurs n’auront pas le tiers des biens pour leur mariage avenant, elles partageront avec leurs freres puinez également le tiers de tous les biens, parce que la part des filles dans une succession, ne peut jamais exceder la part d’un frere puiné, & que la condition des filles ne peut être plus forte que celle des freres puinez, à moins que dans la succession il n’y eût pour tous biens qu’un seul Fief ; car dans ce cas les soeurs y auroient leur mariage avenant en proprieté, & les freres puinez n’y auroient qu’un tiers à vie.

La troisième & dernière sur ces paroles ; & ne pourront contraindre les freres de partager les Fiefs, ni leur bailler les principules places de la maison, dins se conrenteront des roiures, si aucuns ) en a, & des autres biens qu’ils leur peurrons bail-ler, revenans à la valeur de ce qui pourroit leur appartenir.

Tant qu’il y a d’autres biens & effets dans la succession que des Fiefs, les soeurs ne peuvent obliger leurs freres à partager les Fiefs, ni à leur bailler les principales places du Châre au ou manoir pour leur mariage avenant, mais les leurs seront tenuës de prendre des rotures, s’il y en a, où d’autres biens & effets revenans à la juste valeur de leur mariage avenant.

Les filles, non réservées à partage, n’ont que le tiers dans les ineubles pour leur mariage avenant ; art. 31. du Reglement de 1666.

Lorsque les successions consistent toutes en rotures, & qu’il n’y a point plus de freres puinez que de soeurs, les filles y prennent le tiers pour leur iariage avenant ; & dans la liquidation & estimation des rotures, on y comprend le préciput roturier que là Coûtume generale tionne au fils ainé dans les rotures Arrest du Parlement de Normandie, du 18. Juin 1669. ce qui n’a pas lieu dans le pays de Caux, où par une exception à la loi generale, le préciput roturier du fils ainé, n’entre point dans l’estimnation des biens pour augmenter ie mariage avenant des soeurs ; art 57. du Reglement de 1686.

Le mariage avenant sur les biens situez en bourgage, se regle de la même manière qué sur les rotures, & les filles n’ont part égale dans les biens qui sont en bourgage, que lorsqu’elles sont réservées ou reçüé à partage, art. 51. du même Reglement.

S’il y a un Tief & des rotures dans la succession, le mariage avenant ne doit pas être estimé eû égard à la valeur du Fief & des rotures ; car le Fief n’entre point dans l’estimation ; mais l’estimation sera faite seulement sur cé que vaut la part de chaque puiné dans les rorures, déduction faite de la contribution de chaque puiné, & de la contribation de l’ainé à cause de son Fief ; Arrest du même Parlement, du 28. Mars 1642.

Quand il y a plusieurs freres & plusieurs soeurs, & en même tems plusieurs Fiels avec des rotures dans la succession, les Fiefs choisis par préciput par les freres, chacun suivant son droit d’ainesse, n’en trent point dans l’estimation du mariage avenant, ils y contribueront seulement pro modo emolumenti, & on considerera seulement la valeur de la part d’un cader dans les Fiefs non choisis par préciput & dans les rotures, pour en donner autant à chacune des filles.

Mais s’il n’y a qu’un Fief dans la succeision & point d’immeubles en roture, & qu’il y ait plusieurs freres & soeurs, l’ainé à qui appartient le Fief entier, outre le tiers viager qu’il payera à ses cadets, fournira à ses soeurs en proprieté pour leur mariage avenant, la valeur du tiers du Fief sur le pied que la provision des cadets, sera estiinée & liquidée, déduction faite des charges & des dettes de la succession.

Quant aux rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, qui se trouvent dans une succession ouverte en Normandie, & dont les debiteurs sont doiniciliez en Normandie & y ont leurs biens, le mariage avenant se regle sur ces rentes de la même manière que sur les autres biens en roture ; mais si les débiteurs de ces sortes de rentes, sont domiciliez & ont leurs biens hors la Coûtume de Normandie, & dans une Coûtume différente à celle de Normandie, les filles n’y prendront rien à titre de mariage avenant, parce qu’en Normandie la maxime est certaine, que les rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, se partagent suivant la Coûtume du lieu où les débireurs de ces rentes sont domiciliez & où ils out leurs biens ; Arrest du même Parlement, du 20. levrier 1632.


ARTICLE CCLXX.

L Es freres & les soeurs partagent également les héritages qui sont en bourgage par toute la Normandie, même au Baillage de Caux, au cas que les filles fussent recuës à partage.

On appelle héritages en Bourgage, les héritages situez dans les Villes & gros Bourgs, fermez ou non fermez, tenus du Roy ou d’autres Seigneurs.

Dans tonte l’eétenduë de la Province de Normandie, même dans le Baillage de Caux, les filles n’ont part égale aux héritages situez en bourgage avec leurs freres, que lorsqu’elles sont appellées & réservées, & recues à partage, & non autrement ; art. 51. du Reglement de 16bs ; de sorte que dans ce cas, le partage de ces hétirages se fuit par tétes & par égales portions : mais si les filles sont requites à leur mariage avenant, elles n’ent que le tiers de ces héritages & im-meubles pour toutes les filles, comme dans les autres biens roturiers, tant meubles qu’immeubles, & non point une part égale, & ce tiers se partage entre toutes les filles par égales portions.


ARTICLE CCLXXI.

L Es soeurs ne peuvent rien demander aux manoirs & masures logées aux champs, que la Coutume appelloit anciennement mena-ges, s’il n’y a plus de menages que de freres : peuvent néanmoins prendre part ès maisons assises ès Villes & Bourgages.

Mnoirs, Masures, Msenages, sont tous mots synonimes qui veulient dire maisons des Champs & dans les Villages, au lieu que dans les Villes & Bourgs, on dit maisons.

La difposition de cet article a même lieu, encore que les filles soient recues & admises à partage arec leurs freres ; de lorte que la maxime est certaine que les soeurs, quoique réservées à partage, n’ont rien dans les manoirs, masures & habitations des Champs ou des Villages, les freres les prennent par une espece de préciput & de prérogative, sans même être tenus d’en faire récompense à leurs soeurs dans le partage de la succession ; ce qui cependant n’auroir pas lieu, s’il y avoit plus de manoirs, masures ou habitations que de freres ; car en ce cas, aprés que les freres puinez auroient pris par préciput chacun un logement aux Champs, le surpius des manoirs, masures & labitations qui se trouveroient dans la suecession, seroit partagé entre tous les copartageans, & dans lequel les soeurs admises à la succession, auroient leur contingent comme dans les autres biens avec leurs copartageans, sans néanmoins qu’on puisse dire que les soeurs prendraient le surplus aussi par préciput & hors part ; car cette prérogative n’est donnée qu’aux freres puinez, quoique leurs soeurs soient par leur réserve & par leur rappel héritieres comme eux ; Arrest du Parlement de Roüen, du 18 Juin 1670.

a l’égerd des maisons situées dans les Villes & Bourgs, les soeurs reservées & appellées aux succeisions & à partage, y ont part égale avec leurs freres.


ARTICLE CCLXXII.

Q Uand la succession tombe aux filles par faute de hoirs mâles, elles partagent également ; & les Fiefs nobles qui par la Coutume sont individus, sont partis entre les filles & leurs représentans, encore qu’ils fussent mâles.

Il n’y a point de droit d’ainesse entre les filles qui succedent comme héritieres faute d’héritiers mâles, soit en succession directe, soit en succession collaterale ; de sorte que les filles partagent tous les biens, nobles ou roturiers, également, sans aucun droit d’ainesse ni préciput, pas même du principal manoir ; & soit qu’il n’y ait qu’un Fief dans les successions ou qu’il y en ait plu-sieurs, tout est égal entre elles & leurs répresentans ; c’est pourquoi les Fiefs, quoique par notre Coûtume ils soient indivisibles, se divisent & se partagent en ce cas par égales portions entre les filles qui viennent à la succession comme néritieres, lorsque celui de la succession duquel il s’agit, n’a point laissé des hoirs mâles.

Les enfans, même les mâles des filles & autres réprésentans des filles, tels qu’ils soient, mâles ou femelles, n’ont pareillement aucun droit d’ainesse ni préciput dans les Fiefs & autres biens, nobles ou roturiers, lorsque la succession tombent aux enfans & réptésentans des filles, à titre de succession, faute d’héritiers mâles ; de le même manière que si leur mêre, ayeule ou bisayeule maternelle n’en auroit point eû ; tous les biens se divisent & se partagent entre ces héritiers également & par égales portions sans préciput ni droit d’ai-nesse.

Mais aprés que les héritiers & réprésentans d’une fille, ont partagé un Fief avec Phéritier & réprésentant d’une autre fille, les portions uu Fief qui leur sont échuës, ne peuvent être subdivisées ni partagées ; elles appartiennent aux mâles dans la succession de ces copartageans qui avoient entre eux partagé le Fiefs parce que dans ce cas les mâles ne viennent point à la succession comme réprésentant leur mère, mais de leur chef.

Quand la, succession tombe entre filles qui sont seules héritieres faute d’héritiers mâles, la fille ainée n’a point d’autre prérogative, ni droit d’ainesse, ni préciput, que le choix des lois & la garde & saisine des tirres, papiers & enseignemens de la famille, à la charge d’en aider ses cadetes ; Arrest du Parlement de Normandie, du 13. Mars 1536. Elle a pareillement la préscéance & les autres prérogative déférées à l’âge.

Un pere & une mère n’ayant point d’enfans mâles, ne pourroit pas ordonner par aucun acte, pas même par Contrat de mariage, que leur fille ainée auroit le droit d’ainesse dans les biens nobles de sa succession, sans que ses puinez y pussent trouver à rédire ; une pereille disposition seroit nulle, d’autant que la Coûtume excluant les filles du droit d’ainesse, les pere & mere ne peuvent aller au contraire, ni blesser l’égalité qui doit être dans les partages entre toutes les filles qui viennent à la succession comme senles & uniques héritieres.

Il faudroit dire la même chose si la fiile ainée renonçoit à la succession de ses pere & mere, & que son fils se portât leur héritier ; car de la même manière que ce, fils n’exclueroit poinr ses tantes des successions, il n’auroit point de droit d’ainesse dans les Fiefs & biens nobles, il suffit que ce fils descende d’une fille, pour partager tous les biens également sans droit d’ainesse ni préciput ; s’il en étoit autrement, la fille ainée feroit jour nellement une pareille renonciation pour donger un droit d’ainesse à son fils ainé au préjudice de ses soeurs.


ARTICLE CCLXXIII.

P Ar Profession de Religion, l’héritage du Religieux & Religieuse Profez, vient au plus prochain parent habile à succeder, & deslors en avant ils sont incapables de succeder ; comme aussi est le Monastere à leur droit.

Les Moines & Religieux Profez, de l’un & l’autre fexe, sont incapables de succeder, aussi bien que leur Couvent & Monastere, dés qu’ils ont fait proression & émission de yoeux dans les formes preserites par les Canons & les Ordonnances, tous leurs biens, droits, noms, raisons & actions, passent de plein dro. r à leurs plus proches parens, habiles à succeder, comme s’ils étoient morts, pro mortiéis enim habentur in temporalibies & quoad effectus ciuiles.

Comme les Chevaliers de l’Ordre de S. Jean de Jerusaiem ou de Malthe sont de véritables Religieux, des qu’ils ont fait leurs derniers voeux, ils ne peuvent succéder.

Les Abbez & Prieurs Commandataires ont le pecule & la dépoüille ces Religieux Profez de leurs Abbayes & autres Benefices ; mais si un Religieux est pourvû d’un Benefice, Abbaye ou Prieuré, autre que celui dont il est Prosez, son pecule appartient à l’Abbé ou Prieur, duquel le Benefice dont le Religieux est pourvû, depend, parce qu’il est à présumer que ce pecule procede des revenus de ce Benesice, Lorsqu’un Religieux devient Evéque, on lui succede, mais il ne succede point, parce qu’il n’acquiert point le droit & l’habilité de succeder par l’Episcopat.

Dans le nombre des Religieux, par rapport aux successions, il est du bien de l’Etat & du repos des Familles, d’y mettre les lesuites, les Peres de la Doctrine & les Iermires, principalement si ces Religieux ont fait des voux, & demeuré un tems considérable dans leurs Maisons ou Communautez ; mais quant aux Peres de l’Oratoire & de S. Lazare, ils sont capables de successions, parcé que ce sont de simples Prêtres Seculiers, & non des Religieux.

Il faut une Profession expresse, pour rendre une personne Religieuse & incapable de succeder, une Professioen tacite ne suffiroit pas ; c’est pourquoi toutes les successions qui arrivent à un Novice pendant son Noviciat, lui appartiennent ; car ce n’est que par son émission de voeux & par sa Profession, qu’il perd ses droits civils, & la capacité de succeder.

Cependant lorsque la Prosession est nulle par les défauts qui peuvent s’y rencontrer, il est permis de reclamer contre par les voies de droit ; mais il faut que cette reclamation soit faite dans les cinq ans du jour de la Profession, aprés quoi on seroit non-recevable dans la reclamation.

Il est défendu par toutes les Ordonnances anciennes & nouvelles aux Convents & Monasteres de l’un & l’autre sexe, de rien prendre ni exiger directement ni indirectement, pour l’engression & entrée des Religieux & Religieuses, mais c’est chose bien mal oblervée en France ; il n’y a presque point de Couvents & Monasteres, même riches & dorez, soit d’hommes, loit de filles, qui ne se fassent donner par les parens, pour un enfant qui veut être Religieux ou Religieuse ; s’ils ne le sont pas directement & ouvertement, ils le font par des manieres indirectes & secretes, & sans donner de quittance ; c’est-là un grand abus dans la discipline Ecclesiastique.

ARTIeLE


ARTICLE CCLXXIV.

C Elui qui est jugé & separé pour maladie de lépre, ne peut succeder, & néanmoins il retient l’héritage qu’il avoit lorsqu’il fut vendu, pour en joüir par usufruit, tant qu’il est vivant, sans le pouvoir aliéner.

On donna le nom de Ladres à ces malades, aux voyages d’Outremer, parce qu’on les mettoit dans un Hopital auprés de Jerusalem, dont S. Lazare, que l’on appelloit autrefois S. Ladre, étuit le Patron : Chez les Juifs, celui qui se croyoit atteint de la Lepre, se devoit presenter au Prêtre qui devoit le visiter & juger s’il en étoit malade ou non ; & si le Prêtre jugeoit qu’il en étoit arteint, ce malade étoit obligé de se tetirer du commerce des autres hommes, & habiter hors du Camp, & hors des Villes, quand les Juifs eurent des Villes ; Levir. chap. 13. On a suivi en cela la Loy de M-yse dans les bas siécles en plusieurs lieuës de l’Europe, & notamment en France, on y réputoit ces sortes de malades comme morts, tant que leur : maladie duroit ; ils étoient même tenus par les Reglemens du Royaume de prendre la qualité de Laares, dans lesActes publies qu’ils passoient ; il leur étoit même défendu d’aspirer à aucune Charge publique, & s’ils en avoient, ils étoient obligez de s’en défaire, comme il paroit par un Arrest de l’Echiquier de Normandie, pour un Sergent du Bailliage du Ponteau-de-mer.

La disposition de cet Article est à present inutile, nous ne connoissons plus il y a tres-long temps de Lepreux ; autrefois c’étoit une maladie fort commune, & d’autant plus dangereuse qu’elle se communiquoit ; c’est pourquoi il y avoit des lieux destinez & separez pour y resserrer ces sortes de malades, qu’on appelloit Leproseries ou Maladreries.

Ceux qui étoient attaquez de cette maladie, retenoient à la vérité leurs biens, tant qu’ils vivoient, & ils en joüissoient par autrui ; mais ils ne pouvoient nonseulement vendre, aliéner, engager, hypothequer, ni en disposer par donation entre-vifs, ou à cause de mort, ou par Testament, pas même ob pias causas, ils en avoient seulement la joüissance pendant leur vie, mais encore ils étoient incapables de succeder.

Nul n’étoit réputé Lepreux, qu’il n’eûr été jugé tel par le Juge ; en consequence de la visite & avis des Medecins & Chirurgiens, & qu’il n’eur été re-clus & séparez en vertu d’un Jugement donné en consequence ; & c’est le Juge Laique qui connoissoit cette Police, & non le Juge d’Eglise.

Tout ce que nous pouvons tirer de cet Article pour l’usage d’à present, est que nôtre Coûtume répute tous ceux qui sont dans la dépendance absoluë d’autrui, incapable de disposer de leurs biens, principalement au profit des person-nes qui ont ce pouvoir absolu, tels que sont des Directeurs, Confesseurs, Medecins, Chirurgiens, & autres personmes de cette qualité, qui ont un empire plus que despotique sur l’e sprit des malades.


ARTICLE CCLXXV.

B Atard, ne peut succeder à pere, mere ou aucun, s’il n’est legitimé par Lettres du Prince, appellez ceux qui pour ce, seront à appeller.

On distingue ordinairement de trois sortes de bâtards ; les uns ont cette qualité par la nature & suivant les Loix ; les autres sont appellez seulement na-turels, & les derniers sont étabiis par la Loi seule,

Les premiers viennent d’un legitime mariage, les seconds naissent d’une conjonction illegitime, ce que Seneque appelle furtivum genus ; les derniers sont ceux que l’on adopte.

C’est un premier principe parmi nous, que les batards ne succedent point à leurs pere & mere, ni encore moins aux parens de leur pere & merc, quand bien même ce seroit un-bâtard né, ex soluts & solutâ ; car le droit de succeder n’appartient qu’aux enfans sortis d’un mariage legitime & valablement contracté.

Cependant un bâtard qui seroit legitimé par un mariage subsequent, fait & contracté suivant les Loix de l’Eglise & du Royaume, seroit capable de succeder comme s’il étoit né pendant le mariage, & seroit égal en tout à ses freres & soeurs, à la réserve du droit d’ainesse, qui appartiendroit au fils ainé, né pendant le mariage, & non au fils ainé legitimé par un mariage subsequent de les pere & mere, nonobstant qu’il fût l’ainé, par la naissance ; car il ne l’est pas dans le droit, qui veut que le droit d’ainesse soit donné à l’enfant mâle qui vient pendant le mariage, & non à l’enfant mâle qui étoit né avant le mariage, & qui doit son état & sa legitimation au mariage subsequenr.

Il y a encore les batards qui sont legitimez par Lettres Patentes du Prince, obrenuës & enrégistrées à la requête du pere natutel, les plus proches parens presens & consentans, ou dûëment appellez ; apres cette legitimation, un tel bâtard non seulement succede à son père, mais encore aux parens de son pere, qui ont e, pressément consenti à l’obtention & à l’enregistrement des Let-tres de légitimatin ; c’est pourquoi il estdes regles que ces sortes de Lettres sosent enregistrées du vivant du pere ; car aprés sa mort elles ne sont d’aucun effet, & le oûrard ne seroit plus en droit de les faire verifier & homologuer, à moins que cela ne fût du consentement exprés & par écrit des héritiers de son pere naturel, les autres parens presens ou duëment appellez : Mais aprés qu’un batard est legitimé dans toutes les formes par Lettres du Prince, non seulement il est habile à succeder à son pere, & aux parens qui ont expressément donné les mains & consenti à la légirimation ; mais encore son pere le peut faire son Legataire universel.

Il est ici à remarquer que la mere naturelle d’un batard, ne pent le faire legitimer par Lettres du Prince, ni en se mariant à un autre pere que celui qui étoit le pere naturel de ce bâtard, le rendre légitime par ce mariage subsequent ; cela seroit contre les bonnes moeurs.

Comme ces legitimez sont capables de succeder, ils peuvent tenir Offices & Benefices, & consequemment sont capables de tous effets civils, ce que les bâtards non légitimez n’ont point.

Le Pape ne peut legitimer un bâtard, quoad effectus civiles, ni les rendre capables des effets civils ; mais leulement, quoad effectus spirituales, comme pour les Ordres Sacrez & les Benefices.

Une fille bâtarde & illégitime qui épouse un mari légitime, est légitimée ipfo facto & ipso jure, pût ce mariage, spuria legitimo nupta, legitima efficitur,Tiraqueau ,Guy Pape , & tous nos Auteurs sont uniformes en sentimens sur cette décision, & tel est notre usage dans tout le Royaume.

Il paroit par des Lettres de légitimation, du mois de May 1335, que Simon de Bucy, Procureur General du Parlement de Paris, qu’on croit avoir été premier President de ce même Parlement, pour mieux assûrer son état, avoit obtenu des Lettres de légitimation du Roy, de son chef ; quoiqu’il fût né d’un mariage légitime ; mais dont la mere étoit illégitime, lorsqu’elle épousa un mari qui étoit legitime d’extraction.

Un pere naturel, mais non la mere, est tenu de fournir des alimens à son bâtard, même de lui faire apprendre un métier, pour le mettre en état de qagner sa vie ; de plus, les héritiers du pere naturel d’un bâtard, sont dans la même obligation, mais non sa veuve, ni ses simples parens, qui ne sont point ses héritiers.

Un pere naturel ne peut faire son bâtard son donataire ou légataire universel, à moins qu’il ne l’eût fait legitimer par Lettres du PrinCe ; cette donation ou ce legs universel tourneroit en une certaine somme qui seroit arbitrée par les Juges saisis de la contestation, eu égard aux facultez du pere naturel, soit par forme de pension viagere ou en proprieté ; mais si c’étoit des bâtards adultérins, ou de Prêtres, on ne leur donneroit que de simples alimens sur ce don ou legs universel, & rien en proprieté, ses biens seroient adjugez aux héritiers du sang, en toute proprieté & joüissance, à la charge de la pension viagere.

En Normandie, les Seigneurs de Fief, quand même ils seroient Seigneurs Hauts-Justiciers, ne sont point tenus de la nourriture des enfans exposez & trouvez, cela est à la charge des Hopitaux les plus proches du lieu, ou des Fabriques ou Trésors des Eglises Paroissiales.

Les proches parens du pere naturel peuvent être valablement recusez de connoître des Procés du bâtard de ce pere naturel ; Arrêt du Parlement de Roüen, du S Avril 1631.

Les Enfans bâtards, de quelque sorte qu’ils soient bâtards, soit ceux nez ex solutâ & soluto, où adulterins, ne sont point capables de legs de leurs pere & mere, principalement de legs universels ou considérables, mais seulement de pension viagere, per modum alimentorum & pro modo facultatum testaJoris, encore moins les enfans de Prêtres ou autres étant in sacrit, ou enfans in cestes ; tout cela dépend beaucoup des circonstances particulieres du iait ; mais est-il toûjours vrai qu’il seroit contre les sentimens de la nature & de l’humanité, que du moins on ne convertit pas ces legs en quelque pensionviagere & en des alimens, ne partus pereat, notre état ne dépend pointde nous, mais du fourt & du hazard.


ARTICLE CCLXXVI.

LE bâtard peut disposer de son héritage, comme personne libre.

Les bâtards ont la même faculté de disposer de leurs biens, tant entre-vifs, qu’à cause de mort & par Testament, que les personnes légirimes, tant à titre onereux qu’à titre gratuit ; cependant, sous prétexte qu’ils n’auroient point d’héritiers, comme ne s’étans point mariez, ou n’ayant point d’enfans de leur ma-riage, ils ne pourroient donner par donation entre-vifs, ou par Testament, aude-là de ce que pourroit donner celui qui a des héritiers, art. 94. du Reglement de 1666 ; mais les Aubains non naturalisez, ne peuvent disposer de leurs biens par donation à cause de mort, ou par Testament, de leurs biens ; mais seulement par donation entre-vifs, qui est du droit des Gens.


ARTICLE CCLXXVII.

L Es enfans des condamnez & consisquez, ne laisseront pas de succeder à leurs parens, tant en ligne directe que collaterale, pourvû qu’ils soient conçûs lors de la succession.

Les enfans des personnes condamnez au dernier suplice, ou autres peines afflictives qui emportent confiscation de corps & de biens, tels qu’est la condamnation à la mort, aux Galeres à perpetuité, ou au Bannissement perpetuel, sont Capables nonobstant cette condamnation & cette confiscation de biens, de succeder à leurs parens, tant en ligne directe que collateralle, quand même ils ne seroient que conçûs, & non encore nez au jour du Jugement de condammation ; car dans ce cas, les enfans de ces condamnez ne viennent pas à la succession de leurs parens, comme representans leur pere ou mere, condamnez, mais de leur chef, il n’y a que les biens du condamne, meubles & im-meubles, nobles ou roturiers, propres ou acquêts, dont les enfans sont exclus par l’effet de la condamnation & confiscation, les enfans sont & demeurent dans tous leurs droits, pour les autres biens qui peuvent leur écheoir par succession ou autrement ; de manière même que la condamnation du mari ou celle de la femme, ne pourroit nuire, ni préjudicier à l’un ni à l’autre dans les droits habituels qu’ils avoient dans les meubles & conquéts faits pendant lemariage.

Mais si apres la condamnation du pere ou de la mere il échet une suc cession laquelle auroit appartenu au pere ou à la mere, cessant la condamnation, en ce cas les enfans conçûs depuis l’échéance & l’ouverture de la succession, n’y peuvent rien prétendre, la succession est acquise non pas au confilcataire, mais au plus proche parent habile à succeder.

Les enfans nez d’un mariage contracté par un pere ou une mère depuis leur condamnation au dernier supplice, ou aux Galeres à perpetuité, ou au banissement perpétuel, sont incapables de succeder, quoiqu’ils fussent légitimes par rapport à leur état, mais non quoa l’effecius civiles ; & c’est ici où l’on peut dire, filius est parris, sed non beres parris.


ARTICLE CCLXXVIII.

A Venant que le débiteur renonce ou ne veuille accepter la successson qui lui est échûë, ses Créanciers pourront se faire subro-ger en son lieu & droit pour l’accepter, & être payez sur ladite succession, jusqu’à concurrence de leur dû, selon l’ordre de priorité & postériorité, & s’il reste quelque chose, les dettes payées, il reviendra aux autres héritiers plus prochains après celui qui a renoncé.

Cette disposition est pour obvier au dessein qu’un débiteur de mauvaise volonté auroit pour tromper & faire perdre le dù à ses Créanciers, lequel renon-ceroit à une succession à lui échuë pour la faire tomber à un autre.

Suivant cet article, si un debiteur renonce à une succession directe ou collaterale, confistante en meubles ou immeubles, aequêts ou propres, nobles ou roturiers, ou à un legs universel, ou s’il ne veut pas accepter cette succession ou ce legs universel, il est permis en ce cas à ses Créanciers antérieurs à l’ouverture de la succession, de prendre & accepter la succession ou legs universel, en se faisant subroger au lieu & place, droits, noms, raisons & actions du débiteur & aux charges de droit.

Cette Jubrogation ne se fait pas de plein droit, & ne faisit pas le Créancier par la seule renonciation du débiteur à la succession, les Créanciers doivent la demander au Juge par une Requête précise, & déclareront qu’ils entendent accepter la succession pnrement & simplement, au lieu & place de leur debireur & en ce cus, quoiqu’on ne connoisse gueres en Normandie de Curareurs créez aux successions vacantes, il en faudra créer un, pour par les Créanciers diriger leurs actions contre lui, comme ils auroient pû faire contre leur débiteur ; aussi cette subrogation, quoique suivie de l’acceptation, mrend pas les Créanciers héritiers, la fuccession est toujours censée vacante, les Créanciers ne sont en qualité, que comme étant aux droits & exerçans les droits de leur débiteur c est pourquoi si depuis cette subrogation & cette accepration, un parent se présentoit pour apprehender la succession, soib mmme héritier absolut. ou comme héritier par bénefice d’inventaire, il seroit recévable en sa domande, en remboursant aux Créanciers leurs frais & aux charges de droit, telles que seroient les dettes de la succession, & sans préjudice de ses propres créances & droits qu’il pourroit avoir contre la succession, qui resteroient en entier en se portant héritier béneficiaire ; car s’il se porroit héritier absolut, ou pur & simple, non seulemeut il confondroit en soi ses créances & droits, mais encore il exposeroit ses propres biens aux dettes des Créanciers de la succession,

Un ayeul ne pourroit pas même avantager son petit fils des biens de la succession, pour frustrer les Créanciers de son fils encore vivant, en donnant sâ succession à son petit fils ; & en ne laissant rien à son fils, par quelque acte que cet avantage fût fait, soit par donation ou autre acte entre-vifs ou par testament, ce seroit toujours un acte fait in fraudem creditorums, & comme tel condamné & réprouvé par la loi ; pourvù cependant, & non autrement, que ce fussent des Créanciers antérieurs à la disposition.

Mais un pere ayant des enfans de son mariage, & devenu veuf, se faisoit Religieux, ses enfans viendroient à la succession de leur ayeul, sans que les Gréan-ciers du pere pussent demander à y être subrogez au lieu & place du pere, leur débiteur, ni rien prétendre sur les biens de la succession de l’’ayeul ; Arrest du Parlement de Normandie, du 6. Fevrier té43.

Les Créanciers postérieurs à la renonciation faite par l’héritier présomptif à la succession qui lui est échué, ne peuvent demander la subrogation portée par cet article, parce qu’ils ne peuvent pas dire que la renonciation ait été faite par leur débiteur à leur préjudice & pour les tromper.

Le Fise ou Confiscataire ne peut se faire subroger à apprehender la successiont qui a été répudiée par celui qui depuis a été confisqué ; art. 53. du Reglement de 1686, parce qu’il est vrai de dire que le Confiscataire n’a jamais eû de droit dans cette succession.

Comme en Normandie on n’admet point les institutions d’héritier ni les substitutions, il n’est pas permis aux pere & mère de substituer les parts & portions de leurs enfans & autres héritiers présomptils dans leurs successions, ni les réduire à leur légitime pour quelque cause que ce soit, comme prodigalité, dissipassion, dettes par eux contractées, ouimbecillité & dêmence, les Créanciers de ces enfans & héritiers présomptifs seroient en droit de se plaindre d’une semelable disposition, & de se faire subroger au lieu & place de leur débiteur pour accepter la succession qui lui étoit dévoluë & qui lui apparrenoit sans cette disposition.

Lorsque le fils ainé noble a fait sa déclaration précise qu’il veut prendre un Fief par préciput & par droit d’ainesse en chacune suc cession du pere & de la mere, au lieu de partager les successions avec ses freres, ou que le fils ainé roturier a déclaré qu’il veut le manoir roturier, ces préciputs passent aux Créanciers de ce fils ainé, parce que ces préciputs étoient acquits à ce débiteur par sa déclaration & son option : mais si cette déclaration & cette option n’ont point été faites, & que le fils ainé n’ait point fait connoître sa volonté, cette faculté ou prerogative ne passera point à ses Créanciers, d’autant qu’ils ne peuvent pas se faire Subroger à un droit qui n’appartenoit point à leur débiteur, qu’en vercu d’en choix qu’il devoit faire pour avoir ce droit, & qu’il n’a point fait.

Cette maxime souffre néanmoins une exception dans le preciput d’ainesse, qui appartient au fils ainé dans le pays de Caux ; on sçait que ce préciput consiste dans les deux tiers des biens immeubles avec le manoir & pourpris, & que ce préciput appartient au fils ainé sans aucune diminution ni récompense des l’instant du déces des perc & mère, & sans que le fils ainé soit obligé de faire aucune déclaration pour lui acquerir incommutablement ce préciput ; & par conséquent ses Créanciers comme exerçans ses droits, pourront se faire subrover & aecepter ce préciput.

Il est cependant permis à un pere ou à une mere, voyant leur enfant obéré de dettes, de vendre leurs biens, meubles & immeubles, sans que les Créanciers pussent inquièter les acquereurs & tiers détempreurs ; & même les pere & mere pourroient faire retirer les héritages & autres immeubles susceptibles de retrait, par retrait lignager sous le nom de leurs petits ensans, sans que les Créanciers puissent faire failir réellement ou autrement ces biens apres la mort de l’ayeul ou ayeule.

Des Créanciers ne pourroient pas s’oppofer à la profefsion Religieuse que leur débiteur voudroit faire, sous prêtexte qu’il avoir une elperance d’une succession, & sur les biens & effets de laquelle succession ils seroient payez, & laquelle passeroir par cette mort civile à ses enfans à leur préjudice ; Arrest du même Par-lement, du 6. Fevrier 1643.

Les Créanciers qui se font subroger à une succession à laquelle leur débiteur avoit renoncé frauduleusement ou autrement, & qui acceptent cette succession au lieu & place de leur débiteur, ne sont tenus envers tous les Créanciers, que jusqu’à dûe concurrence des forces de la succession, ou pour mieux dire, des biens ; en faisant faire toutefois bon & loyal inventaire des meubles, titres, papiers & enseignemens pour conslater les forces de la succession, faute de quoi ils peurroient être poursuivis in totums & in soliadum, parce qu’on pourroit dire qu’il se sont appropriez les biens & effets de : la succession ainsi un inventaire seroit un acte de précaution ; d’oûvient qu’un légataire universel, un Seigneur qui appréhende une succession par droit de desherence, ou un confiscataire, ne doivent jamais manquer de faire faire un inventaire, afin de n’être pas tenus aux dettes du défunt, au-de-là de la valeur de la succession & des biens.