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ARTICLE CCCXLVII.

L Es successions paternelles & maternelles étant échuës avant que l’aîné ait judiciairement déclaré qu’il opte par préciput un Fief, ou gagé portage à ses frères en celle qui premierement étoit échuë, elles sont confuses & réputées pour une seule succession, tellement que l’aîné n’a qu’un préciput en toutes les deux.

L’intention de la Coûtume dans cette disposition, a été d’empécher la multiplicité des préciputs en la personne de l’aîné au préjudice des puînez ; c’est dans cette vûë que comme régulierement parlant, l’aîné ne peut prendre dans une même succession qu’un seul Fief par préciput ; il est dit par cet article, que lorsque les successions de pere ou de mere se trouvent confuses au jour de leur échéance, l’aîné n’a qu’un seul droit de préciput dans l’une & dans l’autre succession, parce que par cette confusion les deux successions sont réputées être une seule & même succession.

Or deux successions sont censées être confuses & ne faire qu’une feule & même succession au jour de leur échéance, par rapport au préciput de l’aîné en deux manières ; l’une, si avant qu’elles fussent échuës, l’aîné n’avoit pas fait sa déclaration en Iustice, qu’il optoit & prenoit un Fief par préciput dans chaque succession ; l’autre, s’il n’avoit pas déclaré judiciairement qu’il gageoit partage à ses puinez, c’est-à-dire, qu’il renonçoit à prendre un Fief par préciput dans chaque succession, & qu’il entendoit que tous les biens, meubles & immeubles, nobles ou roturiers, fussent mis en partage, pour en donner à chaque cohéritier son contingent suivant la Coûtume, sans quoi les successions sont réputées confuses & n’être plus qu’une seule & même succession par rapport au droit de préciput ; de sorte que l’aîné pour empêcher cette confusion & se conserver son droit de préciput dans chaque succession, est indispensablement obligé de prendre cette précaution, autrement il n’aura qu’un seul droit de préciput dans l’une & l’autre succession.

Cette déclaration par le fils aîné d’opter un Fief dans chaque succession, ou de s’en tenir au partage qui sera fait des successions, non seulement doit être formelle & précise, mais elle doit encore être faite judiciairement, c’est-à-dire, coram Praetore, & il en doit demeurer un acte au Greffe, sans cependant qu’il soit nécessaire d’y appeller les puînez, d’autant que les puînez ne pourroient pas empêcher cette déclaration ; de maniere qu’il ne sussiroit pas à l’aîné de faire signifier par un exploit cette déclaration aux puênez ; si cependant cette déclaration avoit été faite devant Notaire avec minute, & qu’ensuite l’aîné eût fait signifier & donner copie de cet acte aux puînez dans le tems, il seroit dur de n’avoir pas égard à une pareille déclaration ; mais il est plus sûr de la faire judiciairement pour satisfaire litterallement à la Coûtume ; car en matière de formalitez on ne peut être trop scrupuleux & trop circonspects.

La déclaration faite judiciairement ou en jugement par l’aîné de l’option d’un Fief dans chaque succession échuë, ou de partager avec ses cadets également toute la succession échuë sans y prendre de préciput, empêche que les deux successions ne soient confuses & réputées pour une feule & même succession, & sans cette précaution l’aîné n’auroit qu’un seul préciput en l’une & en l’autre succession.

Mais d’un autre côté il n’y a confusion par rapport au droit de préciput que lorsqu’il se trouve des Fiefs dans les deux successions, & non pas lorsqu’il n’y a qu’un seul Fief dans une succession, & des rotures dans l’autre ; car l’aîné peut prendre en ce cas, outre le Fief, le préciput roturier dans la succession, où il y en un, encore que les deux successions foient confuses ; Arrests du Parlement de Normandie, des 16. Janvier 1649. & 20. Mai 1672.

Comme par la Coûtume particulière du pays de Caux le préciput est acquis à l’aîné de plein droit, sans que l’aîné soit tenu de déclarer en Justice ni autrement qu’il opte un préciput dans la succession échuë, il ne se fait point de confusion de successions à cet égard, d’aîné est en droit de prendre son préciput sur la succession échuë la premiere & en tout tems, même depuis l’echéance de l’autre succession paternelle ou maternelle ; Arrests du même Parlement, des 15. Juillet 1659 & 13. Mars 1671.

Cette confusion de successions par rapport au préciput sur les Fiefs & Terres nobles, n’est admise & n’a lieu que dans les successions des pere & mere, & non dans toutes autres successions, soit d’ayeul, ayeule ou autres afcendans, soit collaterales ; c’est pourquoi le petit fils à la répresentation de son pere & de sa mere, peut prendre un préciput en la succession de son ayeul ou ayeule, échuë depuis la mort de son pere ou de sa mère, encore qu’il n’ait fait aucune déclaration d’opter un préciput dans la première succession, avant l’echéance de la seconde succession, pourvû que les deux Fiefs qui se trouvent dans ces successions, ne proviennent pas de la même personne & de la même souche.