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TITRE XIV. DE PARTAGE D’HERITAGE.
ARTICLE CCCXXXV.
EN Normandie, il y a héritage partable & héritage non partable.
L’action en partage est afin d’obliger les cohéritiers à venir à division & partage des biens d’une succession échuë en commun ; car un seul héritier peut for-cer les autres concritiers à venir à partage, majeurs où mineurs ; avec cette différence néanmoins, qu’un mineur ne peut provoquer un partage, parce que ce seroit une aliénation voiontaire, mais il peut être contraint par un majeur à venir à partage ; & dans ce cas il faut créer un Tuteur ad Soc, & à l’esfet du partage, au mineur.
Un Créancier de l’un des héritiers, appreliendant que le partage ne fût fait en fraude, pourroit demander qu’il lui seroit permis d’y être présent & d’y assister ; mais aprés que le partage auroit été fait, il ne pourroit plus atraquer le partage, il ne pourroit se vanger que sur la part & portion tombée au lot de son debiteur.
Si un cohéritier avant le partage avoit vendu quelque héritage ou immeuble de la succeision commune, il seroit permis à l’autre cohcritier, au lot duquel cet héritage ou immeuble seroit échû, ignorant la vente faite par le cohéritier, de revendiquer cet héritage ou immeuble, & de faire condamner l’acquereur & detempteur à s’en desister & departir, avec restitution de fruits du jour du partage ; autre chose seroit si l’héritage ou immeuble tomboit au lot du concritier qui l’avoit vendu avant le partage, la vente subsisteroit ; Arrest du Parlement de Roüen, du 4. Avril 1658.
Dans nôtre Coûtume tous les héritages ou autre immeuble est partageable & divisible, ou n’est point partageable ni divisible.
Les héritages ou immeubles partageables & divisibles sont les terres & héritages roturiers, les maisons, soit celles bâties en bourgage, en franc-aleu ou ailleurs, autres toutefois que les principaux Manoirs & Châteaux des Terres nobles, les rentes roturieres, telles qu’elles soient, comme rentes foncieres, de fiesse ou de bail d’héritage, perpetuelles ou rachétables, ou rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, les Greffes, Tabellionages, Notariats & autres biens de cette qualité, sont aussi partageables & divisibles.
Les héritages non partageables & indivisibles, sont les Fiefs & terres nobles à l’égard des mâles ; & par rapport aux filles, les Fiefs sont partageables & divisibles ; sçavoir, lorsque les filles sont seules & uniques héritieres du défunt, de cujus bons ; agitur.
Par la premiere institution des Fiefs, ils n’étoient pas partageables en France, ils n’y ont été partageables qu’au tems que les Lombards permirent de les parrager dans les successions ; notre Coûtume a conservé l’ancien usage, c’est-àdire, l’indivisibilité des Fiefs ; par ce moyen la spiendeur & la dignité d’une famille subsiste, ou du moins se peut mieux conserver par l’unité des Fiefs & Terres nobles, dirDumoulin , sur l’article 13 de l’ancienne Coûtume de PaIis, gloss. 4. n. 14. ce qui a fait dire à M. Cujas que proprié feudum individuum est, & ronsorti, impatiens ; c’est sur le liv. 2. des Fiefs, Tit. 2. Balde nous apprend la même chose dans sa note sur l’Authentique bor amplius, au Cod. de fidcicommifsis.
Par rapport à la Normandie, il se trouve un ancien Arrest de l’Echiquier, du 3. Aout 1383. sous Charles VI. qui avoit maintenu l’ancienne loi dans cette Province sur l’indivisibilité des Fieis & Terres nobles, quand il y avoit des enfans mâles ; c’est M. de la Roque qui rapporte cet Arrest dans son Traité de la Noblesse.
C’est done une décision certaine & inviolable dans notre Coûtume, que generalement parlant, les Fiefs & lettres nobles sont impartageables & indivisibles à l’égard des mâles ; car encote un coup, ils sont divisibles entre filles, quand elles sont seules héritieres, Il y a même quelques cas, dans lesquels les Fiefs nobles sont partageables & divisibles entre mâles. 16. Si qucun des héritiers mâles né veut point prendre ni opter un Fief pour son préciput. 25. Lorsqu’il s’agit d’un partage entre des coheritiers d’une part, & le Fils ou des Créanciers de l’ainé, subrogez à ses droits & en son lieu & place, d’autre part ; d’autant que ie Fisc & les Créanciers n’ont ni droit d’ainesse ni préciput, le Fief se partage en ce cas par égale portion.
Les servitudes sont encore indivisibles, quoique ce fussent des servitudes roturieres.
Si le proprietaire de biens roturiers avoit par un acte précis défendu de les diviser dans le partage de la succession, & qu’il eût ordonné qu’ils seroient mis dans un seul lot, sauf à en faire raison par celui qui les auroit à ses cohéritiers, sur le pied de leur valeur & estimation, il faudroit suivre cette disposition.
Un Office ne peut pas pareillement. se couper & diviser, si le titre ne peut être que sur la tete d’une seule personne.
Quant aux meubles & effets mobiliers, billets, promesses, obligations, dertes actives, fermages, arrérages de rentes, marchandises, argent monnoyé ou non monnoyé, fruits, grains on autres choses mobiliaires, elles sont divisibles, comme les rentes & les héritages & autres immeubles roturiers.
ARTICLE CCCXXXVI.
T Ous Fiefs sont impartables & individus ; néanmoins quand il n’y a que des filles héritieres, le Fief de Haubert peut être divisé jusqu’en huit parties, chacune desquelles huit parties peut avoir droit de Cour & Usage, Jurisdiction & Gageplege.
Les Fiefs, comme nous venons de le remarquer, sont régulierement parlant, indivisibles entre mâles qui sont héritiers du défunt ; mais entre filles, lorsqu’eiles sont seules héritieres, les Fiefs sont tellement civisibles, qu’ils peuvent être divisez jusqu’en huit parties, même le Fief de Faubers & les Fiefs de dignité, tels que sont les Marquisats ; Comtez ou Baronnies ; tout ce qu’on fait dans ce cas, c’est qu’on attache la dignité du Fief à une portion du Fief.
Les Fiefs ne sont pas seulement divisibles entre les filles, quand au défaut de mâles elles sont seules héritières, mais encore entre leurs enfans mâles ou femelles, qui viennent à la succession de leur ayeul ou ayeule par réprésen tation de leur mère ; mais à l’égard de la portion du Fief qui tombe à chaque fille, elie devient indivisible dans sa succession entre ses enfans mâles s’il y en a ; le fils ainé y prendra même son droit d’ainesse & de préciput ; autre chose seroit si cette mere n’avoit laissé que des filles pour ses liètitieres, cette portion de Fief seroit divisible, & seroit partagée également entre les filles sans droit d’ainesse ni préCiput.
Les Sergenteries nobles sont aussi indivisibles entre hétitiers mâles ; mais elles sont divisibles & partageables entre filles, seules héritieres dans la succession à partager.
Chaque portion du Fief, même du Fief de Haubert ou autre Fief de dignité, qui peut être divisé jusqu’en huit parties inclusivement enrre filles, pourra avoir droit de Cour, Usage, Justice & Gageplege, parce que nonobstant cette division, chaque portion de Fief conse rve toujours la qualité de Fief noble ; cependant il pourroit être convenu par le parrage qu’il n’y auroit qu’une portion de Fief, qui auroit le droit de Cour, Usage, Justice & Gagepiege.
Le Fief de Haubert ou autre Fief ne peut jamais, ni en aucun cas, être divisé en plus de huit parts, autrement il perdroit le nom & la qualité de Fief ; & même la mouvance, Jurisdiction & autres droits de la Seigneurie directe, setroient dévolus au Seigneur Suzerain immédiat du Fief, sur les Vaisaux du Fiefa Iés que les filles ou leurs enfans, mâles ou femelles, sont seules héritieres dans la succession, non seulement les Fiefs sont divisibles, mais encore le partage s’en fait égalemenr entr’elles sans droit d’ainesse ni précipur.
Les Fiefs sont tellement indivisibles dans les successions dans nôtre Coûtume, excepté entre filles, que par Arrest du Parlement de Roüen, du 24 Mars 3672, il a été jugé que le tiers coûtumier des enfans, qui suivant la même Coutume ne se peut aliéner, ni être décreté à leur préjudice, se trouvant assigné sur une Terre noble ou Fief, pouvoit leur être fourni en deniers, & non dans le tiers en essence de la Terre noble ou Fief, & que ces enfans ne pouvoientle demander qu’en deniers ; cet Arrest est dans le Journal du Palais, tom. 1 page 193.
ARTICLE CCCXXXVII.
L E fils aîné au droit de son aînesse peut prendre & choisir par préciput tel Fief ou Terre noble que bon lui semble, en chacune des successions, tant paternelles que maternelles.
C’est ici où la Coûtume generale marque quel est le droit d’ainesse du fils ainé dans les Fiefs nobles, en quoi il consiste, sur quels héritages & dans quelles successions il se prend. Le droit d’ainesse n’est pas seulement un droit honorifique, il est encore utile, Le droit d’ainesse appartient au fils ainé de la maison, ou à ses enfans & répresentans, mâles ou femelles ; c’est done l’ordre de la naissance, qui presente le fils ainé à la C-utume, pour lui accorder le droit d’ainesse.
Dans nôtre Coûtume, le droit d’ainesse est la faculté donnée au fils ainé de prendre & choisir par préciput tel Fief ou Terre noble qu’il juge à propos en chaque succession, tant de pere que de mere, à la charge par lui en faisant cette option, de prendre un Fief dans chaque succession, s’il y en a dans l’une & dans l’autre, & de laisser & abandonner à ses puinez le reste de toute la succession, même de contribuer au mariage avenant des soeurs, s’il y en a, & qui n’ayent point été matiées du vivant des père & mêre.
Le droit d’ainesse n’empéche pas que les pere, mere, ayeul ou ayeule, ne puisse disposer de leurs biens, de les changer de nature, même les aliéner au préjudice du droit d’ainesse, nonobtant que par là, ils ôtent le droit d’ainesse au fils ainé ; Arrest du Parlement de Normandie, du 2o Juillet 1629. Mais d’un autre côté, il leur est permis d’accroître & augmenter le droit d’ainesse par la réunion de plusieurs Fiefs en un seul, sans que les enfans puinez puissent se plaindre de cette réunion, sans cependant que les pere & mere puissent par donation entre-vifs, ou à cause de mort, même par Contrat de mariage, ou autrement, faire des avantages aux puinez, au préjudice du droit d’ainesse, ni faire passer le droit d’ainesse à un dés puinez, au préjudice du fils ainé ; parce qu’il ne leur est pas permis de charger l’ordre de la nature, quand même il se trouveroit des défauts & imperfections dans la personne du fils ainé, il sufsit qu’il soit capable de succeder : Si néanmoins la donation du Fief étoit faite en faveur d’un étranger, elle seroit valable.
Le fils ainé, quoique majeur, ne peut valablement vendre, céder, transporter, donner ni renoncer à son droit d’ainesse, du vivant de ses pere & mere, même en faveur de son frere puiné, quand, même cette vente, cession, transport, donation ou renonciation, seroit faite en faveur & par Contrat de ma-riage du puiné.
La donation faite par un pere ou une mére d’un Fief ou autre chose, en avancement d’hoirie, à leur fils ainé par Contrat de mariage ou autrement, n’ôte point au fils la faculté de choisir de nouveau, aprés la mort du pere ou de la mere qui aura fait la disposition, un autre Fief par préciput, en rapportant par lui à la succession lors du partage le Fief ou autre chose à lui donnée en avancement de succession ; ce qui même auroit lieu nonobstant le partage qui au-roit été fait des biens de la suecession du vivant du pere ou de la mere, & lors duquel partage le fils ainé avoit choisi un Fief par préciput ; car en ce cas, il seroit permis au fils ainé de provoquer & demander un nouveau partage, cette voye de droit seroit ouverte au fils ainé, sans même avoir besoin de Lettres de Relevement ou de Rescision contre son choix, option & acceptation ; mais en tant que besoin, il seroit plus sûr d’en prendre.
Aprés la mort du pere ou de la mère, par rapport aux Fiefs qui sont dans la succession de l’un où de l’autre, le fils ainé majeur peut vendre, céder, transporter, échanger, aliéner, donner & disposer de son droit d’ainesse, ainsi & de la manière qu’il le jugera à propos ; mais le choix & l’option que l’ai-né fait de prendre un droit d’ainesse & un préciput dans la succession échdé, doivent préceder les Actes d’aliénation, & il faut qu’il déclare avant toutes choses son intention ; car par nôtre. Coutume, il ne suffit pas au fils ainé, pour rendre une semblable aliénation valable, que le droit lui soit acquis par la mort de son pere ou de sa mere, & que la succession fût échûë, il faut en outre que comme le droit d’ainesse ou préciput est un privilege personnel & attaché à la personne de l’ainé, & qu’il n’est acquis à l’ainé qu’en vertu de son choix, option & déclaration, la déclaration de choix & d’option de la part de l’ainé, donne l’effet à l’alienation, autrement l’aliénation deviendroit inutile si le fils ainé venoit à mourir sans avoir fait cette déclaration ; Arrest du même Parlement, du 21 Juillet 162x.
Le fils ainé en renontant à la succession de son pere on de sa mere, renonce pareillement au droit d’ainesse qu’il auroit eû dans cette succession, & ce seroit au second fils à qui passeroit le droit d’ainesse, comme le premier aprés le fils ainé, dans l’ordre de la naissance : mais si le fils ainé, aprés s’être porté héritier, renonce dans la suire volontairement & gratuitement à son droit d’ainesse, & ne veut point choisir de préciput, le Fief qu’il auroit eû droit de pren-dre par préciput, se met en partage avec les biens de la succession, sans néanmoins pouvoir le diviser, & sans que le second frere puisse le prendre par pré-ciput ; mais s’il y avoit dans la succession un autre Fief, le second fils le prendroit par préciput.
Lorsqu’il y a plusieurs Fiefs dans une même succession, le second frere peut aprés le choix, option & déclaration du fils ainé sur le Fief qu’il entend prendre puur son droit d’ainesse & préciput, choisir un autre Fief pour son préci-put, ainsi des autres puinez, tant qu’il y aura des Fiefs dans la succession ; & même dans ce cas, les puinez ne sont pas obligez pour pouvoir choisir un Fief, d’attendre que leur frère ainé ait fait son choix, option & déclaration, ils peuvent faire leur choix, encore que leur freère ainé n’ait point fait sa déclaration & son choix, pour le Fief qu’il entend prendre pour son droit d’ainesse.
En coneurrence de deux fils ainez, l’un né avant le mariage, mais légitimé par le subsequent mariage, l’autre né pendant le mariage, le fils ainé né pendant le mariage sera préferé au fils ninéné avant le mariage pouu le droit d’ai-nesse, à cause de la naissance du fils ainé, né pendant le mariage, au lieu que le fils ainé, né avant le mariage, est un enfant de débauché & de libertinage.
Le fils ainé du fils ainé, a le même droit d’ainesse, qu’auroit eû son défunt peère dans la succession.
Le droit d’ainesse a lieu sur les Fiefs & Terres nobles tenuës du Domaine du
Roy par engagement au jour de la succession ouverte ; & lorsque dans la suite & depuis le choix & l’option du fiis ainé, même avant le partage fait. & par-fait des biens de la succession, il plait au Roy de retirer son Domaine engagé, & de rembourser le prix de son engagement, les deniers provenans de ce remboursement, appartiennent au fils ainé, jusqu’à concurrence de son droit d’ai-nesse & préciput, qu’il avoit opté & pris dans les Fiefs engagez, sans que les puinez puissent prétendre que ces deniers doivent être partagez par égale portion comme un effet mobilier ; de sorte que si tout le Fief engagé appartenoit à l’ainé lors du remboursement, tout le prix du rembour sement appartiendroit à l’ainé, parce que le droit étoit acquis au fils ainé, sur les Fiefs du juur de T’ouverture de la succession & de somchoix, option & déclaration.
Il faut dire la même chose des Fiefs, & Terres nobles tenuës & possedées par Contrat de vente à faculté de remerer ; car si lors de l’option ; choix & déclaration faite par le fils ainé, & lors du parrage, la faculté de remerer est exercée, les deniers provenans du reméré & du remboursement du prix de la vente, appartiendront à l’ainé, jusqu’à concurtence de son droit d’ainesse & préciput.
Le Fief que le fils ainé a droit de prendre dans chaque succession, tant paternelle que maternelle, n’est pas un préciput, ni un avant-part, c’est la portion néreditaire du fils ainé, & en prenant ce préciput, il est tenu d’abandonner tous les autres immeubles de la succession, tels qu’ils soient, nobles, roturiers, en Bourgage, en franc-aleu, rentes & tous autres immeubles à ses freres puinez, sans y pouvoir rien prétendre directement ni indirectement ; & même il doit contribuer aux dettes de la succession, pro modo émolumenti seulement, de sorte que si tous les biens de la succession consistoient en un seul Fief, l’ainé qui auroit déclaré & opté le prendre, en payant le tiers à vie aux cadets, payeroit lui seul toutes les dettes de la succession, generalement quelconques, & le tiers à vie des cadets, ne contribuéroit qu’aux interêts ou arrerages du tiers des dettes, si les dettes portoient des interêts ou arrerages, & le fils ainé payeroit en outre le mariage avenant des filles.
Le fils ainé, outre & par-dessus le Fief qu’il choisit pour son préciput & droit d’ainesse, prend une part égale avec ses puinez dans les meubles & effets mobiliers.
Des que le fils ainé majeur a une fois choisi, opté & pris un Fief pour son droit d’ainesse & préciput, il ne peut plus varier ni changer de volonté & de sentiment, à moins qu’il n’y eût eu une erreur ou lésion notable du dol, & une tromperie manifeste dans son choix & option ; & même si son Tuteur avoit fait le choix & option, il ne pourroit pas, devenu majeur, revenir contre aprés dix années de sa majorité ; mais s’il venoit dans les dix ans, & qu’il fit voir qu’il a été trompé & lésé par le choix & l’option que son Tuteur avoit faite du Fief que ses cadets veulent qu’il lui demeure, il seroit restituabie & il seroit admis à faire un nouveau choix & une nouvelle option, & à demander un nouveau parrage ; mais toûjours faudroit-il en tant que besoin des Lettres du Prince, de Relevement ou de Restitution, parce que factum Tutoris factum pupilli, du moins cette voie seroit plus sûre.
Le droit de choix & option du fils ainé passe à ses héritiers dans les successions directes, mais non à ses créanciers ni au Fisc, subrogez à ses droits ; car le droit d’ainesse n’appartient point aux créanciers du fils ainé, ni au Fise, à moins que le fils ainé n’eût fait avant sa mort sa déclaration qu’il optoit, choisissoit & prenoit un tel Fief pour sa portion héreditaire ; ce seroit en ce cas un droit qui seroit in bonis du fils ainé, & qui seroit acquis à ses créanciers & au Fise par sa mort ; c’est tout comme si au jour de son déces, il eût été propriétaire & possesseur actuel du Fief qu’il avoit déclaré choifir & prendre pour son droit d’ainesse & préciput.
Il est permis à la vérité, au fils ainé de prendre & choisir un Fief pour sa portion héreditaire dans chaque succession paternelle & maternelle, du pere, de la mere, ayeul ou ayeule, & autres ascendans tant paternels que maternels, lorsque les successions ne sont point confuses, & qu’elles sont au contraire distinctes & séparées, mais il ne peut avoir deux droits d’ainesse & préciput en
Chaque succession, dans une feule & même Coûtume ; ainsi si la succession est pouverte., & les Fiefs situez dans la Coûtume generale, il faudra regler le droit d’ainesse sur la Coûtume generale ; si au contraire la succession est ouverte dans la Coûtume particulière de Caux, & si les Fiefs y sont situez, l’ainé y prendra son droit d’ainesse suivant qu’il est réglé par la Coûtume particulière de Caux ; d’où vient que s’il y a des Fiefs dans ces deux Coûtumes, l’ainé pourra prendre un précipur dans le Fief situé dans la Coutume generale, & un préciput dans le Fief situé duns la Coûtume particulière de Caux.
En succession collaterale, le frère ainé a aussi la faculté de choisir & prendre par préciput le Fief qui se trouvera dans la succession : & si cette Iuccession se partage par droit de répresentation & par souches, les puinez d’une souche ne peuvent empécher que leur ainé ne choisisse un des lots, dans lequel il y aura un Fief, dans le dessein de le prendre par préciput, encore bien que ce lot ne consistat que dans ce Fiefs Arrest du même Parlement, du 1s Juin 1595.
Le droit d’ainesse n’est ouvert que par la mort naturelle ou civile des pere, mere ou autres ascendans, ou autre parent collaterale.
ARTICLE CCCXXXVIII.
E T au cas que l’aîné choisisse ledit Fief noble par préciput, il laisse le reste de toute la succession à ses puînez.
Cette disposition s’entend du surplus de tous les biens immeubles de la suecession, mais non des meubles & effets mobiliers ; car quant à ces derniers biens, le fils ainé y a sa part égale avec ses puinez, nonobstant qu’il ait opté, choisi & pris un Fief noble par préciput pour sen droit d’ainesse.
Comme les Offices sont aujourd’hui censez des immeubles, le sils ainé qui a choisi un Fief par préciput, n’a rien dans les Offices, soit domaniaux, héreditaires ou autres tels qu’ils soient ; Arrest du Parlement de Roüen, du 9 Août 1667. Et suivant la Jurisprudence de ce Parlement, les Offices domaniaux & héreditaires se partagent suivant la Coûtume du lieu où les droits & émolumens de ces Offices se perçoivent, & non suivant la Coûtume du lieu où le Titulaire de l’Office est domicilié, parce qu’on estime dans cette Province que ces Offices ont plus de réalité que de perlonnalité ; mais quant aux autres Ossices qui n’ont que de simples fonctions, c’est la Coutume du lieu où demeure le Titulaire, qu’il faut suivre dans le partage de ces fortes de Charges.
L’option donnée au fils ainé par cet article, est de pure faculté & liberté ; il dépend de l’ainé de prendre ou ne pas prendre un Fief par préciput dans chaque succession, & de demander le partage, s’il ne vouloit point prendre le droit d’ainesse.
Il est permis aux puinez d’abandonner au fils ainé le surplus de tous les biens immeubles de la succession, pour prendre une pension à vie sur le Fief que l’asné a choisi, opté & pris par préciput ; & cette provision à vie sera sur le pied de la valeur du tiers du Fief, comme s’il n’y avoit qu’un seul Fief dans la Iuecession pour tous biens, sans rotures, si mieux n’aime l’ainé donner à ses puinez la joüissance & l’usufruit du tiers du fruit, pour en joüir par eux-mêmes, & en percevoir les fruits & revenus par leurs mains.
Comme cette provision à vie tient lieu d’alimens aux puinez, elle ne peut être saisie par leurs créanciers, & les puinez en peuvent demander vingt-neuf années, encore bien qu’il n’y eût point eû de poursuites pour en être payé.
ARTIeLE
ARTICLE CCCXXXIX.
E T si en chacune desdites successions, il y a encore d’autres Fiefs nobles, les autres freres les peuvent choisir par préciput selon leur aînesse, chacun en leur rang.
Le droit d’ainesse n’est pas borné au fils ainé ; car isi dans le succession il y à plusieurs Fiefs nobles, il est permis au frere puiné qui suit immediatement le frère ainé, de prendre un Fief dans chaque successiun par préciput, & sa part dans les meubles, en abandonnant par lui aux autres puinez tous les autres biens immeubles des successions, & en payant sa part des dettes, pre modo émolaementi, & en contribuant au mariage avenant des soeurs non mariées ; ainsi des 3 autres puinez, s’il y avoit encore des Fiefs, suivant l’ordre de primogeniture de chaque cader ; de sorte qu’autant qu’il y aura de Fiefs dans une succession, le frere ainé & ses puinez pourront les prendre par préciput, chacun selon son ainesse & en son rang de primogeniture ; & au cas qu’il y eût autant de Fiefs que d’ensans mâles, aprés que chaque enfant mâle aura choisi & pris un Fiefdans la succession, entre tous les enfans, le surplus de tous les biens en roture & en effets mobiliers se partagera par égale portion, à la charge de contribuer également aux dettes de la succession, & au mariage avenant des soeurs non mariées.
ARTICLE CCCXL.
A Près le choix fait du Fief ou Fiefs nobles par l’aîné ou par les aînez à droit de préciput, les puînez partageront entre eux tout le reste de la succession.
a droit de préciput, c’est-àdire, a droit de choisir, opter ou prendre un Fief dans chaque succession pour la portion héréditaire, mais non pas hors part ; & ce droit de préciput, choix & option appartient à chaque enfant mâle tant qu’il y a des Fiefs dans la succession ; ainsi le frere ainé lorfqu’il y a plusieurs Fiefs dans une succession, n’a d’autre prérogative sur ses freres que celle de choisir le premier ; mais il se pourroit faire que le Fief qu’il choisiroit, vaudroit mieux que les autres, ce qui seroit une bonne fortune pour lui, gauderet de bonâ sud Tortunâ, sans que les puinez y pussent trouver rien à rédire ; mais d’un autre côté si le frere ne vouloit point choisir ni prendre un Fief par préciput, cela n’empécheroit pas que les puinez, chacun selon leur droit de primogeniture & le nombre des Fiefs, ne pussent choisir & prendre un Fief ou des Fiefs dans chaque succession, parce que leurs droit ne dépend point du droit de leur frere ainé.
Tout le reste de la succession, à la réserge des meubles & effets mobiliers, dans lesquels les freres qui prennent un ou des Fiefs par préciput, ont parr égale avec les puinez qui n’ont point de préciput ; il n’y a donc que les imnteubles roturiers, dans lesquels les mâles qui ont eu un préciput, n’ont rien, ils appartiennent en toralité aux cadets qui n’ont point eû de préciput faute de Fiefs, & le partage s’en fera entre eux par égale portion.
ARTICLE CCCXLI.
L’Aîné ou autre ayant pris par préciput, avenant la mort de l’un des puînez, ne lui peut succeder en chose que ce soit de la succession, ains lui succederont les autres freres puînez ayans partagé avec lui, & leurs descendans au-devant de l’aîné.
Lorsque le fils ainé ou autre frere qui le fuit, eû égard au nombre des Fiefs qui se trouvent dans la succession, n opté, choisi & pris un Fief dans la succestion des pere & mere ou autres ascendans, il est exelu de la succession de ses freres cadets décedans sans enfans, dans tous les immeubles roturiers que le frere puiné avoit pris dans la succession en laquelle le frere ainé ou au tre avoit D1 pris un Fief pour sa portion héréditaire ; tous ces immeubles appartiennent en toralité aux puinez & à leurs descendans, privativement & à l’exclusion du frere ainé ou autre frere qui avoit eu un Fief pour sa portion héréditaire ; mais quant aux meubles & effets mobiliers qui se trouvent dans la succession d’iin puiné qui n’aipoint eu de Fief, & qui est mort sans enfans, le lrere ainé ou autre Cadet qui aura eu un Fief, les partagera avec tous les painez par égales portiens.
Mais si tous les freres, tant l’ainé que les puinez, étoient morts, les répreientans l’ainé ne seroient pas exclus d’entrer en partage de la succession de l’un de leurs cousins, descendu d’un des puinez, par les enians & répreientans des autres puinez ; la succession roturière de ce cousin mort sans enfans, seroit partagée également entre les descendans & répresentans le frère ané, & les descen-dans & répresentans les purnez ; car la disposition de cet article regarde seulement la succession du frere puiné, dans laquelle le frere ainé ou autre puiné, qui aura pris un Fief, n’a rien dans les héritages & immeubles roturiers ; ces sortes de biens trouvez dans la succession de l’un des puinez qui n’a point eu de Fiefs, appartiendront en totalité aux autres puinez.
Si un frere puiné avoit vendu la part des rotures qu’il avoit euë dans le partage de la succession de son pere où de sa mere ou aûtre afcendant, & s’il les avoit remplacées en l’acquisition d’un Fief ou autres biens situez dans une Coûtume différente ; par exemple, ceux situez dans la Coûtume generale, remplacez dans la Coûtume de Caux, & ceux situez dans la Coutume de Caux, remplacez dans la Coûtume generale, l’ainé y prendra le Fief par préciput, à l’exclusion des puinez ou leurs descendans, quand même ce Fief seroit situé dans la Coutume où étoient les rotures, venduës & remplacés en un Fief, & partagera avec les cadets ou leurs descendans les biens remplacez dans une autre Coûtume, suivant la Coûtume de leur situation ; parce que non seulement les successions se partagent en l’état qu’elles se trouvent au rems de leur échéance, mais encore parce que les héritages se partagent selon la Coûtume du lieu de la situation de ceux ausquels ils sont subrogez ; Art. 67. du Reglement de 1666. Car un bien paternel ou maternel est toujours le même par la voye de la subrogation, mais quant à sa qualité de noble ou de roturier, il l’a perd. Quoique le frere ainé, ou autre son puiné, ait pris & choisiun Fief dans chaque suc cession des péré, mere ou autre ascendant, il n’est pas néanmoins exelu des acquêts & conquêts immeubles de ses freres puinez qui décedent sans enfans ; il y prend sa part avec les autres puinez, ainsi que dans les meubles & effets mobiliers avec les autres puinez, suivant la Coûtume sur les successions collaterales ; le frere ainé ou autre qui aura pris un Fief dans la succession directe, est seulement exelu de la succession de ses freres puinez décede sans en-sans, dans les immeubles roturiers que les freres puinez avoient eu dans la succession directe en laquelle le fils ainé avoit choisi & pris un fief pour sa portion héréditaire Mais le frere ainé, au défaut de ses freres puinez & de leurs descendans, sucgede en tous leurs biens, meubles & immeubles, nobles ou roturiers, priva-tivement & à l’exclusion de leurs soeurs : mais s’il n’y avoit que des soeurs pour héritieres, elles y viendroient également, & même les soeurs mariées seroient tenuës de rapporter ce qui leur auroit été dunné en mariage par les pere & mere ou par leur frere aine, ou moins prendre, parce que c’est encore là en quel-que manière la succession du pere.
ARTICLE CCCXLII.
N Eanmoins s’il y avoit aucun Fief partagé avec les autres biens de la succession, sans avoir été choisi par préciput, avenant la mort de celui au lot duquel il est échû, l’aîné ou ses répresentans succedent en ce qui est noble, & peut prendre ledit Fief par préciput.
Le sens de cet article ; est que lorsque dans la succession d’un frere puiné qui décede sans enfans, il se trouve un Fief qui a été parragé entre tous les puinez par estimation, avec les rotures & autres biens de la succession directe, en ce cas le frere ainé, ou ses répresentans, peut choisir, prendre ou retenir ce Fief par préciput pour sa portion héréditaire dans la succession de ce puiné, mais non les héritages & immeubles roturiers ; ce qui a lieu, soit que le fils ainé eût pris un autre Fief par préciput dans la succession directe, soit qu’en re-nonçant à son droit d’ainesse, il eût partagé la succession directe avec ses freres puinez, comme s’il n’y avoit point eu de Fief ; car quoique l’ainé qui a pris un Fief par préciput soit exclu du reste des immeubles roturiers de la succession directe, néanmoins lorsqu’il y a un Fief qui a été mis en pagtage avec les autres biens de la succession sans avoir été choisi ni pris par préciput par aucun des puinez, le frère ainé succede à ce Fief, c’est-à-dire, qu’il le peut prendre par choix & option pour sa portion héréditaire dans la succession d’un des puinez mort sans enfans, en abandonnant par lui à ses cadets les immeubles roturiers.
Quand cet article parle de Fief partagé, cela ne veut pas dire qu’un Fief se partage réellement & en essence entre les héritiers mâles ou répresentans les mâles, parce que dans ce cas les Fiefs sont indivisibles, mais cela s’entend par estimation du Fief ; & c’est la valeur du Fief suivant l’estimation, qui est partagée sur le pied que chaque partageant à dans le Fief, & le Fief demeure en son integrité à celui des puinez qui le portera plushaut ; si même les puinez n’en vouloient point, le frère ainé le pourroit prendre sur le pied de l’estimation.
Mais si dans la même suc cession du frere puiné décedé sans enfans, il y avoit d’autres Fiefs provenus des successions directes, lesquels auroient été mis en partage avec les autres biens, mais qui n’avoient point été choisis, optez ni pris par aucun autre des puinez, & qui avoient été délaissez sur le pied de l’estimation au puiné décede sans enfans, les autres puinez pourront les prendre selon leur rang de primogeniture ; car chaque frere ainé ne peut de son chef choisir par preciput pour sa portion héréditaire qu’un seul Fief dans une même succession.
ARTICLE CCCXLIII.
A Venant le décès du fils aîné avant les partages faits de la succession qui leur est échuë, le plus aîné des freres survivans, peut choisir tel Fief qu’il lui plaît, à la répresentation & comme héritier de son frere aîné, sans préjudice du droit de préciput qu’il a de son chef ; & ne peuvent, les autres freres prétendre aucune part, provision ni récompense sur ledit Fief.
Le premier, puiné selon l’ordre de la naissance, peut en qualité d’héritier de sson frère ainè mort sans enfans depuis les successions échuës, & avant que son frère ainé eût fait sa déclaration, choix & option de son préciput, & avant le partage dies successions, en un mot, omnibus rebus integris, choisir & prendre dans les suceessions directes le Fief ou les Fiefs que son frère ainé avoit droit de choisir & prendre dans les successions par préciput & pour sa portion héré. ditaire, ou tel ou tels autres Fiefs qu’il voudra choisir ; & en outre ce même puiné, comme héritier de ses pere & mere ou autre ascendant, prendra de son che f comme premier puiné dans la même succession, un autre Fief, s’il y en 4 ; en sorte que ce puiné a dans ce cas double préciput dans une même succession, & s’il y avoit plusieurs successions où la même chose seroit arrivée, il quroit dans toutes deux préciputs, ce seroit là une bonne fortune pour ce puiné : mais il en seroit autrement si le frère ainé étoit mort sans enfans apres avoir fait sa déclaration, choix & option du Fief ou des Fiefs, & aprés les partages faits : le premier puiné n’auroit plus de préciput du chef de son frère ainé, & comme répresentant & héritier de son frère ainé, il n’auroit que son droit de préciput de son chef, s’il y avoit d’autres Fiefs dans les successions, en qualité d’héTitier de ses pere, mere où autre ascendant ; & à l’égard du Fiefou des Fiefs que le frère ainé avoit choisis & pris, ils tomberoient avec ses autres biens dans sa suecession, comme succession collaterale, suivant les droits successifs de tous les puinez : mais dans ce cas le premier puiné prendra dans la succession collaterale de ce frère ainé tel Fief qu’il voudra choisir de ceux qu’il y trouvera par préciput & portion héréditaire dans sa succession, même y prendra sa part dans sies meubles, il n’y aura que les héritages & immeubles roturiers où il n’aura rien, ils appartiendront en total aux autres puinez.
Dans le cas que le premier puiné auroit un droit de préciput, comme répresentant & héritier de son frère ainé, ce droit ne lui appartiendroit pas seule ment si le frere aisé décedoit sans enfans avant son option & choix & le partage de la succession, mais encore si le frere ainé étoit mort civilement depuis la succession ouverte & avant son choix & option & les partages ; mais s’il etoit mort de mort naturelle ou civile depuis, le Fief ou les Fiefs par lui optez, choisis & pris dans les successions directes, tomberoient dans la succession collaterale aux droits successifs de tous les puinez suivant la Coutume, ou au Con-fiscataire.
Les freres puynez ne peuvent prétendre ni demander aucune provision à vie, ni indemnité ni récompense, ni encore moins aucune part ni légitime dans le Fief que leur premier frere puiné prend par option & choix en qualité d’héritier de son frère ainé décedé naturellement ou civilement sans enfans, & comme le répresentant, d’autant que dans une succession collaterale, où il n’y a qu’un Fief, le premier puiné le prend en entier sans que les autres puinez y ayent rien ni en proprieté ni en usufruit ; il n’y a que dans les successions directes, où les puinez ont le tiers à vie sur un Fief qui est l’unique effet de la succession, & ce Fief appartient à la vérité au fils aine s’il le veut prendre par préciput pour sa portion héréditaire, mais à la charge d’une provision à vie sur le pied de la valeur du tiers du Fief au profit des puinez ; car il lui est permis de ne point pren-dre ce Fief, il peut le mettre en partage suivant l’estimation qui en sera faite sur sa juste valeur, laquelle sera répartie entre tous les cadets, suivant les droits successifs d’un chacun.
ARTICLE CCCXLIV.
P Areillement avenant la mort du second fils avant les partages faits de la succession, l’aîné peut prendre par préciput, comme héritier de son frere, le Fief qu’il eût pû choisir de son chef, & ainsi consécutivement des autres, tant qu’il y a Fief en la succession.
Cet article donne au frere ainé le même avantage que l’article précedent aecorde au second frere, qui est que si le second frere vient à déceder naturellement ou civilement sans enfans depuis la succession échuë & avant le partage des biens de la succession, son frère ainé, comme héritier de son frere, pourra choisir & prendre par préciput tel Fief que ce second frère avoit droit de choisir & prendre dans chaque succession ; & le frère ainé a cette même prérogative, lors-que les autres puinez vionnent à déceder sans enfans depuis louverture de la succession & avant le partage, tant qu’il y 2 des Fiefs : mais si la mort naturelle ou civile de ce second frere arrivoit aprés son option & le partage de la succession, cette prérogative cesseroit, ce second frère ayant pleinement consommé son droit, puisqu’il avoir opté, choisi & pris lui-même un Fief par droit de préciput, ce Fiei étoit dans sa succession, & non pas un simple droit potestatif & de faculté, de forte que tous ses héritiers, Créanciers ou le Fise auroient droit sur ce Fief, sans que le frere pût exciper de la prérogative à lui donnée par cet article, d’autant qu’il ne l’avoit qu’au cas que son second frere ne l’eûr point consommée ; & comme la chose étoit faite de son vivant, le frere ainé n’a plus la même faculté, il n’ést même que son hé : itier avec les autres puinez ; cependant il faut convenir que s’il n’y avuit qu’un seul Fief dans la suecession de ce second fils puiné, il auroit droit de le choisir & prendre par pré-ciput aux charges de droit & d’en faire raison aux puinez par une provision à vie a raison du tiers du revenu du Fief.
Il y a une derniere observation bien importante à faire en cet endroir, qui est que si un frere ainé ou autre, par l’ordre de primogeniture, décedoit sans enfans de mort naturelle où de mort civile avant avoir déclaré, choisi, opté & pris un Fief, cette faculté passeroit seulement au frère ainé son héritier, & non à ses Créanciers ni au Tisc, il faudroir que le frere qui auroit un droit de préciput, eût consommé son droit par sa déclaration, choix & option d’un Fief avant sa mort, alors ses Créanciers ou le Fise auroient droit sur ce Fief.
ARTICLE CCCXLV.
L E Fisc ou autre Créancier subrogé au droit de l’aîné avant le partage fait, n’a le privilege de prendre le préciput appartenant à l’aîné à cause de sa primogeniture, mais aura seulement part égale avec ses autres freres.
Le droit de préciput ne passe point aux Créanciers du frère ainé, tels qu’ils soient, ni au File, quoiqu’ils apprehiendent la succession & qu’ils se soient fait subroger à son droit & soient en son lieu & place ; ils ne peuvent opter, choisir & prendre un Fiel dans la succession, comme le frère ainé l’auroit pû faire, ils partagent la succession dans laquelle le frere ainé avoit un droit d’ainesse & de primogeniture, également & par égales portions avec les autres freres puinez, lesquels seront lemma="CONSERVER" pos="Ge" dans tous leur droits : cette question fut jugée de la sorte au Parlement de Roüen en présence du Roy Charles IX. C’est une remarque que j’ai trouvée dans un Plaidoyé de M. l’Avocat general Talon an Parlemens de Paris, en 1626, il n’en dit pas davantâge, il ne cite pas même l’Arrest.
Il ne faut portant pas s’imaginer que quoiqu’en ce cas le partage de la succession foit égal, tant à l’égard des des Fiefs qu’à l’égard des rotures, il faille pour cela diviser & partager les Fiefs ; on se tromperoit, parce que duns notre Coûtume les Fiefs sont indivisibles entre mâles ; mais il faut dire qu’on fait estimer les Fiefs, & on les laisse à celui des partageans, qui fait la condition des autres meilleure & plus avantageuse, & celui à qui il demeure pour la prisée, donne à chaque copartageant son contingent dans le prix de l’estimation ; c’est tout ce que les Créanciers du frere ainé ou le Fife pourront prétendre dans la succession, mais non pas un droit d’ainesse & de préciput.
Mais si l’ainé avoit lui-même consommé son droit de primogeniture par le partage de la succession & par son choix & option d’un Fief, ses Créanciers & le Fisc auroient droit sur ce Fief à l’exclusion des puinez, & une part égale aux puinez dans les meubles & effets mobiliers ; & à l’égard des autres biens de la succession, ils appartiendroient en entier aux autres puinez avec leurs parts dans les meubles & effets mobiliers ; & même si dans la succession il n’y avoit eû que ce Fief, & lequel avoit été pris par le frère ainé, sans aucuns autres immeubles, les Créanciers de l’ainé ou le Fife ne pourroient avoir ce Fief qu’en faisant raison aux puinez, ainsi & de la manière que le frere ainé auroit été obligé de faire, c’est-à-dire, de faire & continuer une provision à vie aux puinez, jusqu’à concurrence du tiers de la valeur du Fief-
ARTICLE CCCXLVI.
Q Uand il n’y a qu’un Fief pour tout en une succession sans autres biens, tous les puînez ensemble ne peuvent prendre que provision du tiers à vie sur ledit Fief, les rentes & charges de la succession, déduites.
Lorsque tous les biens immeubles d’une succession directe, consistent uniquement en un seul Fief, tous les puinez mâles ont seulement tous ensemble une provision à vie de la valeur du tiers du Fief, déduction faite des rentes & charges de la succession & du mariage avenant des filles non mariées, lequel mariage avenant doit leur être payé en essence, héréditairement & en pleine proprieté, & non pas en simple provision à vie, comme on en use en ce cas envers les cadets ; il est vrai que le Fief étant indivisible, il est permis au frere aîné dedans cette rencontre de donner des meubles, Sil y en a suffisam ment dans la succession, la part des puînez prélevée, ou de donner une somme de deniers à ses soeurs pour leur mariage avenant sur le pied de la valeur intrinseque du tiers du Fief, les dettes & autres charges de la succession déduites.
Les meubles & effets mobiliers de la succession n’empêchent point & ne diminuent point la provision à vie des puînez sur le Fief, parce que les puînez ont toujours une part égale dans les meubles & effets mobiliers avec leur frere aîné ; il n’y a que les dettes & charges de la succession, & le mariage avenant des filles, qui puissent diminuer la portion à vie des puînez, comme choses que tous ceux qui prennent la succession à titre d’héritier ou de legitimaires, doivent supporter pro modo emolumenti ; c’est pourquoi le mariage avenant des filles ne se prendroit sur ce Fief, que les dettes & les charges de la succession déduites & prélevées, d’autant qu’elles n’ont leur mariage avenant qu’à titre universel & successif & comme légitimaires.
Dans le cas qu’il y a plusieurs Fiefs dans la succession directe & des meubles, & point d’immeubles roturiers, chaque aîné qui prend un Fief par droit de primogeniture, doit contribuer au payement de la provision à vie des cadets qui ne prennent rien en proprieté dans les Fiefs, & aux autres dettes & charges de la succession, même au mariage avenant des filles, le tout pro modo emolumenti de ce que chaque ainé prend dans les Fiefs.
ARTICLE CCCXLVII.
L Es successions paternelles & maternelles étant échuës avant que l’aîné ait judiciairement déclaré qu’il opte par préciput un Fief, ou gagé portage à ses frères en celle qui premierement étoit échuë, elles sont confuses & réputées pour une seule succession, tellement que l’aîné n’a qu’un préciput en toutes les deux.
L’intention de la Coûtume dans cette disposition, a été d’empécher la multiplicité des préciputs en la personne de l’aîné au préjudice des puînez ; c’est dans cette vûë que comme régulierement parlant, l’aîné ne peut prendre dans une même succession qu’un seul Fief par préciput ; il est dit par cet article, que lorsque les successions de pere ou de mere se trouvent confuses au jour de leur échéance, l’aîné n’a qu’un seul droit de préciput dans l’une & dans l’autre succession, parce que par cette confusion les deux successions sont réputées être une seule & même succession.
Or deux successions sont censées être confuses & ne faire qu’une feule & même succession au jour de leur échéance, par rapport au préciput de l’aîné en deux manières ; l’une, si avant qu’elles fussent échuës, l’aîné n’avoit pas fait sa déclaration en Iustice, qu’il optoit & prenoit un Fief par préciput dans chaque succession ; l’autre, s’il n’avoit pas déclaré judiciairement qu’il gageoit partage à ses puinez, c’est-à-dire, qu’il renonçoit à prendre un Fief par préciput dans chaque succession, & qu’il entendoit que tous les biens, meubles & immeubles, nobles ou roturiers, fussent mis en partage, pour en donner à chaque cohéritier son contingent suivant la Coûtume, sans quoi les successions sont réputées confuses & n’être plus qu’une seule & même succession par rapport au droit de préciput ; de sorte que l’aîné pour empêcher cette confusion & se conserver son droit de préciput dans chaque succession, est indispensablement obligé de prendre cette précaution, autrement il n’aura qu’un seul droit de préciput dans l’une & l’autre succession.
Cette déclaration par le fils aîné d’opter un Fief dans chaque succession, ou de s’en tenir au partage qui sera fait des successions, non seulement doit être formelle & précise, mais elle doit encore être faite judiciairement, c’est-à-dire, coram Praetore, & il en doit demeurer un acte au Greffe, sans cependant qu’il soit nécessaire d’y appeller les puînez, d’autant que les puînez ne pourroient pas empêcher cette déclaration ; de maniere qu’il ne sussiroit pas à l’aîné de faire signifier par un exploit cette déclaration aux puênez ; si cependant cette déclaration avoit été faite devant Notaire avec minute, & qu’ensuite l’aîné eût fait signifier & donner copie de cet acte aux puînez dans le tems, il seroit dur de n’avoir pas égard à une pareille déclaration ; mais il est plus sûr de la faire judiciairement pour satisfaire litterallement à la Coûtume ; car en matière de formalitez on ne peut être trop scrupuleux & trop circonspects.
La déclaration faite judiciairement ou en jugement par l’aîné de l’option d’un Fief dans chaque succession échuë, ou de partager avec ses cadets également toute la succession échuë sans y prendre de préciput, empêche que les deux successions ne soient confuses & réputées pour une feule & même succession, & sans cette précaution l’aîné n’auroit qu’un seul préciput en l’une & en l’autre succession.
Mais d’un autre côté il n’y a confusion par rapport au droit de préciput que lorsqu’il se trouve des Fiefs dans les deux successions, & non pas lorsqu’il n’y a qu’un seul Fief dans une succession, & des rotures dans l’autre ; car l’aîné peut prendre en ce cas, outre le Fief, le préciput roturier dans la succession, où il y en un, encore que les deux successions foient confuses ; Arrests du Parlement de Normandie, des 16. Janvier 1649. & 20. Mai 1672.
Comme par la Coûtume particulière du pays de Caux le préciput est acquis à l’aîné de plein droit, sans que l’aîné soit tenu de déclarer en Justice ni autrement qu’il opte un préciput dans la succession échuë, il ne se fait point de confusion de successions à cet égard, d’aîné est en droit de prendre son préciput sur la succession échuë la premiere & en tout tems, même depuis l’echéance de l’autre succession paternelle ou maternelle ; Arrests du même Parlement, des 15. Juillet 1659 & 13. Mars 1671.
Cette confusion de successions par rapport au préciput sur les Fiefs & Terres nobles, n’est admise & n’a lieu que dans les successions des pere & mere, & non dans toutes autres successions, soit d’ayeul, ayeule ou autres afcendans, soit collaterales ; c’est pourquoi le petit fils à la répresentation de son pere & de sa mere, peut prendre un préciput en la succession de son ayeul ou ayeule, échuë depuis la mort de son pere ou de sa mère, encore qu’il n’ait fait aucune déclaration d’opter un préciput dans la première succession, avant l’echéance de la seconde succession, pourvû que les deux Fiefs qui se trouvent dans ces successions, ne proviennent pas de la même personne & de la même souche.
ARTICLE CCCXLVIII.
M Ais si l’aîné a fait judiciairement déclaration du Fief qu’il prend par préciput, ou gagé partage à ses puînez avant l’echéance de la seconde succession, il aura preciput en chacune des deux, encore que le partage n’ait été actuellement fait ; & par le moyen de ladite déclaration judiciaire, les deux successions sont tenuës pour distinctes & séparées pour le regard des freres puînez.
La déclaration faite par l’aîné en jugement qu’il opte de prendre un Fief par pérciput dans la succession du pere ou de la mere, échuë, où qu’il entend partager également toute la succession avec ses puînez sans y prendre un Fief par préciput, lui conserve le droit de prendre un Fief par préciput dans la succession de son pere ou de sa mere, qui échéra dans la suite ; & par ce moyen il aura préciput en chacune succession, parce qu’au moyen de cette déclaration ces deux successions sont réputées distinctes & séparées par rapport à son droit de préciput à l’égard de ses puînez : mais il faut que cette dé-claration judiciaire soit faite par l’aîné avant l’échéance de la seconde succession, sans cependant qu’il soit nécessaire que le partage fût fait, & le préci-put pris avant l’échéance de la seconde succession, pour conserver le droit de préciput à l’aîné dans l’une & l’autre succession & empêcher la confusion des deux successions, il suffit que l’aîné eût judiciairement déclaré son intention, le partage & le choix actuel & réel du préciput, n’étant que la suite & l’exécution de la déclaration.
ARTICLE CCCLXIX.
S I l’aîné est mineur, son Tuteur doit faire ledit choix, & à faute de le faire dans le tems dû, doit répondre de tous dommages & interêts à son pupille.
L’aîné quoique mineur, est obligé de faire sa déclaration, & dans le tems de la Coûtume, c’est-à-dire, avant l’échéance de la seconde succession, pour se conserver un droit de préciput dans l’une & dans l’autre succession qui échéent l’une aprés l’autre, ou du moins son Tuteur pour lui & en son nom, aprés lequel tems lui & son Tuteur ne seroient pas recevables à vouloir faire cetre dé-claration, le mineur ne seroit pas même restituable contre le defaut de déclaration,, nonobstant la perte qu’il feroit & la lezion qu’il souffriroit de cette omission, il n’a que son recours en dommages & interêts contre son Tuteur, solva-ble ou non solvable ; cette rigueur de la loi est grande, mais elle a pour fondement la condition des puînez qui sont assez maltraitez dans les successions de biens nobles par leurs aînez, sans encore donner plusieurs préciputs aux aînez en de certains cas, qu’en satisfaisant exactement & litteralement aux conditions sous lesquelles ces differens préciputs leur sont accordez.
Si les mineurs ne sont pas restituables contre le défaut de déclaration, soit pour n’en avoir point fait, soit pour ne l’avoit pas faite dans le tems de la Coûtume, à plus forte raison les absens ne le sont-ils pas, pour quelque caufe qu’ils soient absens, même pour le service du Prince ou de l’Etat, ou pour captivité ou esclavage chez les ennemis du nom Chrétien ou autres, où parce qu’ils sont prisonniers, même prisonniers chez les ennemis en tems de guerre ou autre cas ; il n’y aura confusion de successions par rapport aux droits de préciput, ils seront déchus de prendre des préciputs dans l’une & l’autre succession, ils n’en auront qu’un seul dans les deux successions, qui par cette omission ne seront à cet égard régardées que comme unc feule & même succession, & non comme deux successions distinctes & séparées.
ARTICLE CCCL.
L’Aîné fils par la mort de ses pere & mere est saisi de leur totale succession, & doivent les puînez lui demander partage.
Nonobstant la maxime que le mort faisit le vif, il semble que suivant cet article les enfans puînez ne sont point saisis de leurs portions héréditaires dans les successions de leurs pere & mère par le décès de leurs pere & mere, puisque cet article porte, que c’est le frere ainé qui est saisi de toute la succession par le décès des pere & mere communs, & que les puînez sont obligez de lui en demander partage ; mais cela n’empêche pas que les puînez ne soient proprietaires de leurs portions afférantes dans les successions de leurs pere & me-re dès l’instant du décès de leurs pere & mère, & le partage qu’ils sont obligez de demander à leur frère des biens de ces successions, n’est que déclaratif de leur proprieté & de la quotité de leurs portions héreditaires dans les biens des successions de leurs pere & mere.
Jusqu’à ce que les puînez demandent partage, leur frere aîné peut seul intenter toutes actions & demandes, & défendre, il joüit de tous les biens, il les exploite & les fait valoir, c’est lui qui en fait les baux & en reçoit les rentes & revenus, donne quittances, en un mot, il a toute la régie & administration des biens de la succession jusqu’à ce que ses puînez lui en ayent demandé partage, & même il en fait les fruits siens, jusqu’à la demande en partage si les puînez sont majeurs ; mais il doit pour sa sureté & pour celle de ses freres puînez, faire faire bon & loyal inventaire des meubles, titres & enseignemens de la succession, même faire dresser procés verbal de l’état des lieux avant de se mettre en possession & joüissance des terres & héritages, principalement s’il y a des mineurs, sans quoi il s’exposeroit à beaucoup d’inconveniens.
ARTICLE CCCLI.
I L doit aussi avoir la saisine des lettres, meubles, & écritures avant qu’en faire partage aux autres puînez, à la charge d’en faire bon & loyal inventaire incontinent aprés le décès, appellez ses freres, & s’ils sont mineurs ou absens, deux des prochains parens ou deux voisins, un Sergent, un Tabellion ou autre personne publique, qui seront tenus signer ledit inventaire.
La primogeniture donne droit au fils aîné de garder les meubles, titres, papiers & enseignemens de la succession jusqu’au jour du partage, à la charge toutefois d’en faire bon & loyal inventaire, & de s’en charger au bas de l’inventaire.
La forme de cet inventaire est ; 1O Qu’il soit fait aprés & immédiatement aprés le décès de la personne de la succession de laquelle il s’agit ; 2O. Qu’il soit fait par un Sergent, Huissier, Tabellion, Notaire ou autre personne publique ; 3O. Qu’il soit fait en présence des puînez ou duëment appellez, s’ils sont majeurs ; & s’ils sont mineurs, en présence de leur Tuteur, s’ils en ont un, ou de deux plus proches parens, & au défaut de parens, en présence de deux plus proches voisins, ou duëment appellez, même formalité pour les absens ; 4O. Que l’Officier qui aura fait l’inventaire, sera tenu de le signer avec les puinez, Tuteur, parens ou voisine selon les differens cas, ou bien sera fait mention qu’ils n’ont pû ou qu’ils ont refusé de signer, de ce interpellez ; 5O. Que l’inventaire soit bon, loyal & fidel, le tout à peine de nullité & de tous dépens, dommages & interêts.
Ce n’est pas assez que le fils ainé soit habile à succeder pour avoir la garde des meubles, titres, papiers & enseignemens de la succession, il faut en outre qu’il soit d’une conduite sage & reglée, & non pas un prodigue & un dé-bauché, qu’il soit solvable, & que le tout soit en sureté entre ses mains, sans quoi on pourroit le priver de cette garde & de ce dépôt ; dans ce cas on mettroit le tout entre les mais d’une tierce personne sure & solvable, dont on conviendroit à l’amiable ou en Justice reglée ; Arrests du Parlement de Normandie, des 2. Aoust 1650. & 24. Fevrier 1652.
La peine du fils aîné qui ne feroit point d’inventaire des meubles, titres, papiers & enseignemens de la succession, ou qui auroit fait un inventaire infidel, ne seroit pas pour cela héritier, ni exposé aux dettes de la succession, non-obstant sa rénonciation à la succession, les freres puînez n’auroient que la voye de recelez & de divertissemens, s’il y en avoit ; & s’il se portoit heritier, ils pourroient être reçus à jurer in litem sur la valeur des meubles & effets de la suc-cession, & en outre le frère aîné seroit privé de sa portion dans les meubles & effets divertis, & condamné à des dommages & interêts.
La fille ainée, dans le cas qu’il n’y ait que des filles pour héritieres, doit pareillement être saisie des meubles, titres, papiers & enseignemens de la succession jusqu’au partage ; Arrest du même Parlement, du 9. Juillet 1524, mais il seroit juste en même tems de l’obliger à faire inventaire du toutdans la forme préscrite pour le fils aîné.
ARTICLE CCCLII.
L Es Lettres, titres & enseignemens de la succession, doivent être mis par l’aîné entre les mains du dernier des freres, pour en faire les lots & partages.
Cette disposition est contraire à ce qui se pratiquoit dans l’ancien Testament, suivant lequel c’étoit l’aîné qui faisoit les lots, & les cadets choisissoient ; Abraham comme aîné, fit les lots & donna le choix à Loth son neveu ; Genes. Chap. 13. Ce qui s’observoit encore du tems deSeneque , mujor frater, dit-il, dividit patri monium, minor eligit.
Comime c’est au dernier des puînez à faire les lots, le frère aîné est tenu lors du partage de la succession, de mettre és mains du dernier des puînez, les titres, papiers & enseignemens de la succession, pour par ce puîné sçavoir & connoître la qualité des biens & les charges de la succession, sans quoi il ne pourroit pas faire des lots d’une manière commode & convenable.
Chaque frere pourroit même demander la communication des titres, papiers & enseignemens de la succession pendant un certain tems, avant de proceder au partage de la succession, ayant interêt de connoître par soi-même les biens de la succession, même les filles reservées à partage, ou pour la liquidation de leur mariage avenant.
Aprés le partage fait & parfait, les titres, papiers & enseignemens de la succession, seront baillez & délivrez à chaque cohéritier, chacun par rapport à l’hé-ritage ou immeuble, ou aux effets mobiliers qui seront tombez dans son lot.
Tout ce que dessus sera observé dans le partage qui se fait entre filles, lors qu’à faute de mâles, elles sont seules héritieres.
Par nôtre Coûtume, les lots ne se tirent point au sort, c’est au dernier des puînez, où à la dernière des filles puînées à faire les lots, & le choix en appartient à l’aîné ou aînée, & ainsi des autres, selon l’ordre de primogeniture ; ensorte que le non choix demeure à celui ou celle qui a fait les lots.
ARTICLE CCCLIII.
L E puîné faisant les lots, doit avoir égard à la commodité de chacun desdits lots, sans démembrer ne diviser les pieces d’héritage, s’il n’est necessaire, & qu’autrement les partages ne puissent être également faits, sans séparer aussi les rentes Seigneuriales & foncieres, & autres charges réelles, d’avec le fonds qui y est sujet, & faire enforte que le fonds de chacun lot porte sa charge.
C’est ici la forme des lots ; le dernier des puînez, qui les fait, doit 1O. les faire égaux, si faire se peut, si non il y auroit soulte de partage ; 2O. Prendre garde à la commodité de chaque lot ; 3O. Faire enforte, s’il est possible, que ses piéces d’héritages ne soient démembrées ni divisées, sans une nécessité indispensable, & qu’autrement les partages ne puissent être faits également ; 4O.
Ne point séparer les rentes & redevances Seigneuriales & foncieres, & autres charges réelles d’avec le fonds qui y est sujet, mais que chaque lot porte sa charge, si faire se peut : Si cependant les lots ne peuvoient se faire sans ces démembremens, divisions & séparations, à moins qu’il n’y eût nécessité absoluë de les faire inégaux ; en ce cas, le dernier des puînez, qui les fait, fera le tout pour le mieux, suivant son honneur & sa conscience ; ce n’est pas une petite operation que de faire des lots dans certaines successions par la nature & qualité des biens.
Les lots faits par le Tuteur du dernier des puînez, pour & au nom du dernier des puînez par l’avis des parens, bien & dûëment convoquez & assemblez, ne sont pas moins bons & valables, que ceux faits par le dernier des puînez, majeur, sans qu’on puisse saire passer un partage de cette qualité pour un partage seulement provisoire, il est diffinitif ; de sorte que pour pouvoir le faire casser & déclarer nul, il faudroit qu’il s’y rencontrât une lesion égale à celle pour laquelle des majeurs font déclarer nul un partage ; Arrêt du Parlement de Normandie, du 14 May 1657. Or suivant la Iurisprudence du Parlement de Roüen, la lésion capable de faire déclarer nuls, & faire revoquer des partages entre cohétitiers majeurs, de faire ordonner qu’il seroit fait nouveau partage, est du quart au quint, si mieux n’aiment les autres cohéritiers fournir le juste suplément au cohéritier qui fe plaint ; car enfin il faut qu’il se trouve dans les lots une égalité presque géometrique, parce que le partage est un acte de bonne foy, mais foy parfaite & complette ; une erreur de son droit seroit un moyen valable de rescision, contre un partage, & pour en faire ordonner un nouveau ; Arrest du même Parlement, du 20 Juillet 1618. Et comme un mineur, non restituitur tanquàm minor, sed tanquàm laesus, il seroit obligé de faire voir cette lésion.
ARTICLE CCCLIV.
A Prés les lots faits & presentez par le puîné, chacun des freres en son rang, est reçû à les blâmer avant qu’être contraint de choisir.
Il y a trois choses qui doivent préceder le choix & l’acceptation des lots ; l’une, est la confection ; l’autre, la présentation, & la troisième, le blâme des lots.
Nul des copartageans ne peut contraindre l’autre à choisir, prendre & accepter un lot qu’il n’ait blâmé tous les lors, si bon lui semble.
Or les causes de blâme peuvent être différentes suivant les circonstances du fait, comme sur l’inégalité des lots, sur le démembrement & la division des piéces d’héritages sans nécessité sur la séparation des rentes & redevances Seigneuriales & rentes foncieres, & autres charges réelles d’avec les héritages qui les doivent porter, ou sur autres raisons justes & legitimes ; ces blâmes doivent être rédigez par écrit.
Aprés que les lots auront été blâmez, ils doivent être remis avec les blâmes entre les mains du dernier des puînez, qui avoit fait les lots, pour les réformer si les blâmes sont raisonnables ; mais s’ils sont trouvez déraisonnables par les parens ou arbitres convenus, ou en Justice reglée, il ne sera rien changé aux lots, & il sera procedé à la choisie & distribution des lots : Cependant il est permis au puîné qui a fait les lots, d’y changer, augmenter ou diminuer jusqu’à la choisie & acceptation, quand bien même les autres freres les auroient eû en communication, & les auroient blâmez, sauf à eux à en prendre de nouveau communication, & à fournir de nouveaux blâmes, s’ils en ont.
Le dernier des puinez, aprés avoir fait les lots & les avoir presentez à ses freres pour les choisir, seroit recevable à les faire reformer, encore que ses freres eussent fait leur choix & leur option de leurs lots suivant leur rang, lors que par erreur ce puîné souffre une lesion du quart au quint, sans qu’on puisse lui opposer qu’il avoit fait les lots ; Arrest du Parlement de Normandie, du May 1651. La même chose auroit lieu s’il y avoit lesion du quart au quint dans le lot qu’il avoit accepté & pris ; mais sans lesion, il ne seroit pas recevable dans sa plainte ; Arrest du même Parlement, du 21 Juillet 1665.
Comme les nullitez de droit n’onr point lieu en France, il faut obtenir des Lettres de Relevement ou Rescision en Chancellerie, contre un partage qu’on voudroit faire revoquer.
ARTICLE CCCLV.
L Es lots & partages des puînez, qui ne sont presens lors desdits partages, demeurent en la garde & saisine de l’aîné, jusqu’à ce que lesdits puînez le requierent.
Nous apprenons de cet article, que l’absence d’un cohéritier, telle qu’elle soit, depuis longues années, ou depuis peu d’années, comme cinq, sept ou neuf années, n’est point capable d’arrêter & furceoir le partage de la succession où il a part ; & cela fondé sur le principe de droit, que némo invitus in societate manet : ordinairement, c’est le Procureur du Roy, ou le Procureur Fiscal ; qui assiste au partage pour l’absent, & son lot est mis en la garde & possession du frère aîné, jusqu’à ce qu’il soit de retour, & qu’il lui demande son lot ; ce que le frere aîné ne pourra pas se dispenser de faire, même avec restitution des fruits ; & de lui rendre compte de son lot ; car dans ce cas l’aîné ne fait pas siens les fruits & revenus de ce lot, d’autant que la succession a été partagée, & que le frere aîné n’est qu’un simple dépositaire du lot de son frère ; cependant si dans ce lot il y avoit des meubles il conviendroit les vendre, autrement ils s’useroient & se consommeroient pendant l’absence, peut-être lon-gue, du frère absent, & les deniers qui proviendroient de la vente seroient mis ès mains du frere aîné qui les garderoit, mais sans interéts, & même il est à remarquer que ce partage n’est pas seulement un partage provisionnel, mais un partage diffinitif, & contre lequel on ne pouroit revenir que par Lettres de Rescision, fondée sur le dol ou sur la léfion.
ARTICLE CCCLVI.
S’Il n’y a qu’un Manoir roturier aux champs, anciennement appellé herbegement & chef d’héritage, en toute la succession, l’ainé peut avant que faire lots & partages, déclarer en Justice qu’il le retient avec la cour, clos & jardin, en baillant récompense à ses puînez, des héritages de la même succession ; en quoi faisant le surplus sera partagé entr’eux également ; & où ils ne pourroient s’accorder, l’estimation dudit Manoir, cour & jardin, sera faite sur la valeur du revenu de la Terre & loüage des maisons.
Manoir, est la principale maison que l’on habite à la campagne ; il y a Manoir féodal, & Manoir roturier ; le Manoir féodal est le principal lieu du Fief ; Manoir roturier est la maison ou le pere de famille roturier fait sa demeure or-dinaire pour exploiter ses terres ; on dit encore hébergement, ménage ou chef de ménage : Or c’est la demeure & habitation du pere de samille & la commodité les lieux, qui caracterisent le Manoir, mais quant à sa consistance, c’est la destination du pere de famille, qui fait & forme cette consistance, & non point les granges, étables & pressoirs, ainsi cette consistance est plus de fait que de droit.
C’est du Manoir roturier dont parle cet article, & que l’aîné peut choisir & prendre par préciput, tant dans la succession du pere, que dans la succession de la mere, avant que les lots soient faits, & avant partage ; il déclarera pour cela judiciairement qu’il retient le Manoir avec la cour, clos & jardin par choix & préciput, non pas par forme n’avant part, mais à condition de faire récompense, & indemniser ses puînez de la juste valeur du Manoir, cour, clos & jardin, en héritages & immeubles de la succession ; & cela n’a lieu qu’en succession directe, tant paternelle que maternelle, & non en succession collaterale ; & même il faut que les successions directes soient distinctes & non confonduës l’une dans l’autre.
L’aîné qui veut prendre un Manoir roturier par préciput, est tellement obligé de faire sa déclaration en Jugement avant que les lots & le partage des biens de la succession foient faits, que s’il attendoit à se déclarer aprés le partage fait, il seroit non-recevable en sa demande ; jusques-là, que si un Tuteur avoit fait cette obmission, son mineur devenu majeur ne seroit pas restituable contre cette obmission, il n’auroit que son recours pour ses dommages & interêts contre son Tuteur ; cette scrupuleuse formalité n’est pas moins requise en succession roturière qu’en succession noble.
Cette espèce de préciput, ou pour mieux dire cette prérogative, n’a lieu que lorsque dans toute la succession il n’y a qu’un seul principal Manoir, ou principale maison & habitation aux champs, commode pour exploiter & faire valoir la Ferme & héritages en dépendans, & où le pere de famille faisoit sa demeure ordinaire, lorsqu’il faisoit valoir ses héritages roturiers par ses mains ou son Fermier ; car si en une même succession il y a plusieurs principaux Manoirs roturiers, l’aîné n’en prendra aucun, ils seront tous mis en partage, & chaque cohéritier y aura sa part égale en essence, avec choix des lots suivant le rang & l’ordre de primogeniture ; & le frere aîné n’aura que la prérogative du choix des lots ; Arrests du Parlement de Roüen, des 23 Juin 1614 & 3 Août 1656.
L’aîné n’a point de préciput roturier dans les héritages & maisons situez en Bourgage, Villes ou Bourgs ; Arrest du même Parlement, du 20 Juin 1622.
Cette prérogative n’a lieu que pour les héritages de campagne.
Cette prérogative est incessible, comme elle l’est dans le préciput noble.
Pour former la récompense & indemnité que l’aîné doit pour le principal Manoir qu’il prend par préciput dans une succession, il faut estimer le Manoir, cour, clos & jardin, sur le pied du revenu annuel que le Manoir, cour, clos & jardin pourroient rapporter, mais non sur le pied de leur valeur extrinseque ; aprés quoi l’aîné donnera des héritages à ses puînez sur le pied de l’estimation, s’il y a assez d’héritages, si non il leur donnera des rentes ou autres immeubles, même de l’argent comptant, chacun par égales portions, parce qu’en par-tage roturier, toutes les portions afférantes de chaque cohéritier sont égales, & chaque cohéritier aura sa part dans la valeur que le Manoir aura été estimé pour le revenu ; Arrest du même Parlement, du 14 fevrier 1626.
Le préciput roturier n’appartient point à la soeur aînée contre ses soeurs, toutes héritieres dans la succession à défaut de mâles ; on a fait la même décision à cet égard, que pour le préciput noble, qui n’a point lieu entre filles.
Si l’aîné avoit pris son lot dans le partage, sans avoir fait sa déclaration au sujet du préciput roturier ou Manoir principal, cour, clos & jardin, il ne seroit pas recevable à en demander un dans la suite, quand ce seroit incontinent aprés avoir choisi & pris son lot ; dès qu’il n’a point fait cette déclaration, il est déchû de son droit ipso facto.
La Déclaration que le frere aîné doit faire au sujet du préciput roturier, doit être faite ainsi & de la maniere qu’elle doit être faite pour raison du préciput noble.
S’il n’y avoit point de principal Manoir sur les héritages & Terres de campagne, le frère ainé non seulement n’en pourroit prétendre, mais encore n’en pourroit demander aucune indemnité dans la succession.
ARTICLE CCCLVII.
L Es soeurs ne peuvent demander partage ès successions du pere ou de la mere, ains seulement nariage avenant ; & pourront les freres les marier de meuble, sans terre, ou de terre sans meuble, pourvû que ce soit sans les déparager.
Les soeurs ne peuvent demander partage ës successions du pere ou de la mere, ains seulement mariage avenant.
Cela s’entend des filles non réservées à partage ; ainsi les filles non mariées du vivant des pere & mere, n’ont qu’un mariage avenant dans les successions de leur pere & mère, sans pouvoir demander partage à leurs freres ; aussi d’un autre côté les freres peuvent obliger leurs soeurs à venir à partage pour s’exempter de leur payer mariage avenant ; art. 47. du Reglement de 1666.
Le mariage avenant des filles est le tiers de tous les biens de la succession, tant meubles qu’immeubles, nobles & roturiers, qui se trouvent dans la succession des pere & mere au jour de leur décès.
Et pourront les freres les marier de meuble sans terre, ou de terre sans meuble, pourvû que ce soit sans les déparager.
Le mot de marier veut dire ici leur donner leur mariage avenant ; le même Reglement de 1666 art. 47. ajoûte que les freres peuvent payer ce qui sera arbitré pour le mariage avenant, en héritages ou rentes de la succession ; tout cela est en la liberté des freres, ils peuvent donner des meubles, argent comptant & autres effets mobiliers, ou des héritages, rentes ou autres immeubles de la succession à leurs soeurs, en payement de leur mariage avenant ; cependant il faut que cela se fasse de mauière, que si les freres marient leurs soeurs & qu’ils leur donnent leur mariage avenant, ils ne les déparagent point, c’està-dire, qu’ils ne les marient point desavantageusement, ni avec un mari d’une condition très-inégale à la leur ; ce qui est bien difficile en Normandie, parce que tant qu’il y a des mâles, les filles ne peuvent pas avoir de grands biens ; en quelque nombre qu’elles soient, elles n’ont que le tiers des biens de la succession pour leur mariage avenant, mais en toute proprieté.
Si un frere, au lieu de faire arbitrer, estimer & liquider le mariage avenant de ses soeurs en la manière accoutumée, s’étoit obligé de leur payer une somme en deniers, il ne pourroit les obliger à prendre en payement des héritages, il seroit tenu de leur payer en argent la somme promise ; Arrest du Parlement de Normandie, du 24 May 1675. Mais la liquidation faite dans toutes les formes ordinaires, du mariage avenant à une cerraine somme, n’empèche pas que les freres ne puissent payer le mariage avenant, en héritages & rentes de la succession ou en meubles ; & même les maris de ces filles ne pourroient préten-dre que la même chose, pour le payement du don mobile à eux donné par ces filles par leur Contrat de mariage, sans pouvoir demander à leurs beaux-freres le payement de ce don mobile en argent comptant ; Arrest du même Parlement, du 8 Mars 1675.
ARTICLE CCCLVIII.
L A fille reservée à partage, ne peut prendre part qu’en la succession de celui qui l’a réservée,
Comme de droit les filles sont excluses des successions tant qu’il y a des mâles, elles n’y peuvent venir comme héritieres que lorsque les pere & mere les reservent à leurs successions, soit en les mariant ou autrement ; ce qui leur est permis de faire ; de manière qu’une fille reservée à une succession & à partage, ne peut venir qu’à la succession du pere, ou de la mere, qui l’a expressémenr reservée à sa succession, & non à la succession à laquelle elle n’a point été réservée ; car dans cette dernière succession, elle n’y auroit que mariage avenant.
Il y a pourtant une exception à cette regle generale, qui est que si le pere avoit reservé une de ses filles à sa succession & à celle de la mere, comme il le peut, cette fille viendroit non seulement à la succession de son pere, mais encore à la succession de sa mere, encore que la mere n’eût pas parlé dans l’Acte de la réserve & du rappel à la succession ; la mere n’a pas le pouvoir du pere, elle ne peut reserver sa fille qu’à sa propre & seule suecession, & non à celle de son mari père de cette fille.
ARTICLE CCCLIX.
F Ille mariée revenant à partage des successions de ses pere ou mere, doit rapporter ce qu’elle a eu de meuble & d’héritage de celui qui l’a réservée.
Puisqu’une fille reservée à partage vient à la succession comme héritière, il eII juste qu’elle rapporte lors du partage à la succession à laqueile elle est reservée, tout ce qu’elle à cu des pere où mere, de la succession duquel où de laquelle il s’agit, lors de son mariage, soit en meubles & effets mobiliers, ou en héritages & autres immeubles, ou moins prendre ; & même si une petite fille avoit été réservée à parrage à la succession de son ayeul ou ayeule, elle seroit tenuë en venant à partage de rapporter rout ce que son pere ou sa mere auroit eu de la succession de son ayeul ou ayeule, ou moins prendre, encore bien que cette perite fille n’eût rien eu de la succession de son pere ou de sa mère ; Arrest du Parlement de Normandie, du 20 Fevtier 1é14.
Quand toutes les filles ont été mariées par le pere, & qu’il n’est rien dû de leur mariage, elles viennent à la succession de leur pere, sans rapporter ce que leur pere leur avoir donné en mariage ; art. 68. du Reglement de r6é6, & Arrests du même Parlement, des 8 Fevrier 1éb7, & a Juillet 1é7o ; mais s’il reste quelqu’une des fiiles à marier aprés la mort du pere, dont le mariage avenant n’a point été reglé, alors si cette fiile a reeû quelque chose de sun pere, sujette à rapport, elle est tenuë à la rapporter & la précompter sur son mariage avenant ; parce qu’en ce cas, c’est une délibation sur la succession du pere, & qui étoit subsissante au jour du décës du pere.
En Normandie, le rapport se fait entre cohéritiers, non seulement en succession directe, mais encore en succession collaterale, parce que nul ne peut avantager un de ses héritiers présomptifs plus que l’autre, tant en ligne directe qu’en ligne collaterale ; avec cette différence néanmoins, qu’en ligne directe, il faut tout rapporter, meubles & immeubles, au lieu qu’en ligne coilaterale, on rapporte seulement les immeubles & non les meubles, d’au tant qu’on peut valabiement donner ses meubles à un de ses cohéritiers collateraux, hors part.
Si les héritages & immeubles sont en esfence lors de la succession ouverte & du partage, il faudra les rapporter au partage ou moins prendre ; & s’ils étoient hors les mains de l’héritier auquel ils ont été donnez, il en tiendra compte sur le pied de la valeur qui a été donnée par son Contrat de mariage ou autre Acte, & au défaut d’appréciation, sur le pied de leur valeur, au rems que la chose à été donnée, & non au jour de l’ouverture de la succession.
ARTICLE CCCLX.
L Es soeurs, quand elles sont héritieres, peuvent partager tous les Fiefs de Haubert, jusqu’à huit parties, si autrement les partages ne peuvent être faits.
Lorsque la succession est dévolué aux filles à défaut de mâles, elle & partagent la succession entr’elles par égales portions, sans droit d’ainesse, ni pré-ciput pour la soeur ainée ; & elles divisent les Fiefs entre-elles, même les Fiefs de Haubert, jusqu’eu huit parties, si les partages ne peuvent pas être faits autrement ; car si le partage peut être fait sans diviser les Fiefs, attendu qu’il y a dans la succession des immeubles en roture, équivalens & propres à égaler les jots ; en ce cas, les Fiefs demeureront en entier aux soeurs ainées, suivant le rang de primogeniture de chaque fille, & les autres soeurs puinées prendront des héritages & immeubles roturiers pour leur portion néreditaire, suivant l’estimation & à proportion de la valeur des Fiefs pris par les soeurs ainées ; cette estimation sera faite au denier vingt, sans cependant que la seur ainée fut recevable à vouloir obliger ses soeurs puinées à prendre leur portion heréditaire en argent, sous prétexte qu’elle ne voudroit pas diviser le Fief qui se-roit dans la succession commune ; mais il est toûjours vrai de dire qu’il ne faudra en venir à la division des Fiefs, qu’autant que le partage de la succession ne se pourra faire autrement.
ARTIeLE
ARTICLE CCCLXI.
L A fille reservée à partage, aura sa part sur la roture & autres biens, s’il y en a, si non sur le Fief, lequel pour le regard de ladite fille est évalué en deniers, pour ce qui peut lui appartenir, pour en avoir rente au denier vingt.
Une succession à laquelle une fille a été réservée à partage avée ses freres confiste ou en Fiefs & en rotures, ou en un Fief seulement. S’il y a des Fiefa & des rotures, la fille reservée à partage, ne prendra rien dans Fiefs, iis appartiendront aux mâles chacun suivant son rang de primogeniture, elles pren-dront seulement leur portion héreditaire dans les rotures, sans que les freres qui ont pris les Fiefs par préciput y ayent rien ; Arrest du Parlement de Roüen, du a9 Avril 1623 ; mais si les rotures étoient d’une trop petite valeur, & qu’il n’y eût qu’une fille, il seroit permis à la fille de les abandonner aux mâles qui ont opté & choisi les Fiefs pour leur portion héreditaire, lesquels seroient tenus de donner le tiers de la valeur des Fiefs par estimation à la fille, néreditairement & en proprieté : Si au contraire, il n’y a qu’un Fief dans la succession pour tous biens immeubles, le frère ainé le pourre prendre à la charge d’en donner le tiers par évaluation aux soeurs, héreditairement & en proprieté.
Si une fille réservée à partage, s’étoit contentée dans le partage de rotures, & qu’elle eût pris le lot dans lequel les rotures se trouvoient, elle ne seroit pas recevable aprés cela, à venir demander le tiers en proprieté dans les Fiefs, d’autant qu’elle auroit consommé son droit, & que d’ailleurs tant qu’il y a des rotures dans la succession, les filles, quoique reservées à partage, ne peuvent rien prétendre dans les Fiefs, Mais si du consentement tous les biens des frères, tant meubles qu’immeubles, nobles & roturiers, étoient mis en parrage sans aucune option, ni choix de la porton des Fiefs par les frères, la fille reservée à partage ne prendroit pas pour cela part dans les Fiefs en fonds, corps & en essence, elle y auroit seulement sa part par évaluation & estimation, qui scroir du tiers des Fiefs, lequel tiers seroit reparti entre toutes les filles par égales portions, sans préjudice à leur part dans les meubles, qui dans tous les cas se partagent également entre tous les freres & les filles reservées à partage.
Toutes les fois qu’il faudra donner un tiers par évaluation à une fille reservée à partage, dans les Fiefs, pour sa portion héreditaire, cetre évaluation sera faite au denier vingt, sur le pied du revenu, sans y. comprendre les bûtimens & les bois de haute-futaye ; on ne considère que la valeur intrinseque des biens, & non l’extrinseque ; mais d’un autre côté, le frère ainé & autres freres qui auront pris les Fiefs par choix & option, pourront payer la liquidation ou estimation à leur seeur en rotures, ou en rente au denier vingt ; ils pourroient même lui donner de l’argent comptant, mais il faudroit qu’ils en fissent faire un emploi pour leur sureté, crainte qu’eux ou leurs heritiers & ayans cause, ne fussent un jour recherchez par ces soeurs.
Les Fiefs étans pris par les freres ainez, tous les immeubles en roture seront partagez également entre les autres frères & la seur réservée à partage ; mais dans le cas qu’il n’y auroit qu’un Fief pour tous biens dans la succession, & que le frere ainé le prendroit par choix & option, les autres freres n’auroient qu’un tiers à vie, & la fille reservée à partage, un tiers en proprieté, le tout par évaluation, & même le frère ainé contribuéroit aux deux tiers de la provision à vie des cadets, & la soeur reservée à partage, pour l’autre tiers.
ARTICLE CCCLXII.
F Illes mariées, encore qu’elles ne reviennent à partage si elles n’y ont été expressément reservées, si est-ce qu’elles font part d’autant qu’il leur en appartiendroit, au profit des héritiers, telle comme si elles avoient eu partage au lieu de mariage.
Une firle qui a été mariée & dotée par son pere ou par sa mere, fait part au profit de ses freres héritiers du pere ou de la mere, comme si elle venoit à partage & qu’elle eût été formellement & expressément reservée à partage par le pere ou la mere à leur succeision ; de sorte que les freres dans le partage de la succession, prennent dans les biens la part des filles mariées & non U reservées à partage, qu’elles auroient eûës si elles avoient partagé la succession, comme héritieres avec leurs freres par la réserve à la succession, & que la dot qu’elles ont eûë en mariage, medioere ou considérable, tient lieu en ce cas de partage ; & par là, la part des filles mariées & non reservées à partage, appartient aux freres seuls, & non aux soeurs qui seroient reservées à partage, & le mariage avenant des autres soeurs non mariées, est d’autant diminué au profit des freres qui confondent en leur personne & à leur profit la part que les filles mariées auroient eû pour leur mariage avenant, si elles n’avoient pas été mariées du virant des pere & mére ; ce qui a lieu pour tous les biens de la succession, meubles & immeubles, tels qu’ils soient, & en quelque lieu qu’ils soient situez, dans lesquels les filles mariées auroient eû part, si elles avoient été reservées à partage : Mais aussi les freres sont obligez en ce cas de rapporter à la succession autant de la dot de la fille mariée & non reservée à partage, qu’elle auroit eû dans la succession, si elle n’avoit pas été mariée, c’est-û-dire, jusqu’à concurrence de ce qu’elle y auroit pris pour sa part dans le mariage avenant, mais non tout ce qui lui avoit été donné en dot ; en un mot, ce rapport sera fixé sur la part que la seur mariée & non reservée à partage, auroit eûë dans sa legitime ou mariage avenant, encore bien que la dot qu’elle avoit eûë en se mariant, étoit plus considerable que ce qu’elle auroit eüE pour sa legitime ou mariage avenant.
ARTICLE CCCLXIII.
L Es filles mariées par le pere ou la mere, ne peuvent rien demander en leur succession, & si elles ne font part au profit de l’aîné, au préjudice du tiers que les puînez ont par provision, où en proprieté en Caux.
Cet article contient une exception à l’article précedent, par rapport aux suecessions dans lesquelles il y a du bien en Caux ; cette exception est qu’aprés que par le present Article a dit que les filles mariées par le pere ou la mere, & non reservées à parrage, ne peuvent rien prendre ni prétendre duns les successions des pere & mêre, que ce qui leur aura été promis par leur Contrat de mariage, elle porte que dans les successions de Caux, les soeurs mariées par leur pere ou mere ne font point part au profit du frère ainé, au préjudice des freres puinez, pour diminuer le tiers qui leur peut appartenir dans les biens immeubles situez en Caux, soit en proprieté, soit à vie, & en ce cas, le tiers des puinez se regle comme s’il n’y avoit point eû de soeurs mariées, & qu’elles eussent toutes leur mariage avenant dans une succession ouverte en Caux.
C’est aujourd’hui une jurisprudence certaine, qu’il n’est pas permis en Caux de réserver une fille à partage, mais seulement dans le reste de la Province, gouvernées par la Coûtume generale de Normandie.
ARTICLE CCCLXIV.
L Es freres contribuent à la nourriture, entretenement & mariage de leurs soeurs, selon qu’ils prennent plus ou moins en la succession de leur pere & mere, ayeul ou ayeule en ligne directe, & pareil-lement aux autres charges & dettes de la succession.
Chaque frere qui est héritier de ses pere, mere, ayeul qu’ayeule, est tenu de contribuer aux charges & dettes de la succession, même de nourrir, entretenir & donner mariage avenant à leurs soeurs, le tout pro modo emolûmenti que chaque frere prend dans la succession.
Quant à la nourriture, entretien, & mariage avenant des filles, il y a une observation à faire, qui est que les treres ne sont tenus de cette obligatiou que dans les successions directes, & non dans les successions collaterales ; la raison est que les filles sont excluses par leurs freres des successions collaterales.
Comme dans notre Coutume les dettes immobiliaires se payent par les héritiers immobiliers, & les dettes mobiliaires par les héritiers mobiliers, les freres tant l’ainé que les puinez contribuent aux dettes : immobiliaires à proportion de ce qu’ils prennent dans la succession en qualité d’héritiers aux immeubles & aux dettes mobiliaires, à proportion de ce qu’ils prennen t aux meubles & jusqu’à concurrence de leur juste valeur ; Arrest du Parlement de Normandie, du 12. Avril 1628. Mais tout cela ne pourroit avoir lieu que dans le cas qu’il y auroit de differentes sortes d’héritiers dans une succession, sçavoir des héritiers quant aux propres, des héritiers quant aux meubles, & des héritiers quant, aux acquêts ; ce qui ne peut avoir lieu que dans les successions collaterales, & non dans les successions directes, dans lesquelles il n’y a qu’une seule sorte d’hcritiers.
Lors done qu’il y a des héritiers aux propres, des héritiers aux meubles, & des héritiers aux acquers, il faut distinguer les dettes mobiliaires d’avec les dettes immobiliaires ; les dettes mobiliaires se prennent sur les meubles à proportion de ce que chaque héritier y prend, & les dettes immobiliaires se prennent sur les propres & sur les acquêts, sçavoir les dettes anciennes, c’est-à-dire contractées par les prédecesseurs du défuntl sur les propres ; & à l’égard des dettes contractées par le défunt, elles se prennent sur les acquêts ; & chaque hiéritier dans les uns & dans les autres biens contribué au payement de ces dettes à proportion de la part qu’il prend dans la succession immobiliaire, & non au-de-là ; deforte que lorsque l’on dit que chaque héritier contribué au payement des dettes à proportion de ce qu’il prend dans la succession ; cela s’entend dans le cas qu’il n’y a qu’une seule sorte d’héritiers qui succedent aux meubles & aux immeubles, propres ou acquêts ; car lorsqu’il y a diversité d’héritiers, les uns meubles, les autres aux acquêts & les autres aux propres, & ceux-ci aux propres paterneis ou aux propres maternels, chaque sorte d’héritier est tenu d’acquitter, & payer les dettes de la succession qui convien-nent à l’espèce des biens ausquels l’heritier succede, encore qu’il excede ce qu’il amende dans la succession, sans pouvoir demander récompense de cet excedent contre les autres heritiers dans l’autre espèce de biens de la succession.
Le frère ainé qui a pris le préciput dans la succession, ne contribuë avec ses freres à la nourriture, entretien & mariage avenant des soeurs communes, que sur le pied qu’il amende de la succession.
Par le principe que les freres doivent contribuer aux dettes immobiliaires à proportion de ce qu’ils prennent dans les immeubles, & aux dettes mobiliaires à proportion de ce qu’ils prennent dans les meubles, si les meubles ne suffifoient pas pour payer les dettes mobiliaires, ils seroient tenus de contribuer au surplus du payement des dettes mobiliaires à proportion de ce que chacun profite dans les immeubles.
Les puinez qui voudroient retirer des héritages donnez par le pere ou la mere aux filles en les mariant, avec faculté aux freres de les pouvoir retirer moyennant une certaine somme, ne peuvent obliger leur frere à contribuet au payement de la somme convenabie pour faire ce retrait ; Arrest du même Parlement, du 27. May 1625.
a l’égard des Créanciers de la succession & des soeurs pour le payement de leur mariage avenant, ils ont une action solidaire contre tous les freres héritiers, sauf leur recours les uns contre les autres, c’est de plus une maxime constante dans nôrre Coûtume, que tout héritier est tenu solidairement des dettes de la uccession de laquelle il est héritier envers les Créanciers, quand même il n’auroit que des meubles & effets mobiliers dans son lot de partage sans aucuns im-meubles.
Une dot promise en deniers par un frère à sa soeur, & duë par sa succession, est une dette immobilière passive ; & comme telle, elle est à la charge de son hérigier des propres, parce que cette dot tient lieu de légitime.
ARTICLE CCCLXV.
F Emme prenant part aux conquests faits par son mari constant le mariage, demeure néanmoins entiere à demander son dot sur les autres biens de son mart, en cas qu’il y ait consignation actuelle du dot faite sur les biens du mari ; & où il n’y aura point de consignation, le dot sera pris sur les meubles de la succession, & s’ils ne suffisent, sur les conquêts.
Le terme de consignation dont se sert cet article, est particulier à nôtre Coutume, quant à la signification qu’on lui donne par rapport à la dot ; car dans le sens de cet article, par le mot de coxsignation de la dot, on entend un emploi ou remplacement des deniers dotaux de la femme sur les biens du mari, fait par Contrat de mariage ou par la quittance de la dot, au moyen de laquelle consignation les biens du mari sont hypotequez fpecialement aux deniers dotaux de la femme, tant pour le principal que pour les interêts ; en un mot, cette consignation est une constitution que fait le mari des deniers dotaux de la femme sur ses biens ; & par dot non consignée sur les biens du mari, on entend une simple promesse faite par le mari par son Contrat de mariage, de faire emploi & remplacement des deniers dotaux de la femme.
La consignation actuelle des deniers dotaux de la femme, & les deniers dotaux de la femme non consignées par le Contrat des mariage ou par la quittance, ont deux essers bien differens ; s’il y a eu consignation des deniers dotaux, la femme reprendra ses deniers doraux sur les biens propres du mari, & en outre sur sa part dans les meubles & conquêts faits pendant ESPERLUETTEiconstant le mariage, soit en usufruit, soit en proprieté, au lieu que s’il n’y a point eu de consignation des deniers dotaux, la dot sera seulement prise sur les meubles, & s’ils ne suffisent, sur les conquêts immeubles ; & si les meubles & les conquêts n’étoient pas suffisans, la dot seroit prise sur les propres du mari, ce qui fait voir que la condition d’une femme, dont les deniers dotaux ont été actuellement consignez, est bien plus avantageuse que celle dont les deniers dotaux n’ont point été consignez.
Lors donc que les deniers dotaux de la femme ont été réellement ou tacitement consignez sur les biens du mari, la reprise ne s’en fera point sur les meubles & conquêts immeubles faits pendant le mariage, mais sur les propres du mari, & la femme a sa part entière dans les meubles & conquêts immeubles, comme s’il ne lui étoit point dû de restitution de dot ; Arrest du Parlement de Roüen, du 22. Juin 1675 ; ce qui s’entend non seulement des deniers doraux aetuellement payez au mari, mais enco e de ceux qui pourroient arriver à la fem-me pendant fon mariage par succesion directe, mais non les deniers doraux qui lui arriveroient par succession collaterale, donation, less ou autrement, & d’ailleurs qu’en ligne directe.
Il y a deux consignations, l’une actuelle, expresse & réelle, & l’autre tacite.
La consignation actuelle, expresse & réelle, est quand par le Conttar de mariage il a été expressément dit & stipulé, que les deniers doraux payez lors du Con-trat de mariage, ou qu. seront payez dans le temps convenu par le Contrai de mariage, ont été des-deprésent réellement & actuellement consi, nez & coxstituez sur tous les biens du mari, tant présens qu’à venir, pour tenir le nom, cété & ligne de la femme ; par ce moyen le mari devient, pour ainsi dire, proprietaire des deniers dotaux, & il fait une constitution de la dot sur ses propres biens : or cette consignation se fait, ou par le Contrat de mariage ou par la quittance de la dot ; par le Contrat de mariage, en disant que la dot promise ou payée, est dés lors consignée, constituée & remplacée sur les biens du futur époux, tant présens que ceux à venir ; par la quittance, en déclarant par le mari que les deniers dotaux qu’il reçoit, il les consigne, remplace & constiruè sur tous ses biens, présens & à emir La consignation tacite, est lorsqu’on a baillé & donné à la femme des rentes hypoteques ou constituées, ou autre rentes rachétables en dot, & que le mari en a depuis reçù le rachat & amortissement.
La simple proresse de consigner les deniers dotaux, n’est pas une consignation actuelle, & elle ne peut produire les effets de la consignation réelle ou tacite, desorte que dans le cas qu’il n’y a point eu de consignation actuelle ou tacite, on commencera par épuiser les meubles, & ensuite les conquêts immeu-bles pour la restitution de la dot, & on ne viendra sur les propres du mari que in subsidium ; Arrest du même Parlement, du 22. Decembre 1657.
La consignation actuelle ou tacite des deniers dotaux sur les biens du mari, rend la dot immobiliaire, même l’action pour la répetition de la dot, laquelle, comme l’action, appartient aux héritiers des propres de la femme ; la chose auroit lieu, quand même les deniers doratx n’auroient pas été actuellement ou tacitement consignez, mais qu’il n’y auroit eu qu’une simple promesse d’employ & de rempla cement de la dot, faite par le mari sur ses biens ; parce que l’esprit de la Coûtume a été de conserver dans tous les cas la dot auxhéritiers des propres de la femme ; Arrest du même Parlement, du 26. Mars 1607.
Par un effer de la consignation de la dot, le mari est tenu de rendre les rentes qui lui ont été données en dot sur le denier de leur constitution au jour du Contrat de mariage, & de les continuer à la femme ou à ses héritiers sur ce denier, quand même elles auroient été depuis réduites à un moindre denier Arrest du même Parlement, du 17. Decembre 1665.
Il ne suffit pas pour pouvoir par la femme joüir de l’effet de la consignation actuelle ou tacite, que le mari ait déclaré avoir consigné sur ses biens les deniers doraux qui lui ont été promis en mariage, il faût en outre que la dot lui fait été réellement payée, & que le payement en soit justifié par la quittance ou autrement, ou que le mari air reçû pendant son mariage le remboursement & amortissement des rentes données en dot à sa femme, La femme n’a point droit de conquêts sur les terres, héritages & immeubles acquis par le mari des deniers dotaux de se femme, soit qu’il ait fait la consignation de la dot fut ses biens ou non ; mais si l’acquisition étoit plus forte que les deniers dotaux, la femme prendroir sa part dans les conquéts.
Celui qui est encore en tutelle lors de son mariage, ne peut former d’obligation sur ses immeubles pour la dot de la femme, quoique consignée sur ses biens, la dot ne pourroit en ce cas être prife que sur ses meubles, encore bien que son mariage soit valable quoad feax ; & quoad effectus civiles.
La dot de la femme se prend sur tout ce qui revient de la fuccession du mari à son héritier, aprés la distraction du doüaire, pourvû qu’il y ait consignation actuelle de la dot ; art. 69. du Reglement de 1666. Il faut dire la même chose si le mari avoit reçu pendant le mariage le remboursement & amortissement des rentes qui lui avoient été données en dot ; cependant quant à l’hypoteque de la dot, elle est préferée à celle du douaire, pourvû que le Contrat de mariage soit reconnu avant la célébration du mariage ; art. 7o du même Reglement : bien sentendu s’il avoit été fait sous signature privée ; car s’il avoir été passé devant Notaire, non seulement il ne faudra point de reconnoissance, mais encore l’hypoteque de la dot passeroit devant l’hypoteque du douaire.
Il y a consignation de dot, si le mari par le Contrat de mariage avoit consenti le remplacement des rentes par lui reçûës en dot, en cas de rachat & amortissement des rentes és mains du mari, & la femme reprendroit sa dot sur les biens de son mari, & auroit en outre ses droits sur les conquêts faits pendant le mariage ; Arrest du même Parlement, du a8. Janvier 1672.
Les interêts de la dot courrent du jour de la mort du mari, encore qu’il n’y ait eu aucune interpellation ni demande ; Arrests du même Perlement, des 20Aoust 152y, 21 Avril 1553, 9. Iuin 1676, 22. Decembre 1612, 7. Juillet 16z9, & 71. Decembre 164r : mais la femme ou ses heritiers n’en pourroient demander que cinq années d’interêts, comme il se pratique pour les arrerages liyporeques ou constiruées, à moins qu’il n’eût été fait des poursuites de cinq ans en cinq ans contre les héritiers du mari ; il ne faut done pas dire qu’on en peut demander vingt-neuf années d’interêts comme dans les rentes de fieffe ou de bail d’héritages ou autres rentes foncières ; la raison de cette décision, est que la dot consignée sur les bieus du mari, est une efpèce de constitution de renrte sur les biens du mari.
ARTICLE CCCLXVI.
S I le mari reçoit constant le mariage le raquit des rentes qui lui ont été baillées pour le dot de sa femme, le dot est tenu pour consigne, encore que par le Traité de mariage ladite confignation n’eût été stipulée.
C’est ce qu’on appelle consignation tacite, laquelle a lieu, lorsque le mari reçoit pendant & constant le mariage le rachat des rentes qui lui ont été don-nées, baillées & délivrées pour la dot de la femme ; & cette consignation produit le même effet que la consignation actuelle de la dot, quoique par le Con-trat de mariage il n’y eût point de stipulation de consignation ; de sorte que la femme ou ses héritiers repereront dans le cas de cet article la dot sur les propres du mari, & prendront en outre leur part dans les meubles & dans les con-quéts faits pendant le mariage ; sçavoir, moitié en proprieté dans les conquëts faits en bourgage, & le tiers en usufruit dans tous les autres conquêts, sans préudice de ceux faits dans l’etenduë du Bailliage de Gisors & du Bailliage de Caux.
Le remploi des immeubles que le mari ou la femme possedoient lors de leur mariage, doit être fait sur les immeubles qu’ils ont acquis depuis leur mariage, au sol la livre, & à faute d’acquêts immeubles, sur les meubles ; & la femme n’a parti ausdits meubles & acquêts, qu’aprés que le remploi aura été fait ; art. 65. du Reglement de 1666. ce qui ne doit néanmoins s’entendre que des aliénations voiontaires faites par le mari de la dot de sa femme, mais non des rentes données en dot, dont le mari auroit reçû le rachat & rembour sement pendant le mariage ; car dans ce dernier cas le principal & les interêts des rentes feront pris sur la part du mari dans les meubles & conquêts, & non sur la masse des meubles & conquêts : de manière que la part de la femme dans les meubles & conquêts n’en portera rien, & la part de la femme y sera enti & re ; Arrest du même Parlement, du 2. Juillet 1670. il n’en seroit pas de même si la dot n’avoit point été consignée actuellement ou tacitement ; car elle se prendroit sur toute la masse des meubles, & s’ils ne suffiloient, sur la masse des conquêts immeubles, & in subsidium sur les propres du mari ; mais quant aux propres aliénez du mari, ils se prendroient seulement sur les meubles & conquêts immeubles faits pendant le mariage, & non sur les propres de la femme.
Generalement parlant, il n’y a point de remploi des meubles, s’il n’est expressément stipulé, ou au cas de l’article 390. de nôtre Coûtume, ou quand les meubles sont réputez immeubles, suivant les articles 4o9, 511. 512, & 513. de la. Coûtume ; art. 66. du Reglement de 1666.