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ARTICLE CCCXCII.

A Près la mort du mari la femme a le tiers aux meubles, s’il y a enfans vivans de son mari, en contribuant aux dettes pour sa part hormis les frais des funerailles & legs testamentaires ; & s’il n’y en a point, elle y a la moitié aux charges que dessus.

La femme aprés le décës de son mari, a en pleiue proprieté le tiers des meubles & effets mobiliers de son mari, s’il y a des enfans vivans du mariage ; & Sil n’y a point d’enfant vivant de son mari, soit de son dernier mariage soit de maria, es précedens, où descendans de ses enfans en ligne directe, la femme a la moitié des meubles, le tout aux charges de droit, qui sont de contribuer au payement du tiers ou de la moitié des dettes du mari, à la réserve des frais de l’inhumation de son mari & des legs s’il en avoit sait, lesquels tomberont sur la portion des héritiers du mari dans ses meubles & sur les héritages & immeublesdu mari ; voila quel est le sens litteral de cet article, voici les maximes qu’il enfaut tirer.

La première, que pour que la femme ait droit de prendre cette portion dans les meubles de son mari, il suffit que le mari & la femme eussent leur véritable & actuel domicile en Normandie, & que ce fût là sedes fortunarum du mari & de la femme au jour du déces du mari, soit que leur Contrat de mariage fût passé en Normandie ou ailleurs ; car les meubles & effets mobiliers suivent & se reglent en fait de succession suivant la Coûtume du domicile du propriétaire d’iceux, c’est pourquoi s’il se trouvoit des meubles en un lieu qui seroit régi par une Coûtume différente, la femme ne laisseroit pas d’y prendre la portion que cet article lui donne dans le cas & la condition y portée, & point davantage ni moins.

La seconde, que par le Contrat de mariage, il peut être convenu que la femme ne prendra aucune part ni portion dans les meubles de son mari, soit qu’il y ait des enfans au jour du décés de son mari, ou qu’il n’y en ait point, ou que la lemme les aura tous ; parce que lesContrats de mariage sont susceptibles de toutes sortes de clauses, des qu’elles ne sont point contre les bonnes moeurs ; or on ne peut pas dire qu’il y ait rien de contraire aux bonnes, moeurs dans une convention particulière de cette qualité, de plus, cet article ne contient en ce point aucune pro-hibirion.

La troisième, que la femme prend cette portion de meubles à titre & qualite d’héritière de son mari, & non à titre & qualité de commune ; parce qu’il n’y a point de communauté de biens en Normandie entre conjoints par mariage.

La quatriéme, que sous le terme de meubles on n’entend pas seulement les meubles meublans, tels qu’ils soient, précieux ou autres, mais encore tous les effets mobiliers, tels que sont les Billets, Promesses, Obligations, Arrerages de rentes, Fermages, Loyers, Fruits ameublis par la Coutume ou autre ment, en un mot tout ce qui est meuble ou réputé meuble ; & même les armes, comme Canons & Engins, & les Ornemens de Chapelle, ne seroient point exempts du droit de la femme, si mieux on n’aimoit les garder en lui en donmant sa part dans la valeur par l’estimation qui en seroit faite.

La cinquiême, que la femme qui seroit séparée au jour du décés de son mari, ne prendroit rien dans ses meubles, ni pareillement si elle renonçoit à la succession de son mari.

La sixième, que la femme ne prend le tiers ou la moitié des meubles qui se trouvent au jour du déces de son mari dans sa succession, qu’en contribuantu tiers ou à la moitié des de rtes mobiliaires du mari, mais non des dettes imm. biliuires, soit que les dettes soient anterieures au mariage, ou contractées pendant le mariage, la femme seroit même tenuë de contribuer au tiers ou à la moitié du remploi des propres aliénez du mari, s’il ne se trouvoit point d’acquêts ; parce que dans nôtre Coûtume il n’yia point d’acquêts que les propres ne soient remplacez, & qu’au défaut d’acquêts les propres se prennent suivant leur valeur sur les meubles & effets mobiliers ; elle seroit pareillement obligée de payer sa part des médicamens & pensemens fournis & faits dans la maladie de son mari ; mais quant aux habirs de deüil, c’est aux héritiers à les fournir à la veuve, sans diminution de la part dans les meubles ; si cependant elle se remarioit incontinent aprés la mort du mari, quoiqu’elle ne fût pas groise, elle seroit privée de ses habits de deüil ; Arrest du Parlement de Roüen, du 3. Novembre 1637. Mais à légard des habits de deüil des enfans & domestiques du défunt, la veuve y doit contribuer sur le pied de la part qu’elle prend dans les meubles ; Arrest du méme Parlement, du 3. Octobre 1647 ; & à l’égard des héritiers collateraux du mari, il ne leur est point dû d’habits de deüil ; Arrests du même Parlement, des 25. quin 3631, 6. Juillet ré46, 22. Fevrier 16s2. 8. Décembre 2655, & S. Décembre 4661. Sil y avoit dans une succession des héritiers aux propres & des héritiers aux meubles & acquêts, un chacun porteroit le deüil à ses frais, sans que les néririers d’une sorte de biens fussent tenus de le fournit aux héritiers de l’autre sorte de biens, quand même les uns profiteroient plus que les autres.

La septième, que les Créanciers de la succession du mari ont une action solidaire contre la femme qui prend part aux meubles de son mari, sauf son re-cours contre les héritiers de son mari, La huitième, que la femme en prenant part aux meubles de son mari, n’est point tenuë des frais funeraires de son mari, ni des legs qu’il pourroit avoir faits par fon testament ; cette sorte de dette doit se prendre sur la part & portion que les hériners du mari prennent dans les meubles & sur tous ses héritages & immeubles.

La neuvième & dernière maxime, est que la femme ne prend aucune part dans les meubles & effets mobiliers de son mari, qu’aprés là mort de son mari, ainsi c’est à la femme à prouver dans ce cas la mort de son mari.