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TITRE XV. DU DOUAIRE DE LA FEMME, ET VEUVAGE DU MARI.

ARTICLE CCCLXVII.

L A femme gagne son doüaire au coucher ; & confiste le doüaire en l’usufruit du tiers des choses immeubles, dont le mari est saisi lors de leurs épousailles, & de ce qu’il lui est dépuis échu constant le mariage en ligne directe, encore que lesdits biens fussent échus à ses pere & mere ou autre ascendant par succession collaterale, donation, acquêts ou autrement.

Il y a trois parties dans cet Article, La première sur ces paroles, la femme gagné son douaire au Eoucher.

Le doüaire étoit inconnu chez les Romains ; l’Empereur Frederie fut le premier qui l’introduisit en Italie, comme nous l’apprenons des Constitutions Sci-ciliennes, liv. 2.

Une ancienne Cronique de Normandie nous apprend, que ce fut Iean, surnommé Iean sans Terre, Roy d’Angleterre, qui en 1225. régla le douaire & qui le fixa au tiers des propres du mari ; c’est pour cette raison que les Provinces de la Gaule, qui obéissoient en ce tems là aux Anglois, ne donnent encore à présent que le tiers en douaire, ce qui étoit conforme aux Loix des Bourguignons, liv. 2. de Legibus Buergundiae ; & nous voyons dans Beaumanoir au tit. des vieilles Coûtumes rédigées par écrit en 1283, que l’établissement du douaire commença en France sous le Roy Philippe, Auguste qui regnoit en 1214. & qu’avant lui il n’y avoit point de douaire s’il n’étoit convenu par le Traité de mariage ; & ce Prince regla le douaire à la moitié.

Le douaire est un usufruit qui appartient à la femme sur une portion des immeubles du mari, Or il y a deux fortes de doüaire ; le douaire coûtumier, & le douaire préfix ou conventionnel : le douaire coutumier, est celui qui est donné à la femme par la Coûtume, encore qu’il n’ait été ni stipulé, ni convenu, ni accordé ; le douaire préfix ou conventionnel, est celui qui est reglé & fixé par stipulation & con-vention du Contrat de mariage.

Le douaire soit coutumier ou préfix, n’est acquis à la femme qu’au coucher c’est à-dire, aprés être entrée dans le lit nuptial du mari, & non par la simple bénédiction nuptiale, ni par l’entrée & réception de la femme dans la maison du mari.

Mais ne seroit-il pas permis de faire ici une question ; Un mari décede le lendemain de son mariage aprés avoir couché avec sa femme, ses héritiers préten-dent qu’il étoit impuissant ; par la visite des Médecins & Chrirurgiens, faite par Ordonnance de Justice, il est justisié que ce mari étoit impuissant au jour de son mariage ; sur ce fondement les héritiers collateraux contestent le doüaire à la veuve, soutenant qu’elle ne l’avoit point gagné ni pû gagner au coucher, suivant cet article ; il faut décider avec M. d’Argentré , sur l’article 429. de l’ancienne Coûtume de Bretagne, que ces héritiers seroient mal fondez dans leur prétention ; parce que dans cecas, necessitatem excluaimus à persectione actus, sed hominis habilitatem in agentium personis requirimus.

Le doüaire coûtumier se regle & le fixe suivant les Coûtumes des Provinces & lieux où ies héritages & immeubles sujets à ce douaire sont situez ; & en ce cas, les Coûtumes sont réelles ; c’est pourquoi le douaire coûtumier se prendroit sur les héritages & immeubles situez en différentes Coûtumes, & sur le pied que le douaire coûtumier seroit fixé & reglé par chaque Coûtume, sans consider la Coûtume du lieu où le Contrat de mariage auroit été passé Une veuve douairiere est tenue d’entre tenir, le bail que son mari auroit fait de son vivant des maisons, terres & héritages qui seroient tombez au lot à douaire de la femme aprés le décés de son mari, faus à elle à prendre les leyers & fermages sur le pied du bail tant que le bail durera : mais quant aux baux que la doüairiere auroit faits pendant la jouissance de son douaire, ils finisseut par. sa mort, sans que les héritiers du mari soient tenus de les entretenir ; parce que la jouissance de la douairiere finissant par sa mort, les baux qu’elle a faits de cette jouissance ou partie d’icelle, finissent pareillement au pour de son décës.

Il n’y a que les femmes dont le mariage est légitime & valable, qui puissent prétendre & avoir douaire sur les biens de leurs maris.

Les femmes légitimes des étransers, bâtards, ou de ceux qui meurent sans héritiers, prennent douaire, comme les femmes de tous autres maris, même sur sies biens du mari dont les biens seroient confisquez par leur ctime, & dont la condamnation emporteroit la confiscation de corps & de biens.

Le défaut de dot ou de non payement de la dot promise, n’emporte point la privation du douaire contre la femme ; si néanmoins il étoit dit par le Contrat de mariage, qu’au cas que le mari ne fût point payé de la dot promise, la femme ne pourroit avoir de doüaire, une coûvention de cette qualité seroit licire & permise.

La seconde partie est au sujet de ces termes : Et corsiste le doiaire en l’usufruit du tiers des choses immeubles dont le mari est saisi lors de leurs époufailies, & de ce qui lui est depuis éceâ constant le mariage en ligne directe.

Le droit coutumier ou préfx de la femme dans nôtre Coûtume, est l’usufruit du tiers des biens immeubles du mari : mais il y a cette différence entre le douaire Coûtumier & le donaire préfix, que le doüaire coûtumier se prend seulement en usufruit sur le tiers des héritages & immeubles, tant nobles que roturiers, ou en franc-aleu, ou d’autre nature & qualité qu’ils soient, art. 87. du Reglement de 1666, dont le mari étoit saisi au jour des épousailles ou bénédiction nuptiale, & sur ceux qui lui sont venus en ligne ou succession directe de pere, mère, ayeul, ayeule, ou autre ascendant, pendant & constant le mariage ; au lieu que le doüaire préfix se prend en usufruit sur le tiers de tous les Béritages & immeubles, tant nobles que roturiers ou autres, de quelque côté & de quelque manière qu’ils soient venus au mari, soit par succession collaterale, donation, legs, acquisition & charge ou autrement, & même si ces immeubles ne suffisoient pas, il pourroit être ptis sur les meubles, lesquels seroient à cet effer vendus, pour du prix en provenant être fait emploi jusqu’à concurrence du doüaire préfix, & duquel empioi la femme joüiroit sa vie durant.

Le douaire coûtumier se regle par la Coûtume du lieu où sont situez les heritages & immeubles sujets au douaire, & non par la Coûtume du lieu où le Contrat de mariage a été passé, ni du domicile des conjoints par mariage, soit au tems du mariage, soit au tems de l’ouverture du doüaire.

Quoique le douaire de la femme consiste en l’usufruit du tiers des immeubles du mari, néanmoins il n’est pas absolument nécessaire que la femme ait le tiers de tour le revenu des immeubles du mari, il suffit qu’elle jouisse du tiers des immeubles sur le pied de leur valeur & revenu annuel, & qu’elle ait la jouissance pleine & entière des choses contenuës en son lot.

De plus, la femme doüaitière n’a pas seulement les droits utiles, qui sont les fruits & revenus naturels & civiles, les Treizièmes, Reliefs & autres droits Seigneuriaux de cette qualité ; elle a encore les droits honorifiques des Terres, héritages héritages & immeubles dont elle joüit pour son doüaire ; elle a aussi la présentation aux Béne fices & aux Offices dépendans des Terres tombées en son lot.

La doüairière ne peut entrer en joüissance de son douaire, qu’aprés que les lats à doüaire ont été faits entre elie & Ies néritiers du mari ; c’est à ses frais que ces lots sont faits, & sans répétition contre les héritiers du mari, parce qu’on présume qu’elle travaille pour elle, & pour une cause purement lucrative ; Arrest du Parlement de Roüen, du 27. May 1637.

La femme douairiere ne jouit du tiers des terres, héritages & immeubles de son mari, qu’aux charges de droit, qui sont de contribuer pour son tiers au payement des arrerages des rentes hypoteques ou constituées, ou autres dertés im-mobiliaires & hyporecaires créées & faites avant le mariage, rentes foncieres, nobles ou rorurieres, dûës sur les terres & héritages ; elle doit même contribuer pour un tiers au payement des taxes & impositions que le Prince mer sur les terres, héritages & autres immeubles pendant sa jouissance ; elle est encore tenuë seule des réparations d’entretient, soit des maisons & batimens êtans en son lot, soit du pavé qui est devant les terres & héritages dont elle joüit pour son douaire ; mais elle ne contribué point au payement des dettes mobilinires, quoiqu’antérieures à son Contrat de mariage ; si néanmoins outre sa qualité de doüatrière, elle se portoit héritière de son mari, elle porteroit une portion de ces dettes, même de céiles contractées pendant le mariage, à proportion de la part qu’elles prendroit dans les meubles, car elle ne peut se décharger de ces sortes de dettes qu’en renonçant à la succession de son mari, & en se tenant à sa dot, doüaire & autres reprises portées par son Contrat de mariage ; les Créanciers hypotecaires, quoique pour dettes mobiliaires, seroient en droit de faire saisir les fruits & revenus des héritages & immeubles tombez au lot de la douairière, comme hypotequez & affectez à leurs créances ; mais les héritiers du mari sont obligez d’en acquitter la femme, & de faire cesser seuls les poursuites de ces Créanciers ; Arrest du même Parlement, du S. Novembre 1660.

Mais si les deux tiers des héritages & immeubles échus au lor de l’héritier du mari, ne sussisoient pas pour payer les dettes mobiliaires, hypotecaires & antérieures au mariage, la femme douairière seroit tenuë d’en payer le surplus sur son douaire, ou de renoncer à son douaire, faus son recours contre l’béritier du mari solvable ou non solvable ; Arrest du même Parlement, du 18. Juillet 1630.

La douairière n’est tenu de contribuer aux dettes immobiliaires, liypotequaires & antérieures à son Contrat de mariage, qu’au cas que le Contrat ou Acte qui contient la dette, soit controllée ; car le Contrat de mariage de la femme, quoique posterieure à la dette immobiliaire & hypotequaire du Créancier, prévaut & l’emporre sur l’hypoteque du Créancier, si le Contrat du Créancier a été passé en Normandie, & n’a pas été contrélé ; parce qu’en Normandie c’est le controle qui donne l’hypoteque aux Conrrats & Obligations passées en Normandie ; & à l’égard de ceux qui sont passez hors 1a Normandie, ils ont hypoteque sur les immeubles situez en Normandie, encore qu’ils ne soient point controiez art. 135. du Reglement de 1666.

La femme douairiere ne peut interrupter celui qui avoit acquis des héritages & immeubles de son mari avant son mariage, quoique le Contrat d’acquisirion soit passé en Normandie & non controlé, d’autant que ces héritages & imineubles n’étoient plus in bonis du mari, au tems du mariage de la douairière.

La femme doit, à cause de son douaire, contribuer au mariage avenant des filles d’un premier mariage de son mari, & au payement de la dot promise à ce lles qui ont été mariées, laquelle est encore duë, soit que le pere les ait mariées avant son mariage avec la femme douairière, soit depuis son mariage, parce que ce sont des dettes immobiliaires, hypotequaires & anterieures au mariage de la seconde femme, & à laquelle il est du un douaire, Arrest du même Parlemerit, du 23. Aoust 1656. & même elle contribué au mariage avenant des soeurs de son mari, quand bien même elles seroient devenuës héritières de leur frere, son mari ; Arrest du même Parlement, du 13. Mars 1685.

Le mari n’ayant point d’immeubles, peut par le Contrat de mariage constituer doüaire à sa femme sur ses meubles, dont la femme joüira pendant sa vie, & aprés sa mort la pleine proptieté en passera aux enfans, ou aux héritiers collateraux du mari, s’il n’y a enfans du mariage ; Arrest du même Parlement, du 26. Juin 1619. mais en ce cas il convient aprés la mort du mari vencre ces meubles, & du prix en faire emploi, dont la femme aura la joüissance pendant sa vie, & aprés son décës la rente provenante de l’emploi, appartiendra aux enfans, & leur sera un propre paternel, qui en cas de leur décés sans enfans, soit en minorité ou en majorité, appartiendroit aux héritiers des propres paternels, & non aux héririers mobiliers, ni encore moins aux héririers maternels, mais si les meubles n’avoient point été vendus ou qu’il n’eût point été fait emploi du prix en provenant, dans ce cas les meubles ou la somme apartiendroient aux héritiers mobiliers des enfans décede sans enfans, comme étant un meuble dans leur succession.

Les rentes hypoteques ou constituées, ne sont pas moins sujettes au doüaire que les rentes foncieres, nobles ou roturieres ; & S’il y a eu quelques-unes des rentes qui ayent été rachetées pendant le mariage, la femme douairière & ses enfans en auront récompense sur les autres biens du mari, affectez au doüaire, sans pouvoir toutefois avoir d’action contre les debiteurs des rentes qui auroient fait le remboursement & l’amortissement des rentes és mains du mari, à moins qu’il n’y eût saisie ou demande avant le rachat ; art. 78. du Reglement de ré66.

Les Charges & Offices de Judicature, de Finance ou Domaniaux, dont les maris étoient pourvus lors de leur mariage, sont pareillement sujetsjau douaire, soit coutumier soit préfix, & la femme en a le tiers par usufruit, ou du moins dans les gages, produit & revenu, autre néanmoins que le manuel ; c’est pourquoi si le mari vend & dispose de son Office pendant son mariage, sa femme pourra s’opposer au Sceau des Provisions, afin de conserver & à fin de deniers, & demander que l’acquereur de l’Office gardera par ses mains le tiers du prix de son acquisition pour sureté du douaire, ou en tout cas qu’il en sera fait emploi ; mais elle ne pourroit pas empécher que son mari ne revendit la Charge, & même faute d’opposition au Sceau, l’Office est purgé du doüaire ; mais quant aux Charges de la Couronne & de la Maison du Roy, & celles des Maisons des Princes du Sang, elles ne sont pas sujettes au douaire.

En Normandie le douaire, soit coutumier soit préfix, ne vient jamais en contribution, soit sur le prix des Charges & Offices, soir sur le prix de la vente des héritages & immeubles, pas même sur le prix des meubles, parce que par notre Coûtume le prix des meubles & des immeubles se distribue toujours par or-dre d’hypotheque entre les Créanciers, & jamais par contribution au sol la livre.

Si un mari avoit laissé tomber son Office aux Parties Casuels faute par lui d’avoir payé le Droit annuel & le Prêt, la femme en auroit récompense sur les au-tres biens du mari, soir que la femme accepte la succession de son mari, ou qu’elle y renonce ; mais si l’Office venoit à être supprimé par le Prince pendant le mariage sans ancun remboursement de Finance, la femme n’auroit aucune recompense ni indemnité pour son doüaire sur les autres biens du mari ; tout cela se fait entendre du doüaire coutumier ; car à l’égard du doüaire préfix, il ne peut souffrit de diminution, quelque accident qu’il arrive sur les Charges, Offices & autres biens du mari, meubles ou imme ubles, parce que le doüaire préfix se prend sur tous les biens du mari, tant meubles qu’immeubles, propres ou acqueéts.

Tout doüaire coutumier ou préfix, ne peut exceder le tiers en usufruit des biens immeubles du mari, en la personne de la femme, & en propriété en la personne des enfans ; de manière que le doüaire préfix ne peut être plus fort que le coûtumier, qui est toûjours du tiers ; mais il peut être moindre que le coûtumier par la convention des contractans.

La femme prend doüaire coûtumier sur les héritages vendus par son mari avant son mariage à faculté de remerer, & par lui retirez pendant le mariage, en contribuant par elle au tiers du prix du remeré, rétrait conventionel ou rembour sement ; Arrest du même Parlement, du 23 Décembre 2658.

Pour que la femme ait doüaire coûtumier sur un néritage, ou autre immeuble de son mari, il ne suffit pas que le mari soit saisi d’héritages & immeubles par une simple joüissance & possession, il faut en outre que la proprieté lui en appartienne irrévocablement & incommutablement ; car s’il est justement, ou pour cause necessaire, dépossedé pendant le mariage, la femme n’y aurâ point de doüaire, pas même de récompense sur les autres biens du mari.

La femme à doüaire sur l’immeuble par elle donné à son mari en don mobile, si lors de la mort du mari ou séparation de la femme, il se trouve en essence part. 7r du Reglement de 1é6s, à la charge par elle de contribuer aux dettes que son mari a contractées pendant son mariage ; Arrest du même Parlement, du 26 Mars 1667. Cette contribution sera jusqu’à concurrence du tiers à proportion du doüaire de la femme.

La femme ne prend point doüaire sur les héritages retirez par son mari pendant le mariage à droit de Retrait lignager ou féodal, mais elle a douaire sur les héritages retirez par le mari par faculté de remerer, en payant le tiers du remboursement, comme aussi sur les héritages qui viennent au mari pendant le mariage par commise, felonie, confiscation, batardise, désherence ou autres voyes de reversion, annéxées aux Fiefs.

Une femme épousant un mineut, a doüaire sur les principaux des rentes rachetées pendant la minorité de son mari, quoique le rachat ait été fait avant son martage, & que les deniers n’ayent point été remplacez ; Arrêts du même Parlement, du premier Avril 1é67, parce que les biens des mineurs ne changent point de nature tant qu’ils sont mineurs, & que les principaux des rentes remboursées & amorties pendant la minorité des propriétaires des rentes, sont immeubles comme l’étoient les rentes.

La femme est obligée de prendre son doüaire sur les héritages & immeubles baillez à son mari, sans qu’ellepuisse attaquer les possesseurs des héritages & immeubles que son mari a donnez en échange, à moins que les héritages & im-meubles donnez à son mari, ne soient pas sussisans pour remplir le doüaire de la femme ; Arrét du même Parlement, du premier Avril 1683.

Le doüaire coûtumier ne se prend pas seulement sur les héritages & immeubles dont le mari est saisi au jour de ses épousailles ou bénédiction nuptiale, mais encore sur ceux qui échéent au mari en ligne directe pendant le mariage.

Le doüaire Coûtumier ne se prendroit pas moins sur les héritages tenus & possedez à titre de Bail emphithéotique & à vie, ou par engagement, que sur ceux dont le mari seroit proprietaire incommutable, même sur une Isle ou autres Terres qui se formeroient par alluvion sur un héritage situé dans une riviere ou fleuve, donné à la Veuve en doüaire.

Les droits utiles d’un Fief, dont la Veuve joüit à titre de douairiere, lui appartiennent, & non aux heritiers du mari ; mais quant à la foy & hommage, il n’y a que les héritiers du mari qui puissent recevoir ce devoir de la part du Vassal, & non la doüairière ; elle a aussi droit de nommer & presenter aux Benefices dont le droit de patronage seroit annezé au Fief tombè dans son lot à doüaire S’il ne se trouvoit point de propres dans la succession du mari, soit immeubles au jour du mariage du mari, soit immeubles échus au mari en li-gne directe pendant & constant son mariage, ou qu’il n’y eût point de doüaire préfix par le Contrat de mariage, la veuve n’auroit point de doüaire.

Une femme ne pourroit avoir doüaire sur les biens de son mari, soit ceux qui lui sont échus de la succession de son pere, soit ceux qui lui sont avenus de la succession de sa mere, qu’à la charge de contribuer aux dettes que son mari avoit contractées entre le tems de son mariage & l’acceptation par lui saite de la succession de son pere ou de sa mère ; Arrest du Parlement de Roüen, du 2o Déceinbre 167z, il est rapporté dans le Journal du Palais, tome premier.

Un fils qui s’étoit marié, même majeur, sans le consentement de sa mere, quoique remariées étant décedé, sa veuve ne peut demander doüaire sur les biens de la mere ; ainsi jugé par Arrest du Parlement de Roüen, du 33 Fevrier 1o7â, rapporté au Journal du Palais, tome premier.

Le doüaire ne se prend pas moins sur les biens de la mere, que sur les biens du pere ; enforre que la veuve, & aprés sa mort les enfans ont double douaire, l’un sur les biens du pere, & l’autre sur les biens de la mere ; ce qui est singulier dans notre Coûtume ; nulle autre Coûtume du Royaume ne contient une pareille décision : ce qui fait qu’une veuve & ses enfans aprés sa mort, ont un grand avantage en fait de doüaire.

La troisième partie est par rapport à ces paroles : Encere que lesdits biens fussent ecbûs à ses pere & mere, oi autre ascendant par succession collaterale, donation, acquêts ou autrement.

La raison de cette décision, est que tous ces biens étoient devenus propres en la succession du fils, héritier de ses pere, mere ou autre ascendant, ainsi il ne faut pas être surpris si la femme de ce fils prend doüaire dans ces sortes de biens.

Mais la femme n’a point doüaire coûtumier sur les héritages & immeubles qui échéent à son mari, de la succession des descendans, sçavoir de la succession des enlans au pere ; de sorte que la femme de ce père, ne prendroit point doüaire coûtumier sur les héritages & immeubles échus à son mari d’une succession de cette qualité ; Arrest du même Parlement, du a8 Juillet 16s3.

Elle n’a point pareillement de duüaire coûtumier dans les héritages & immeubles qui échéent à son mari pendant le mariage par succession collaterale, quand bien même le frère auquel le mari a succedé, seroit décedé sans avoir fait demande en partage à son frère ainé saisi de la succession, & qui en a fait les fruits siens pendant tout le tems que le frere est demeuré dans le silence & n’a point demandé partage ; il en seroit au trement du doüaire préfix ; parce que le doüaire préfix se prend indistinctement sur tous les biens du mari meubles & rnmeubles, propres ou acquêts, & sans se mettre en peine si les propres viennent de succession directe ou de succeision coilaterale.

Sur le principe que le doüaire coûtumier ne se prend point sur les immeubles échus au mari pendant le mariage en succession collaterale, si le frère dé-cedé avoit reconnu son frère, mari de la doüaitiere, pour son héritier, & qu’il eût promis de lui garder sa succession, la femme ne prendroit pas pour cela doüaire coûtumier sur les immeubles de la succession du frère de son mari ; Arrét du même Parlement, du premier Juillet 1656.

Il n’y a point de droit coutumier sur les acquêts ou conquêts immeubles faits pendant le mariage, soit par acquisition, donation, legs ou aurrement : mais si la donation étoit faite par Contrat de mariage, même par un étranger ou par un parent ou un ami de la famille ou du futur époux, qui ne seroit en aucune manière héritier du donateur, la femme prendroit douaire coûtumier sur les immeubles compris dans la donation, parce que le mari en est saisi au jour des épousailies ; mais si une telle donation étoit faite pendant le mariage, la femme n’y pourroit prendre droit coûtumier.’Aprés les lots à douaire faits, la veuve doüairiere peut entrer en joüissance des héritages & immeubles tombez en son lot, sans être obligée de donner caution, pas même à sa caution juratoire.

Si la douairiere ne peut être payée des rentes échuës en son lot, elle peut poursuivre les héritiers du mari à lui fournir d’autres rentes ou autres effets de pareille valeur, sans qu’elle soit obligée de diseuter les debiteurs des rentes ; Arrest du même Parlement, du 31 Juillet àoSuivant la Iurisprudence du Parlement de Roüen, le doüaire ne s’éteint pas moins par la mort civile de la femme que par sa mort naturelle ; ainsi une femme douairière qui se fait Religieuse Professe, ou qui est condamnée à une peine afflictire qui emporte mort civile, perd son doüaire, & il est éteint dans sa personne ; Arrest du même Parlement, du 24 Janvier 1ézy, & même il y a ouverture au douaire, non seulement par la mort naturelle & civile du mari, mais encore par la simple séparation de biens & d’habitation de la femme ou la séparation de biens seulement.

L’hypoteque du doüaire coûtumier ou préfix, ne va qu’aprés l’hypoteque de la dut, pourvû que le Contrat de mariage soit reconnu devant Notaire avant la celebration du mariage ; art. 70. du Reglement de 1666. Cependant le doüaire soit coûtumier ou préfix, porté par le Contrat de mariage, à l’hypot eque du jour du Contrat de mariage ; Arrest du Parlement de Roüen, du 14 Août 464s, rapporté par Basnage en son Traité des hypoteques, chap. 13. Meis s’il n’y avoit point de Contrat de mariage, ou que le Contrat de mariage ne fût point passé devant Notaires, ou qu’étant sous signature privée il n’auroit point été reconnu en forme probante & authentique, ce doüaire n’auroit hypoteque que du jour de la benediction nuptiale, en Normandie, où le Controlle a lieu & est nécessaire pour donner hypoteque, néanmoins les Contrats de mûriage n’y sont point sujets, ils emportent hypoteque, in vim actus, Une femme peut par son Contrat de mariage, renoncer à prétendre doüaire coûtumier ou préfix, & cette renonciation est licite & permise, mais il faut qu’elle soit expresse & formelle ; une pareille renonciation qui seroit faite pendant le mariage, ne vaudroit rien, mais elle seroit bonne si elle étoit faite apres la mort de son mari, en faveur des enfans ou héritiers du mari ; Arrest du même Parlement, du S Décembre 1656 ; quoiqu’il en soit, la renonciation de la femme à tout doüaire, ne pourroit nuire ni préjudicier aux enfans, principalement par rapport au doüaire coûtumier, parce que les ensans le tiennent de la Coûtume & non de ses pere & mêre.

Une femme en contractant mariage, pourroit stipuler que son doüaire seroit dans retour, au cas qu’il n’y eûr point d’enfans du mariage, une stipulation de cette qualité seroit licite ; de manière que s’il ne venoit point d’ensans du mariage, ou que tous les enfans fussent décede au jour de la mort du pere, elle auroit son doüaire en joüissance & en proprieté, & ses héritiers y succederoient comme un effet qui lui appartenoit incommutablement & qui faisoit partie de ses biens au jour de sa mort.

Le doüaire coûtumier n’a pas besoin d’être stipulé par le Contrat de mariage, il est dû in aim consuetudinis.

Si le mari, pendant & conssant le mariage, recouvroit un propre de ses pere & mere par l’évenement d’un proces qu’il auroit intenté contre les détempteurs pendant son mariage, la femme y prendroit doüaire, encore que le mari en se mariant n’eût qu’une action en désistement & revendicarion ; ce qui auroit lieu quand même le proces n’auroit été jugé qu’aprés le décés du mari, d’autant que par cette réintegrande & ce recouvrement, il faut regarder la chose comme si le mari en eût été possesseur au jour de son mariage, ou au jour de son déces Un mari qui décederoit en sortant de l’Eglise, & qui par consequent n’auroir point couché avec sa femme, la femme ne pourroit prétendre de doüaire, ni encore moins, si le mari ou la femme en sortant de l’Eglise entroit en Redigie n, & y faisoit, aprés le tems du noviciat, profession.


ARTICLE CCCLXVIII.

D Oüaire n’est dû, si non du jour qu’il est demandé, s’il n’est autrement convenu par le traité de mariage.

Doüaire n est dû, si non du jour qu’il est demandé.

Suivant cette disposition, le douaire, soit coutumier ou préfix, ne faisit point la doüairière ni les enfans, si leur mere étoit morte au jour du déces de leur pere, il faut en faire demande, non pas judiciaire, mais par un simple exploit ; on pourroit même donner assignation en cas de refus devant le Juge compétant aux héritiers du mari, pour être condamnez à faire délivrance du doüaire.

Les héritiers du mari gagnent les fruits & revenus des héritages & immeubles sujets au douaire, depuis le déces du mari jusqu’au jour de la demande en délivrance du douaire.

Dés que la demande a été faite par la doualrière de son douaire aux héritiers de son mari, la veuve est en droit de demander aux acquereurs des héritages & immeubles sujets au douaire, tous les arrerages du douaire, depuis la mort de son mari, si mieux n’aiment les détempteurs ou tiers acquereurs déguerpir ; parce que le doüaire est un droit réel, & qu’il suffir que la femme ait cemandé le doüaire aux héritiers du mari, il est même permis à la veuve de faire fai-sir les fruits des Terres & héritages acquis par le tiers détempteur depuis son mariage, pour raison de son douaire, soit coûtumier, soit présix ; elle peut aussi les obliger à se désister des héritages & immeubles, sans être tenué de prencre la voye de la saisie réelle, La demande que la veuve a faite de son doüaire contre les héritiers de son mari, vaut contre la succession du pere du mari, quoiqu’échde long-iems depuis la mort du mari & la demande du doüaire aux héritiers du mari ; Arrest du Parlement de Normandie, du 8 Fevrier 1628. e du Parlement de cette Province, est que si les biens du mari sont failis & vendus par décret, la femme ne peut demander son douaire en essence, mais seulement en deniers, sur le prix de l’adjudication, dont on fait ensuite emploi, lequel emploi rient lieu de doüaire pour la veuve & pour les enfans ; si cependant la veuve vouloit payer le tiers des dettes anterieures à son Congat de mariage, avec offres de donner caution de faire payer aux créanciers les deux tiers des dettes anterieures à son Contrat de mariage en exemption des frais du décret, elle seroit recevable à demander son doüaire en essence ; Arrests du même Parlement, des 16 Mars 1637, 21 suillet 1683, a & 12 Décembre 1658.

Les héritiers de la femme doüairiere, qui décede aprés le jour de la Fête de S. Iean-Baptiste, gagnent les fruits, grains & foins de toute l’année ; & à l’égard des pommes & raisins, ils les gagnent si la douairière décede aprës le premier jour de Seprembre, encore que ces fruits soient pendans par les racines & non recueillis ; ce qui a lieu, soit que la veuve fit valoir les terres & héritages par ses mains, soit qu’elle les eût donnez à ferme, non pas cegendant pour pouvoir enlever les fruits en essence au Fermier, en lui remboursant les labours & semences, mais pour avoir les fermages, comme ils auroient eû les fruits en essence, si la donairière n’avoit pas affermé les terres & héritages, & qu’elle les fit valoir par ses mains au tems de sa mort, arrivée dans la saison où la Coûtume répute les fruits pendans par les racines & non recueillis ; meubles.

Mais si la doüairière décedoit avant la S. Jean-Bapriste, ses héritiers ne gagneroient les fruits, grains & foins qu’à proportion du tems qu’à duré le douai-fe & la jouissance de la veuve ; de même pour les pommes & raisins, si la veuve décedoit avant le premier Septembre, comme pareillement les fermages, seroient à proportion du tems qu’elle a vécu.

Lorsque le douaire est ouverr, & que la femme en a fait demande, les arrerages en courrent de die in diem, & la veuve a part aux fruits & levées des Terres & autres immeubles sujets au doüaire, à proportion de sa jouissance ; Arrest du même Parlement, du 37 Juiller 1664.

On peut demander vingt-neuf années d’arrerages & du doüaire, soit coûtumier, soit préfix, du jour de la demande en délivrance du doüaire, sans qu’il soit necessaire de réitérer la demande pendant les vingt-neuf années, ni faire aucunes poursuites ; parce que le doüaire est censé un droit réel & foncier, & pour alimens ; aussi la demande en ouverture de douaire, ne pourroit être prescrite que par quarante ans, à compter du jour du décés du mari ; parce que c’est une action hypotecaire, qui ne se prescrit que par quarante ans.

Quoique par le Contrat de mariage, le doüaire préfix ne fût que d’une certaine somme de deniers, cependant les interéts en seroient dus à la veuve du jour de la demande du doüaire ; mais il seroit plus sur de faire rendre une Sentence en condamnation d’interêts en consequence de cette demande.

On peut former complainte pour raison de la, possession du douaire, en cas de nouvelleté & de désaisine.

Sil n’est autrement convenu par le traité de mariage.

Il peut être stipulé & convenu par le Contrat de mariage, que la veuve ne

sera point tenuë de faire demande de son doüaire ; & en ce cas, elle sera saisie de son doüaire du jour du décës de son niari, & les fruits & interêts de son douaire, coûrreront du jour de la mort de son mari.


ARTICLE CCCLXIX.

S I le pere ou ayeul du mari ont consenti le mariage, ou s’ils y ont été présens, la femme aura droit sur leur succession, combien qu’elle échée depuis le décès de son mari, pour telle part & portion qui lui en eût pû appartenir si elle fût avenue de son vivant ; & ne pourra avoir doüaire sur les biens que le pere, la mere ou ayeul auroient acquis ou qui lui seroient échus depuis le décès du mari.

Si le pere ou ayeul du mari ont consenti le mariage on s’ils j ont été présens, la femone aura ouaire sur iecur successio n, combien qu’elle échée depuis le décés de fonmari, pour telle part & portion qu’il lui en eût pû appartenir si elle fût averaè de son vivant.

Voici unedisposition bien singulière, mais qui a eu pour but de tenir les enfans dans le respect envers leurs pere & mere & autres ascendens ; cette dispo-sition est, que la Coûtume aprés avoir réglé le doüaire coutumier de la femme dans l’’article 367, à l’ususruit du tiers des immeubles dont le mari est saisi au Jour des épousailles, & de ceux qui lui sont échus en ligne directe depuis le mûriage, djoute que si le pere ou ayeul du mari 2 consenti au mariage de son fils ou petit fils, ou qu’il ait été présent à son mariage, la veuve de ce fils ou petit fils ait douaire sur les immeubles du pere ou ayeul, qui écleront à ce fils ou petit fils dans la succession de son pere ou ayeul, encore que cette succession ne vint à écheoir qu’aprés la mort du fils ou petit fils.

Mais d’un autre côté, le consentement du pere ou ayeul au mariage de son fils ou petit fils, doit être formel ou expres, comme d’avoir été présent au mariage & avoir signé au Contrat de mariage, ou sur le registre des mariages à l’E-glise ; en un mot, il faut que le consentement soit prouvé & justifie ; car un consentement tacite ou presumé ne suffiroit pas pour donner effet à cette disposition ; tout cela dépend beaucoup des circonstances du fait.

Quoique notre article ne parle que du pere & ayeul, & qu’il semble que la mere ou ayeul maternel ne soit point dans ce cas, cependant il est certain que les immeubles de la mere ou ayeul maternel qui auroit consenti au mariage de son fils ou petit fils, ne seroient pas moins sujets au douaire de la fem-me que ceux du pere ou ayeul paternel ; parce que la mere ou ayeul maternel en la puissance de qui est le sils de famille, ne doit pas moins consentir à son mariage, que le pere ou l’ayeul paternel ; Arrest du Parlement de Roüen, du 36.

Fevrier 167a.

Les pere, mere ou autres ascendans qui ont parlé, qui sont intervenus, qui ont éte présens, & qui ont consenti au mariage de leur fils ou petit fils, ne peuvent vendre, aliéner, engager & hy potequer ie tiers de leurs immeubles depuis le mariage, au préjudice du doüaire de la femme de ce fils ou petit fils, ni par consequent au préjudice des enfans nez de ce mariage, s’ils se tiennent à leurs tiers coûtumier ; & même ni euxni leur mère ne seroient point obligez de contribuer aux dettes contractées par le pere, mere, ayeul, ayeule ou autre ascendant du mari depuis leur consentement, présence ou intervention au mariage ; car des ce moment ils se sont imposez une interdiction absolué de leurs immeubles qjusqu’à concurrence du doüaire que la femme auroit eu en usufruit, & du tiers que les enfans auroient eu en propriéré, si le mari avoit survécu ses pere, mere, ayeul, ayeule ou autre ascendant qui auroient été présens, & qui auroient consenti au mariage.

Cette décision ne doit plus faire de difficulté aprés l’Arrest du Conseil, du 30.

Aoust 1687. en forme du Reglement, qui a ordonné que la veuve du fils qui 2 survécu son pere, & qui s’est porté héritier d’icelui, peut avoir douaire sur la succession de son beaupere décedé avant son mari, suivant l’ancienne Jurisprudence du Parlement de Roüen ; cet Arrest fait loi dans la Province l’avois donné des mémoires dans l’Instance à M. le Duc d’Elbeuf, pour soutenir le parti qui a été suivi par ledit Arrest ; aussi le fond de la contestation. pour la liquidation & le payement du douaire coutumier de Madame la Duchesse d’Elbeuf, qui étoit Partie dans ledit Arrest du Conseil, fut jugée de la sorte par Arrest du Parlement de Paris en la quatrième Chambre des Enquêtes, du 8. Iuin 169s. Cet Arrest est rapporté dans le lournal des Audiances, liv. 11, chap. S.

Il est indifferent pour donner le doüaire, sur les immeubles des pere & mere ou autres ascendans, à la femme, que la suecession des pere, mere ou autres ascendans soit échuë du vivant du mari de la douairière ou aprés la mort du mari, sa veuve prendra toujouts doüaire dans le tiers par usufruit des immeubles de sieur succession & suivant la portion héréditaire qu’il y auroit euë, & aprés elle ses enfans en toute proprieté & jouissance.

Et ne pourra auoir dotaire sur les biens que le pere, la mere où ayeul, auroient acquis ait qui leur seroient échus depaïs le decës du mari.

La raison de cette disposition, est que le mari étant mort avant ses pere mere on autres ascendans, il est vrai de dire qu’il n’a rien eu dans les immeubles qui sont survenus à son pere, sa mere, ayeul ou autre ascendant depuis sa mort, soit par succession, acquisition, donation, legs où autrement, & conséquemment ces sortes de biens ne tombent point dans le douaire.

Le doüaire préfix n’est pas moins compris dans notre article que le douaire Coûtumier.


ARTICLE CCCLXX.

S I le pere ou ayeul n’ont consenti le mariage, la femme n’emporte après la mort de son mari doüaire, fors de ce dont son mari étoit saisi lorsqu’il l’épousa, ou de ce qui lui seroit depuis échû en droite ligne constant le mariage.

Il faut que les pere, mere, ayeul, ayeule ou autres ascendans, ayent certainement & véritablement consenti au mariage du fils de familie, pour que sa femme puisse demander douaire sur les héritages & immeubles de leur succeision, quand bien même leur fils seroit mort avant eux ; car faute d’un tel consentement, la femme n’auroit douaire coûtumier que sur les héritages & immeubles dont il étoit saisi au jour de son mariage, & sur ceux qui lui seroient échus pendant son mariage par succession directe ; & quant au douaire préfix, tous les auttes biens, meubles & immeubles, que le mari avoit lors de son décës, y seront en outre affectez & hypotequez ; desorte que si le pere, la mère ou autre ascendant n’avoient point donné leur consentement au mariage, la veuve n’auroit point de doüaire, soit coutumier ou préfix, sur leur succession échuë depuis la mort de son mari.

De quelque manière & sur quelques biens que la femme prenne son douaire, & soit que son mari ait survécu son pere, sa mere, ayeul, ayeule ou autre ascendant, soit qu’il soit décedé avant eux, elle n’y aura son doüaire qu’à la charge par elle de contribuer aux de ttes immobiliaires, hypotequaires, anrérieuges au mariage, qui auroient été contractées par son mari ou par ses pere & me-re ou autres ascendans ; & cette contribution sera sur le pied du tiers, qui est la portion que la femme prend dans les héritages & immeubles de son mari au jour de son mariage, & dans ceux à lui échus en ligne directe pendant & constant le mariage, même dans ceux de la succession de les pere, mere ou autres ascendans, échuë depuis sa mort, en justisiant évidemment & valablement dans ce dernier cas par la douairiere, que le pere, mere ou autre ascendant avoient duëment consenti à son mariage avec leur fils.

ARTIeLE


ARTICLE CCCLXXI.

L A femme ne peut avoir doüaire plus que le tiers de l’héritage, quelque convention qui soit fait au traité de mariage, & si le mari donne plus que le tiers, ses héritiers le peuvent révoquer après son déces.

Le douaire coûtumier ou préfix n’est que du tiers des immeubles & léritages du mari, situez en Normandie, sans qu’il puisse être plus fort directement ni indirectement, par convention portée par le Contrat de mariage ou autremnent, & sans qu’on puisse en cela déroger à la Coutume, ayant une dilposition prohibirive ; desorte néanmoins que si par le Contrat de mariage le, doüaire étoit pius iort que le tiers, la convention ne seroit pas en tout nulle, le douaire seroit seulement réductible au tiers, à l’instance & sur la demande des héritiers, éréanciers & ayans cause du mart ; mais quant au mari il ne pourroit pas de son vivant demander cette réduction, non seulement parce qu’il ne pourroit venir contre son propre fait & sa liberalité, mais encore parce que par l’incertitude, si le douüaire auroit lieu, l’action seroit prématurée ; & même les héritiers, créanciers ou ayans cause du mari, seroient obligez de se pourvoir en réduction dans les dix ans, à compter du iour de la demande du douaire, aprés lequel tems ils seroient non re cevables en leur demande & prétention.

Si les ensans se portoient héritiers de leur père, ils seroient pareillement en droit de faire réduire le doüaire de leur mere, qui excederoit le tiers, sans qu’on pût leur opposer, non plus qu’aux héritiers Collatéraux, créanciers ou ayans Cause du mari, qu’ils étoient tenus de ses faits & promesses, d’autant que la convention qu’ils combattoient, étoit directement contre la prohibition de la Coûtume qui ne pouvoit être couverte par un fait.

Quoique le douaire, coutumier ou préfix, ne puisse jamais exceder le tiers, il peut néanmoins être congenu par le Contrat de mariage entre les contractans, qu’il sera moindre que le tiers ; parce que la Coûtume n’a point sur cela de prohibition.

Le mari ne peut pas même, par forme de donation, constituer douaire à sa femme plus que de tiers de ses immeubles, directement ni indirectement ; car il ne peut en faveur de mariage donner à sa femme aucune part de ses immeubles ; art. 73. du Reglement de 1666. Cependant la femme mineure ou majeure, duëment autorisée par ses parens, n’ayant enfans d’un premier mariage, peut don-ner à son mari par Contrat de mariage tous ses meubses & le tiers de ses immeubles ; & si elle avoit des enfans, elle ne pourroit donner de tous ses biens à son second mari, que suivant la porrion d’un des enfans moins prenant dans sa succession, suivant l’article 405. de nôtre Coutume, conforme à l’Edit des secon-des Noces, de François Il. de 1560.

Le don mobile est même légal, c’est-à-dire, qu’il a lieu sans stipulation pour le tiers de la dot promise ; Arrests du Parlement de Roüen, des s Fevtier 1653, 41. May 1671, & 7. Juillet 1684 ; de manière que quand le Contrat de mariage ne conriendroit pas le don mobile, il ne seroit pas moins du’au mari in vim coxsueJudinis, & même c’est une maxime certaine, que ce qui reste à payer de la cot promise à une femme par le Contrat de mariage, doir s’appliquer & s’imputer sur la dot & sur le compte de la femme, & que tout ce qui a été payé, a’impute sur le don mobile ; Arrest da même Parlement, du 9. Janvier 1659.

Il n’est point pareillement douteux, que le don mobile faisit de plein droit, & que s’il se trouve encore en nature au tems du décés du mari, sa veuve y peut prendre douaire ; & cette donation n’est point sujette à insinuation ; art. 74. du même Reglement.


ARTICLE CCCLXXII.

C Elui qui est plege du douaire, le doit fournir & faire valoir, encore que la promesse excede le tiers des biens du mari, sans qu’il en puisse demander recours sur les biens du mari ou de ses hoirs, quelque contre-lettre ou promesse de garentie qu’il ait de lui.

Quoiqu’il soit défendu & prohibé de donner & accordet par Contrat de mariage à la femme un douaire plus fort que le tiers des immeubles du mari, néan-moins si une personne majeure intervenoit plege ou caution du douaire promis & convenu par le Contrat de mariage ou autrement, elle est tenuë de payer le douaire entier, même la péduction ou l’excedent du tiers, à la femme & aux en sans, sans mêmé aucun recours pour l’excedent contre le mari, ses héritiers, créanciers & ayans cause ; la caution perdra l’excedent du tiers en pure perte, elle n’auroit recours de garantie que pour raison du tiers ; ainsi ce n’est pas ici le cas de la maxime de Droit, que liberata reo, liberatur & fidejussor ; il faut que la caution fasse valoir en son propre & privé nom le doüaire entier, quand même il excederoit le tiers, sans espèrance d’aucun recours pour l’excedent du tiers, quelqu’acte d’indemnité & de garantie que le mari puisse lui avoir donné, un tel acte seroit nul, comme étant une espèce de contre : lettre à la prohibition de la Coûtume ; c’est une faute que le Fidejusseur auroit faite, qu’il doit supporter ; c’est pourquoi il est dangereux d’être caution en pareil cas, du moins si on le faisoit, il faudroit borner son cautionnement au tiers qui peut & doit former le douaire.


ARTICLE CCCLXXIII.

C E qui se doit entendre de toutes personnes, autres personnes que le pere ou ayeul du mari, lesquels en ce cas ne sont tenus que des arrerages qui écheront leur vie durant, & n’y sont obligez leurs hoirs après leur mort.

Non seulement le pere ou autres ascendans paternels peuvent être cautions du douaire, mais encore la mere & autres ascendans maternels : mais lorsque les pere ou mere ou autres ascendans, soit paternels soit maternels, se sont rendus cautions du douaire, ils ne sont tenus d’en payer les arrérages que pendant leur vie, même de l’’excedent du tiers ; mais aprés leur mort leur caution-nement tombe & cesse, sans passer : contre leurs héritiers & ayans cause ; Arrest du Parlement de Roüen, du 13. Decembre 16yo, & même ils ne feroient pas tenus des arrerages du douaire, quoiqu’echus du vivant de la caution ; art. 75. du Reglement de 16b8 ; en quoi les pere, mere ou autres ascendans sont plus favorisez qu’un étranger de la famille, qui auroit eu la facilité de se rendre caution du douaire, qui même excederoit le tiers des immeubles du mari ; car cet étranger seroit tenu non seulement de payer pendant sa vie les arrerages du doüaire en entier, mais encore ses héritiers ou ayans cause.

Si le cautionnement étoit borné & limité à l’excedent du tiers, celui qui se seroit rendu caution, ne payeroit que les arrerages de cet excedent, & non du doüaire entier ; cela dépend des termes du cautionnement.

Si un pere se rendoit caution de la dot de son fils envers la femme, ce cautionnement ne seroit pas réputé une donation en avancement de succession, ni uin avantage indirect capable d’empécher la femme ou les enfans nez du mariage, qui auroient renoncé à la succession de leur pere & ayeul, de pouvoir repeter la dot sur les biens de l’ayeul caution de la dot ; mais la femme & les enfans ne pourroient faire decreter ses biens, qu’aprés avoir discuté les biens du sils, fon mari principal debiteur de la dot ; Arrest du même Parlement, du 20. Aoust 1644. l’ayeul qui seroit caution, pourroit même pour se liberer de ce cautionnement, abandonner tous ses biens à la veuve & aux enfans de son fils, à la char-ge d’une pension à vie pour sa nourriture & son entretien, laquelle seroit arbitrée par les Juges saisis de la contestation ; Arrest du même Parlement, du 29.

Janvier 1627.


ARTICLE CCCLXXIV.

M Oins que le tiers peut avoir la femme en douaire, s’il est convenu par le traité de mariage.

Puisque la femme peut par convention avoir moins que le tiers des immeubles du mari pour son douaire, il n’est pas douteux qu’elle peut valablement renoncer à prendre aucun douaire, & qu’on peut stipuler & convenir qu’elle n’aura point de doüaire ; mais il faut que tout cela se fasse par le Contrat de mariage & avant la célébration de mariage, car telles conventions faites pendant & constant le mariage, seroient nulles comme pareillement l’acte qui seruit fait entre le mari & la femme pendant le mariage, par lequel le mari augmenteroit le doüaire, quand même cette augmentation avec le doüaire accordé par le Contrat de mariage, n’excederoit point le tiers des immeubles du mari, à moins qu’il ne fût dit par le Contrat de mariage, qu’il pourroit augmenter le douaire de sa femme pendant son mariage, s’il le jugeoit à propos ; car dans ce cas ce n’est pas une nouvelle convention, mais l’exécution de la faculté portée par le Contrat de mariage, pourvû toutefois, & non autrement, que le doüaire présix n’excedât point le douaire coûtumier.

S’il étoit dit pareillement par le Contrat de mariage, que la femme ne prendroit son douaire que sar de certains immeubles désignez par le Contrat de maria-ge, & que tous les autres biens en seroient libres, présens & à venir, cette convention seroit licite & valable, quand même au moyen de cette convention le douaire seroit moindre que le tiers des immeubles du mari ; mais il ne faudroit pas que le douaire fût plus fort que le tiers ; car nonobstant cette fixation, il seroit réductible au tiers ; en un mot il est permis d’accorder un doüaire préfix à la femme au lieu du douaire coûtumier, ainsi & de la manière qu’on le juge à propos, même moindre que le droit coûtumier, mais il ne peut être plus forr que le tiers des immeubles du mari, autrement il est reductible ; parce que, le doüaire préfix ne peut exceder le coutumier, & s’il l’excede, on peut le faite réduire au coûtumier ; mais s’il est moindre, le douaire sera & demeurera à la fixation portée par le Contrat de mariage, sans que la veuve ni les enfans puissent renoncer au doüaire préfix pour prendre le coûtumier ; & cela parce que c’est une des conventions du Contrat de mariage.

On ne pourroit pas stipuler par le Contrat de mariage ou autrement, que le doüaire coûtumier ou préfix seroit viager & non propre aux enfans, une pareille convention seroit nulle par rapport aux enfans, à qui la Coûtume don-ne cette portion de biens en pleine proprieté, comme une table aprés le naufrage.

Un douaire préfix stipulé sans retour par le Contrat de mariage au profit de la femme, n’est pas moins propre aux enfans, que si cette stipulation n’avoit point été faire, d’autant que cette convention n’est qu’au cas qu’il n’y fait point d’enfans du mariage, & par rapport aux héritiers collatéraux du mari ; c’est ainsi que s’explique Bacquet en son Traité des Droits de Justice, chbap. 15. n. 46.


ARTICLE CCCLXXV.

L Es douairieres doivent tenir en état les maisons & héritages, comme elles leur auront été baillées, sans couper les bois autres que ceux qui sont en coupes ordinaires, si ce n’est pour réparer les maisons & manoirs, appellé le proprietaire, & par Ordonnance de Justice.

Les doüairieres doivent tenir en état les maisons & béritages, comme elles leur auront été baillées.

Ces réparations, sont des réparations d’entretien & menuës réparations, mais non les grosses réparations, telles que sont les quatre gros mures, poutres. solives, voutes, planchers, les couvertures entieres & toutes autres grosses réparations, qui ne sont point à la charge de la douüairière ; elle n’est tenue que des répatarions viagerés : mais il faut qu’elle entretienne les lieux de maniere qu’elle les laisse au même & en aussi bon état qu’elle les a trouvez lorsqu’elle en a pris possession & est entrée en joüissance ; & afin de constater l’état des lieux, il conviendra d’en faire dresser un Proces verbal en entrant avec les héritiers du mari ou duëment appellez, & aux frais des héritiers, faute de quoi la veure ni ses héritiers ne seroient pas recevables aprés avoir pris les lieux sans visite, à dire qu’ils n’étoient pas en état lorsque la douaitiere s’en étoit mis en possession.

La douaitiere qui laisse déperir les tetres, héritages, maisons, manoir, batimens, colombier, pressoir, four & autres lieux donr elle a la joüissance pour son doüaire, & qui n’y fait pas faire les réparations ausquelles elle est obligée, peut à la vérité être condamnée à les faire avec dommages & interêts, mais elle ne seroit pas pour céla privée de son douaire, & elle ne le perdroit pas ; elle seroit même condamnée aux dommages & interêts du chef de son Fermier, qui auroit dégradé les terres & les lieux pendant son bail.

La dounirière en entrant en joüissance de son douaire, peut obliger les héritiers du mari à mettre les maisons, bûtimens & lieux en bon état, & à y faire les réparations nécessaires.

Si les maisons & bâtimens dont la douairiere jouit, tomboient par caduciré, les héritiers du mari seroient tenus de les faire rebûtir ou lui en donner d’autres, mais non s’ils périssoient par le feu ou par quelqu’autre accident extra-ordinaire ou force majeure ; en ce cas la douairière n’auroit que la joüissance de la place, sans cependant qu’elle pût prétendre devoir jouir du batiment que l’héritier auroit fuit faire sur la place.

La doüairiere est tenuë d’acquitter les rentes & charges foncieres, ausquelles les héritages dont elle joüit pour son doüaire, sont sujets, sans aucune recompense ni indemnité contre les héritiers du mari, même de contribuer aux ta-xes réelles qui sur viennent sur les héritages, comme Arriere-an, Franc-aleu, Tiers & Danger, Frane-Fiefs, & au tres taxes qui peuvent survenir sur les terres, héritages, maisons & autres immeubles ; Arrests du Parlement de Roüen, des 1s Janvier & 1 Décembre 1647, & 3 Fevrier 1é57.

Sil y avoit des carrieres, ardoirieres, sablonnieres & marnes, dans les terres, dont la veuve a la jouissance pour son doüaire, elle en auroit l’usage pour l’utilire, entretien & culture des terres, maisons & terres qui composent son douaire, mais elle n’en pourroit faire commerce ni les vendre, parce que tout cela ne se peut tirer sans endommager le fond & la supersicie de la terre.

Sans couper les bois auires que ceux qui sont en coupes ordinaires, si ce n’est pour reparer les maisons & manoirs, appellé le proprietaire, & par Ordonnance de Justice.

La douairière ne peut couper les bois de haute-futaye, mais seulement les bois taillis dans leurs coupes ordinaires & sans pouvoir les avancer ; elle ne pourroit pareillement avancer la pèche des étangs. Si cependant il tomboit quelques arbres de haute-sutaye par caducité ou tempêre, ils lui appartiendroient ; il lui seroit de plus permis de couper queiques arbres de haute futaye, si elle vouloit réparer les manoirs & bâtimens dépendans de sa jouissance ; mais il faudroit pour cela y appeller l’héritier du mari, & même en avoir la permission du Juge des lieux ; ce qui arrive tres-rarement, parce que la douairière n’est point tenuë des grosses réparations, mais seulement des menuës, viageres & d’entretien, qui ne demandent point de bois de haute-futaye.


ARTICLE CCCLXXVI.

F Emme n’a doüaire sur les biens de son mari, si elle n’étoit avec lui lors de son décès.

La femme qui abandonneroit son mari, sans raison ni juste cause, & qui ne seroit point avec son mari au tems de la maladie dont il est décedé, doit être condamnée à perdre son douaire, & à en être privée pour toûjouts, en haine du mépris & du peu d’affection de la femme pour son mari, qui ne l’a pas assisté dans le tems qu’il avoit plus besoin de secours : mais si la femme étoit absente de la maison de son mari lors de son déces pour juste & bonne cause par exemple, si elle étoit en voyage pour sa santé, comme aux eaux, ou pour les affaires domestiques, ou si elle avoir été obligée de demander sa separation de corps & d’habitation, ou qu’elle l’eût fait ordonner, ou pour autre cause raisonnable, & que son mari vint à mourir sans s’être trouvée à sa mort, elle ne seroir pas privée pour cela de son douaire, elle l’auroit comme si elle s’y fût trouvée ; mais elle ne pourroit s’excuser sur une simple séparation de biens De plus si le mari étoit malade de la peste ou autre maladie contagieuse, sa femme ne seroit pas obligée de demeurer avec lui, ni l’assister elle-même & en propre personne, tant que cette maladie dureroit, & elle ne seroit pas pour cela privée de son douaire ; cependant il seroit de son devoir de lui donner & faire tenir ses besoins & necessitez.

Il ne suffiroit pas à une femme qui auroit par caprice, legereté, libertinage & sans juste cause quitté son mari & sa maison, de retourner auprés de lui dans les derniers momens de sa vie, pour ne pas perdre son douaire ; du moins faudroit-il qu’il parût une véritable & sincere reconciliation entre elle & son ma-ri, & même qu’elle eût assisté son mari dans la maladie dont il seroit mort ; autrement ce seroit une réconciliation feinte, étudiée & interressée ; car enfin toute femme qui quitte & abandonne son mari sans juste cause, & qui n’est point avec lui dans le tems de sa morr, est indigne d’avoit douaire sur ses biens, Sur ces principes une femme, par Arrét du Parlement de Paris du 2 sanvier 167s, a été privée d’avoir part dans la communauté de biens, pour avoit quitté son mari par legereté sans l’avoir assisté à la mort ; cet Arrest est dans le premier Tome du Journal du Palais.

Une femme convaincuë & jugée adultere, est privée du doüaire ; & même sil avoit été transigé sur l’accusation d’adultere, pour arrêter la condamnation de la femme qui étoit plus que convaincuë par les informations, & que par la Transaction elle eût renoncé par avance à son douaire, la Transaction subsisteroit, & la femme ne seroit pas recevable à prendre des Lettres de Relevement ou de Rescision contre ; Arrest du Parlement de Roüen, du 8 Mars 1678.


ARTICLE CCCLXXVII.

C E qui se doit entendre, quand elle a abandonné son mari sans cause raisonnable, ou que le divorce est avenu par la faute de la fem-me ; mais s’il advient par la faute du mari, ou de tous deux, elle aura son doüaire.

Encore un coup, pour priver une veuve de son doüaire, qui n’auroit pas été avec son mari lors de sa mort, il faut qu’elie ait quitté & abandonné son mari sans cau se raisonnable, ou que la rupture du ménase fût arrivée par la seule faute de la femme ; mais on ne pourroit rien imputer à la femme, si elle avoit fait divorce avec son mari par la faute de son mari, on de l’un & de l’autre, car dans ces cas, êlle seroit exeusable d’avoir rompu son ménage, d’avoir quitté son mari, & ne s’être pas trouvée chez lui & dans sa maison lors de sa mort ; & c’est aux suges à examiner & à décider pour quelles causes une iemme peut être excusée d’avoir quitré son mari & sa maison, & de ne s’être pas trouvée chez lui & auprés de lui dans sa dernière maladie, & de laquelle il est déce dé.

Quoique l’héritier du mari ne soit pas recévable à accuser la veuve du crime d’adultere lorsque son mari ne s’en est point plaint de son vivant, néanmoins pour établir & justifier que la femme avoit quitté & abandonné son mari & sa maison pour cause criminelle & capable de faire priver la femme de son douaire, l’hicritier du mari pourroit & seroit recevable à proposer par forme d’exception à la demande formée par la femme pour la délivrance de son doüaire, l’accusation d’adultere, & à en demander la preuve, à plus forte raison, les neritiers du mari pourroient reprendre l’accusation d’adultere, commencée par le mari conire sa femme, La veuve qui se remarieroit incontinent aprés le déces de son mari, ou qui vivroit dans le libertinage & la débauche pendant sa viduité, pourroit être privée de son doüaire.


ARTICLE CCCLXXVIII.

L’Héritier n’est tenu de doüer la femme de son prédécesseur, fors de ce qu’il a eu de la succession.

L’héritier, même l’héritier absolu & pur & simple du mari, n’est tenu de fournir à la veuve le douaire coutumier ou préfix que sur les seuls biens qui lui viennent de la succession du mari, & jusqu’à concurrence des biens de la succession, sans que la veuve ait aucune action ni droit sur les propres biens & biens personnels de l’héritier pour raison de son doüaire, d’autant qu’elle n’a qu’un droit réel sur les biens de son mari ; c’est pour cette raison que le doüaire se pert & s’éteint par le déperissement du fonds, arrivé par cause naturelle, sans même que la veuve puisse en demander aucune indemnité ni ré-compense à l’héritier de son mari : Cependant si le mari avoit aliené une partie des immeubles affectez au douaire, l’hétitier n’en seroit pas quitte pour lui-offrir le tiers de ce qui resteroit d’immeubles au jour du déces du mari, l’héritier seroit tenu de lui faire raison du tiers des immeubles alienez sur les biens & effets de la succession, mais non sur ses propres biens.

Si le mari avoit constitué un doüaire coûtnmier à sa femme par son Contrat de mariage, & qu’il n’eût aucuns immeubles, mais seulement des meubies & effets mobiliers, l’héritier du mari ne seroit point obligé de fournir par indemmté ou autrement ce doüaire à la veuve, pas même sur les meubles & effets mobiliers de la succession, encore moins sur ses biens pefsonnels ; il en seroir autrement du douaire préfix, il se prendroit sur les meubles & effets mo-biliers de la succession, mais jamais sur les biens de l’héritier du mari de la douairière.

L’héritier seroit garant envers les acquereurs & tiers détempteurs qui auroient acquis des héritages & immeubles du mari, affectez au doüaire, & qui seroient poursuivis par la veuve pour son doüaire, & l’héritier du mary seroit tenu personnellement & par sa qualité d’héritier de faire cesser les poursuites de la doüairière.

Si depuis la mort du mari, son héritier étoit rentré en possession d’un héritage & immeuble qui avoit appartenu Au mari avant son mariage, la veuve y prendroit douaire, en remboursant à l’heritier un tiers des frais qu’il auroit faits pour rentrer dans cet héritage & imme uble, si mieux n’aimoit la veuve n’y rien prendre pour son doüaire,


ARTICLE CCCLXXIX.

S I le mari durant son mariage a vendu de son héritage, la femme en peut demander doüairie à celut qui le possede.

La femme dans le cas de cet article, ne seroit pas tenuë d’interrupter les aequereurs & tiers détempreurs par la voye de la suisie réelle ou décret, ni encore moins par une demande en déclaration d’hypareque, qui est inconnuë en Normandie ; elle pourroit les pouriuivre par une demande en désistement du tiers des héritages & immeubles par eux acquis, sauf leur recours contre l’héritier de son mari ; parcé que la femme baber actionem res persecutoriam pour son douaire sur les héritages & immeubles que son mari a vendus & alienez, quoique affectez & hypotequez à son doüaire ; les enfans qui aprés avoir renoncé à la suecession de leur pere, se tiendroient à leur tiers coûtumier, auroient le méme droit & la même action que leur mère ; la femme ne pourroit pareillement interrupter les acquereurs & tiers détempteurs, qu’elle n’eûr préalablement renoncé à la succession de son mari, ou qu’elle ne fût separée de biens, ou de biens & d’habitation d’avec son mari ; car si elle prenoit part aux meubles, elle n’auroit plus d’action contre eux, ou du moins elle confondroit cette aetion en sa personne, à cause de sa qualité d’héritière de son mari quant aux meubles.

Si le mari avoit échangé des héritages & immeubles affectez & hypotequez au doüaire contre d’autres, le doüaire ne pourroit être pris que sur les héritages & immeubles qui ont été donnez au mary en contr’échange, & non sur ceux qu’il avoir donnez en échange.

La veuve doüairiere ne peut inquièter pour son douaire, les debiteurs des rentes par eux rachetées & amorties au mari pendant le mariage, quoique le mari fût propriétaire incommutable de ces rentes au jour de son mariage, elle n’a que la recompense sur les autres biens de la succession, s’il y en a3 mais à l’egard des Charges & Offices, la veuve ni les enfans n’ont point d’action conrre le Titulaire pour raison du doüaire à moins qu’ils n’eussent for-mé opposition au Sceau des Provisions, avant devoir été scellées ; parce qu’en matière de Charges & Offices, le Sceau purge toutes hypoteques, même le doüaire, ouvert ou non ouvert, faute d’oppositiomt


ARTICLE CCCLXXX.

F Emme ne peut avoir doüaire de ce qui est échû à son mari depuis les épousailles par donation, succession collaterale ou autrement, qu’en ligne directe.

Cet article doit être entendu seulement du douaire coûtumier, & non du doüaire préfix qui se prend sur toutes sortes de biens, meubles & immeubles.

Par la raison que le doüaire coutumier se prend seulement sur les héritages & immeubles dont le mari est saisi au jour de ses épousailles & ceux qui lui viennent pendant le mariage en ligne directe, soit par donation ou succession, il y’ensuit par une conséquence nécessaire, que ce doüaire ne le prend point sur les héritages & immeubles qui arrivent au mari pendant le mariace, par acquisition, donation ou legs de toutes autres personnes que de ses pere, mere, ou autres ascendans, où par succession collaterale ; mais à l’égard du douaire présix, comme tous les biens du mari y sont affectez & hypotequez, ces derniers biens y seroient engagez comme tous les autres.

Cependant les Provisions à vie des puinez & les pensions dont joüissent les soeurs tant qu’elles ne sont point mariées, venant à cesser, augmentent le douaire de la veuve sur les héritages & immetbles de son mari, qui étoient effectez à ces provisions & pensions ; parce que cette cessation est une extinction des provisions & pensions à vie, & non une succession collaterale.


ARTICLE CCCLXXXI.

S I le mari renonce à la succession qui lui est échuë en ligne directe, néanmoins la femme peut prendre douaire sur icelle aux charges de droit.

Si le mari renonce à la succession qui lui est échuë en lignedirecte, néanmoins la femme peut prendre douaire sur icelle.

Cette faculté est donnée à la femme, à cause que son doüaire lui donne la qualité de oréancière de la succession de son mari, mais elle ne peut exercer cette faculté qu’aprés la mort de son mari, naturelle ou civile, & non de son vivant, n’y ayant ouverture au douaire que par la mort du mari naturelle ou civile ; cependant par notre lurisprudence elle pourroit le faire aprés sa séparation de biens, ou de biens & d’habitation, parce qu’en Normandie cette séparation donne droit à la femme de demander son doüaire, ce qui est bien extraordinaire, & ne paroit pas raisonnable.

Si un mari avoit renoncé à une donation d’immeubles, qui lui avoit été faite en directe depuis son mariage, & qu’il avoit acceptée, ou à un legs qui iui avoit été fait en directe, la veuve pourroit pareillement prendre doüaire sur les choses données ou léguées ; d’autant qu’il est à présumer que la renonciation que le mari avoit faite à la succession échuë en ligne directe, où à la donation ou legs fait en ligne directe & par des ascendans, a été faite en fraude de la femme ; ainsi la veuve y prendroir douaire, comme si son mari n’y avoit point renoncédux charges de droit, qui sont de contribuer au payement du tiers des dettes des ascendans, ou contractées avant la donation ou legs ; si néanmoins les ascendans avoient consenti au mariage du mari de la douairière, la reuve ni les enfans douairiers ne seroient point obligez de contribuer aux dettes que ces ascendans auroient contractées depuis le Contrat de mariage du mari de la douai-rière, parce que ces sortes dedettes ne peuvent en rien diminuer le doüaire.


ARTICLE CCCLXXXII.

H Omme ayant eu enfant né vif de sa femme, joüit par ususruit tant qu’il se tient en viduité de tout le revenu appartenant à sadite femme lors de son décès, encore que l’enfant soit mort avant la dissolution du mariage ; & s’il se remarie, il n’en joüira que du tiers.

Voici un droit bien considérable que la Coûtume donne à un mari ; ce droit s’appelle Droit de viduite, qui est qu’un mari qui a eu un enfant, mâle ou femelle de son mariage, joüit pendant sa vie de tous les biens de sa femme en usufruit, & en fait les fruits siens, s’il ne se remarie point, & s’il se remarie, du tiers, encore même que l’enfant vient à déceder avant la dissolution du mariage, de quelque nature que soient les biens, meubles & immeubles, nobles ou roturiers, en franc-aleu ou en bourgage, propres ou acquêts, & de tous autres.

Mais ce droit de viduité ne s’étend que sur les biens situez en Normandie, & non sur ceux situez dans une autre Coûtume où le droit de viduité n’auroit pas lieu ; c’est pourquoi le mari n’auroit point droit de viduité sur les biens de sa femme, femme, fituez en Normandie, & aliénez par la femme duëment autorisée par son mari, & dont le prix a été remplacé & employé en acquisitions d’autres héritages, & immeubles situez dans l’etenduë d’une Coutume différente en ceci à la nôtre ; mais d’un autre côté, le mari auroit droit de viduité sur les biens de sa femme, fituez en Normandie, acquis du prix & des deniers provenans de la vente & aliénation duëment faite par la femme, de biens qui lui appartenoient dans une autre Coûtume ; & cela parce que les biens acquis & rempla-cez sont situez dans l’etenduë de la Coûtume de Normandie, où le droit de viduité est reçû-Mais pour que le mari ait droit de viduité, il faut deux choses ; l’une, que son mariage fût légitime & valable ; l’autre, qu’il soit sorti un enfant de ce mariage, qui ait eu vie ; car s’il étoit mort né ou né mort, cet enfant ne seroit com-pté pour rien & ne donneroit point le droit de viduité au pere : si néanmoins l’enfant étoit né avant le mariage, & qu’il eût été légitimé par le mariage subséquent de ses pere & mere, cet enfant produiroit le même effet pour donner le droit de viduité au pere, que si cet enfant étoit né pendant le mariage C’est assez qu’il soit sorti un enfant vif du mariage pour donner ouverture du droit de viduité, sans qu’il soit nécessaire qu’il survive sa mere ; car qu’il vive ou qu’il meure, c’est chose indifferente au droit de viduité.

Le mari ne perdroit point son droit de viduité par la séparation de corps & d’habitation, ou de biens seulement de la femme ; Arrest du Parlement de Roüen du 22. Decembre 1636. Mais les Créanciers du mari ne pourroient pas, comme exerçant les droits de leur débiteur, jouir des biens de la femme, qui étoit au pour de son décés séparée d’avec son mari, les enfans joüiroient seuls des biens de leur mere, au préjudice des Créanciers de leur pere, parce qu’en ce cas le droit de viduité est personnel au mari ; il est même permis au pere de renoncer, ceder & remettre son droit de viduité à ses enfans, au préjudice & même en fraude de ses Créanciers, quand bien même cet usufruit seroit saisi réellement ou autrement par les Créanciers au tems de la renonciation, cession & remise ; Arrest du même Parlement, des 17. May 1634. & 15. Juiller 1660. & art. 77. du Reglement de 1666. Mais si cette cession étoit faite par ce mari à ses héritiers collateraux ou à ceux de sa femme, elle ne pourroit nuire ni préjudicier à ses Créanciers, qui auroient fait saisir cet usufruit avant la cession.

Le droit de viduité n’a lieu que sur les biens qui se trouvent au jour du déces de la femme, & non sur ceux qui peuvent écheoir aprés saimort & de son chef, côté & ligne ; Arrest du même Parlement, des s. Aoust re7, & 17. May 1672.

Le père en se remarlant ne perd pas son droit de viduité en entier, il le perd seuleient pour les deux tiers, & son droit est reduit à un tiers de son usufruit, & les deux autres tiers passent aux héritiers de la femme, soit ses enfans, soit ses héritiers collareraux ; & si le mari s’est remarié, en ce cas pour regler la joüissance des biens par droit de viduité entre le mari & les héritiers de la femme, il faudra faire deux lots pour en idonner un au mari pour son tiers, & l’autre à tous les héritiers de la femme, qui contiendra les deux autres tiers ; & c’est au mari à faire les lots ; Arrest du même Parlement, du 19. Juillet 163s.

L’esperance du droit de viduité ne lie point les mains à la femme, & ne la met point dans l’interdiction de pouvoir vendre, aliéner, engager, hypote quer & disposer de ses biens, tant par actes entre-vifs que par actes à cause de mort ; le tout dans les termes de droit & en gardant les formalitez requises pour la validité des alienarions & dispositions que peut faire une femme en puissance de mari ; parce que le droit de viduité du mari ne se prend que sur les biens qui se trouvent apparrenir à la femme au jour de son déces ; ensorte que si la femme n’a aucuns biens au rems de sa mort, le droit de viduité du mari deviendra inutile.

Lorsqu’il n’y a point eu d’enfant nez vifs d’un mariage, & que la femme meurt avant que les fruits de ses immeubles soient ameublis par la Coutume, le mari gagne seulement les fruits à proportion du rems de l’année du décës de la femme, comme dans le cas du droit de viduité, qui donne aux héritiers du mari les fruits des biens dont le mari joüissoit, à proportion de la joüissance du mari qui décederoit avant le tems auquel la Coûtume ameublit les fruits pendens par les racines & aux arbres ; Arrest du même Parlement, du 17. Iuillet 16é4.’il y a contestation pour sçavoir si l’enfant dont la femme est aecouchée, est né vif, ou né mort, c’est au mari à prouver le fait ; mais dans le doute, aprés avoir bien consulté les Medecins & Chirurgiens, qui à proprement parler sont les véritables Juges d’une pareille contestation, il semble qu’il faudroit déciter que l’enfant étoit né vif, & non mort ; ces sortes de contestations sont bien délicates, d’ailleurs un mari est toujours favorable : Quoiqu’il en soit, un enfant qui seroit né monstre, ne pourroit donner le droit de viduité au mari Si par le Contrat de mariage il étoit dit, que le mari n’auroit aucun droit de viduité sur les biens de la femme, la convention seroit valable, & elle auroit son execution contre le mari.


ARTICLE CCCLXXXIII.

L E droit de viduité appartient au mari, non seulement au préjudice des enfans de sa femme, de quelque mariage qu’ils soient fortis, mais aussi des Seigneurs féodaux ausquels pourront appartenir les héritages de la femme, soit à droit de confiscation, ligne éteinte & réversion, où droit de garde des enfans ou héritiers mineurs d’ans de la femme.

Le droit de niduite appartient au mari non seulement au préjudice des enfans de sa femme de quelque mariage qu’ils soient.

Ces paroles ne se peuvent entendre que des enfans de la femme, nez de précedens mariages, lesquels enfans ne peuvent empécher le droit de viduité, car à l’égard des enfans sortis du mariage de la femme avec le muri qui prétend le droit de viduité, ils empéchent si peu le droit de viduité, que c’est leur naissance qui donne lieu au droit de viduité.

Mais aussi des Seigneurs féodaux, ausquels pourront appartenir les béritages de la femme, soit à droit de confiscation, ligne éteinte & reversion, ou droit de garde des enfans ou héritiers mineurs d’ans de la femme.

La confiscation de corps & de biens de la femme, le droit d’aubaine, bâtardise, deshérance, commise de Fiefs & héritages par desaveu ou félonie, ni la garde noble Royale ou Seigneuriale des enfans ou antres héritiers mineurs de la femme, ne peuvent empécher le droit de viduité au mari, & ne lui préjudicient en rien ; il faut qu’il joüisse des biens de sa femme, nonobstant tous ces droits qui appartiennent aux Seigneurs de Fief, & les Seigneurs ne pourront rien avoir dans les fruits & revenus des biens de la femme qu’apres là mort du mari ; parce que le droit de viduité est acquis au mari par la Coutume, & auquel la femme par son fait & sa condition ne peut donner arteinre.

Le droit de viduité est rellement acquis au mari in uim consaetudinis, qu’il appartiendroit au mari, encore qu’il n’y eût point de Contrat de marizge, de même qu’il se pratique pour le douaire Coûtumier de la femme.

Le droit de viduité faisit au moment du décés de la femme, sans qu’il soit obligé d’en faire demande aux héritiers de la femme ; d’autant qu’à proprement parier, le mari ne fait que continuer sa joüissance, à la difference du douaire dont la femme est tenuë de demander délivance aux héritiers du mari, pour pouvoir joüir & faire les fruits siens des biens sujets au douaire.


ARTICLE CCCLXXXIV.

L E mari doit nourrir, entretenir & faire instruire les enfans de sa femme, si d’ailleurs ils n’ont biens suffisans, même aider à marier les filles ; laquelle nourriture, entretenement, instruction & contribution de mariage, sera arbitrée en Justice par l’avis des parens, eu égard à la valeur de la succession & nombres des enfans ; de toutes lesqueiles charges il sera quitte, en laissant ausdits enfans le tiers du revenu de la suc-cession de leur mere.

Cet Article artache deux sortes de charges ou droit de viduité, l’une de nourrir par le pere, entretenif faire instruire les enfans de sa femme, de quelques mariages qu’ils soient sortis ; l’autre de contribuer au mariage avenant des filles, bien entendu si ces enfans, mâles ou femelles n’ont pas d’ailleurs des biens lussisans pour fournir à ces charges, autres que les biens de leur mere ; car s’ils en ont, le mari est pleinement déchargé de ces obligations, nonobstant qu’il joüisse & fasse les fruits siens des biens de sa femme par son droit de viduité.

C’est aux parens à regler & arbitrer la nourriture, entretien & instruction des enfans, & la contribution au mariage avenant des filles ; & c’est sur la valeur & les forces de la succession & le nombre des enfans, que le tout doit être reglé & arbitré, il semble qu’il faudroit aussi avoir égard à la condition des en-sans ; car enfin un enfant noble d’extraction ne doit pas être nourri, entretenu & élévé comme un paisanL’obligation que le droit de viduité impose au mari de nourrir, entretenir & faire instruire les enfans de sa femme ou ceux qu’il a eus avec elle, dure jusqu’à ce qu’ils foient majeurs de vingt ans, aprés lequel tems, c’est à eux à se pourvoit ; car il ne soroit pas raisonnable de perpétuer cette charge tant que le droit de viduité dureroit.

Le mari seroit en outre tenu de payer les arrerages courans des rentes Seigneuriales ou foncieres qui seroient à prendre sur les Terres, maisons & héri-tages, mais non des autres rentes, ni les dettes de la succession de sa femme.

Le mari pourroit pour se décharger de toutes les obligations portées par cet Article, abandonner à tous les entans de sa femme, en quelque nombre qu’ils soient, & de quelques mariages qu’ils soient nez, le tiers du revenu annuel de tous les biens de la succession de leur mère, moyennant quoi il joüira des deux autres tiers exempts de ces charges.


ARTICLE CCCLXXXV.

S I l’usufruit de tout ou partie du bien de la femme, appartenoit à autre personne lors de son décès, après icelui usufruit fini, le mari aura la joüissance desdits biens.

Aprés le premier usufruit fini, ce seroit un nouvel usufruit à cet égard en la personne du mari des biens ou partie d’iceux de la femme à cause de son droit de viduité ; car le premier usufruitier & le mari ne pourroient pas en même tems avoir l’usufruit des biens de lafemme, le premier suspendroit celui du mari, & celui du mari ne commenceroit qu’au jour que le premier finiroit ; de ma-nière que tant que dure l’ancien usufruit, le mari n’a qu’une esperance dans les biens dont un autre que lui avoir la joüissance du vivant de sa femme ; ce qui peut lui donner coroinam sullicitudinem, mais non le droit de déposseder l’ancien usufruitier.


ARTICLE CCCLXXXVI.

A U record de mariage qui se fait pour la connoissance du douaire, les parens & amis qui ont été présens audit mariage, y sont reçûs & ne peuvent être reprochez.

Record, est un Acte contenant les conventions matrimoniales qui n’avo ient été arrêtées que verbalement ; mais à present, qu’il se fait presque toujours des Centrats de mariage avant la célébration de mariage, & qu’on ne se contente pas de regler des conventions matrimoniales verbalement, il ne se fait gueres U de records de mariage ; il est vrai que dans la Province de Normandie, il se fait encore souvant des Traitez ou Contrats de mariage sous signature privée, dont même on ne fait faire la reconnoissance que depuis la célebration de mariage, soit devant Notaire, soit devant le Juge, mais du moins les conventions matrinioniales sont-elles artestées & justifiées par un Acte, & cela dispense d’en venir à une preuve par témoins ; il est vrai qu’il y a beaucoup d’inconveniens dans les Traitez ou Contrats de mariage sous signature privée, non seulement en ce qu’on peut les supprimer, mais encore parce qu’il est aisé à un mari & à une femme de changer leurs conventions matrimoniales, & de se faire des avantages indirects pendant & constant le mariage, il seroit de la bonne police de dessendre les Traitez ou Contrats de mariage faits sous signature privée ; cela est d’une dangereuse conséquence dans la société civile, principalement si ces sortes de Trairez ou Contrats de mariage, n’étoient reconnus & recordez devant Notaire ou en Justice que depuis la célébration du mariage, du moins faudroitil que cette reconnoissance ou record fût faite avant la bénédiction nuptiale ; quoiqu’il en soit, s’il se fait record de mariage, il sera fait non seulement pour la reconnoissance du douaire, mais aussi des autres conventions matrimoniales ; Arrests du Parlement de Roüen, des 2. Aoust 1650, & 7. May 1653, & art. 78. du Reglement de 1666. Et même comme le doüaire coûtumier est acquis à la femme en uim censuetudinis, sans stipulation ni convention, le Traité ou Contrat de mariage & le record de mariage paroissoient inuriles à cet égard ; il ne se-roit tout au plus nécessaire que par rapport lau douaire préfix.

Ce sont les parens & amis qui ont eté presens au mariage, qui doivent assister au record du Traité verbal de mariage, sans même qu’ils puissent être re-prochez ni en être exelus ; les parens, principalement ceux qui seroient les héritiers présomptifs des conjoints par mariage s’ils n’avoient point d’enfans, y sont même interressez pour voir si lors du record on ne change rien aux conventions qui avoient été arrêtées verbalement avant le mariage, & si le mari & la femme sous prétexte du record de leur Traité verbal de mariage, ne se sont point fait quelqu’avantage indirect ; cela passeroit pour une contrelettre.

Si le Traité ou Contrat de mariage sous signature privée, étoit perdu & adheiré, on pourroit demander la preuve par témoins, qu’il a été vû, lû, & tenu par les parens & amis qui avoient assisté au mariage, ou autres gens dignes de foi ; & encore une preuve de cette qualité seroit bien delicare pour les conséquences ; parce qu’outre qu’il faudroit supposer un Acte qui ne paroit point, c’est qu’il faudroit encore des témoins sur la dot, doüaire & autres conventions matrimonlales, Il est à remarquer, qu’il n’y a que les parens qui ont été présens au Traité de mariage verbal ou sous signature privée, qui puissent assister au record ou reconnoissance du Traité, sans même pouvoir être reprochez ni recusez.


ARTICLE CCCLXXXVII.

E N ce record, ce que la plus grande partie accordéra est tenu pour prouvé, pourvû qu’ils parlent de certain.

Si les parens & amis se trouvoient en avis differens, il faudroit donner la préférence des suffrages aux plus qualifiez ; mais est-il toujours nécessaire qu’ils rapportent des faits certains & positifs ; de simples oùi dire ou rapports vagues & generaux, seroient de peu de conséquence pour constaier les conventions matrimoniales du mari & de la femme déja conjoints par mariage, & même tels que pourroient être ces rapports, ils seroient toujours dangereux pour pouvoir constater des conventions matrimoniales.


ARTICLE CCCLXXXVIII.

E T si les accords de mariage sont portez par écrit, nul ne sera reçû à faire preuve outre le contenu en iceux, & toutes contre-lettres qui se sont faites au déçû des parens presens audit mariage, & qui l’ont signé, sont nulles, & n’y aura-t’on aucun égard.

Et si les accords de mariage sont portez par écrit, nul ne sera resû à faire preuve autre le contenù en iceux.

Lorsqu’il y a un Traité ou Contrat de mariage par écrit, soit sous signature privée ou devant Notaire, contenant les conventions matrimoniales des conjoints par mariage, la preuve par témoius n’est point recevable contre le contenu au Traité ou Contrat de mariage, ni pour prouver le contraire outre & au-de-là de toutes les clauses & conventions portées & conrenuës au Contrat de mariage, dont il faut nécessairement & absolument suivre la teneur ; Arrest du Parlement de Roüen, du 6 May 166y ; la même chose se trouve renouvellée par l’Ordonnance de 1667., art. 2. du Tit. 20. qui porte qu’il ne sera reçû aucune preuve par té-moins contre & outre le contenu aux Actes, ni sur ce qui seroit allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes ; encore qu’il s’agit d’une somte ou valeur moindre de cent livres : On peur néanmoins admêttre la preuve par té-moins de la perte d’un Contrat de mariage, comme de tout autre acte, & qu’il n été vû, lû & tenu.

Et toutes contre-lettres qui se sont faites au déchi des parens presens audit mariage, & qui l’ont signé, sont nulles, & ny aura-s on aucun égard. Une contre-lettre est une convention par écrit qui va contre la substance ou la teneur du Contrat de mariage ou autre Acte, qui en dérruit les clauses, qui les altere, qui les diminuë, ou qui y déroge.

Or toutes les contre-lettres à un Traité ou Contrat de mariage, faites à part à l’inseù & hors la presence des parens qui ont assisté & signé au Contrat de mariage, sont nulles & ne produiront aucun effet ; Arrét du même Parlement des S Juillet 1637, 1é Novembre 1648, 13 Avril 1683 & ; Fevrier 1664.

En quelque tems que des contre-lettres de cette qualité soient faites, soit avant ou depuis le mariage, elles sont nulles tant à l’egard de la femme & des enfans, qu’à l’égard de celui qui les a faites.

Les parens, par rapport aux contre-lettres, sont les père, mere, ayeul, ayeule, & autres ascendans, ou les Tuteurs ou autres personnes qui out autorité sur ceux ou celles qui se marient ; les héritiers présomptifs des futurs conjoints pourroient encore être mis au nombre des parens, au préjudice defquels & nonobstant qu’ils ayent été presens, & ayent signé au Contrat de ma-riage, on feroit des contre-lettres contre les Contrats de miariage.

Mais quant aux personnes qui sont majeures, & qui ont la liberté de se matier sans le consentement d’autrui, & comme il leur plait, elles peuvent chan-ger, diminuer, augmenter à leur Contrat de mariagé avant la célebration de mariage, même en faire un nouveau à leur volonté, sans y appeiller ceux qui avoient signé au premier Contrat de mariage par bienséance ou autrement mais tout cela ne se pourroit faire pendant le mariage, on feroir même beau coup de difficulté en Iustice reglée, de déiruire un premier Contrat de mariage fait & parfait, par un second, quoique fait avant la bénediction nuptiale, & que tous ceux qui avoient signé au premier, eussent signé au second ; aussi le Parlement de Paris n’admettroit point le second Contrat de mariage, le second Contrat de mariage seroit déclaré nul, & on ordonneroit l’execution du premier Contrat de muriage.

Une nouvelle convenvion faite depuis le Contrat de mariage, mais non pendant le mariage, seroit même valable, si elle étoit signée des parens qui avoient signé au Contrat de mariage, encore bien qu’il contint des dérogations au Contrat de mûriage, pourvu que cette convention fut insérée à la minute du Contrat de mariage.


ARTICLE CCCLXXXIX.

L Es personnes conjointes par mariage ne sont communs en biens, soit meubles, foit conquêts immeubles, ains les femmes n’y ont rien qu’après la mort du mari.

Les personnes conjointes par mariage ne sont communs en biens, soit meubles, soit conquêts immeubles.

Cet article contient une disposition prohibitive, & à laquelle on ne peut derover, petentior enim lex est que qerat quim que permitrit, in permittente enim libera pore as, in probibente vero pena est ; Caintilien. Declamat. 374.

En Normandie, il n’y a point de communauté de biens entre les conjoints par mariage, ni légale ni conventionnelle, soit que le Contrat de mariage fait été passe en Normandie, ou dans une autre Coûtume différente de celle de Normandie ; & soit que les Parties contractantes ayenr leur domicile lors du Contrat de mariage ou pendant le mariage en Normandie, ou dans une Coutume pareillement différente à celle de Normandie, sans même que par aucu-ne clause & convention du Contrat de mariage, quelque précile & formelle qu’elle soit, on puisse déroger en ce point à la Coûtume de Normandie, ni stipule r une communauté de biens, principalement si les biens sont firuez dans l’étenduë de la Coutume de Normandie.

Par le Droit Romain il n’y a point à la vérité de Communauté de biens entre le mari & la femme, mais on pouvoit la stipuler & l’admettre par le Con-trat de mariage, au lieu que par notre Coûtume il y a prohibition expresse de la stipuler & de l’admettre, à peine de nullité de la convention, & telle est la jurisprudence certaine & inviolable du Parlement de Roüen ; mais quant aux autres Parlemens, & en particulier celui de Paris, on y autorise la clause apposée aux Contrats de mariage, portant une dérogation à toutes Coûtumes exclusives, même prohibitives de la communauté, telle qu’est la Coûtume de Normandie, & à la faveur de cette clause dérogatoire, on donne droit de Communau-té à la femme dans les biens acquis en Normandie pendant & constant le mariage.

Si même les futurs conjoints étoient Normands, domiciliez en Normandie. lors de leur mariage, & que leur Contrat de mariage fut passé en Normandie. avec soumission à la Coutume de Normandie, & dérogation à toute autre Coutume qui seroit contraire pour toutes les acquisitions qu’ils feroient en Norman-die ou ailleurs, pendant & constant le mariage, & s’ils saisoient des acquisitions. dans une Coûtume où la communauté est légale sans avoir besoin de stipulation, comme celle de Paris, il ne seroit pas aisé à la femme de se faire don-ner dans les Tribunaux de la Province de Normandie un droit de communauté dans ces sortes d’acquisitions ; tant il est vrai que dans cette Province, non seulement on ne connoit point de communauté de biens entre le mari & la femme, mais encore on fait executer à la lettre la disposition de la Coutume, par laqueile il est expressément défendu d’admettre une commun auté entre les conjoints par mariage ; c’est pourquoi dans ces cas, il est plus avantageux aux femmes de plaider à Paris qu’en Normandie. dins les femmes ny ont rien qu’aprés la mort du mari.

Ces termes ne sont pas tout-à-fait justes ; car dans les Coûtumes où la communauté de biens est legale, & dans celles où il n’y a point de communauté, comme nôtre Coûtume, les femmes n’ont rien daus les biens de la communauté qu’aprés la mort des maris &, aprés la dissolution de la communauré, si ce n’est qu’on veuille dire que nôtre Coûtume s’est expliquée de la sorté, pour nous faire entendre que ce que la femme prend dans les meubles & conquêts immeubles faits pendant & constant le mariage, elle le prend, non pas à titre de commune, mais comme héritière de son mari ; sçavoir, moitié dans les meubles, s’il n’y a enfans du mariage, & le tiers s’il y a enfans ; & à l’égard. des immeubles, elle en joüit du tiers par usufruir, s’ils sont situez dans la Coutume generale & hors Bourgage, & s’ils sont en Bourgage ou dans l’etenduë. du Bailiiage de Gisors, de la moitié en proprieté.

Dés que la femme n’a rien dans les meubles & conquêts immeubles qu’aprés la mort de son mari, il s’enfuit que le mari peut en disposer pendant sOn vivant à sa volonté, quasi Dominus, & que la femme ne prend part que duns ce qui se trouve au jour du décés du mari, & elle n’y a qu’un droit habituel.


ARTICLE CCCXC.

L Es meubles échus à la femme constant le mariage, appartiennent au mari, à la charge d’en employer la moitié en héritage ou rente pour tenir le nom, côté & ligne de la femme, si tant est qu’ils excedent la moitié du don mobil qui a été fait au mari en faveur de mariage.

Les meubles & effets mobiliers qui échéent à la femme pendant le mariage, soit par succession directe ou collaterale, donation entre-vifs ou par Testament ou autrement, appartiennent à la vérité au mari, mais à condition par lui d’en faire emploi & remplacement de la moitié de la valeur d’iceux en. héritages & immeubles, avec déclaration que cette acquisition est faite des deniers provenans de la moitié des meubles de la femme avec toute subrogation, & pour lui tenir lieu de propre à elle & aux siens de son côré & ligne ; ce que le mari est obligé de faire, soit que la femme ait fait don mobil à son mari en faveur de mariage, soit qu’elle ne lui en ait point fait, & soit que les meubles excedent en valeur la moitié du don mobil ou non ; Arrêt du Parlement de Nor-mandie, du 26 Fevrier 1639. & art. 79. du Reglement de 1666.

On comprend sous le nom de meubles qui peuvent écheoir à la femme pendant son mariage, & dont le mari est obligé de faire emploi & remplacement de la valeur de la moitié d’iceux, non seulement tous les meubles meublans & effets mobiliers, mais encore tous les droits & actions mobiliaires qui peuvent appartenir à la femme.

Si on payoir au mari pendant son mariage de l’argent qui étoit dû à sa femme avant son mariage, cet argent n’appartiendroit pas au mari, il n’y auroit rien, il appartiendroit en toral à la femme & aux siens de son côté & ligne ; d’autant que ces deniers sont censez faire partie de la dot de la femme ; Arrest du même Parlement, du S Avril 1655. Si cependant il avoit été promis don mobil au mari par son Contrat de mariâge, ces deniers y seroient sujets comme les autres biens de la femme jusqu’à concurrence du don mobil.

Si le mari au jour de son déces n’avoit point fait d’emploi ni de remplacement de la moitié des meubles échus à la femme pendant son mariage, la femme auroit, non seulement comme heritière de son mari, sa part entière sur tous les meubles qui se trouveroient en essence au jour de la mort du mari, mais encore elle prendroit son remplacement de la moitié de ses meubles, que son mari devoit faire & qu’il n’a point fait, sur la part du mari dans les meubles ; d’autant qu’un remplacement ordonné par la Loi devoit être fait, est toûjours réputé contre le mari & ses héritiers, & que le mari & ses héritiers ne doivent point profiter de la négligence du mari ; ainsi la part de la femme dans les meubles qui se trouvent au jour du décës du mari, ne doit point contribuer à ce remplacement.

La preuve par témoins est recevable contre le mari & ses héritiers, pour justifier la valeur des meubles échus à la femme pendant son mariage, & dont le mari n’a point fait de remplacement pour la moitié, encore que la valeur de la moitié excede la somme de cent livres.

L’action de remploi de la moitié des meubles échus à la femme pendant son mariage contre son mari ou ses héritiers, est iimobiliaire & appartient aux héritiers de la femme, à l’exclusion même du mari qui seroit héritier mobilier de son fils, jusques-là que si l’enfant aprés avoir recueilii la succeision de sa mere, venoit à mourir sans enfans, cette action en remplacement appartiendroit aux héritiers collateraux du côté maternel, & non aux héritiers collateraux du côte paternel.

De la même maniere que les deniers doteux reçûs par le mari, produisent interêts de plein droit, contre les héritiers du mari, du jour de son déces sans demande ni interpellation ; de même la moitié des meubles de la femme, non remplacez, produisent des interêts de plein droit du jour de la mort du mari, parce que cette portion de meubles est réputée & censée faire partie de la dot de la femme.

Lorsque le remplacement de la moitié des meubles de la femme, & à elle échus pendant son mariage, se trouvera avoir été fait par le mari, la femme ne laissera pas aprés la mort de son mari, de prendre sa part dans l’autre moitié, comme dans tous les autres meubles qui se trouveront au jour du décës du mari ; sçavoir un tiers S’il y a enfans, & une moitié s’il n’y en a point.


ARTICLE CCCXCI.

A Venant la mort de la femme séparée quant aux biens d’avec son mari, ses meubles appartiennent à ses enfans ; & si elle n’en a, ils doivent être employez à la nourriture du mari & acquit de ses dettes

Comme dans notre Coutume il n’y a point de communauté de biens, ni legale ni conventionnelle entre mari & femme conjoints par mariage, il sem-bloit que la femme pour se mertre à couvert des dettes de son mari, n’avoit pas besoin de se faire separer de biens d’avec lui, ni de renoncer à la succession de son mari ; cependant il en est autrement, parce que du moment qu’elle prend part dans les meubles & conquêts immeubles faits pendant le mariage, & que le mari joüit de son bien par la feule qualité de mari, & en reçoit ie revenu sur ses propres & seules quittances, ael susiinendae onera natrimonii, elle ne peut reprendre la pleine joüissance de son bien, & se garantir des dettes de son mari, qu’en se faisant separer de biens d’avec lui pendant son mariage, ou de renoncer à la succession de son mari aprés son déces, dans le tems preserit par la Coûtume, en faisant bon & loyal Inventaire, & en justice reglée ; mais apres ces formalitez, la femme reprendra sa dot, son doüaire & autres conventions matrimoniales, & rien dans les meubles & conquêts immeubles, à moins qu’elle ne se les fit adjuger sur & tant moins de la restitution de sa dot & reprises elle ne sera point de plus tenuë des dettes du mari ; & c’est dans ce cas, que les meubles de la femme, aprés sa mort, appartiennent à ses enfans si elle en a, n’importe de quels mariages ils soient ; & si elle n’en a puint, ils seront einployez à la nourriture de son mari & à acquitter les dettes, rant de la femme que du mari ; sans que le mari puisse profi er des meubles de la femme, qu’il n’ait préalablement acquitré les dettes mobiliaires que devoir sa femme au jour de son déces ; Arrest du même Parlement, du 21 Juin 1625 ; mais toûtours pro moda aenrolumenti, s’il a fait faire bon & loyal Inventaire, de sorte que dans ce cas, les les héritiers collateraux de la femme n’ont rien dans ses meubles, ils appartiennent en pleine proprieré au mari, jure mariti.

Il y a de deux sortes de séparations, l’une est la separation de corps & de biens, l’autre est la séparation de biens seulement.

La séparation de corps & de biens est ordonnée pour faits de sevices & maltraitemens commis par le mari en la personne de sa femme ; mais il faut que ces sortes de faits soient graves & non légers, & d’ailleurs bien prouvez par une plainte, information, rapport en Chirurgie & autres preuves résultanres d’une procédure extraordinaire ; car en Normandie la procédure civile n’a point lieu en séparation de corps & de biens.

Une accusation fausse & calomnieuse d’adultere d’un mari contre sa femme, & dans laquelle il auroit succombé, seroit une cause suffisante de séparation de corps & de biens, quand même il ne se trouveroit point d’autres faits de séparation.

La qualité des personnes est encore d’un grand poids dans les demandes en sparation de corps & de biens ; il faut des faits de sévices, bien plus graves pour produire cette séparation à une femme roturiere & simple bourgeoise, qu’à une Demoiselle & personne de conditions à Paris c’est le contraire, la demande en séparation de corps ou d’habitation & de biens, se forme par une action au Civil, s’instruit par une Enquête respective, & se juge civilement.

La folie, la lépre, ou si le mari étoit devenu punais, ces accidens & autres, pour lesquels il seroit impossible à la femme de demeurer & habiter avec son mari, seroient des causes légitimes à la femme pour se faire séparer de corps & de biens d’avec son mari.

La séparation de corps faite bonâ gratiâ, & volontairement entre le mari & la femme sans plainte, informations, procedures ni autorité de Justice, est nulle & ne peut subsister ; la demande en séparation de corps doit être instruite & jugée dans toutes les formes d’une accusation criminelle ; & s’il se fait quelquefois une transaction ou autre acte contenant une séparation, cette separation ne produira aucun effet, & elle ne durera qu’autant de tems que les parties, ou l’une des parties, le voudra.

La séparation de corps emporte celle de biens, La séparation de biens seulement, est pour cause de dissipation & mauvaise conduite du mari, lorsqu’il est obété de dettes, que ses biens sont saisis tant meubles qu’immeubles, & que vergit ad inopiam ; c’est par la voye civile & sur En-quêtes respectives, & autres preuves que se font & se jugent les séparations de biens, & avec les autres formalitez ordinaires.

Les femmes séparées de biens par leurs Contrats de mariage ou par Sentences doivent faire inscrire leurs noms dans un tableau étant dans l’etude des Notaires ou Tabellions, à peine de nullité de la séparation, ou du moins il faut que la séparation soit lüé aux Assises ; Arrests du Parlement de Roüen, des 7. Aoust 1637, & 1. Juin 1655. Si néanmoins la femme avoit fait faire un Inventaire ou état en bonne forme, des meubles & effets mobiliers par elle apportez en mariage, & annexée en la minute du Contrat de mariage, le défaut d’avoir fait ins-crire la séparation sur le tableau du Notaire ou Tabellion, ou de l’avoir sait publier aux Assises, ne seroit pas capable de donner atteinte à la séparation de biens ; Arrest du même Parlement, du 11. May 1657 ; & même par l’Ordonnance de 1673. au Tit. 8. il n’y a que les séparations, soit par Contrats de maria-ge, ou par Sentences & jugemens, des femmes des Marchands, Négocians & Banquiers, qui doivent être publiées & inscrites dans les Jurisdictions Consulaires ou dans les Hôtels de Ville, les séparations de toutes autres semmes ne sont point assujeties à cette formalité : cependant si une femme depuis sa séparation de biens, venoit s’habituer & demeurer en Normandie, elle seroit obligée de faire publier sa separation aux Assises, & la faire inscrire au tableau des Notaires ou Tabellions, autrement on n’y auroit aucun égard C’est un usage en Normandie d’obtenir par la femme des Lettres en Chancellerie pour se faire séparer de biens d’avec son mari ; usage cependant assez inutile, puisque la séparation de biens est une voye de droit, qui n’a pas besoin d’avoir recours à l’autorité du Prince.

Il n’est point douteux que les maris ne peuvent en aucun cas, ni pour quelque cause que ce soit, demander une séparation de corps & de biens, où de biens seulement, d’avec sa femme.

Il n’y a que les Juges Laies, tant Royaux que ceux des Seigneurs, chacun en droit soy, qui puissent connoître des léparations, soit de corps soit de biens, & non les Iuges Ecclesiustiques.

La femme en conséquence de sa séparation de biens, doit sur le Procés verbal d’exécution des meubles de son mari ou sur un inventaire, les faire vendre par un Huissier, & se les faire adjuger, en présence de son mari ou duëment appellé, même des Créanciers ; le prix de cette vente sera à imputer sur sa dot,, reprises & conventions matrimoniales ; & la femme commencera par prendreen essence, si elle le juge à propos, ses biens paraphernaux, qui sont les meubles servans à l’usage de la femme ; toutes ces formalitez sont absolument nécessaires pour donner effet à la Sentence de séparation, tant par rapport aux meubles que par rapport aux immeubles, & même sans cela les meubles seroient censez appartenir au mari.

En Normandie la seule séparation de biens fait ouverture au doüaire, mais il faut appeller les Créanciers dans la demande en séparation de biens.

La femme séparée de biens a seulement la joüissance & administration de ses biens, elle peut faire des baux & donner quittances aux Fermiers & debiteurs, sans avoir besoin de l’autorisation de son mari ; elle peut même sans autorité de Justice, & sans l’avis, consentement & autorisation de son mari, vendre, engager, aliéner & hypotequer ses meubles présens & à venir, & les immeubles par elle acquis depuis sa séparation, sans qu’il soit besoin d’en faire le remploi art. 126. du Reglement de 16b8 ; mais elle ne peut vendre ni hypotequer les inimeubles qui lui appartenoient lors de la séparation, ou qui lui sont depuis échus par succession, sans permission de Justice & avis de parens ; & néanmoins les Contrats qu’elle aura faits sans ladite permission, peuvent être exécurez sur le revenu de ses immeubles aprés qu’il sera échû & amobilié, art. 127. du même Reglement.

La femme séparée de biens d’avec son mari par son Contrat de mariage ou autrement, ne peut demander aux héritiers de son mari aucune part des meubles de la succession, ni aux acquêts que son mari a faits depuis leur séparation ; arr. 87. du même Reglement.

En Normandie une séparation de biens ne pourroit être retractée par aucun acte volontaire & du consentement mutuel du mari & de la femme, cette rétractation & révocation ne pourroient se faire qu’en Justice réglée & en con-noissance de cause, crainte des fraudes qui se pourroient pratiquer en pareils actes, principalement par rapport aux Créanciers du mari ou de la femme, mais quant aux héritiers du mari ou de la femme, ou de l’un & de l’autre, ils auroient de la peine à donner atteinte à une semblable révocation faite par acte où en Justice ; c’est aussi une chose qui se pratique journellement dans les Coûtumes où il y a Communauté de biens entre les conjoints par mariage, un mari & une femme peuvent y rétablir par un acte volontaire fait entre eux, la communauté qui avoit été dissoute par une séparation de biens ; pourquoi ne pas dire la même chose dans notre Coûtume ; où la femme ne prend à la verité rien dans les meubles & conquêts immeubles faits pendant le mariage à titre de commune, elle y prend une certaine part aprés la mort de son mari comme son héritière, mais elle perd ce droit par une séparation de biens ; ainsi par quelle raison ne pas pemmettre au mari & à la femme de remettre les choses comme elles étoient avant la séparation, sans que leurs Créanciers & encore moins leurs héritiers puissent s’en plaindre, eux d’ailleurs qui comme leurs héritiers sont tenus d’entrerenir leurs faits & promesses Les meubles de la femme séparée de biens, tant les meubles qu’elle avoit lors de son mariage, par sa qualité de femme séparée de biens par son Contrat de mariage, ou qu’elle s’est fait adjuger en conséquence de sa Sentence de séparation, ou qu’elle a achetez depuis sa séparation, appartiennent aprés sa mort à ses enfans, de quelques mariages qu’ils soient sortis, ou aux ensans de ses enfans, & si elle n’a point d’enfans, ses meubles doiyent être vendus pour les deniers en provenans, être employez à nourrir son mari & au payement de ses dettes, quand même le mari auroit d’ailleurs d’autres biens, même suffisans pour se nourrir & payer ses dettes, si la femme avoit des dettes de son chef ou comme obligée conjointement & folidairement avec sun mari, il faudroit pareillement les payer du prix de ses meubles ; Arrest du même Parle ment, du 21 Juin 1625. De plus, si le mari ou sa femme n’avoient point de Créanciers, le mari ne profiteroit pas moins des meubles de sa femme, si au jour de son décës elle n’avoit point laissé d’enfans ; il y a davantage, c’est que le mari en prenant les meubles de sa femme, ne seroit obligé à ses dettes que jusqu’à la coneurrence de la valeur des meubles, pourvû toutefois qu’il en ait fait inventaire, bon, loyal & sidele, sans quoi il seroit tenu de toutes les dettes mobiliaires, quand même elles excederoient la valeur des meubles ; & aprés s’être mis en possession des meubles, il ne pourroit plus les défaisser & les abandonner pour se mettre à couvert des dettes de sa femme, comme nous l’avons déja remarqué.


ARTICLE CCCXCII.

A Près la mort du mari la femme a le tiers aux meubles, s’il y a enfans vivans de son mari, en contribuant aux dettes pour sa part hormis les frais des funerailles & legs testamentaires ; & s’il n’y en a point, elle y a la moitié aux charges que dessus.

La femme aprés le décës de son mari, a en pleiue proprieté le tiers des meubles & effets mobiliers de son mari, s’il y a des enfans vivans du mariage ; & Sil n’y a point d’enfant vivant de son mari, soit de son dernier mariage soit de maria, es précedens, où descendans de ses enfans en ligne directe, la femme a la moitié des meubles, le tout aux charges de droit, qui sont de contribuer au payement du tiers ou de la moitié des dettes du mari, à la réserve des frais de l’inhumation de son mari & des legs s’il en avoit sait, lesquels tomberont sur la portion des héritiers du mari dans ses meubles & sur les héritages & immeublesdu mari ; voila quel est le sens litteral de cet article, voici les maximes qu’il enfaut tirer.

La première, que pour que la femme ait droit de prendre cette portion dans les meubles de son mari, il suffit que le mari & la femme eussent leur véritable & actuel domicile en Normandie, & que ce fût là sedes fortunarum du mari & de la femme au jour du déces du mari, soit que leur Contrat de mariage fût passé en Normandie ou ailleurs ; car les meubles & effets mobiliers suivent & se reglent en fait de succession suivant la Coûtume du domicile du propriétaire d’iceux, c’est pourquoi s’il se trouvoit des meubles en un lieu qui seroit régi par une Coûtume différente, la femme ne laisseroit pas d’y prendre la portion que cet article lui donne dans le cas & la condition y portée, & point davantage ni moins.

La seconde, que par le Contrat de mariage, il peut être convenu que la femme ne prendra aucune part ni portion dans les meubles de son mari, soit qu’il y ait des enfans au jour du décés de son mari, ou qu’il n’y en ait point, ou que la lemme les aura tous ; parce que lesContrats de mariage sont susceptibles de toutes sortes de clauses, des qu’elles ne sont point contre les bonnes moeurs ; or on ne peut pas dire qu’il y ait rien de contraire aux bonnes, moeurs dans une convention particulière de cette qualité, de plus, cet article ne contient en ce point aucune pro-hibirion.

La troisième, que la femme prend cette portion de meubles à titre & qualite d’héritière de son mari, & non à titre & qualité de commune ; parce qu’il n’y a point de communauté de biens en Normandie entre conjoints par mariage.

La quatriéme, que sous le terme de meubles on n’entend pas seulement les meubles meublans, tels qu’ils soient, précieux ou autres, mais encore tous les effets mobiliers, tels que sont les Billets, Promesses, Obligations, Arrerages de rentes, Fermages, Loyers, Fruits ameublis par la Coutume ou autre ment, en un mot tout ce qui est meuble ou réputé meuble ; & même les armes, comme Canons & Engins, & les Ornemens de Chapelle, ne seroient point exempts du droit de la femme, si mieux on n’aimoit les garder en lui en donmant sa part dans la valeur par l’estimation qui en seroit faite.

La cinquiême, que la femme qui seroit séparée au jour du décés de son mari, ne prendroit rien dans ses meubles, ni pareillement si elle renonçoit à la succession de son mari.

La sixième, que la femme ne prend le tiers ou la moitié des meubles qui se trouvent au jour du déces de son mari dans sa succession, qu’en contribuantu tiers ou à la moitié des de rtes mobiliaires du mari, mais non des dettes imm. biliuires, soit que les dettes soient anterieures au mariage, ou contractées pendant le mariage, la femme seroit même tenuë de contribuer au tiers ou à la moitié du remploi des propres aliénez du mari, s’il ne se trouvoit point d’acquêts ; parce que dans nôtre Coûtume il n’yia point d’acquêts que les propres ne soient remplacez, & qu’au défaut d’acquêts les propres se prennent suivant leur valeur sur les meubles & effets mobiliers ; elle seroit pareillement obligée de payer sa part des médicamens & pensemens fournis & faits dans la maladie de son mari ; mais quant aux habirs de deüil, c’est aux héritiers à les fournir à la veuve, sans diminution de la part dans les meubles ; si cependant elle se remarioit incontinent aprés la mort du mari, quoiqu’elle ne fût pas groise, elle seroit privée de ses habits de deüil ; Arrest du Parlement de Roüen, du 3. Novembre 1637. Mais à légard des habits de deüil des enfans & domestiques du défunt, la veuve y doit contribuer sur le pied de la part qu’elle prend dans les meubles ; Arrest du méme Parlement, du 3. Octobre 1647 ; & à l’égard des héritiers collateraux du mari, il ne leur est point dû d’habits de deüil ; Arrests du même Parlement, des 25. quin 3631, 6. Juillet ré46, 22. Fevrier 16s2. 8. Décembre 2655, & S. Décembre 4661. Sil y avoit dans une succession des héritiers aux propres & des héritiers aux meubles & acquêts, un chacun porteroit le deüil à ses frais, sans que les néririers d’une sorte de biens fussent tenus de le fournit aux héritiers de l’autre sorte de biens, quand même les uns profiteroient plus que les autres.

La septième, que les Créanciers de la succession du mari ont une action solidaire contre la femme qui prend part aux meubles de son mari, sauf son re-cours contre les héritiers de son mari, La huitième, que la femme en prenant part aux meubles de son mari, n’est point tenuë des frais funeraires de son mari, ni des legs qu’il pourroit avoir faits par fon testament ; cette sorte de dette doit se prendre sur la part & portion que les hériners du mari prennent dans les meubles & sur tous ses héritages & immeubles.

La neuvième & dernière maxime, est que la femme ne prend aucune part dans les meubles & effets mobiliers de son mari, qu’aprés là mort de son mari, ainsi c’est à la femme à prouver dans ce cas la mort de son mari.


ARTICLE CCCXCIII.

N Eanmoins s’il n’y a que des filles qui ayent été mariées du vivant de leur pere, elle a la moitié au meuble, pourvû que le ma-ri soit quite du méuble par lui promis à ses filles ou gendres en faveur de mariage.

Voici un cas où la veuve prend moitié des meubles du mari, quoiqu’il ait des enfans vivans au jour de son déces, c’est dans le ces que ces enfans soient des filles, & que ces filles ayent été mariées du vivant de leur pere, & que leur pere eût livré les meubles qu’il leur avoit promis en faveur de mariage, soit à leur maris, soit à elles depuis la mort de leurs maris ; dans ce cas, la femme aura la mortié des meubles & effets mobiliers de son mari, comme s’il n’y avoit point d’enfans, & non pas leulement le tiers ; mais si ces filles avoient été dotées en immeubles & héritages, la femme n’auroit pas le même avan tage, parce que la Coutume ne donne cet avantage que dans le cas que les silies ayent été mariées en meubles ou en deniers.


ARTICLE CCCXCIV.

L A femme peut renoncer à la succession de son mari dans les quarante jours après le décès d’icelui, pourvû qu’elle renonce en Justice, & qu’elle n’ait pris ni concelé aucune chose des meubles, dont elle est tenuë fe purger par serment faisant ladite renonciation, auquel cas elle aura seulement ses biens paraphernaux exempts de toutes dettes, & son douaire : & où puis aprés il seroit trouvé qu’elle en auroit eu aucune chose directement ou indirectement, elle est tenuë con-tribuer aux dettes, tout ainsi que si elle n’avoit point renoncé ; lequel délai ne pourra être prorogé sans connoissance de cause, les héritiers & ceux qui y ont interêt, appellez ; & où il seroit prorogé après le délai de trois mois passez du jour du déces, les meubles pourront être vendus par Justice, sauf à faire droit à ladite veuve pour telle part & portion qui lui pourra appartenir, sur les deniers de la venduë desdits biens.

La femme peut renoncer à la succession de son mari.

Il faut que la renonciation de la femme à la succession de son mari, soit expresse & formelle, la simple abstention ne susfiroit pas, Le mot de succession dont se sert cet article, est pour faire entendre que la femme ne prend rien dans les biens de son mari, comme commune en biens avec lui, mais comme son héritière.

Dans les quarante jours aprés le décés d’icelui, Le tems présorit & fatal pour par la veuve renoncer à la succession de son mari, est de quarante jours à compter du jour du décés du mari, sçû & connu ; Arrest du Parlement de Roüen, du 30. Juillet 1631. aprés lequel tems la veuve seroit non recevable à vouloir renoncer, elle ni ses enfans & héritiers, a moins qu’elle n’eûr ob enu du Juge dans les quarante jours un plus long délai d’y renoncer ; art. 82. du Reglement de 1666. Si cependant elle étoit mineu-re lors du décës de son mari, & qu’elle ou son Tuteur eût obmis à renoncer à sa succession dans les quarante jours, elle seroit restituable contre cette omission, & recevable à renoncer dans les quarante jours du jour de sa restitution, Il n’est point nécessaire d’appeller les Créanciers à la renonciation.

Comme par nôtre Coûtume la femme n’est point obligée de faire inventaire avant ni aprés sa renonciation, on ne peut pas dire que l’Ordonnance de ré8x. art. 1. du Tit. 7. ait dérogé à l’article de nôtre Coûtume, sur les délais pour faire inventaire, & pour déliberer quelle qualité prendra la veuve dans la succession de son mari ; & nonobstant cette Ordonnance, il faut tenir qu’en Normandie la veuve majeure est absolument tenue de renoncer à la succession de son mari dans quarante jours, à compter du jour du décés de son mari.

Pouroû qu’elle renonce en Justice, & qu’elle n’ait pris ni concelé aucune chose des meubles, dont elle est tenuë s . purger par serment faisant ladite renonciation.

Trois formalitez essentielles doivent accompagner la renonciation d’une veuve à la succession de son mari, La premiere, qu’elle renonce en personne, ou du moins par un Procureur fondé de sa Procuration speciale, en Justice, judiciairement & devant le Juge, pro tribunali sedente, c’est-à-dire, à l’Audience, un Acte de renonciation fait au Greffe, hors la presence du Iuge, ou devant Notaire, quoi qu’avec minute, ne seroit pas valable dans notre Coûtume, parce qu’elle veut que la renonciation soit faite en Justice ; cependant il seroit bien rigoureux de rendre une veuve héritière de son mari, au préjudice d’un Acte de renonciation de cette qualité, principalement s’il n’y avoit rien à lui reprocher sur les meubles & effets de la succession ; mais lorsque la chose se presente, il ne faut pas manquer à faire faire à la veuve sa renonciation judiciairement.

La seconde, qu’elle n’ait fait ni commis aucuns recelez ni divertissemens dans les meubles & effets de la succession de son inari avant sa renonciation, car si elle avoit recelé & diverti les meubles & effets de la succession de son mari avant de renoncer, elle ne pourroit plus renoncer valablement, & sa renon-ciation seroit nulle, & ne lui serviroit de rien ; en un mot, la veuve seroit dans le même cas que si elle avoit aecepté la succession de son mari ; art. 83. du Reglement de 1666. Mais si, ajoûte cet article, la femme avoit sousttait des meubles de son mari aprés sa renonciation, elle seroit seulement tenuë de les rapporter, sans qu’elle fût pour cela réputée héritière, elle servir privée des meubles qu’elle auroit recelez & divertis, & elle n’y auroit rien ; art. 84. du même Reglement : les meubles & effets recelez & divertis accroitroient aux héritiers du mari ; Arrest du même Parlement, du é Juiller 167y8.

Quoiqu’on puisse rendre plainte & faire informer contre la veuve, de feits de recelez & divertissemens par elle commis dans la succession de son mari, avant ou aprés sa renonciation, même faire décerner un décret contre elle & lui faire subir inrerrogatoire, néanmoins la procedure extraordinaire doit en demeurer là, & le Juge est obligé de civiliser l’affrire, de inettre sur l’extraordinaire les Parties hors de Cour, convertir les Informations en Enquêtes, & permettre de continuer l’Enquête, & à la veuve d’en faire une de sa part si elle le juge à propos, le tout dans le tems qui sera ordonné ; cette action s’appelle actio rerum amotarum ; on peut même obtenir des Monitoires, & faire entendre dans ce cas les parens pour témoins ; Artest du même Parlement, du 26 Fevtier 167s : Quoiqu’il en soit, il ne peut jamais survenir de peines afflictives & corporelles contre une veuve, pour recelez & divertissemens, ob memoriam matrimonii cum suo defuncto marito ; mais comme cette considetation cesseroit contre des étrangers qui seroient les complices de la femme dans les recelez & divertissemens, tels que seroient des domestiques ou autres, leur procés leur seroit fait & parfait extraordinairement, & ils pourroient être condamnez à des peines afflictives suivant l’exigence des cas ; Arrest du même Parlement, du 30 Octobre 163é, La renonciation doit être faite rebus integris, sans avoir par la veuve mis la main à la chose, sans avoir rien pris, récelé & diverti aucuns meubles ni effets, sans avoir pris 1a qualité d’héritière de son mari par des Actes précis & for-mels, & sans avoir fait des Actes qui ne se pouvoient faire qu’en qualité d’héritière de son mari, qui font des Actes d’héritier, facti & animi.

La troisième & derniere formaliré qui doit accompagner la renonciation d’une veuve à la succession de son mari, est qu’elle est tenuë de préter serment devant le Juge, qu’elle n’a récelé ni diverti aucune chose des meubles & effets de son mari, directement ni indirectement ; on fait souvent de faux sermens en cette occasion, c’est à quoi les Juges doivent bien prendre garde.

La faculté qu’à la femme de pouvoir renoncer à la succession de son mari, passeroit & seroit transmissible à ses héritiers, si la femme étoit morte dans les quarante jours preserirs par la Coutume pour pouvoir par la veuve renoncer à la succession de son mari.

La convention ou clause portée par le Contrat de mariage, que la femme ne Pourroit renoncer à la sucression ae son mari, & qu’elle n’auroit point la faculté de remport ou reprise, seroit nulle & nonobstant cette clause ; il seroit permis à la veuve de renoncer à la succession de son mari, & d’exercet ses repri-ses & remport ; mais non ses héritiers, même ses enfans, si la reprise ou remport n’avoit pas été stipulée en leur faveur ; parce que la reprise est personnelle à la femme, & ne passe point à ses héritiers sans stipulation précile par le Contrat de mariage en leur faveur.

La femme séparée de biens n’est pas censée héritière de son mari, encore qu’elle n’ait pas renoncé à sa succession ; art. 81. du Reglement de rébs, parce que la séparation est équivalente à une renonciation.

Auquel cas elle aura seulement ses biens paraphernaux exempts de toutes dettes, & son doüaire,

La veuve, en renonçant valablement à la succession de son mari, n’est tenuë d’aucunes dettes de son mari, telles qu’elles soient, mobiliaires ou autres ; & si elle y avoit parlé, elle pourroit à la vérité être poursuivie Solidairement par les créanciers, mais elle en seroit indemnisez par les héritiers du mari, Arrest du même Parlement, du 17 Décembre 1672.

La veuve dont la renonciation est valable, outre qu’elle n’est point tenuë des dettes de son mari, elle emporte ses biens paraphernaux qu’elle rrouve en essence, ou leur juste valeur, qui est le sixième du prix des meubles.

Or les biens parapéernaux sont les meubles à l’usege de la femme, comme habits, coffre ou armoire, linge & autres hardes qui servent ordinairement à une femme pour s’habiiler ; le lit de la femme est encore un bien paraphernal, mais non les perles, bagues, croix & diamens, quand même elle en auroit stipulé le remport ou reprise par son Contrat de mariage ; Arrests du même Parle ment, des 18 Août 1618 & 12 Octobre 1654 ; la femme a aussi sa dot, reprises, remplacemens, indemnitez & son doüaire, mais non les avantages que son mari lui auroit faits par son Contrat de mariage, soit en meubles où en deniers, ou autrement ; parce que dans le cas de renonciation elle ne peut avoir tant de causes Iucratives, c’est assez qu’on lui donne son doüaire, qui lui est une liberalité du mari.

L’action pour demander les biens paraphernaux passe aux héritiers de la femme, comme la faculté de renoncer, poursû que les héritiers fussent dans les quarante jours pour renoncer ; & si la veuve aprés avoir renoncé, n’avoit pas demandé ses biens paraphernaux, ses fiéritiers pourroient les demander Arrests du même Parlement, des 2é Août 1626 & 30 Juillet 1627.

Les biens paraphernaux ne seroient pas moins dus à une veuve, quoique son Contrat de mariage fût sous signature privée & non reconnu.

Il suffit que la renonciation de la veuve soit nulle dans la forme, pour la rendre héritière, encore qu’elle n’eût point fait actes d’héritière de son mari ; mais elle pourroit la réîtérer, si elle étoit encore dans le tems, & rebus integris.

La veuve doit être nourrie aux dépens de la succession de son mari pendant les quarante jours qui lui sont accordez pour déliberer si elle se portera héritière de son mari, ou si elle renoncera à la succession de son mari ; & en cas qu’elle y renonce, elle ne sera point tenuë de sa propre nourtiture, ni de les domestiques si elle en a.

Des que la veuve renonce, elle n’a non seulement rien dans les meubles & effets mobiliers du mari, mais encore dans les conquêts immeubles faits pendanr & constant le mariage dans les lieux où la femme a droit dans les con-quets, soit par la Coûtume ou par les Usages locaux.

C’est au Juge Civil à connoître de l’action en récelez & divertissemens, contre la veuve ou héritiers, quand même l’action auroit commencé par une plainte, permission d’informer, information, decret & interrogatoire, & non au Ju ge Criminel ; Arrest du même Parlement, du 15 Juillet 16y8.

Oit puis aprés il seroit trouvé qu’elle en auroit eû aucune chose, directemens ou indirectement, elle est tenuè contribuer aux dettes, tout ainsi que si elle n’avoit point renoncé.

La preuve concluante des recelez & divertissement faits avant la renonciation, directement ou indirectement, rend la veuve héritière de son mari, non-obstant sa renonciation, & comme si elle n’avoit pas renoncé ; c’est pourquoi elle est tenuë de contribuer au payement des dettes mobiliaires de la succession de son mari pour le tiers, si le mari avoit des enfans au jour de son dé-ces, & pour moitié s’il n’en avoit point ; mais quant aux créanciers, elle est tenuë solidairement envers eux, sauf son recours contre les heritiers du mari, pour la contribution dont ils seront tenus, la même chose doit être dite de la veuve dont la renonciation seroit nulle.

Lequel delai ne pourra être prorogé sans connoissance de cause, les beritiers G. ceux qui y ont interêt, appellez.

Le delai de quarante jours, accordé à la veuve pour renoncer à la succession de son mari ; peut être à la vérité prorogé par le Juge pour causes raisonnables, mais cela ne se peut faire sur Requête non communiquée à partie, il faut que la difficulté soit diseutée en connoissance de cause, & ceux qui y ont interets, presens ou dûement appellez ; art. 82. du Reglement de 1666.

Et où il seroit prorogé, aprés le delat de trois mois pusiez dé jour du déces, les meubles pourroni être vendus en Justice, fauf à faire droit à ladite veuve, pour telle part & portion qut lui pourra appûrtenir sur les deniers de la uendiè desdits biens, Quelque délai que le Juge puisse aecorder en connoissance de caufe, parties présentes ou duëment appellées, aprés les trois mois passez du jour du décés du mari, tous les meubles trouvez aprés le décés du mari, seront vendus en la manière accoutumée, & par ordonnance du Juge à la requête des Créanciers, héritiers ou autres ayans cause de la femme, pour les deniers en provenans être tenus en main de Justice pour la conservation des droits des parties interessées, au nombre desquelles sera la femme pour y prendre ce qui lui appartiendra en se portant licritière de son mari, ou en renonçant à sa succestion.


ARTICLE CCCXCV.

L Es biens paraphernaux se doivent entendre des meubles servans à l’usage de la femme, comme seroient lits, robes, linge & autres de pareille nature, desquels le Juge fera honnête distribution à la veuve en essence, eu égard à la qualite d’elle & de fon mari, appellé méanmoins l’héritier & Créancier, pourvû que lesdits biens n’excedent la moitié du tiers des meubles ; & néanmoins où le meuble seroit si petit, elle aura son lit, sa table & son coffre.

Les biens paraphernaux se doivent entendre des meubles feruans à l’usage de la femme, comme seroient lits, robes, linge & autres de pareille natire.

Ce mot parapbernaux vient du mot grec, qui signifie hors de la dot, c’est-à. dire, un bien que la femme s’est réservé & n’a point constitué en dot en se mariant ; il en est parlé dans la Loi 9. 8. 2. aux Dig. de jure dotium ; c’est un droit ancien en France, qui donnoit à la femme un plein pouvoir sur ses biens paraphernaux, on les appelloit son pecule ; mais dans notre Coûtume les biens pa-raphernaux ne sont pas rels, puisque par cet article les biens paraphernaux d’une femme qui a renoncé à la succession de son mari, ne consistent que dans ses meubles servans à son usage, comme un lit, une robe, du linge & autres Choses de pateille nature.

Cet article nous apprend encore que hors le cas de la renonciation d’une femme à la succession de son mari, il n’y a point lieu aux biens paraphernaux : or encore un coup, les biens paraphernaux d’une femme qui a renoncé à la succession de son mari, consistent dans un lit, robe, linge, coffre & autres de pareille nature à l’usage de la veuve.

Desquels le Juge fera honête distribution à la veuve en essence, eu égard à la qualité d’elie & de son mari, appellé néanmoins l’héritier & Créancier.

La veuve doit avoir ses biens paraphetnaux en essence, s’ils se trouvent Au jour du décés du mari, sinon leur juste valeur ; mais ces biens paraphernaux en essence ou en valeur ne seront donnez à la veuve, que par le Juge en connoissance de cause, les héritiers & les Créanciers du mari présens ou duëment appellez, à moins que la distribution ne se fit à l’amiable ; quoiqu’il en soit, la veuve n’aura des biens par aphernaux, que selon la qualité & condition d’elle & de son mari ; & mé me si c’est le Juge qui fait cette distribution, il l’a fera moderément & suivant les forces deila succession ; car enfin il saut tacher de soulager, autant qu’il est possible, une succession obérée.

Pouroù que lefaits biens n’excedent la moitié du tiers des meubles.

Les biens paraphernaux ne peuvent en aucun cas exceder le sixième des meubles qui se trouvent au jour du décés du mari, de quelque qualité & condition. que soient le mari & la femme, & quelques biens qu’ils ayent laissez.

Et néanmoins ois le meuble seroit si pesis, elle aura son lit, sa robe & son coffre.

Quelques

Quelques petits & peu de valeur que soient les meubles trouvez au jour du décès du mari, la veuve aura toujours son lit, son habit & son coffre ou armoire, c’est ce qu’on ne peut lui refuser.

Les grains, bestiaux, équipages & instrumens de menage de Campagne ; non plus que les bagues, joyaux, carosse, chevaux & équipages, ne sont point biens paraphernaux, & la femme qui a renoncé à la succession de son mari, n’y a rien.

La séparation de biens donne lieu à la femme à demander ses biens paraphernaux, comme elle le pourroit faire en renonçant par elle à la succession de son mari après sa mort.

Les biens paraphernaux ne sont dûs à la veuve, qu’au cas qu’elle ait expressément & valablement renoncé à la succession de son mari, & que par son Contrat de mariage elle n’ait stipulé le remport, c’est-à-dire la reprise de ses habits, hardes ou autres meubles servans à son usage, même ses bagues & joyaux, & qu’elle ne puisse avoir ce remport ou reprise, stipulé sur les meubles trouvez après le décès de son mari, ou sur ses autres biens s’il y en a ; Arrest du Par-lement de Normandie, du 17. Octobre 1654.

Si les meubles dont le remport ou reprise a été stipulé par le Cntrat de mariage au profit de la femme, ne se trouvent point en essence lors du décès du mari, la veuve en aura récompense sur les biens du mari, suivant l’évaluation portée par le Contrat de mariage, & s’il n’y a point d’évaluation, suivant l’estimation qui en sera faire par experts sur le pied qu’ils valoient au tems du ma-riage, & non au tems du décès du mari ; & cette valeur sera payée par privilege sur le prix des meubles, & subsidiairement sur les héritages & immeubles de la succession par hypotheque du jour du Contrat de mariage.

Berault rapporte sur cet article un Arrest du Parlement de Roüen, du 10.

Septembre 1642. par lequel il fut jugé que le proprietaire d’une maison seroit payé de ses loyers sur les meubles trouvez dans la maison, avant la veuve pour ses biens paraphernaux ; ce qui paroit juste, parce que les meubles meublans sont les gages & la sureté des loyers d’une maison.


ARTICLE CCCXCVI.

S I le mari constant le mariage décharge les héritages à lui appartenans au jour de ses épousailles, ou bien à lui échus en ligne directe constant le mariage, de rentes hypoteques & foncieres ou autres charges réelles, la femme a le tiers entier pour son douaire, déchargé desdites rentes raquitées, comme s’ils n’eussent point été chargez lors & avant les épousailles ; & ne sont lesdits raquits & décharges réputées conquêts pour y prendre droit par la femme ou ses héritiers.

Nous comprenons deux choses par cet article ; l’une, que la Coutume a perpertuellement en vûe de convertir en propres, autant que faire se peut, toutes sortes d’immeubles, & de ne reputer un immeuble un acquêt, que les propres ne soient entierement remplis, en ce qu’elle ne veut point que la libération ou affranchissement des héritages du mari pendant le mariage, des rentes & autres charges réelles, soit réputée un conquêt, mais comme comme s’il n’y a point eu de rentes & autres charges sur ces propres ; l’autre, de diminuer les avantages des femmes, en ce qu’elle refuse aux femmes de pouvoir prendre une part dans cette libération, comme elle feroient si c’étoit un conquêt ; de maniere qu’il faut tenir pour certain, que si les héritages du mari qui lui appartenoient lors de son mariage, ou qui lui sont échus pendant le mariage par succession directe, ont été liberez & déchargez pendant le mariage des rentes, redevances & & charges réelles & foncieres ausquelles ils étoient sujets, la femme aura le tiers de ces héritages en usufruit pour son douaire, comme si ces rentes & charges n’avoient jamais été dûës, sans que la femme soit tenuë de faire récompense de ces rentes & charges aux héritiers du mari ; cette libération augmente le doüaire sans qu’il en coûte rien à la femme, mais d’un autre côté la femme ne peut rien prétendre en propriéré ou en ususruit dans cette liberation, soit à titre de conquêt, soit à droit successif, c’est-à-dire, comme héritière de son ma-ri ; elle n’en profite que par rapport à son doüjaire, d’autant que cette liberation ne fait que remêttre les choses comme si ces héritages n’avoient jamais été Chargez des rentes qui ont été acquitées, rachetées & amorties pendant le mariage, ce qui est singulier à notre Coûtume.

Mais si ces rentes & charges avoient été acquittées & amorties des deniers dotaux de la femme avec subrogation à son profit par la quittance d’emploi, cette liberation n’augmenteroit pas le doüaire de la femme, parce qu’au moyen de l’emploi ou remplacement & de la subrogation, il est vrai de dire que les rentes & charges subsistent toûjours, que le mari n’a fait que changer de créancier, & que sa femme est devenuë sa créanciere au lieu & place des premiers & anciens créanciers qui ont été remboursez ; ainsi cette liberation ne change. rien à la chose, & la femme n’aura doüaire sur les héritages qu’à la charge de supporter pour un tiers les arrerages des rentes à elle duës ; Arrest du Parlement de Normandie, du 5 Juillet 1662 ; il en seroit de même si cet amortissement avoit été fait de deniers emprumtez par le mari, & dont il auroit constitué sur lui de nouvelles rentes ; parce que le doüaire de la femme ne peut augmenter par l’amortissement de rentes & charges sur les propres du mari, que lorsque le rachat se fait des propres deniers, épargne & ménage du mari, ans déclaration ni emploi de deniers d’autrui-


ARTICLE CCCXCVII

ARTICLE CCCXCVII S I le mari a vendu son propre pour faire ledit raquit, la femme prenant douaire sur les héritages déchargez, ne pourra prétendre doüaire sur l’héritage vendu.

S’il en étoit autrement, la femme auroit double avantage, & deux causes Jucrarives ; elle prendroit son doüaire sur les propres du mari, liberez de renres & charges reelles, des deniers provenans du prix de la vente d’autres propres du mari, & en outre sur les propres vendus, ce qui ne seroit pas raisonnable ; ainsi dans ce cas la femme n’aura doüaire que sur les propres de son mari, liberez des rentes & charges réelles qu’ils devoient, & non sur les autres propres du mari ; & elle ne pourra valablement inquierer ni poursuivre les acquereurs & tiers détempteurs de ces propres pour raison de son doüaire.


ARTICLE CCCXCVIII.

L A femme ne peut avoir douaire ne conquêts sur les biens donnez à son mari.

La femme ne peut avoir douüaire sur les biens donnez à son mari.

Il faut excepter de cette regle trois cas.

Le premier, si la donation a été faite au mari d’immeubles avant ou lors de fon mariage.

Le second, si la donation lui a été faite en ligne directe, qui est réputée faite en avancement d’hoirie.

Le troisième, si la future épouse a donné par Contrat de mariage de ses meubles à son mari pour don mobil, principalement si ces immeubles fe trouvent en nature au jour du déces du mari ; Arrests du Parlement de Roüen, des 28.

Juin 164s, & 14. Janvier 1647.

Dans tOus ces trois cas, la femme aura douaire sur les immeubles donnez de cette manière au mari, soit par donation entre vifs, ou à cause de mort & par testament, ce qu’il faut cependant entendre du doüaire coûtumier seulement, car quant au doüaire préfix, il se peut prendre sur toutes sortes de donations, tant de meubles que d’immeubles, & par quelques personnes & en quelque tems qu’elles soient faites, même par personnes étrangeres au mari donataire.

La femme ne peut avoir conquêts sur les biens donnez au mari.

Cette disposition est extraordinaire, principalement si la donation a été faite par personne autres que des ascendans & en ligne directe, comme par de simples parens ou personnes étranges, à moins que ces personnes étranges n’eussent stipulé par l’acte de donation ou de legs, que la chose donnée ou léguée ne seroit pas propre au donataire, & aux siens de son côté & ligne ; car en ce cas la donation ne seroit pas un conquêt, mais un propre au mari, & la femme apres la mort de son mari n’y prendroit rien comme conquêt ; mais hors ces cas, il sembleroit que la femme pourroit avoir droit de conquêts dans les meubles donnez à son mari pendant le mariage ; cependant c’est ce que notre coutûme n’a point voulu, puisque par cet article elle ordonne que la femme ne prendra rien comme conquêts dans les biens donnez au mari pendant le mariage, par quelques personnes & de quelque manière que soient faites les donations, ou entre vifs, ou à cause de mort & par testament, nôtre Coûtume ne mettant au nombre des conquêts que ceux qui se font par muruelle collaboration, travail & industrie du mari & de la femme, & par acquisition faite par le mari seul, & par le mari & la femme conjointement pendant & constant le mariage, & la femme n’étant point séparée.


ARTICLE CCCLXCIX.

L A proprieté du tiers de l’immeuble destiné par la Coutume pour le douaire de la femme, est acquis aux enfans du jour des épousailles, & ce pour les Contrats de mariage qui se passeront par ci-aprés ; & néanmoins la joüissance en demeure au mari sa vie durant, sans toutefois qu’il le puisse vendre, engager ne hypotequer ; comme en parité les enfans ne pourront vendre, hypotequer ou disposer du tiers avant la mort du pere, & qu’ils n’ayent tous renoncé à la succession.

Il y a six parties dans cet article.

La première sur ces paroles ; la proprieté du tiers de l’immeuble destiné par la Coutume pour le dovaire de la femme, est acquis aux enfans du jour des épousailles.

Ce qu’on appelle douaire en la personne de sa femme, se nomme en la personne des enfans Tiers coûtumier ; & c’est mal parler que de dire que le Tiers coutumier est la legitime des enfans, parce que pour être legitimaire il faut être héritier dans la succession de l’ascendant, où l’on prend une legitime : Or pour avoir le Tiers coûtumier, il faut renoncer à la succession du pere, sur les biens duquel le Tiers coûtumier doit être pris ; le Tiers coûtumier est donc une créance donnée aux enfans ; ou par la Coûtume, qui est le doüaire coûtumier, ou par la disposition du pere, qui est le doüaire préfix.

Le Tiers coûtumier est le tiers en proprieté de tous les immeubles dont le pere est saisi au jour de son mariage, & qui lui sont avenus en ligne directe pendant le mariage.

Il n’y a que les enfans nez d’un legitime mariage, ou les enfans de ces enfans si leurs peres étoient décedez avant leur ayeul, qui puissent avoir le tiers Coûtumier ; de forte que les enfans legitimes d’un aubain ou étranger, d’un batard, ou de celui qui n’a plus d’héritiers dans sa parenté, peuvent avoir le Tiers coûtumier ; en un mot, tous les enfans sortis d’un mariage valable & legitime, même ceux legitimez par un mariage subsequent, mais non ceux qui auroient été seulement legitimez par Lettres du Prince, même du consentement du pere & de ses parens.

Le Tiers coutumier, ou pour mieux dire le droit de prendre le Tiers Coutumier, ne passe point aux héritiers collateraux des enfans ou petits enfans qui meurent sans enfans avant le pere qui devoit le Tiers coutumier sur ses biens ; ensorte que les héritiers collateraux de ces enfans ou petits enfans ne sont pas recevables à renoncer à la succession du père des enfans, ou à la succession de l’ayeul des petits enfans, pour demander le Tiers coutumier sur les biens du pere ou de l’ayeul qui le devoit ; Arrest du Parlement de Normandie, du 17 Juillet 16s3. Si néanmoins les héritiers collateraux de ces enfans ou petits enfans, étoient leurs freres ou soeurs ; en ce cas, le droit du Tiers coûtumier, qui appartenoit aux enfans ou petits enfans, passeroit à leurs freres ou seeurs soeurs héritiers, encore bien que les enfans ou petits enfans n’eussent pas renoncé de leur vivant à la succession du pere qui devoit le Tiers coutumier, ni fait l’option du Tiers coutumier ; mais ce droit de transmission est borné aux freres & aux soeurs, & ne passe point aux autres héritiers collateraux ; Arrests du méme Parlement, des 9 Août 1658 & 3s Décembre 1670.

Par la raison que les enfans tiennent leur Tiers coutumier de la Coûtume, comme une créance sur les biens de leur pere, & non pas comme une legitime â titre d’héritier legitimaire, l’exheredation prononcée par le pere, même pour juste cause, ne pourroit priver les enfans du Tiers coutumier, ils l’auroient en toute proprieté & joüissance.

Le Tiers coûtumier n’appartient pas moins aux filles qu’aux mâles, si elles n’ont point été mariées du vivant du pere, ou si elles restent seules d’enfans ; mais si elles ont été mariées du vivant du pere, elles n’y ont rien ; & si elles n’ont point été mariées, leurs freres leur doivent mariage avenant sur le Tiers Coûtumier.

Le Tiers coutumier consiste dans le tiers en proprieté des immeubles dont le mari étoit saisi au jour de ses épousailles, & qui lui sont venus & échus en ligne directe, soit par donation, legs, succession ou autrement, mais non par Succession collateralle, donation ou legs de personnes autres que des ascendans.

Le Tiers coutumier ne se prend que sur les immeubles de quelque qualité qu’ils soient, nobles, roturiers, en franc-aleu, en Bourgage, rentes, Offices ou autres, & non dans les meubles & effets mobiliers.

Le débiteur qui auroit fait le rachat & amortissement de rentes affectées au Tiers coûtumier, ne pourroit être poursuivi par les enfans ou petits enfans pour leur Tiers coutumier, S’il n’y a eu saisie ou défenses de payer avant le rachat & amortissement fait entre les mains des débiteurs, sauf aux enfans à se pourvoir sur les autres biens affectés au Tiers coutumier pour en avoir récompense ; art 76. du Reglement de 1666.

Le Tiers coûtumier des enfans sur des Fiefs saisis réellement & adjugez par decret, ne se prend point en essence, parce que les Fiefs sont indivisibles, il se prend sur le prix de la vente & adjudication, exempt des srais de confignation & du droit de Treiziéme, si mieux n’aiment les enfans prendre le tiers de la valeur des Fiefs, suivant l’estimation qui en sera faite en la manière accoutumée ; Arrests du même Parlement, des 1a Juin 1671 & 14. Mars 1672 : Mais si au préjudice de l’estimation des Fiefs, les créanciers demandent que les Fiefs soient vendus & adjugez par decret en leur integrité, & que par l’adjudication de prix de la vente soit moindre que le prix de l’estimation, les créanciers seront seuls tenus des frais du decret, & les enfans auront le tiers de la valeur des Fiefs sur le pied de l’estimation qui en a été faite, exempt des frais du decret, des droits de Consignation & du Treizième ; Arrét du même Parlement, du s Août 167s.

Mais quant aux héritages & immeubles roturiers saisis réellement, le Tiers Coûtumier s’y prend en essence, parce que ces sortes de biens sont divisibles, c’est pourquoi si ces héritages & immeubles roturiers ne se pouvoient pas aiément partager sans y faire préjudice & dététioration, en ce cas il faudroir les liciter, quoique la voye de licitation ne soit gueres en usage en Normandie, si mieux n’aimoient les enfans prenaire leur Tiers coutumier en deniers, fuivant l’essimation de tous les biens roturiers compris dans la saisie réelle, & sur le prix de l’adjudication par decret, exempr des frais de Consignation & du droit de Treizième.

Les enfans sont tenus de prendre leur Tiers coutumier sur les héritages & immeubles donnez à leur pere en contre-change, & non sur ceux que leur pere a donnez en contre-change, & qu’il possedoit au jour de son mariage, ou qui lui étoient échus pendant son matiage en ligne directe.

Pareillement le preneur à fiesse qu à bail d’héritage, ne peut être dépussedé par les enfans, pour raison de leur Tiers coutumier, quoique les héritages donnez à fieffe qu à Bail d’héritage pendant le mariage du pere, fnssent possedez par leur pere au jour de son mariage, ou qu’ils lui fussent échus pendant son mariage en ligne directe, le preneur à fieffe ou à bail d’héritage est seulement tenu de continuer la rente aux enfans sur & tant moins, & jusqu’à concutrence de leur Tiers coûtumier ; Arrest du même Parlement, du 1s suin 1666.

Les augmentations, ameliorations, batimens, plans & autres choses que le pere a faites pendant son mariage sur les Terres sujettes au Tiers coûtumier, augmenTent le Fiefs coutumier des enfans, sans que les créanciers du pere puissent en demander par manière & forme de ventilation, diminution fut le Tiers coutumier ; Arrest du même Barlement, du 1o Banvier 1652.

Les bois de haute-futaye, abbattus & vendus par le pere pendant son mariage, entrent dans l’estimation du Tiers coûtumier des enfans, & les enfans doivent en avoir récompense sur les autres biens de la succession de leur pere jusqu’à concurrence de leur Tiers coutumier, à l’exception des bois de hautefutaye, que le pere a abbattus & consommez pour son usage, soit pour son chauffage, ou pour bâtir ou réédifier ; Arrest du même Parlement, du oAoût 1659.

Lorsque tous les biens sujets au Tiers coutumier ont été vendus & alienez par le pere, les enfans peuvent poursuivre les acquereurs, & les obliger à le desister & départir dû tiers en essence pour leur Tiers coutumier ; à l’effet de quoi tous les biens seront estimez, pour ensuite leur en être donné le tiers en essence & non en deniers, parce que les héritages & immeubles vendus & alienez par le pere, sont la chose des enfans, jusqu’à concurrence de leur Tiers coûtumier, La proprieté du tiers des immeubles effectez au Tiers éoutumier des enfans, est acquise aux ensans du jour des épousailles de leur pere, & non du jour de son Contrat de mariage, sans que le pere puisse donner atteinte à cette propriété par son fait directement ni indirectement.

Si le Tiers coûtumier ou doüaire des enfans ne peut se prendre sur les immeubles situez en Normandie, comme se trouvant épuisez par des dettes ante-rieures au Contrat de mariage & au douaire, il ne pourra pas être pris sur les biens du pere, situez dans une autre Coûtume où le doüaire n’est que viager à la femme, & non propre aux enfans jArrest du Parlement de Paris, du 2o Iuillet 1o8s, il est rapporté dans le Journal du Palais, tom. 2. pas. 1002. parce qu’il n’y a point d’extention d’une Coutume à une autre, iorsque les Coûtumes ont des dispositions differentes : mais le douaire, qui par la Coûtume seroit propre aux enfans, ne pourroit être stipulé viager, nonobstant cette stipulation il seroit propre aux enfans, in uim de la Coûtume.

La seconde partie est au sujet de ces termes, & ce pour les Contrats de mariage qui se passeront ci-apres.

Le Proces verbal de nôtre Coutume, nous apprend que l’article 399 est un article de nouvelle Coûtume, & que la Noblesse de la Province, & en particulier la Noblesse du Bailliage de Coustances, s’y opposa, prétendant que la proprieté du Tiers coutumier des enfans, ne devoit point leur être si acquise du jour des épousailles du mari, que les peres fussent dans une espèce d’interdiction d’aliener & hypotequer pour leurs besoins & la nécessité de leurs affaires leurs immeubles affectez au Tiers coutumier, mais la prétention de la Noblesse ne passa pas, les Commissaires arrérerent le contraire pour les Contrats de mariage, qui se passeroient à l’ayenir ; de sorte que depuis cet article, les peres ne peuvent rien faire contre la proprieté acquise aux enfans dans leurs immeubles pour le Tiers Coûtumier des enfans, à compter du jour de la bénédiction nuptiale des pere & mére.

La troisiéme, sur ces termes, & néanmoins la joüissance en demeure au mari sa vie durant.

On dit ordinairement que jamais mari n’a payé doüaire, il faut dire aussi que jamais pere n’a payé de Tiers coûtumier ; parce qu’un pere a la joüissance de tous ses biens pendant sa vie, & que le doüaire & le Tiers coûtumier n’ont lieu qu’aprés sa mort ; & même le Tiers coutumier n’est ouvert à l’égard des enfans qu’aprés la mort de la mère, laquelle joüit pendant sa vie de tous les immeubles qui doivent revenir aprés sa mort en toute proprieté aux enfans pour leur Tiers coûtumier.

La quatriéme, sur ces paroles, sans toutefois qu’il le puisse vendre, engager ne hyporequer.. Le pere ne peut pour quelque cause que ce soit, vendre, aliener, engager, hypotequer, donner, léguer ni disposer des immeubles qui doivent composer le Tiers coutumier des enfans, s’il a lieu ; car si le Tiers coûtumier n’avoit pas lieu ; par exemple, si les enfans jugeoient à propos de se porter heritiers de leur pere, ou s’ils décedoient avant leur pere, les Contrats, obligations, engegemens & dispositions seroient valables & subsisteroient ; cependant il leur est per-mis de faire des échanges & des fieffes ou rentes à bail d’héritage.

La cinquiême, est par rapport à ces termes : comme en pareil, les exfans ne pourrent uendre, bopotequer ou disposer du tiers auant la mort dit pere.

Les enfans du vivant de leur pere ne peuvent vendre, aliener, engager, hypotequer ni disposer de leur Tiers coûtumier, à peine de nullité des Contrats, Actes & dispolitions, par rapport au Tiers coutumier, quand même tout cela auroit été fait par les enfans pleinement majeurs, ou que le pere & les enfans auroient vendu, aliené, engagé ou hypotequé les immeubles sujets au Tiers coûtumier, ou le Tiers coûtumier conjointement.

La sixième & derniere partie est à l’égard de ces termes : & qu’ils ayent tout renencé à sa succession.

Pour pouvoir par les enfans prendre le Tiers coûtumier, il faut qu’ils ayent préalablement renoncé à la succession de leur pere ;’car ils ne peuvent être héritiers de leur pere & avoir en même tems leur Tiers coutumier dans ses im-ineubles, & même ils sont obligez de rapporter ou précompter ce qu’ils ont touché de leur pere en avancement d’hoirie ou autrement.

De plus, les enfans qui se tiennent à leur Tiers coûtumier, doivent contribuer pour un tiers aux dettes immobiliaires contractées par le pere avant son mariage, mais non à celles contractées depuis, ni aux dettes purement mobiliaires, comme billets, promesses, obligations ou arrerages de rentes, mé-me de rentes anterieures au mariage, & echuës avant le mariage ; toutes les dettes mobiliaires & toutes celles contractées pendant le mariage, quoiqu’immobiliaires, doivent être seulement prises sur les deux autres tiers des immeubles du pere & sur ses meubles ; il est vrai que si les dettes mobiliaires étoient faites avant le mariage par un titre qui emportât hypoteque, les créanciers pourroient se pourvoir pour raison des de ttes immobiliaires créées avant le mariage, sauf le recours des enfans contre les héritiers de leur pere, S’il y en a, ou les créanciers posterieurs au mariage, pour les obliger à les indemniser du tiers de ces sortes de dettes, comme ne devant point tomber sur leur Tiers coûtumier ; quant aux rentes foncieres, redevances Seigneuriales & charges réelles, qui se trouvent sur les terres & héritages au profit des Seigneurs & bailleurs de fonds, les enfans qui prennent leur Tiers coûtumier sur ces terres & héritages, doivent pareillement porter le tiers de ces rentes, redevances & charges, en quelque tems qu’elles ayent été nées, même pendant le mariage.

Il n’est pas permis au pere d’imposer d’autres conditions au Tiers coûtumier des enfans que celles portées par la Coûtume, à peine de nullité des conditions.

Le Tiers coûtumier estouvert au profit des enfans, si leur mere est morte, non seulement par la mort naturelle de leur pere, mais encore par sa mort civile, comme s’il faisoit Profession en Religion, ou s’il étoitcondamné à un banissement per-petuel, ou aux Galeres à perpetuité, miême si sa femme s’étoit fait ségarer de biens de son vivant, si le pere avoit fait cession de biens, ou si tous ses biens ou la plus grande & la plus considérable partie, étoient saisis reellement par ses créanciers, Arrêts du même Parlement, des Io Avril 1651 & 11 Fevrier 1667. Et dans tous ces cas on donne ordinairement quelque provision au pere, s’il n’a d’ailleurs de quoi vivre : mais à l’égard des enfans, ils ne pourroient valablement dispofer, vendre, aliener, engager & hyporequer leur Tiers coûtumier, qu’aprés la mort naturelle de leur pere, & non aprés sa mort civile, parce qu’il ne seroit pas impossible qu’il ne revint au siécle par les voies de droit, ou qu’il se fit : réhauiliter.

Il est même permis au pere voyant sa femme morte, de mettre ses enfans en soüissance des immeubles qui doivent former le Tiers coutumier, au préiudice de ses créanciers, & sans qu’ils foient en droit de se plaindre de cet abandonnement, delaissement & cession ; Arrest du même Parlement, du18 May 1639.

Le Tiers coutumier des enfans ne peut ét e confisqué pendant la vie du pere, soit par le crime du pere, ou par le crime des enfans.

Les Contrars & Obligations par lesquels les enfans du vivant de leur pere ouautre ascendant, ont vendu & hypotequé le Tiers à eux destiné par la Coûtu-me, sont executoites sur leurs autres biens presens & à ventr, mais non sur le Tiers coutumier, en quelques mains qu’il puisse passer, même de l’héritier du fils, ni sur leur personne ; art. 8.. du Reglement de 1668.

L’action, pour demander le Tiers coûtumier, n’est point sujette à la prescription du vivant du pere, d’autant qu’il n’est point ouvert aux ensens tant que le pere vit.

Finallement, quoique par le Contrat de mariage le doifaire de la femme eût été convenu, reglé & fixé à une portion moindre que le tiers des héritages & immeubles du mari, néanmoins cette convention n’auroit lieu que par rapport à la femme, & ne pourroit nuir ni préjudicier aux ensans pour leur Tiers coutumier, qui ne peut jamais nonobftant routes conventions, être moindre que du tiers des héritages & immeubles dont le pere étoit saisi au jour de ses épousailles, & qui lui sont échus pendant le mariage en ligne directe.


ARTICLE CD.

S’Il y a enfans de divers lits, tous ensemble n’auront qu’un tiers ; demeurant à leur option de le prendre au regard des biens que leur pere possedoit lors des premieres, secondes ou autres noces, & sans que ledit tiers diminuë le doüaire de la seconde, tierce ou autre femme, lesquelles auront plein doüaire sur le total bien que le mari avoit lors de ses épousailles, si autrement n’est convenu.

Deux dispositions dans cet article.

La première sur ces termes ; S’il y a enfans de divers lits, ils n’ont tous ensemble qu’un tiers, demeutant à leur option de le prendre au regard des biens que leur pere possedoit lors des premières, secondes ou autres néces, Lorsqu’il y a des enfans de plusieurs mariages, & en quelque nombre que soient les enfans, mâles ou femelles, ils n’ont tous ensemble que le tiers des immeubles dont leur pere étoit saisi au jour de ses épousailles, & de ceux qui lui sont échus en ligne directe pendant & constant le mariage, pour leur Tiers coûtumier, avec faculté néanmoins aprés l’ouverture du Tiers ooutumier & la mort du pere, de prendre par eux leur Tiers coutumier sur les immeubles que le pere avoit au tems du premier, second, troisième ou autre mariage ; ensorte que les enfans du premier lit n’ont pas un Tiers coutumier plus fort que celui des enfans sortis des mariages posterieurs & subsequens ; ils n’ont tous qu’un seur & même Tiers coutumier à partager également entr’eux, ils n’ont que la prérogative de voir quel étoit l’état des immeubles du pere commun au tems de ses mariages, pour connoître s’il leur sera plus avantageux de prendre leur Tiers coûtumier sur les immeubles de leur pere, tels qu’ils étoient lors de l’un de ces mariages, plûtût qu’au tems d’un autre mariage ; c’est dans cet esprit que le Parlement de Roüen, par l’article 86. du Reglement de 16bé, à ordonné que les enfans sortis des dernieres noces peuvent prendre leurs tiers, eu égard au tems des premieres noces, encore qu’il n’en reste aucuns enfans, pourvû qu’ils soient nez avant la mort des enfans des precedentes noces ; il y a plus, il suffiroit que les, enfans des derniers mariages fussent conçûs avant la mort des enfans des premiers mariages, pour avoir ce droit d’option ; Arrest du Parlement de Normandie, du 30 Mars 1673.

Mais lorsque le pere ne s’est marié qu’une fois, le Tiers coutumier des enfans se regle par le doüaire coûtumier de la femme ; car en ce cas le doüaire de la femme & le doüaire coûtumier sont relatifs l’un à l’autre : nais quand le Gere s’est marié plusieurs fois, le doüaire & le Tiers coutumier peuvent être dafferens, parce que le Tiers coûtumier des enfans se peut prendre, eu égard aux immeubles que le pere possedoit au tems de son premier mariage, ou au tems du second ou troisième mariage, selon que les enfans le jugeront à propos & qu’il leur sera plus avantageux ; mais à l’égard du doüjaire de la femme, il ne se regle que par rapport aux immeubles dont le mari est laisi au jour de sans que leur ses épousailles.

Ii n’est pas nécessaire que tous les enfans des differens lits renoncent à la succession de leur pere, pour donner lieu au Tiers coutumier, ceux qui ont re-noncé, peuvent prendre le Tiers ceûtumier, & ont l’option de le prendre, eu égard aux immeubles du pere lors de ses differens mariages, encore que les enfans des autres dits se loient portez héritiers de leur pere ; mais ceux qui ont renoncé, ne peuvent prendre leur part dans le Tiers coûtumier, comme si les autres enfans avoient aussi renoncé à la succession du pere commun, sans que leur part aecroisse à ceux qui ont renoncé.

L’autre disposition est à l’occasion de ses paroles ; & sans que ledit Tiers dimanuë le doüaire de la seconde, tierce on autre femme, iesquelles aurent plein doiai-re sur le total bien que le mari avoit lors de ses épousailles, si autrement n est convernt.

La Coûtume aprés avoir donné l’option aux enfans sortis de divers lits, de prendre leur Tiers coûtumier du jour des promieres, secondes & autres nôCes, elle ajoute dans la seconde partie de cet article, que le Tiers coûtumier des enfans ne diminue point le doüaire de la seconde femme, ou pour mieux dire, la seconde femme n’est point privée de son plein douaire sur la totalité. des immeubles que fon mari possedoit au tems de son mariage ; Arrest du méme Parlement, du 18. Iuin 1657. Aussi par l’article ESPERLUETTE7. du Reglement de 166é, la seconde femme ne peut avoir doüaire que sur les biens dont elle a trouvé son muri saisi lors de leur mariage, ou qui lui sont depuis échus en ligne directe L’enfant du premier lit transmet son droit d’option du doüaire ou Tiers coutumier à sa seur du second lit, quoiqu’elle ne fût pas encore née, mais in utero matrir lors du déces de son frère ; & même ce douaire ou Tiers coutumier est préférable aux Créanciers antérieurs au second mariage, mais postérieurs au premier mariage ; c’est aussi ce qui fut jugé par Arrest du Parlement de Roüen, du 16. Mars 1673. rapporté au Journal du Palais, tome premier.

L’option que les enfans de differens lits ont de prendre leur Tiers coûtumier, eu égard aux biens immeubles que leur pere possedoit au jour de son premier mariage ou des autres mariages subséquents, ne diminue point pareillement le Tiers coutumier de ces mêmes enfans, ni le douaire de la seconde, troisième ou autre femme, & cette femme n’est point pour cela privée de fon plein douaire sur la totalité des biens que son mari possedoit au tems de son premier ma-riage, s’il n’étoit autrement convenu par son Contrat de mariage, sçavoir qu’elle n’auroit doüairc que sur les biens dont son mari étoit saili au jour de son premier mariage, & non sur ceux qu’il avoit au jour qu’il l’avoit épousée.

Finallement il faut tenir pour certainl que le Tiers des ensans du premier lit ne peut être diminué par le douaire des secondes ou tierces femmes, & que ces secondes où tierces lemmes ne peuventprendre leur douaire sur le Tiers des enfans, au au cas que le pere eût dissipé ses biens avant de passet en seconde ou troisième noces ; car en ce cas, le Tiers des enfans doit être compté pour la suputation du douaire de la seconde ou tièrce femme, de manière que ces femmes prennent l’une & l’autre un aussi grand douaire sur le total des biens dont le maris’est trouvé saisi lors de leurs épousailles, que si les enfans n’avoient pas prélevé leur Tiers ; c’est ainsi qu’il faut entendre les termes de notre article, qui portent ; que le Tiers des enfans ne diminue point le doüaire de la seconde, tièrce ou autre femme ; par exemple, Titius se marie en premieres nôces, il a de bien 3000, liv il passe en secondes noces avec 20007. liv. de bien seulement, parce qu’on suppose 1o707. liv. distraites des 30000. liv. pour le tiers des enfans du premier lit.

De combien sera le douaire de la seconde femme sur les 20007. liy : Sera-t-il du tiers des 20000. liv. seulement, c’est-à-dire, de 6666. liv. 13. s . 4. d. comme quelques-unes de nos Commentateurs l’ont pensé : Il faut décider qu’il sera de 10000. liv. faisant la troisième partie de 300vo liv. comme si les enfans du premier lit n’avoient pas prelevé 10000. pour leur tiers dans ces 30000. liv. en un mot, le doüaire des secondes ou tierces femmes, ne peut être pris sur les biens du mari, que le tiers des enfans du premier lit n’ait été prélevé, & les secondes ou tierces femmes n’ont de douaire que sur les biens dont le mari est saisi au jour des épousailles, & les dettes hypotecaires contractées par le mari avant son second ou troisième mariage, déduites.


ARTICLE CDI.

E T ne pourront les enfans accepter ledit Tiers, si tous ensemble ne renoncent à la succession paternelle, & rapportent toutes donations & autres avantages qu’ils pourroient avoir de lui.

Trois conditions sont requifes pour mettre les enfans en état de prendre leur iers coutumier dans les immeubles dont leur pere étoit saisi au jour de son mariage, & sur ceux qui lui sont échus pendant le mariage en ligne directe ; l’une, qu’ils ayent renoncé purement & simplement à la succession de leur pere ; l’autre, qu’ils ayent tous renoncé, la troisiéme, qu’ils rapportent ou précomptent ce qu’ils auront reçu de leur pere ou autre alcendant, soit par donation, legs ou autrement. 1’. a l’égard de la renonciation, il faut qu’elle soit expresse & formelle, & faite dans ies termes préserits par la Coutume pour les renonciations aux successions ; la simple abstention ne suffiroit pas, ni encore moins se dire & porter héritier par bénefice d’inventaire.

Mais pourroit : on quitter & abandonner la qualité d’héritier béneficiaire qu’on auroit acceptée en pleine majorité, & renoncer à la succession pour demander son Tiers coûtumier, aux offres de rendre compte du bénefice d’in-ventaire : Il faut distinguer : ou c’est à l’égard de cohéritiers, ou à l’égard deCréancriers ; quant aux cohéritiers, cela ne se peut faire, parce qu’entre cohéritiers, Théritier beneficiaire n’est pas moins héritier qu’un héritier absolu, ou pur & simple ; mais à l’égard des Créanciers, il en est autrement, parce que la qualité d’héritier béneficiaire n’est à cet égard qu’une qualité flotante, que celui qui l’a prise peut en tout tems quitter & abandonner, pour se mettre en état par une renonciation pure & simple à la succession, & en rendant compte aux Créanciers du benefice d’invengaire, de pouvoir demander son Tiers coûtumier, & leur abandonner le surplus des biens de son père.

Pour pouvoir renoncer à une succession il n’est point nécessaire de faire invenfaire, il suffit de n’avoir pas mis la main à la chose par recelez, divertissemens ou autrement, & de n’avoir pas fait actes d’héritier.

Le tems pour renoncer à une succession est fixé par notre Coûtume à quarante jours, du jour du décës de celui, de cujus bonis agitur, mais toujours rebus integris. 2. Aux termes de notre article, il faut que tous les enfans renoncent à la succession, mais suivant l’arncle 89. du Reglement de 166s, il n’est pas nécesfaire que tous les enfans renoncent à la succession pour donner lieu au ; iers coûtumier, les uns peuvent se tenir au Tiers coutumier, & les autres peuvent ndecepter la succession, ou se tenir aux avantages qui leur ont été faits par leur pere ; mais les enfans n’auront le Tiers coûtumier qu’aprés avoir renoncé, & celui qui aura renoncé aura seulement la part au Tiers coûtumier qu’il auroit eu si tous avoient renoncé ; de manière que le droit d’accroissement n’a point lieu dans le Tiers coûtumier, & que la portion de ceux qui n’ont point renoncé, & qui ne se sont point tenus à leur Tiers coutumier, demeure dans la masse de la succession pour tourner au prOfit des Créanciers de la succession, C’Il y en a.

La portion des filles qui ont été mariées par le pere en meubles & effets mobiliers, ne diminue point le Tiers coûtumier des enfans qui fe tiennent au Tiers Coûtumier, & les Créanciers de la succession ne peuvent imputer sur le Tiers coûtumier les meubles & effets mobiliers donnez aux filles par le pere en mariage ; Arrests-du Parlement de Roüen, des 14. Avril 1644, & 13. Fevrier 1676. mais autre chose seroit si le pere avoit donné des immeubles à ses filies en mariage ; car en ce cas il faudroit en tenir compte aux Créanciers sur le Tiers coûtumier.

Quant au rapport, les enfans qui renoncent à la succession de leur pere pour prendre leur Tiers coûtumier, sont tenus de rapporter à la suecession tous les dons & avantages qui leur ont été faits par leur pere, si ce sont des immeubles ; car à l’égard des meubles, comme ils ne sont point susceptibles du Tiers coutumier, les enfans ne sont point tenus de les rapporter aux Créanciers de la suecession ; & même les petits enfans ne pourroient pas demander leur Tiers coûtumier sur les biens de leur ayeul, à moins de rapporter à la suecession ce qui avoit été donné d’immeubles par l’ayeul à leur pere, d’autant que l’enfant qui renonce à la succession de son pere, doit rapporter ce qui lui a été donné par son pere, ou ce que son père a payé pour lui ; art S8. du Reglement de réés ; ce qui se doit entendre si les petits enfans viennent à la succession de leur ayeul, ou y prennent leur Tiers contumier ; mais quant au Tiers coûtumier, ils ne rapporteroient que les immeubles, au lieu que s’ils venoient à la succession ils rapporteroient tant les immeubles que les meubles ; car il se pourroit faire que les meubles seroient précieux, & que les effets mobiliers seroient considérables, & sans un tel rapport il se feroit journellement des avantages indirects à un des enfans, & l’égalité ne seroit plus gardée entre cohéritiers dans une succession directe ; mais quant aux successions collaterales, le rapport n’a point lieu entre cohéritiers.


ARTICLE CDII.

L Es enfans partageront ledit Tiers coutumier selon la Coutume des lieux où les héritages sont assis, à laquelle n’est en rien dérogé pour le regard des partages, & sans préjudicier au droit des aînez ; & n’y pourront avoir les filles que mariage avenant.

Les enfans partageront ledit Tiers coûtumier selon la Coûtume des lieux où les héritages sont assis, à laquelle rien n’est dérogé pour le regard des partages.

Les immeubles qui tombent dans le Tiers coutumier, se partagent entre ceux qui y prennent part suivant la Coutume où ils sont situez, sgavoir la Coûtume generale de Normandie, la Coûtume particulière du pays de Caux, ou les Usages locaux, chacun en droit soy, Si dans la succession il y avoit des immeubles dans d’autres Coûtuies disferentes à la nôtre, c’est-à-dire, où le doüaire seroit viager, les enfans n’y pren-droient pas le Tiers coutumier, mais si par ces Coûtumes le douaire étoit propre aux enfans comme dans la nôtre, les enfans y prendroient leur douaire.

Et sans préjudicier au droit des ainez, Le droit d’ainesse a lieu dans le Tiers coutumier, ensorte que si le Tiers cougumier consiste en un seul Fief sans rotures, il est permis au fils ainé ou à ses enfans de prendre le Fief par choix, option & préciput, & les puinez n’auront que le tiers du Fief à vie ; & si le Tiers coûtumier consiste dans des rotures, le fils ainé où ses enfans, pourra prendre par préciput le principal manoir des héritages de campagne, faisant partie du Tiers coûtumier : mais ce droit d’ainesse & de préciput n’a lieu que lorsque les enfans prennent leur Tiers coûtumier en essence ; car s’ils en étoient payez en déniers, le fils ainé n’auroit aucun droit d’ainesse ni de préciput sur ces deniers.

Et nY pourront avoir les filles que mariage avenant.

Les filles ne prennent point part dans le Tiers coutumier avec leurs freres, elles n’y ont que mariage avenant pour toutes les filles non mariés du vivant du pere ; car quant aux filles mariées, elles n’y ont rien ; mais s’il n’y avoit que des filles & point de mâles, elles le partâgeroient entre elles, mais également & sans droit d’ainesse ni préciput.


ARTICLE CDIII.

E T où le pere auroit fait telle aliénation de ses biens, que ledit tiers ne se pourroit prendre en essence, ses enfans pourront révoquer les dernieres aliénations jusques à concurrence dudit tiers, si mieux les acquereurs ne veulent payer l’estimation du fonds dudit tiers en roture au denier vingt, & en Fief noble au denier vingt-cinq, laquelle estimation sera partagée égallement entre lesdits enfans.

Les aliénations faites par le pere des immeubles ou partie des immeubles affectez au Tiers coûtumier, ne peuvent nuire ni préjudicier aux enfans qui se tiennent à leur Tiers coûtumier, ils peuvenr les faire révoquer sans même avoit besoin de Lettres de Rescision ni de la voye du decret, parce que ces immeubles sont leur chose jusqu’à concurrence de leur Tiers coutumier ; mais il faut qu’ils commencent par interrupter les derniers acquereurs, pour sçavoir si les imoneubles par eux acquis, ne sont pas capables de remplir le Tiers coûtumier, sauf à aller contre l’acquereur qui suit immédiatement, si les enfans ne sont pas remplis de leur Tiers coûtumier par le déguerpissement fait par le dernier acquereur : mais dans ce cas il est permis à des acquereurs, pour n’être pas dépossedez des héritages qui leur ont été vendus par le pere, nonobstant qu’ils fussent affectez & assujettis au Tiers coutumier des enfans, de payer la valeur du fonds du Tiers coûtumier aux enfans ; suivant l’estimation qui en sera faire, eu égard au tems du déces du pere ; & au cas que l’acquereur en ait tenu proces, c’est-à dire, ait fait quelque conteslation à ce sujet, il sera au choix des enfans de prendre l’estimation, eu égard au tems du décës du pere ou au tems de la condamnation qu’ils auront obtenuë ; arr. 90. du Reglement de 1666. & de cette manière le Tiers coutumier ne sera point fourni en essence, mais en valeur & deniers, Cette même estimation sera faite au denier vingt. cinq pour les Fiefs & héritages nobles, & au denier vingt pour les rotures, le rout suivant le revenu annuel & la valeur intrinseque des immeubles.

Les acquereurs ne peuvent être à couvert de l’action des enfans pour leur Tiers coûtumier, que par quarante ans, à compter du jour du déces du pere.

Les enfans sont obligez d’interrupter & poursuivre d’abord les derniers acquereurs & non les premiers, à moins que la dernière acquisition ne suffise pas pour remplir le Tiers coutumier ; & c’est la date des Contrats qui constate l’ordre des acquisitions, & non le conrrole des Contras d’acquisition, parce que les Contrats de mariage n’ont pas besoin du contrûle pour acquerir hypoteque.

Les acquereurs n’ont pas ce privilege à l’égard de la veuve, de payer le douaire en deniers, ils sont obligez de déguerpir & à se désister des héritages par eux acquis jusques à concurrence du doüaire de la veuve ; car une doüairière doit toujours joüire de son douaire en essence, sans que les acquereurs soient gecevables à vouloir lui en donner la valeur en deniers par estimation.

a l’égard des enfans, ils ne peuvent interrupter ni faire déguerpir les preneurs d’héritages à fieffe ou bail a rente, quoiqu’affectez au Tiers coûtumier, & ils sont obligez de prendre la sieffe ou rentelen payement & sur & tant moins de leur Tiers coutumier ; deplus si cette rente ne remplit pas le Tiers coutumier, il faut leur fournir ce qui s’en défaudra en essence & leur donner des fonds qui font partie de la fieffe, par estimation, sans qu’on puisse les contraindre à prendre de l’argent ; tout ce que les preneurs à fieffe pourroient faire dans cette occasion, seroit d’offrir de déguerpir toute leur fieffe, moyennant quoi ils seroient déchargez de la rente, des poursuites & demandes des enfans au sujet de leur Tiers coûtumier, Les deniers, qui proviennent du payement fait en deniers par des acquereurs d’héritages sujets au Tiers coûtumier aux enfans pour n’être point dépossedez, se partagent également entre tous les freres qui se sont tenus au Tiers coutuner, sans aucun droit d’ainesse, préciput ni prérogative sur ces deniers, quand même ce seroit des Fiefs ou des biens nobles qu’ils avoient acquis ; il en seroit de même sur les deniers qui proviendroient de la vente & adjudication des biens saisis réellement & décrerez sur le pere, & sur lesquels les enfans avoient leur Tiers coûtumier ; car quant aux adjudicataires par decret, les enfans ne pourroient leur demander leur Tiers coûtumier en essence, ni les faire déguerpir, il faut qu’il prennent en deniers la valeur de leur Tiers coutumier sur le prix de l’adjudication.


ARTICLE CDIV.

P Areillement la proprieté du tiers des biens que la femme a lors du mariage, ou qui lui écheront constant le mariage, ou lui appartiendront à droit de conquêts, appartiendra à ses enfans, aux mêmes charges & conditions que le tiers du mari.

Suivant cet article, les enfans n’ont pas seulement un Tiers coutumier sur les biens immeubles de leur pere, ils en ont encore un sur les biens immeubles de leur mere ; & même le Tiers coutumier sur les biens de la mère est plus fort & plus considérable que le Tiers coutumier sur les biens du pere, puisque le Tiers coûtumier sur les biens du pere est limité aux immeubles dont le pere est saisi au jour de son mariage, & à ceux qui lui échéent en ligne directe pendant le mariage, au lieu que le Tiers coutumier sur les biens de la mere s’étend non seulement sur les biens immeubles qu’elle a lors de son mariage & qui lui arrivent pendant le mariage en ligne directe, mais encore sur ceux qui lui échéent par succession collaterale, donation, legs, conquêts, aut alio quovis mudo.

Le Tiers coutumier sur les biens de la mere fuir les mêmes regles que celles du Tiers coûtumier sur les biens du pere. 16. Comme par cet article il est dit que la proprieté du tiers des biens de la mere appartiendra à ses enfans, il s’ensuit que la mere ne peut vendre, aliéner, engager & hypotequer le tiers de ses immeubles au préjudice du Tiers coutumier de ses enfans ; parce que cette proprieté est acquise aux enfans du jour du mariage de la mere in vim consaetudinis, sans stipulation, promesse ni convention. 2. Les enfans sur le même principe ne peuvent vendre, aliéner, engager ni hypotequer le Tiers coutumier qui leur est donné par la Coûtume, du viyant de leur mere. 30. Il faudra prélever sur les immeubles de la mère le tiers des dettes immobiliaires ctéées avant le mariage de la mere, & toutes les autres dettes & charges ausquelles le Tiers cou-tumier sur les biens du pere, est assujetti. 45. Les enfans ne prennent pas le Tiers coutumier sur les biens de la mère, comme héritiers de la mère, mais comme une créance que la Coûtume a établie en leur faveur dés l’iustant du mariage de la mere ; aussi faut-il que les enfans renoncent à la succession de la mere pour pouvoir prendre un Tiers coûtumier sur les biens de la mère.

5O Les meubles & essers mobiliers de la mere ne sont point sujets à ce Tiers ESPERLUETTEoutumier, il n’y a que les héritages & immeubles. 6. Ce Tiers coutumier, soit que le doüaire soit coutumier ou prefix, n’est que du Tiers des immeubles & héritages de la mere pour tous ses enfans, en quelque nombre qu’ils foient & de quelques mariages qu’ils soient sortis. 7o, Le fils ainé pourra y prendre droit d’ainesse & préciput comme dans le Tiers coutumier sur les biens du perc. 8.. Les filles mariées du vivant de la mere n’y auront rien, & à l’égard des filies non mariées,, elles n’y auront que leur mariage avenant. 9s. Entre filles qui se trouveroient sans frères, le ipartage s’en feroit également sansdroir d’ainesse ni préciput entre elles ; en un mot, le Tiers coutumier sur les biens du pere, & le Tiers coûtumier sur les biens de la mèré, marchent en tout d’un pas égal, & se reglent par les mêmes maximes.

Le Tiers coutumier, comme on l’a remarqué ci-dessus, est ouvert même du jour de la mort civile, séparation de biens & saisie réelle des biens du pere, & même par l’abandonnement de biens que fait un pere à ses enfans, ou telle autre voye par laquelle un pere est privé & dépouillé de la propriété & possession de les biens, & les Créanciers du pere vivant ne peuvent contester valablement cer abandonnement par lui fait à ses enfans, quant aux fruits de leur Tiers coûtumier, dont ils joüiront du jour de l’abandonnement ; Arrest du Parlement de Paris, du S. May 1691, entre les enfans de M. le Duc d’Elbeuf, d’une part, & ses Créanciers, d’autre part ; il est rapporté dans le Journal des Audiances, tom. 5. liv. 7. ch. 24.

Le Tiers coûtumier ayant été consommé par les dettes antérieures au Tiers coûtumier ou douaire, la récompense n’en peut être demandée sur les biens situez dans une autre Coûtume que celle de Normandie, qui ne donneroit qu’un douaire viager à la femme, & non propre aux enfans ; Arrest du Parlement de Paris du 20. Juillet 1686. rapporté dans le Journal du Palais, tom. 2. page 1003.


ARTICLE CCCCV.

L A femme convolant en secondes nôces ne peut donner de ses biens à son mari en plus avant que ce qui en peut écheoir à celui de ses ensans qui en aura le moins.

Cet article est tiré de l’Edit de François Il. de 1560. communément appellé, l’Edit des secondes Noces : cependant par rapport à nôtre Coûtume, cet article ne regarde que les femmes convolant en secondes nôces, & non les maris qui se remarient, non seulement parce que nôtre Coûtume regle ailleurs les avantages que le mari peut faire à la femme en l’épousant, mais encore parce que par notre même Coûtume, le mari ne peut donner aucune portion de ses immeubles à sa future épouse par son Contrat de mariage ni autrement, & qu’en cas d’enfans, la femme n’a que le tiers des meubles qui se trouvent au jour du décés du mari avec lequel elle a cu ces enfans ; mais dans le doute, cette prohibition doit être étenduë au mari.

Il faut donc tenir pour constant que la femme ayant enfant & se remariant, ne peut donner directement ni indirectement au mari qu’elle épouse de ses biens, meubles & immeubles, nobles, roturiers, propres ou acquêts, plus que l’un de les enfans, qui prendra le moins dans la succession ; mais quant aux conquêts qui auroient été faits pendant son premier mariage en bourgage ou dans l’etenduë du Bailliage de Gisors, où elle prend moitié en propriete, & dans tous les autres biens que la femme auroit eus de la libéralité de son premier mari, il ne seroit pas juste que la femme en fit une libéralité à son second mari, ils doivent demeurer en entier aux enfans nez du mariage pendant lequel ils ont été faits, puisque ces sortes de biens ne sont dûs qu’au travail, industrie & libéralité du pere de ces enfans ; c’est aussi la disposition de l’Edit de 1560.

La donation faite par la femme à son second mari, doit être réduire, eu égard au nombre des enfans qui survivent, & non de ceux qu’elle avoir lors de son second mariage, art. 91. du Reglement de 1666. desorte que si au jour du déces de la femme, elle n’a plus d’ensans, la donation se reglera sur le pied de ce que la femme qui n’a point d’enfans peut donner par la Coûtume à son mari par son Contrat de mariage ; quoiqu’il en soit, pour regler la donation faite par la femme ayant enfans, à un second mari, on régarde le nombre des enfans, tant mâles que femelles, & non la portion que chaque enfant prend dans la succession de la mère ; Arrest du Parlement de Normandie, du 27. May 1666.

C’est pourquoi la portion de la donation faite au mari, doit être seulement égale à celle de l’enfant moins prenant, & le mari donataire partagera nvec les enfans comme une espèce d’héritier surnumeraire ; il faut dire la même chose de la donation que feroit le pere du mari, uyant des enfans, à sa seconde femme.

Les enfans & le second mari donataire partageront les biens de la succession de la mere en l’état qu’ils sont & qu’ils se trouvent au jour du déces de la meres même décision si c’est le mari qui soit donateur.

La donation faite par le pere de la femme au second mari de cette femme, ou par le pere du mari à la seconde femme, ne seroit point censée être faite par la femme à son second mari, ni par le mari à sa seconde femme, & la donation ne seroit point réductible sur la portion de l’un des enfans moins prenant.

La femme dans toutes les donations qu’elle pourra faire à differens maris, ne peut donner à tous les maris enfembe plus que ce qu’il lui est permis par la Coûtume. de donner de son bien par donation entre vifs ; par exemple, le tiers de ses immeubles ; de manière que si par la première donation elle avoit épuisé la quotité des biens qu’elle peut donner, elle ne pourra plus rien donner à son second mari Quoique cet article ne fasse point de distinction des biens qui peuvent tomber dans la donation, il est néanmoins certain que le douaire coutumier n’est pas compris dans la réauction, parce que la femme le tient de la Coûtume & non de la libéralité du mari ; il en seroit autrement du douaire préfix, si le mari n’avoit point de biens susceptibles du douaire coûtumier ; parce qu’en ce cas le douaire préfix seroit une pure libéralité du mari, quoique par nôtre Coûtume le douaire préfix ne puisse pas être plus fort que le douaire coûtumier.

Sous le terme d’enfans, on y comprend les petits enfans & leurs descendans, à condition néanmoins que s’il y a plusieurs descendans de l’un des en-sans, ils ne seront qu’uine tére dans la réduction de la donation faite par la femme à un second mari, avec lequel elle convoleroit en secondes nôces, ou par rapport à la donation faite par le mari à une seconde lemme.

Si la femme qui se remarie n’a aucun enfant de son premier matiage, ou que ceux qu’elle a eus soient morts, la donation qu’elle fera à son second mari, ne sera pas reglée sur le pied de l’Edit de 1560, & de cet article de notre Coûtume, mais sur ce qui étoit permis à la femme de donner par la Coûtume generale à toute autre personne qu’à son mari ; il faut dire la même chose dans le cas d’une donation faite par le mari à une seconde femme.

Les ameublissemens faits par une femme ayant enfans en faveur de son second mari, ou d’un mari à une seconde femme, sont sujets au retranchement & à la réduction, comme la donation ; parce qu’un tel ameublissement est un avantage indirect, qui ne peut exceder les bornes d’une véritable donation.

Une donation mutuelle & réciproque, faite par Contrat de mariage, entre une femme qui a des enfans de son premier mariage, & son second mari, seroit même sujette au retranchement & à la réduction de 1560. & de cet arti-ele ; mais dans notre Coûtume il seroit difficile de faire ces sortes de donations, parce que le mari, qu’il aie des enfans ou qu’il n’en ait point, & même par Contrat de mariage & en faveur de mariage, ne peut donner aucun de ses immeubles à la femme qu’il épouse.

Le don mobil qu’une femme ayant enfans, feroit à son second mari par le Contrat de mariage, seroit aussi sujet au retranchement, comme toute autre donation ; quand même la donation ne seroit que de l’usufruit de tous les biens de la femme, elle tomberoir pareillement dans la réduction.

Il n’y a que dix ans pour faire réduire toute donation excessive, & consé-

quemment celle faite par une femme ayant enfans, à fon second mari, ou par le mari à une seconde femme, à compter du jour de la majorité des enfans & héritiers de la personne qui a fait la donation.

C’est au mari donataire de sa femme à faire les lots, ou à la femme donataire de son mari ; desorre que le donafaire ne prend son lot que par le non choix & aprés le choix des enfans ; Arrest du miême Parlement, du 23. Avril 1é2s.


ARTICLE CCCCVI.

S I le mari a reçû constant le mariage, le raquit des rentes hypopoteques qui lui appartenoient lors des époufailles, la femme aura récompense de son douaire entier sur les autres biens de son mari jusqu’à concurrence de la valeur desdites rentes, si elles n’ont été rem-placées.

Des que le doüaire se prend sur les rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, ou autres rentes rachérables comme sur les autres immeubles, il est juste que si le mari qui reçoit l’amortissement de cos rentes des débiteurs qui veuient se liberer, la femme en ait récompense pour son douaire entier sur les autres immeubles de la succession de son mari jusqu’à duë concurrence de ces rentes, posé qu’elles n’ayent pas été remplacées ; car si elles avoient été remplacées, & qu’elles fussent encore subsistantes au tems de l’ouverture du doüai-re, elle prendroit son douaire sur le remplacement ; il faut dire la même chose du Tiers coûtumier, sans néanmoins que la veuve ou les enfans puissent inquiêter les débiteurs de ces rentes pour raison de l’amorrissement, quand mé-me il ne se trouveroit point d’autres biens dans la succeision du pere pour y prendre le douaire de la femme, ou le Tiers coûtumier des enfans, à moins qu’avant le rachat des rentes il n’eût été fait des saisies ou empechemens entre les mains des débiteurs ; il seroit même permis en ce cas aux héritiers du mari de continuer à la veuve douairiere, ou aux enfans qui s’en seroient tenus à leur Tiers coutumier, les rentes qui autoient été rachetées és mains du mari, sur le pied qu’elles étoient constituées, au lieu d’en donner récompense à la veuve ou aux ensans sur les autres immeubles de la succession du mari.


ARTICLE CCCCVII.

E T si les deniers desdites rentes ont été remployez en autres rentes ou héritages elle y aura douaire jusqu’à concurrence de ce qui avoit été racquité, bien que l’acquisition soit faite depuis les épousailles.

De cet article il faut former une décision, qui est si le mari reçoit le remboursement des rentes constituées au denier quatorze, & qu’il les remplace au denier dix-huit ou autre denier du Prince, la femme pour son doüaire ou les enfans pour leur Tiers coutumier, n’auront que le tiers de ces nouvelles rentes : mais si les arrerages des nouvelles rentes étoient plus forts que les arrerages des rentes racherées, la veuve ne prendroit le tiers des arrerages pour son doüaire, que sur le pied des arrerages annuels des rentes rachetées, & non le tiers des nouvelles rentes ; comme pareillement si le principal du remplacement étoit plus fort que le priocipal des rentes amorties, les enfans ne prendroient leur Tiers coûtumier sur le remplacement, que sur le pied du capital des rentes remboursées, & non sur le pied du capital du remplacement ; parce que par la maxime, que subrogatum tenet naturam subrogati, le doüaire & le Tiers coûtumier ne se doivent prendre sur le remplacemnt, que jusqu’à concurence du tiers des rentgs

Tachetées & amorties és mains du mari pendant le mariage, sauf à la femme, si & elle se portoit héritière de son mari, à prendre le droit de conquêts dans l’excédent de l’acquisition ; car quant aux enfans, comme ils auroient renoncé à la succession de leur pere pour s’en tenit à leur Tiers coûtumier, ils n’auroient trien dans cet exeédent, dans lequel il n’y avoit aucune déclaration d’employ & de remplacement, n’ayant été fait que du ménage & des épargnes du mari.


ARTICLE CCCCVIII.

L Es remplois de deniers provenus de la vente des propres, ne sont censez conquêts, sinon d’autant qu’il en est accrû au mari outre ce qu’il en avoit lors des épousailles ; comme aussi les acquisitions faites par le mari, ne sont réputées conquêts si pendant le maria-ge il a aliéné de son propre, jusques à ce que ledit propre soit remplacé.

Le but que nôtre Coûtume a de conserver les biens dans les familles, & d’empécher qu’ils n’en sortent autant qu’il est possible, a donné lieu à cet article, qui reut que les remplois ou remplacemens en fonds d’héritages & autres immeubles, faits pendant le mariage, des deniers procédans de la vente des propres du mari, ne soient pas réputez conquêts, mais toujours propres jusqu’à concurrence des anciens propres, & qu’il n’y aura de conquérs que ce qui excedera les propres aliénez pendant le mariage ; de maniere que toutes les acquisitions que fait un mari pendant le mariage, ne sont réputez conquêts, que les propres du mari, aliénez, ne soient remplacez, quand bien même par le Contrat d’acquisition il n’y auroit point de déclaration que le prix de l’acquisition vient & procede en tout des deniers provenans de la vente & aliénation d’un propre du mari ; car il faut tenir pour certain dans nôtre Coutume, qu’il n’y a point d’acquéts ou conquêts, que les propres ne soient remplacez, pas même de meubles que les acquêts ou conquêts ne soient remplacez, ce qui n’a pas moins lieu à l’égard de la femme & ses héritiers, qu’à l’é-gard du mari & ses héritie rs.

La maxime, qu’il n’y a point d’acquêts ou conquêts que les propres alienez ne soient remplis & remplacez, n’a pas seulement lieu en faveur de la veuve, mais encore en faveur des héritiers aux propres, soit du mari, soit de la femme ; & ce sont les parens de côté & ligne d’où procedent les propres vendus & alienez, à qui appartient l’action en remploi ; car cette action en remploi est immobiliaire, & elle est ouverte aux héritiers des propresdu mari, non seulement contre la veuve, mais encore contre les héritiers des meubles & acquêts de la femme, ou à la femme & à ses héritiers, contre le mari ou ses héritiers ; car enfin il n’y a point d’acquêts ni conquêts dans une succession, que les propres alienez du mari ou de la femme, n’ayent été remplacez.

Les propres alienez doivent être remplacez au profit des héritiers aux propres, & au marc ou sol la livre, sur tous les acquêts immeubles ; & à faute d’acquêts, le remploi en sera fait sur les meubles ; art. 107. du Reglement de 1666. De manière que tout héritier aux propres, soit du mari, soit de la femme, peut demander tout le propre qui ne se trouve plus en nature dans la succession de celui ou celle dont il est héritier, sur les acquêts & conquêts, & faute d’acquêts ou conquêts sur les meubles.

Ceux qui sont obligez de souffrir ou faire le remploi, sont les maris, les femmes, & les héritiers des meubles & acquets, & les legataires universels & par-ticuliers.

Quoique l’héritier quant aux propres paternels, ou lIéritier quont aux propres maternels, puisse demander à l’héritier des meubles & acquêts le remploi des propres alienez, néanmoins si dans la succession, il ne se trouve ni meubles ni acquêts, ces differens héritiers ne fe peuvent demander entr’eux ni ni les uns aux autres le remploi ou remplacement du propre vendu & aliéné par le défunt ; car en ce cas ils prennent la succession en l’état qu’elle se trouve ; Arrest du Parlement de Roüen, du 31 Juillet 1627.

L’alienation des propres ne se fait pas seulement par la vente des héritages, rentes, Offices & autres immeubles, mais encore par l’hypoteque des immeubles, par le rachat ou amortissement des rentes, & en contractant des detres ou autres engagement ; & même encore bien qu’un Office eût été perdu faute par le mari d’avoir payé le droit annuel, & lequel étoit un propre du mari, le remplacement en seroit dû sur les acquêts ou conquêts de sa succession ; enforte que la veuve & les héritiers du mari ne pourroient rien avoir dans les conquêts, avant que le prix de l’Office n’eût été remplacé sur les acquêts ou conquêts ; Arrests du même Parlement, des 7 Juilier 1é6a & 22 Juin r673 ; tant il est vrai qu’on favorile toujours les héritiers des propres contre une veuve ou les héritiers des meubles & acquets, jusques-là qu’un legataire universel ne peut profter des meubles, que les rentes qui avoient été remboursées au Testateur, & qui lui étoient propres, n’eussent été remplies & remplacées sur les meubles à duë estimation ; Arrest du même Parlement, des 2o Août 1646, 27 Mars 1655. & S Juillet 1659, Le remploi ne se fait pas feujement des propres de souche, & qui ne sont échus que par succession directe ou colateralle, mais encore des acquêts que le mari avoit au jour de son mariage, & par lui alienez pendant son mariage ; & ces acquêts doivent être remplacez sur les conquéts faits pendant le mariage, avant que la femme puisse rien prendre sur les conquërs faits pendent le mariage ; Arrest du même Parlement, du 24 Juiller 166s ; mais cet immeuble ne seroit pas un propre dans sa succession, ni encore moins un propre de disposition, ce seroit un simple acquet à cet égard. La consignation que le mari fait par son Contrat de mariage sur ses biens, des deniers dotaux de sa femme, est répurée une alienation des propres du mari, à cause de l’’hypoteque formelle & speciale qu’il a contractce, dont les hé-ritiers aux meubles & acquêts, sont obligez de décharger les proptes ; & méme la veuve ne pourroit rien prétendre dans les conquéts faits pendant le mariage, qu’aprés que les deniers dotaux auront été pris dessus, & que les propres du mari n’en ayent été d’autant quirtent & déchargez.

La donation faite par le mari ou la femme pendant leur mariage, même une fondation de Messes, Obits ou autres Prieres, n’est point sujette à remploi & rempla-cement ; Arrests duimême Parlement, des s’Avril 1630 & ; Décembre 1661.

Les acquêts sont le premier sujet du remploi des propres, & on ne fait point gorter le remploi sur les meubles, qu’au défaut d’acquêts ; car il n’y a point d’acquêts que les propres ne soient remplacez.

L’action de remploi appartient à la femme contre le mari, & au mari contre la femme, & aux heritiers des propres contre les héritiers des meubles & acquêts du mari & de sa femme.

Il n’y a point de remplacemunt de propres situez en une Coûtume, & aliénez sur des acquêts situez dans une autre Coûtume, c’est-à-dire qu’on ne peut pas demander remploi des propres en Normandie, sur des biens situez dans une autre Coûtume ; par exemple dans la Coûtume de Paris, mais seulement sur les acquêts situez en Normandie s’il y en a, & s’il n’y en a point, ni de meubles, il n’y aura point de remplacement à demander ; Arrest du même Parle ment, du 28 Fevrier 1637.

Le remploi des propres alienez doit être fait suivant le prix du Contrat d’adienation, & non suivant la valeur du propre, au tems de la mort de celui ou de celle de la succession duquel ou de laquelle il s’agit, suivant le même Arrest du Parlement, du a8 Fevrier 1637.

Dans le remploi des biens de la femme, vendus par le mari, il est au choix de la femme & de ses héritiers de se contenter du prix de la vente, échange ou rente de la fieffe, ou de demander la juste valeur de ses héritages à son mari ou ses héritiers, & subsidiairement aux acquereurs & détempteurs ; art. 125. du Reglement de 1666.

Les héritiers aux meubles & acquêts, ou les legataires universels, qui n’auroient

point fait d’Inventaire, seroient tenus de remplacer le propre aliené de la personne de la succession de laquelle il seroit question, encore que la valeur du propre aliené excedût le valeur des meubles & acquêts de la succession ; Arrest du même Parlement, du is Décembre 1638.

Le remploi se fait seulement dans une succession échûë, & dont les biens se partagent entre differens héritiers, & non lorsqu’il n’y a qu’une sorte d’héritiers, comme en ligne directe où l’action de remploi n’a point lieu ; parce qu’en pareille succession, il n’y a point de differens héritiers, & que les propres alienez s’y prennent sur tous les biens de la succession generalement quelconques, ainsi l’action de remploi ne peut avoir lieu qu’en succession collaterale, ou entre mari & femme ou leurs héritiers.


ARTICLE CCCCIX.

E T où les deniers provenans du racquit desdites rentes, n’auront été remployez lors du décès, ils ne sont censez meuble, mais immeuble, jusqu’à la concurrence des propres qui appartenoient au ma-ri lors dudit mariage.

De cette disposition, il faut conclure que ces deniers n’étans point un effet mobilier, mais immobilier & de la même nature qu’éroient les rentes, Offices ou autres immeubles vendu, la femme & les héritiers aux meubles & ecquêts, n’y auront rien ; ils apparriendront aux héritiers des propres, si les rentes, Offices ou autres immeubles étoient un propre en la personne du défunt ; mais si ces rentes, Offices ou autres immeubles étoient un acquét au jour du mariage du mari, la femme à la vérité ne prendroit rien dans les deniers provenans du remboursement & amortissement des rentes, ou de la vente des Offices ou autres immeubles, & lesquels deniers se seroient trouvez en essence, ou encore dûs au jour du décés du mari, mais ils appartiendroient à l’héritier des meubles & acquêts, comme les rentes, Offices ou autres immeubles lui auroient appartenu.

Si les deniers qui se trouveroient en essence au jour du décés du mari, excédoient le principal des rentes ou le prix de la vente de l’Office ou autre im-meubles, cet excedent seroit un effet mobilier dans lequel la femme prendroit part, & qui appartiendroit à l’héritier des meubles & acquêts à l’exclusion de l’héritier aux propres ; Arrest du Parlement de Normandie, du 11 Août 1665.


ARTICLE CCCCX.

G Ens mariez ne se peuvent ceder, donner ou transporter l’un à l’autre quelque chose que ce soit, ni faire Contrats où Confessions, par lesquels les biens de l’un viennent à l’autre, en tout ou partie, directement ni indirectement.

Il est défendu par cet article au mari & à la femme conjoints par mariage, de s’avantager l’un l’autre pendant le mariage, quand même ils feroient séparez de corps ou de biens, directement ni indirectement, ni à personnes in-terposées, soit par donation entre-vifs ou à cause de mort ou Testament, Cessions, Transports, Contrars, Déelarations, Reconnoissances, Consessions, portant que tous les biens & autres choses, ou partie d’icelles, appartiennent à l’autre, ni en quelqu’autre manière que ce soit, à peine de nullité des avantages & Actes qui auroient trait à cet avantage, encore même que l’héritier présomptif eût parlé, consenti & promis de les entretenir, ou quand le mari & la femme se seroient reservé par leur Contrat de proprieté la faculté de se pouvoir donner à l’un ou à l’autre pendant leur mariage, & quand même ils n’auroient point d’enfans de part & d’autre.

La liberation qui seroit faite par le mari, des dettes réelles & charges foncieres ausquelles l’’héritage de la femme étoient sujets, ne pourroit pas passer pour un avantage indirect, & même le mari ni ses heritiers n’en pourroient demander récompense, pourvû que le mari n’eûr point aliené de ses propres pour liberer, acquitter & décharger l’héritage de la femme ; il en seroit de même des impenses, ameliorations, rédifications, constructions & bûtimens faits par le mari sur les héritages de sa femme ; ce ne sont point là des avantages indirects, les héritiers du mari n’en poutroient demander la répetition à la fem-me ou à ses herrtiers, ni encore moins des frais que le mari auroit faits au sujet de poursuites & de Procés concernans les biens & droits de la femme, Il n’y a point de don mutuel entre conjoints par mariage, dans nôtre Coutume, ainsi un mari & une femme conjoints par mariage, n’ayans enfans & étans en parfaite santé, ne pourroient pas se donner l’un à l’autre & au survivant d’eux, l’usufruit des conquéts faits en Bourgage, ou dans l’etenduë du Baillage de Gisors, Une Donation faite par un mari à la mére de sa femme, ou par la femme à la mère de son mari, ou à l’enfant du conjoint qui auroit enfans, seroit réputée un avantage indirect & contraire à la disposition de nôtre Coûtume, mais non si elle étoit faire à un beau-frere, ou à une belle-seur, il n’y auroit que la voye de faire affirmer le Donataire sur la vérité de la Donation.

Par Arrest du Parlement de Paris, du 31 Janvier 1683, en la Grand’Chambre, il a été jugé qu’une Donation mutuelle faite entre un mari & une fem-me pendant & constant leur mariage, mariez à Paris & domiciliez à Paris, ne pouvoit s’étendre sur les ac quêts ou conquêts qu’ils avoient faits en Normandie pendant leur mariage, mais seulement sur les conquêts qu’ils avoient faits dans l’etenduë de la Coûtume de Paris, ou autres Coûtumes sembiables ; cet Arrest fondé sur la disposition de cet article.

Il est vrai que par ce même Arrest, on fit valoir le don mutuel sur les rentes constituées où rentes hypoteques, que les conjoints par mariage s’étoient faites & avoient acquises sur des débiteurs domiciliez en Normandie, sur le maxime du Parlement de Paris, que les rentes constituées à prix d’argent ou rentes hypoteques, se reglent suivant le domicile du propriétaire ou créancier des rentes ; mais on auroit jugé autrement à cet égard au Parlement de Roüen, parce que suivant la maxime de ce Parlement, les rentes constituées à prix d’argent ou rentes hypoteques se reglent fuivant le domieile des débiteurs, & non suivant le domicile du créancier ou propriétaire des rentes ; cet Arrest est dans le Journal des Audiences, tom. 2. liv. 5. chap. 4. Il y a le don mobil, mais il faut qu’il soit fait avant le mariage, & non pendant le mariage.

Le don mobil est valable, encore bien que le Contrat de mariage qui le contient, soit sous signature privée ; ce don ne doit pas moins subsister, que s’il étoit porté par un Contrat de mariage, passé devant Notaire ou autre personne publique.

Le mari ne peut rien donner de ses immeubles à sa femme, même par Contrat de mariage.


ARTICLE CCCCXI.

T Outefois le mari ayant aliené l’héritage de sa femme, lui peut transporter du sien pour récompense, pourvû que ce soit sans fraude ou déguisement, & que la valeur des héritages soit pareille, & qu’il apparoisse de l’aliénation du mari par Contrat autentique.

Ce ne seroit point là un avantage indirect, ni une donation faite par le mari à sa femme pendant le mariage, mais datio in solutum, pourvù toutefois & non autrement, 1o. Que cela se fasse sans fraude & déguisement ; 20. Que l’aiénation du bien de la femme par son mari, soit prouvée & justifiée par le Con-trat ou autre Acte d’aliénation devant Notaire ou autre personne publique ; car un Acte d’aliénation sous signature privée ne sussiroit pas pour établir le fait de l’aliénation ; ni encore moins une aliénation verbale ; 30 Que la valeur de la cession & tranlport de l’héritage ou autre immeuble, fait par le mari à la femme, pour l’indemniser de l’alienation par lui faite de son héritage ou autre im-meuble, soit pareil au prix de l’aliénation du bien de la femme : En un mot, il ne faut pas qu’il y ait la moindre apparence de fraude, autrement une cession ou transport de cette qualité, passeroit pour un avantage indirect ; & même pour connoître la juste valeur du propre aliéné, il est permis d’en demander l’estimation, soit les héritiers du mari, soit les créanciers anterieurs au magiage, immobiliers & hypotecaires, & même ceux qui auroient contracté avec le mari depuis la cession & transport ; Arrest du Parlement de Normandie, du 7 May 1656.