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TITRE XVI. DES TESTAMENS.

ARTICLE CCCCXII.

T Out Testament doit être passé pardevant le Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion, en presence de deux témoins idoines, âgez de vingt ans accomplis, & non legataires ; presence desquels le Testateur doit déclarer sa volonté, & s’il est possible le dicter ; & après, lui doit être lû le Testament, presence de tous les dessusdits, signé du Testateur, s’il le peut faire, & si faire ne le peut, sera fait mention de l’occasion pourquoi il ne l’a pû signer ; même il sera signé desdits Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion, & témoins.

Cet article prescrit les formalitez pour le Testament solemnel.

Il est bon d’observer à cette occasion que les formalitez requises par les Loix Romaines, pour la validité des Testamens, furent d’abord observées cn France, sous les premiers Rois de la premiere race.

Ces solemnitez donnerent souvent occasion auxhéritiers ab inteftus, de disputer les Legs pieux aux Eglises & aux Pauvres, en contestant la validité des Testamens ; mais pour obvier à ces contestations, les Peres du Concile de Lyon de l’an 567, & ceux du cinquième Concile de Paris de l’an 61s, déclarerent bons & yalables en faveur de ces Legs tous les Testamens, non seulement de tous les Evéques & Cieres, mais aussi tous les Testamens des Laiques, où les solemnitez requises par les Loix Romaines, auroient été obmises.

Depuis ces Conciles, chacun commença de tester à sa volonté, car en ce tems-là peu de gens mourroient sans faire des legs à l’Eglise ; & même par succession de tems, les legs pieux qui ne dépendoient au commencement que de la volonté des Testateurs, devinrent tellement forcez, qu’on alia jusqu’à refuser le Viatique & la Sépulture à ceux qui étoient décedez sans avoir fait quelque don à l’Eglise ; & par ce moyen la connoissance des contestations pour raison des Testamens, fût donnée au Juge d’Eglise ; & c’est à l’occasion de cette Iurisdiction, que les Papes se mélerent de prescrire des formalitez pour la confection des Testamens solemnels ; mais ces abus ont été réformez par les Loix & les Coutumes du Royaume.

On appelle Testament, un juste témoignage ou déclaration de nos dernieres volontez ; il y a en outre les Coüiciles ; mais parmi nous, on ne fait plus de différence entre ces deux actes de derniere volonté, sinon que le Testament précede ordinairement le Codicile, & que le Codicile n’est souvent qu’une addition, soit pour y augmenter, ou pour y diminuer, & quelquefois pour révoquer nôtre premiere voionté, ou pour la mieux expliquer, & la faire entendre.

Dans les Testamens, il y a deux choses à considerer, la forme & la matière : la foime, ce sont les formalitez preserites par la Coutume, pour la validité. des Testamens ; la matiere, ce font les biens dont on peut resser, & les autres choses dont on dispose, ou qu’on veut qui soient faites aprés sa mort ; car enfin la mort donne la consommation aux Testamens, & tant que le Testateur est wivant, c’est un Acte florant & incertain ; les personnes qui peuvent faire Testament, & les personnes en fayeur desquelles on peut tester suivant la Coutume, sont encore la matière des Testamens.

Dans nôtre Coutume, on ne connoit que de deux sortes des Testimeris, le Testament solemnel & le Testament olographe ; le Testament solemnel est celui qui est passé devant une personne publique, ou autre qui ait caractere pour le recevoir ; le Testament olographe est celui qui est sous signature privée, écrit, datté & sixné de la propre main du Testateur ; les Testamens nuneup atifs y sont inconnus ; car tout y doit être rédigé par écrit, sans quoi on n’a qucun égard aux dernieres voiontez, quand même elles seroient atrestées par le témoignage de témoins les plus irreprochables ; la preuve par témoins, n’est pas même recevable dans ce cas.

La forme du Testament solemnel est qu’il soit passe devant le Cuté ou son Vicaire, Notaire ou Tabellion, en la presence de deux témoins, que le Testateur déclare sa volonté en leur presence, qu’il dicte sa volonté s’il est possible, que le Testament lui soit lù en la presence du Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion & des deux témoins, que le Testateur le signe, s’il ie peut faire, & s’il ne le peut faire, il sera fait mention pourquoi il ne l’a pû signer ; finalement, que le Testament soit signé du Curé ou Vicaire, Notaire ou l’abellion.

Les témoins doivent être idoines, âgez de vingt ans accomplis & non Legataires ; les Religieux autres que les Religieux Curez, ne peuvent être témoins dans les Testamens, les Prêtres & Ecclesiastiques seculiers peuvent y être admis, mais non les femmes ; sur rout, il faut tacher que les témoins soient personnes dignes de foi & irreprochables ; c’est pourquoi toutes les personnes qui ne peuvent servir de témoins en jugement, & ausquelles on peut reprocter quelque nôte d’infamie de fait ou de droit, & que les Loix déclarent ne pouvoir prêter témoignage, ne peuvent être témoins dans les Testamens ; on pourroit se servir des parens du Testateur pour témoins, pourvû qu’ils ne fussent pas Legataires directement ni indirectement ; l’Executeur testamentaire pourroit être témoin s’il n’étoit point Legataire, Pour juger de la capacité des témoins, il faut seulement la considerer au tems que le Testainent est fait, & non au jour de la mort du Testateur.

Le nombre de deux témoins prescrit par la Coûtume, ne peut être diminué dans les Testamens, même en tems de peste, Les témoins doivent ausolument savoir écrire & signer.

Il n’est pas seulement permis aux Notaires ou Tabellions Royaux ou de Seigneurs, de recevoir les Testamens, mais encore aux Curez, soit Seculiers, soit Reguliers, où leurs Vicaires.

Il suffit que le Vicaire soit notoirement Vicaire, qu’il ait été établi Vicaire par le Curé de la Paroisse, & qu’il en ait fait publiquement les fonctions, pour pouvoir en l’absence de son Curé recevoir un Testament, sans qu’il soit nécesfaire en Normandie que le Vicaire ait des Lettres de Vicariat, enregistrées au Greffe de la Iurisdiction ordinaire Royaie.

Nul Ecclesiastique, tel qu’il soit, Seculier ou Régulier, autre que le Curé ou son Vicaire, ne peut recevoir des Testamens, à la reserve des Prêtres prépusez par l’Evéque ou ses Archidiacres pour la déserte des Cures pendant l’an-née du déport, parce qu’ils font en cela fonctions de Curez ; un Evéque pourroit aussi recevoir un Testament.

Les Curez ou Vicaires ne peuvent être témoins dans les Testamens qu’ils reçoivent ; mais si un Testamentqu’ils n’auroient point reçû contenoit des legs pieux à leurs Eglises, il ne pourroit pas être valablement contesté, sous prétexte que le Curé ou Vicaire auroit été témoin dans le Testament ; Arrest du Parlement de Roüen, du 28 May 1659.

C’est le Curé ou son Vicaire, ou le Notaire ou Tabellion du lieu du domiCile du Testateur, qui en general doit recevoir un Testiment ; cependant si le Testament d’une personne qui passeroit ou qui tomberoit malade en passant dans un lieu qui ne seroit point le lieu de son domicile ordinaire, étoit reçu par le Curé ou Vicaire ou le Notaire ou Tabellion du lieu, il ne seroit pas moins valable dans la forme que s’il avoit été passé par le Curé ou Vicaire de la Paroisse de la demeure ordinaire du Testateur, ou par le Notaire ou Tabellion du lieu dé son domic ile ; mais il ne seroit pas permis à un Curé ou Vicaire de recevoir un Testament hors l’etenduë de sa Paroisse, ni à un Notaire ou Tabellion d’en recevoir un hors le Ressort de son Notariat ou Tabellionage, à peine de nuslité du Testament.

Un Naraire ou Tabellion de Seigneur ne peut pas moins recevoir des Testamens dans l’etenduë de la Justice où il est Notaire ou Tabellion, qu’un Notaire ou Tabeilion Royal ; autrefois les Notaires Apostoliqueme pouvoient pas recevoir de Testament, mais aujourd’hui que presque dans tout le Royaume, par la volonté du Prince & Edits êmanes de son autorité Royale, ils ont les mêmes fonctions que les Notaires Royaux, ils peuvent recevoir des Testamens.

Les’uges, soit Royaux, même de Cours Souveraines, soit Juges de Seigneurs, ni les Secrétaires du Roi, n’ont pas le pouvoir de recevoir des Testamens ; il n’y a que les Secretaires d’Etat, qui peuvent recevoir les Testamens des Rois & des Enfans de France, mais non des Princes du Sang ; les Secretaires du Cabinet n’auroient pas le pouvoir des Secretaires d’Etat.

Les Cieres de Notaires ou de Tabellions sont absolument incapables de recevoir des Testamens, quand même ils feroient pour & au nom de leurs No-faires ou Tabellions.

Un Notaire ou Tabellion ne peut recevoir des Testamens dans lesquels il seroit Legataire, tant mediocre que fûr le Legs.

Il est nécessaire de marquer le lieu dans lequel le Testament solemnel a été passé, mais non à l’égard des Testamens olograpnes ; les Testamens doivent être dattez, même les Testamens olographes ; cependant quant à ces derniers, s’il n’y avoit que ce défaut de formalité, il seroit difficile de donner atteinte à un Testament olographe pour n’être pas datté, d’autant plus que le Testament ne reçoit son entiere perfection & sa cosommation que par a mort de ce-lui qui l’a fait, & lajour de la mort donne la date à un Testament olographe.

Les ratures, interlignes ou renvois qui seroient faits dans un Testament, seront approuvez par signature ou paraphe, même dans les Testamens olographes.

Le Testateur en faisant son Testament solemnel, doit déclarer sa volonté & la dicter mot pour mot en presence du Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion & de deux témoins ; de maniere que l’obmission du mot dicté seroir une nullité essentielle dans un Testament, à moins que le Testateur par l’érat de sa maladie, ne fût dans une impossibilité absolué de pouvoir arranger lui méme ses dispositions ; mais il faudroit faire mention expresse de cette impossi-bilité, à peine de nullité du Testament ; quoiqu’il en soit, si le Testateur étoit hors d’état de déclarer & faire entendre lui-même & par sa bouche ses dernieres volontez, il ne pourroit pas faire de Testament valable.

De plus, le Testament étant fait, il deit être lû en la presence du Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion & des témoins, sans cependant qu’il soit nécessaire de le rélire au Testateur ; mais il doit être fait mention qu’il a éte lû au Testateur en presence des deux témoins par le Curé ou Vicaire, Notaire on Tabeilion, qui l’a reçû, aussi à peine de nullité.

Enfin le Testâment solemnel doit être signé du Testateur, s’il sçait ou peut signer, sinon sera fait mention qu’il ne sçait ou qu’il ne peut signer, aprés en avoir été interpellé suivant l’Ordonnance ; ce défaut seroit une nulliré dans de Testament ; quant aux Testamens olographes, ce ne seroit pas assez qu’ils fussent écrits en entier de la main du Testateur, il faut nécessairement qu’ils soient signez de lui, autrement un pareil Testament seroit nul.

Toutes les formalitez prescrites par la Coutume pour les Testamens, sont de droit écrit, & on n’y peut déroger & contrevenir, quand même il s’agiroit de legs pieux, il faut les suivre à la lettre, & non par simples équivalens.

Comme tout Testament est révocable jusqu’à la mort du Testateur, il s’enfuit que le Testateur peut le revoquer par le moindre Acte qui contienne la révocation ; si cependant c’étoit par un autre Testament ou Codicile, il faudroit que ce dernier Testament ou Codicile fût parfait.

On Testament dure & subsiste tant qu’il n’est point révoqué, & tant que le Testateur est vivant il n’est point sujet à la prescription.


ARTICLE CCCCXIII.

T Estament écrit & signé de la main du Testateur, est bon & valable, ores que les solemnitez prescrites au precedent article, n’ayent été observées & gardées.

Nous avons dit sur le précedent article que le Testament olographe est celui qui est écrit en entier, datté & signé du Testateur ; ce ne seroit pas assez qu’il fût écrit en partie de la main du Testateur ESPERLUETTEen partie par une autre personne, quand même ce seroit un Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion, ou autre personne publique ; un Testament de cette qualité seroit nul ; Arrest du Parlement de Normandie, du 8 May 1657.

Un Testament olographe n’a besoin d’aucunes formalitez requises pour les Testamens solemnels, il suffit pour sa perfection & validité qu’il soit écrit, datté & signé du Testateur ; mais il ne seroit pas moins lestament olographe, quoique le Testateur l’eût fait reconnoître devant Notaire ou Tabellion, ou en Justice ; Arrests du même Parlement, des 17 Janvier 1636 & 27 Août 1618.

Les faits de suggestion ne sont point admissibles dans les Testamens olographes, quoiqu’ils le soient dans les Testamens solemnels ; les Testateurs y peuvent inserer des clauses dérogatoires, comme dans les autres Testamens.

La preuve tant par titres que par témoins, qu’on a empèché le Testateur de faire Testament peu être admise ; mais la preuve par témoins ne seroit pas recevable, que le Testateur a fait un Testament, & que ce Testament a été vû, lû & tenu, & qu’il a été supprimé, la preuve de ces faits seroit trop dangereuse ; d’ailleurs, qui pourroit assurer que ce prétendu Testament étoir dans sa for-me, soit valable sait dans ses dispositions : Il faudroit néanmoins considerer les circonstances de l’affaire qui pourroit quelquesois dégenerer dans un crime.

Quoique nôtre Coûtume ne parle point des Testamens militaires, cependant ils sont reçûs par la iurisprudence du Parlement de Roüen ; Arrests des SAvril 1628 & 28 Janvier 1638 ; mais non les Testamens nuncupatifs.


ARTICLE CCCCXIV.

H Omme non marié, ou n’ayant enfans, après l’âge de vingt ans accomplis, peut disposer de ses meubles par Testament à qui bon lui semble.

Pour pouvoir disposer par Testament & ordonnance de derniere volonté de tous ses meubles & effets mobiliers, il suffit que le Testateur ait vingt ans accomplis, tant à l’égard des mâles qu’à l’égard des femelles, pourvû que le Testateur ne soit point marié, ou s’il est marié, qu’il n’ait point d’enfans vivans de son dernier mariage, ou de precedens mariages.

L’âge de vingt ans aecomplie est tellement requis pour disposer de ses meubles par Testament, qu’un mineur de vingt ans, quoi qu’émancipé ne pourroit tesser de ses meubles & esfets mobiliers Cet article s’entend même de l’universalité de meubles & effets mobiliers, quand même toute la succession consisteroit en meubles & effets mobiliers, sans aucuns immeubles.

Les muets & sourds de nature conjointement, les furieux, les insensez, les interdits, les Religieux, même les Religieux de Malthe, les Aubains ou Etrangers, & les personnes mortes civilement par condamnations, ne peuvent fai-re Testament tel qui soit, pas même au sujet de leurs meubles.

Si un furieux ou insensé avoit quelques bons intervales, pendant lesquels il auroit fait son Testament dans les formes ordintires, son Testament seroit valable, sans que la folie, fureur ou démence précedente ou subsequente, pût donner atteinte à sa derniere volonté.

Le Testament solemnel d’un aveugle est valable, pourvû qu’il soit revétu des formalitez des Testamens solemnels ; Arrest du Parlement de Normandie, du 27 Août 1638.

Quoique noire article porte qu’un Testateur ayant les qualitez requises, puisse léguer ses meubles à qui bon lui semble, néanmoins il faut que les Legataires loient capables d’accepter & recevoir les legs ; ainsi toutes personnes qui n’ont point Tevamenti factionem pussivam, ne peuvent être Legataires, soit de meubies ou d’immeubles, telle seroit la concubine du Testateur ; un Aubain ou Etranger, un bâtard, principalemnent un bâtard adulterin, ou de Prêtre, le Confesieur du Testateur pour lus & à son profit particulier, les Religieux men-dians, les Medecins, Apoticaires & Chirurgiens, & autres personnes prohibées par les Loix & la Jurisprudence des Arrests.

Comme cet article ne porte point que pour qu’une disposition testamentaire des meubles soit valabie, il soit nécessaire que le Testateur survive son Testament de trois mois, comme l’article 422 le requiert pour les acquets imme ubles ; j’estime que dans le cas d’une disposirion testamentaire de meubles, quand même ce seroit d’une universalité de meubles, il ne seroit point nécessaire que le Testament eût été fait trois mois avant le décés du Testateur.

En dernier lieu, il faut pour pouvoir disposer de ses meubles, que les vingt Sans du Testateur soient accomplis, ce ne seroit pas assez qu’ils fussent commencez ; car dans ce cas, anitus incoeptus pro completo non Babetter.


ARTICLE CCCCXV.

C Eux qui auront accompli seize ans, soit fils ou fille, pourront disposer par Testament du tiers du meuble à eux appartenant.

Pour pouvoir disposer par Testament du tiers de ses meubles & effets mobiliers, il faut avoir au moins seize ans accomplis, soit mâle ou femelle, sans même avoir besoin de l’autorisation de son Tuteur ou Curateut, en quelque quantité, & de quelque qualité que soient les meubles & effets mobiliers qui se trouveront au jour du décés du Testateur ; cet âge est bien délicat & bien foible pour pouvoir faire un Testament, aussi la Coûtume borne la disposition d’un pareil Testateur à une tierce partie de ses meubles & esfets mobiliers, qui quelquesois sont considérables ; mais c’est la Loi qui donne, cette faculté, il faut s’y rendre.

ARTIeLE


ARTICLE CCCCXVI.

L Es bâtards peuvent tester de leur meuble, ne plus ne moins que font les legitimes.

Les bâtards, même adulterins & autres, n’ont pas moins activam testandi facultatezs, que les personnes legitimes, de sorte que les bâtards peuvent disposer par Testament de tous leurs meubles & effets mobiliers s’ils sont âgez de vingt ans accomplis, où du tiers s’ils n’ont que feize ans accomplis, & du tiers de leurs acquêts & conquêts immeubles, ainsi & de la manière que les personnes d’une condition legitime le peuvent faire par Testament ; car il n’y t à cet égard ancune différence entre les bâtards & les personnes legitimes.

Mais pour ce qui est de passiva facultate resiandi, les bâtards peuvent à la verité recevoir des legs universels ou particuliers de personnes étrangeres, iais leur pere ou mere ne peuvent les faire leurs Legataires universels : & même à l’égard des legs particuliers, il ne faut pas qu’ils soient considérables, à moins que ce ne fût des pensions viageres ; sie étoit des bâtards adulterins, incestueux ou de Prêtres, les legs qui leur seroient faits par leur pere auroient de la peine à subsister.

Un Aubain ou Etranger non naturalisé n’a point la faculté de disposer par Testament, non enim babet jura civitatis, mais il peut disposer de ses biens par donation entre-vifs, que est juris gentium, & auquel les Aubains ou Etrangers, quoique non naturalilez, participent ; ils pourroient même recevoir par donation entre-vifs, mais non par donation à cause de mort ni par Testament.


ARTICLE CCCCXVII.

F Emme mariée ne peut tester d’aucune chose, s’il ne lui est permis par son mari, ou que par son Contrat de mariage il soit ainsi convenu.

Pour qu’une remme mariée & en puissance de mari, soit qu’elle ait des enfans ou qu’elle n’en ait point, mineure ou majeure, puisse faire Testament & disposer par Testament de ce qu’il est permis de disposer par ordonnance de derniere volonté, suivant la Coutume, il faut absolument & nécessairement qu’elle ait le consentement de son mari, ou qu’elle soit spécialement & ad boc autorisée par son mari, ou que par son C’entrat de mariage cette faculté lui ait été expressément réservée, quand même sa disposition seroit pour cause pieuse : le consentement ou autorisarion doit même être portée par le Testament, la seule présence du mari à la passation du Testament, ne suffiroit pas.

Si le mari étoit absent depuis long-tems au-de-là des mers, ou en Pays étranger ou éloigné, la femme en ce cas pourroit se faire autotiser par Justice à l’effet de faire Testament, & le Testanent seroit valable.

Pareillement une femme séparée de biens & d’habitation, ou de biens seulement, seroit capable de faire cet Acte.

Une femme mariée & non séparée d’avec son mari, pourroit se faire autoriser par Justice au défaut de son mari, pour disposer de ses biens par Testa ment aux termes de la Coûtume, parce qu’un pareil refus seroit injuste, déraisonnable, & approcheroit de la barbarie ; car enfin les Testamens sont une espece de consolation pour les mourans.

Une femme, quoiqu’autorisée par son mari, ou ayant les autres qualités requises pour tester, ne peut faire Testament que dans la sorme de la Coûtume, ni disposer par Testament que de la quotite des biens, prescrite par la Coutume.

Si une femme mériée & domioiliée en Normandie, faisoit son Testament sans le consentement ni autorisation de son mari, ou qui ne se seroit point réservé la faculté de tester par son Contrat de mariage, suivant ce qui est porté par cet article, dans un lieu regi par une Coûtume qui ne requereroit point cette formalité, par exemple la Coûtume de Paris, ce Testament ne pourroit avoir d’exécution sur les biens fituez en Normandie, parce que la Testatrice avoit une incapacité personnelle, prononcée par cet article de la Coûtume de Normandie, à moins qu’elle ne fatisfit aux conditions de cet article ; incapacité qui la suivoit par tout à cet égard, & qui rend son Testament sans effet sur les biens de Normandie, sans qu’on puisse dire en ce cas, qu’il faut suivre les formalirez du lieu où l’on contracte & où l’on fait Testament, car il y a bien de la différence entre la forme d’un Acte ou Testament, & la capacité ou incapacité d’un Contractant ou d’un Testateur.

Il a été jugé par Arrest du Parlement de Paris, du 26. Juillet 1670, qu’un femme n’étant pas obligée par la Coûtume de son domicile à se faire autoriser par son mari pour faire Testament, n’avoit pas besoin d’autorisation de son mari pour la validité de son Testament quant aux biens situez dans une Coûtume qui requiert l’autorisation de son mari pour tester ; cet Arrest a été rendu en la Quatrième Chambre des Enquêtes, il est rapporté dans le Journal du Palais.


ARTICLE CCCCXVIII.

L E Testateur ayant enfans vivans ou descendans d’eux, habiles à lui succeder lors de son déces, ne peut disposer de ses meubles par Testament en plus avant que d’un tiers, sur lequel tiers sont portez les frais des funerailles & legs testamentaires.

Celui ou celle qui a des enfans mâles ou femelles ; & de quelque mariage qu’ils soient sortis, ou defcendans d’eux mâles ou femelles, habiles à lui succeder, ne peut disposer par Testament ou ordonnance de derniere volonté, que du tiers de ses meubles & effets mobiliers, & non davantage, & encore moins de ses immeubles, encore faut il prélever sur ce tiers de meubles, les frais funeraires & les legs que le Testateur ou Testatrice auroit faits par son Testament, de manière qu’un legs de cette qualité, est peu de chose ; les autres tes mobiliaires de la perlonne qui a fait le Testament, tomberoient sur le légataire universel ou sur l’héritier.

C’est au jour du décés du Testateur qu’il faut regarder s’il y a des enfans ou descendans d’eux, & s’ils sont habiles à succeder ; car ce ne seroit pas assez qu’il y eût des enfans ou desdendans d’eux, il faut qu’ils soient habiles à succeder & non incapables de succeder, tels que seroient des Religieux prosez & autres morts civilement, d’autant que ces sortes d’enfans n’empécheroient point que leur pere & mere ne pussent disposer de leurs biens, comme les personnes qui n’auroient point d’enfans ou descendans d’eux, pourroient faire.


ARTICLE CCCCXIX.

N Eanmoins s’il n’y a que des filles ja mariées, & qu’il soit quite de leurs mariages, il peut disposer de la moitié, & l’autre moitie appartient à la femme.

Un pere qui n’a que des filles ou descendans d’elles, pour ses héritieres préfomptives, qu’il a mariées, & ausquelles il a entièrement payé la dot qu’il leur avoit promise, peur donner par Testament la moitié de ses meubles & effets moniliers à qui bon lui semble, & l’autre moitié appartiendra à sa femme, non comme sa légataire, mais comme son héritière en cette partie.

D’où l’on peut inferer deux choses ; l’une, que si le pere n’avoit que des filles pour héritieres présomptives, & dont la dot a été payée, & point de femme, ou s’il n’avoit d’enfans mâles ou femelles, ou descendans d’eux, ni de femme, il pourroit disposer de tous ses meubles & effets mobiliers par Testament ; l’autre, qu’une mere, veuve, n’ayant que des filles mariées, & leur dot payée, pour héritieres présomptives, ou qui n’auroit point d’enfans, pourroit pareillement disposer par Testament de tous ses meubies & effets mobi-diers en faveur de qui elle jugeroit à propos, sans que ses filles ou les héritiers collateraux pussent y trouver rien à rédire.


ARTICLE CCCCXX.

ET où sa femme seroit prédecedée, il peut disposer de tout.

Cet article veut dire que le mari aprés la mort de la femme, lequel n’a que des filles mariées, & dont la dot a été payée, pour héritieres présomptives, peut léguer par Testament tous ses meubles & effets mobiliers au prosit de qui il veut, sans que ses filles ni les héritiers collatéraux de sa femme, soient en droit de contester ce legs ; il faudroit dire la même chose, si ce pere n’avoit point d’enfans ni descendans d’eux, mais il faut que sa femme soit morte pour pouvoir faire une pareille dilposition ; car tant que la femme vivra, il ne sera loisible au mari que de donner la moitié des meubles & effets mobiliers qui se trouveront au jour de son déces ; parce que si la femme le survit, elle y aura moitié s’il n’y a point d’enfans du mariage, ou s’il n’y a que des filles qui ayent été motiées du vivant du pere, & dont la dot a été payée ; mais encore un coup, souvenez-vous que le mari en léguant moitié qu’il a dans les meubles à une personne érrange, il ne laisse pas l’autre moitié à la femme jure legati, puisqu’un mari & une femme ne se peuvent rien donner ni léguer l’un à l’autre pendant le mariage, mais jure successionis, & comme héritière en cette partie de son mari aux charges. de droit, Ce que nous venons de dire du mari, doit s’appliquer à la femme, c’est-à-dire que la femme qui a survécu son mari, peut disposer de tous ses meubles & effets mobiliers en faveur de telle personne qu’elle juge à propos, lorsqu’elle n’a que des filles mariées pour héritieres présomprives, & dont la dot a été payée, ou qui n’a aucuns ensans de son dernier mariage ou de précedens mariages.


ARTICLE CCCCXXI.

L Es enfans émancipez succedent avec les autres non émancipez, en rapportant par les émancipez ce qui leur a été donné.

En matière de succession il n’y a point de difserence entre les enfans émancipez, & les enfans non émancipez l, iils viennent également à la succession dont ils sont héritiers présomptifs & habiles à lucceder ; il faut mémeqque ceux qui ont rega quelque chose en avancement d’hoirie, soir les enfans emancipez soit les non-emancipez, la rapportent à la succession lors du parrage, ou qu’ils prennent moins dans la succession.

Il n’y a point d’émancipation dans notre Coûtume sans Lettres du Prince, & aprés qu’elles ont été entérinées en la manière accoutumée : cependant il est certain que le mariage émancipe de plein droit, sans qu’il soit besoin de Lettres d’émancipation.


ARTICLE CCCCXXII.

H Omme n’ayant enfans, peut disposer par testament ou donation à cause de mort, du tiers de ses acquêts & conquêts immeubles, à qui bon lui semble, autre toutefois qu’à sa femme & parens d’icelle, pourvû que le Testament ou donation soit faite trois mois avant le décès & qu’il n’ait disposé dudit tiers entre vifs.

On ne peut disposer des propres en aucune manière par Testament ou donation à cause de mort ; & à l’égard des acquets & conquéts, on n’en peut disposer que du tiers, pourvû toutefois & non autrement ; 10. Que le Testateur n’ait point d’enfans ou descendans d’eux, mâles ou femelle, au jour de de son décés. 2o Que cette disposition ne soit point en favour de sa femme ni de ses parens, directement ni indirectement, ni par forme de fideicommis. 40. Que le Testateur ait vécu trois mois depuis son lestament ou donation à cause de mort. 40. Qu’il n’eût point disposé par donation entre vifs du tiers de ses acquêts & conquêts immeubles.

La faculté de pouvoir disposer du tiers de ses acquêts par Testament ou donation à cause de mort, n’est pas moins donnée aux filles majeures de vingt ans, ou à une veuve maieure de vingt ans, & qui n’a point d’enfans, qu’aux mâles non mariez, ou mariez mais qui n’ont point d’enfans au jour de leur déces.

Non seulement le mari ne peut léguer à sa femme ni à ses parens le tiers de ses acquets & conquêts immeubles, mais encore toute autre personne n’en peut disposer en faveur de l’un de les Eéritiers presomptifs aux acquers & conquêts immeubles, ainsi un des héritiers aux acquêts & conquêts immeubles ne peut être Légataire du tiers des aequêts & conquêts immeubles ; mais l’héritier aux propres pourroit être Légataire du tiers des acquêts & conquêts immeubles.

Les trois mois dont il est parlé dans cet article, courrent du jour de la date du Testament, soit qu’il soit passé devant un Curé ou Vicaire, Notaire ou Tabellion, ou qu’il soit Glographe ; ainsi tout Testament, même le Testament olographe, doit être datté, à peine du nullité : mais on ne seroit pas re-cevable à faire preuve par témoins que le Testateur avoit antidatté son Testatament olographe ; Arrest du Parlement de Roüen, du 21. suin 1622. & à l’égard des autres Testamens, il n’y auroit que l’inscription de faux à proposer pour attaquer la date d’un Testament.

La faveur des legs pieux portez par un Testament, dont le Testateur n’auroit pas survécu trois mois depuis qu’il l’a fait, ne pourroit pas fauver ce dé-faut, parce qu’il est essentiel ; puisque la Coûtume ordonne précisément qu’un Testateur qui dispose du tiers de ses acquêts ou conquêts immeubles, doit survivre son Testament trois mois, le tout à peine de nullité.

Une personne qui a son véritable domicile en Normandie, & dont les acquêts & conquêts immeubles sont en Normandie, faisant son Testament dans une Coûtume différente où le Testateur s’étoit trouvé à l’occasion d’affaires ou auggrement, les trois mois de survie ne sont pas moins requis pour la validité de la disposition du tiers des acquêts & conquêts immeubles, que si le Testament avoit été fait en Normandie, & c’est là le véritable esprit de notre Coutûme ; c’est pourquoi si on a jugé autrement dans quelque Cour autre que le Parlement de Roüen, on s’est écarté du sens litteral & de l’intention de la Coutume : ainsi on n’estime pas qu’il faille tirer à conséquence un Arrest du Parlement de Paris, du 20. Juillet 1686, qui a jugé qu’un Bourgeois de Paris, faisant son Testament à Paris, ne doit pas survivre trois mois son testament pour le faire valoir à l’égard des biens situez dans l’etenduë de la Coûtu-me de Normandie, qui demande par cet article ce tems de survie ; car cet Arrest est directement contraire à la disposition de cet Article & à la Jurisprudence des Arrests du Parlement de Roüen ; Taisan dans sun Commentaire sur la Coûtume de Bourgogne, art. 6. du titre 7. not. 2. rapporte un Arrest du

Parlement de Dijon, du 12. suin 1646. conforme à la maxime de Normandie.

Par cet Arrest le tems de survie de vingt jours-requis par la Coûtume Bourgogne, a été jugé nécessaire pour les biens, tant situez en Bourgogne que Ceux situez hors la Bourgogne, quoique le Testareur fût domicilié hors l’etenduë de la Coutume de Bourgogne, & que le Testament eût été fait lors l’éten-duë de cette Province.

Il faut que les trois mois de survie soient complets, il ne suffiroit pas qu’ils fussent commencez ; desorte que s’il manquoit un jour aux trois mois, le Testament seroit nul Me. Barthelemy Auxanet fait à ce sujet une remarque, qu’on croit ne devoir pas être omise ; il dit que la Coûtume de Normandie, qui commu-nément est appellée la sAce Coûtume, réprouve les Testamens, s’ils n’ont été faits trois mois avant le déces du Testateur, & que si dans les Coûtumes qui n’ont point pareille disposition ce tems paroissoit trop long, on pourroit le réquire à un autre tems plus court, comme de quarante jours, ou autre tems que l’on jugeroit à propos ; c’est dans ses Mémoires sur le mot des Testamens ; ce qui fait entendre que c’est une chose bien delicate qu’un Testament fait par un moribond, & qui ne survit sa dernière disposition que de quelques jours, de quelques heures, & quelquefois de quelques momens ; il est aisé de surprendre un testareur qui est dans cet état, & qui souvent n’a de connoissance que pour se plaindre des maux qu’il souffre. On a même vû des Testamens, Mû l’on a fait parler un Testateur comme vivant, quoiqu’il fût mort ; ce qui n’arriveroit pas, si la disposition de cet article de notre Coûtume avoit lieu dans les autres Coûtumes du Royaume.

Pour réduire le legs des acquêts & conquêts immeubles au tiers, il faut considerer les acquêts & conquêts immeubles du Testateur au jour de son déces, & non au jour & son Testament ; car un Testament n’est pas nulle pour avoir par le Testateur légué plus que le tiers de ses acquêts & conquêts immeubles, le legs tombe seulement en réduction ad legitimum modum, c’est-à-dire au tiers des acquêts & conquêts immeubles.

Des qu’on a disposé par donation entre vifs du tiers de ses acquêts & conquêts immeubles, on ne peut plus en disposer par Testament ou donation à cause de mort, d’aucune portion ; car on ne peut disposer que du tiers de ses acquêts & conquêts immeubles, tant par donation entre vifs, que par Testament ou donation à cause de mort.

Par Arrest du Parlement de Paris en la Grand : Chambre, du 3. Avril 1699. il a été jugé dans notre Coûtume, qu’un legs devant être réduit au tiers des acquets, dont on peut seulement disposer par Testament suivant cet article, le Légataire doit avoir sa récompense sur les autres biens dont le Testateur pouvoit disposer en totalité ou en plus grande partie, situez dans une autre Coûtume ; cet Arrest est rapporté dans le Recueil des Arresls notables, tom. 1. pag. 207. Cette décision seroit beaucoup de difficulté au Parlement de Roüen ; on ne pense pas pas même que cette Cour admit cette indemnité ou récompense, parce qu’elle paroit contraire à la disposition de cet article.


ARTICLE CCCCXXIII.

L A femme veuve ayant enfans vivans, habiles à lui succeder lors de son décès, ne peut disposer par Testament ou donation à cause de mort, que d’un tiers de ses meubles.

Il y a une exception à cette disposition, qui est que si la veuve n’avoit que des filles pour héritieres, & que ces filles eussent été mariées & dotées & leur dot payée, elle pourroit en ce cas disposer par Testament de tous ses meubles & effets mobiliers en faveur de qui elle jugeroit à propos, autre qu’à personne prohibée par la Coûtume, mais non de ses acquêts ou conquêts immeubles : De plus, ù contrario sensis, si la femme veuve n’a point d’ensars au jour de son deces, il lui sera permis de tester de la totalité de ses meubles & effets mobiliers, & non pas seulement du tiers ; car cette restriction n’est qu’au cas que la veuve ait des enfans vivans habiles à lui succeder au jour de son déces : elle pourroit même en ce cas disposer du tiers de les acquets & conquêts immeubles


ARTICLE CCCCXXIV.

P Ere & mere par leur Testament ne peuvent donner de leurs meubles à l’un de leurs enfans plus qu’à l’autre.

a plus forte raison ne pourroient-ils donner de leurs immeubles, & cela pour garder & conserver l’égalité entre les enfans ; c’est done dans cette vuë que les pere & mêre ne peuvent donner par Testament ou autrement, aucune portion de leurs meubles & immeubles à l’un de leurs enfans plus qu’à l’autre, directement ni indirectement, soit mâles ou femelles, ou à leurs de scendans en ligne directe ; & même il ne seroit pas permis à cejui qui auroit été avantagé de renoncer à la succession pour se tenir à son don ou legs, afin de s’exempter de rapporter à la mafse ce qui lui auroit été donné & légué, parce qu’il faur toujours rapporter ce qui a été donné ou légué contre la dilposition de la Coûtume.


ARTICLE CCCCXXV.

E T quant aux autres personnes qui n’ont enfans, ile pourront donner à leurs héritiers ou autres personnes, telle part de leurs meubles que bon leur semblera.

Suivant cet article on peut être héritier & Légataire tout ensemble en ligne collaterale, sçavoir héritier quant aux propres ou quant aux ac quêts & conquêts immeubles, & Légataire d’une portion des meubles & effets mobiliers ou de la totalité, puisque par cet article il est permis à toute personne, mâle ou femelles, qui n’a point d’enfans, de donner à un de ses heritiers présomprifs habiles à lui succeder, telle part de ses meubles & effets mobiliers qu’elle jugera à propos, tout ou partie, sans qu’il y ait lieu à rapport, d’autant plus qu’il n’y a point de rapport en collaterale : Un Testateur ou Testatrice, qui n’a point d’enfans, peut à plus forte raison faire le même legs à une personne étrange, au préjudice de ses héritiers coilateraux.


ARTICLE. CCCCXXVI.

L E pere peut donner par son Testament à son fils naturel avoüé, telle part de son meuble que la Coutume lui permet donner à un étrange.

Si done le Testateur a une femme & des enfans legitimes, il ne pourra léguer à son bûtard, mâle ou femelle, quoique reconnu & avoué, que le tiers de ses meubles & effets mobiliers ; mais s’il n’a point de femmes ni d’en sans legitimes, il pourra lui léguer la moitié, même la totalité, de tous ses meubles & effets mobiliers, ainsi qu’il le pourroit faire envers une personne étrange, il ne faudroit pourtant pas que ce fût un bâtard adulterin, incestueux ou de Prétre ; mais quant à ses acquêts & conquêts immeubles, il ne pourroit pas lui en léguerla moindre portion.


ARTICLE CCCCXXVII.

N Ul ne peut disposer de son héritage & biens immeubles ou tenans nature d’iceux, par donation à cause de mort ne par Tetament, ne en son Testament, encore que ce soit par forme de donation ou autre disposition entre vifs, ou que ce fût en faveur des pauvres ou cas pitoyable, si ce n’est au Bailliage de Caux en faveur des puînez, ou du tiers des acquêts, comme dit est ci-dessus.

Nul, mâle ou femelle, majeur ou mineur, ayant enfans ou n’en ayant point, ne peut disposer par Testament, donation à cause de mort ou autre acte à cause de mort, d’aucune ni de la moindre portion de ses propres, même en sa-veut de l’Eglise & des pauvres, ou pour toute autre cause pieuse, quand méme il seroit dit dans le Testament ou donation à cause de mort que le legs vaudra comme s’ii étoit fait par donation ou autre disposition entre vifs, à peine de nullité du legs ; car dans nôtre Coûtume tous les propres sont réservez à l’héritier qui les doit avoir, & ils sont hors la disposition testamentaire ou à cause de mort ; il n’y a que les acquêts & conquêts immeubles qui tombent dans cette disposition, & pour un tiers seulement, encore faut-il que le Testateur majeur n’ait point d’enfans au jour de son déces, & qu’il ait vécu trois mois depuis le jour & date de son Testament & ordonnance de derniere volonté.

Non seulement les propres réels sont hors la disposition testamentaire, mais encore les héritages & immeubles tenans nature de propre ; & même il n’est pas permis de faire des legs à prendre sur des héritages propres, quand bien méine il n’y auroit ni meubles ni acquêts capables de payer les legs, soit dans cette Coûtume ou dans une autre ; ainsi une disposition par Testament ou à cause de mort, portant que le Testateur a légué une rente ou une somme de deniers à prendre sur ses propres, n’est pas valable, quand même le legs seroit pour causes pieuses ; Arrests du Parlement de Normandie, des 9. Aoust 1é 47. & 17. Fevrier 1660. Mais à l’égard des propres fictifs, c’est-à dire ceux qui ne sont propres que par convention, ils ne tombent point dans la prohibition de cet articie, parce que ces sortes de propres ne sont point propres de disposition, & le Testateur en peut disposer ainsi & de la manière qu’il pourroit faire de ses acquées & conquêts immeubles.

Les Régataires de propres seroient mal fondez à demander récompense de leur legs, qui est nul & qui ne peut subsister, sur les autres biens du Testateur, soit meubles ou acquêts ou conquêts immeubles, jusquà concurrence qu’il est permis d’en disposer par ordonnance de derniere volonté, parce que le Teftateur, fecit quod facere non poterat, & non fecit quod facere potorat, à moins que ce ne fût dans le cas que le legs a été fait en faveur des pauvres de l’Eglise ou pour autres causes pieuses ; Arrests du même Parlement, des 10o. Juil-let 1637, 24. Novembre 3632, 19. Avril 1652, 15. Avril 165s, & 26. Janvier 1672. Et encore faudroit, il que le Testateur eût vécu trois mois complets depuis la date de son Testament ; & même nonobstant la faveur de ces legs, on se tient fouvent à la rigueur de la Loi, & on n’en donne point récompense sur les meubles ni sur le tiers des acquêts & conquêts immeubles.

Si le Testateur avoit disposé de ses meubles & du tiers de ses immeubles, tant propres qu’acquêts & conquêts, sa disposition vaudroit pour les meubles & pour le tiers des acquêts & conquêts immeubles, & seroit nulle. à l’égard des propres ; car la nullité d’un less n’emporte pas la nullité de l’autre.

Les propres roturiers ne sont pas moins inaliénables par Testament & ordonnance de derniere volonté, que les propres féodaux & nobles ; & il ne faut point distinguer si ce sont propres anciens ou propres naissans, ils sont tous au dessus des dispositions testamentaires & à cause de mort.

Par une exception à la disposition generale de cet article, il est permis à un bere ou à une mère de pouvoir donner par Testament ou donation à cause de mort, de leurs propres à leur fille pour la marier ou par augmentation de dot, bien entendu pourrû que cela n’excede point le tiers de leurs héritages & immeubles ; les pere & mere ont encore la même faculté dans l’etenduë du Bailliage de Caux, où par la Coûtume partieuliere un pere ou une mere peut donner le tiers de ses acquêts à un, ou à plusieurs, ou à tous leurs puinez, même par Testament ou donation à cause de mort.

Dans nôtre Coûtume les dispositions testamentaires & la donation à. cause de mort sont la même chose, sans que les termes y puissent rien changer ; car enfin nous ne connoissons que de deux sortes de donations, la donation entre vifs, & la donation à cause de inort ou par Testament.


ARTICLE CCCCXXVIII.

N UI ne peut disposer par Testament de l’usufruit de ses héritages ou d’autres biens réputez immeubles, non plus que de son héritage ; toutefois il en pourra disposer en récompense de ses serviteurs ou autres causes pitoyables, pourvû que l’usufruit n’excede le revenu d’une année.

Generalement parlant, on ne peut léguer l’usufruit d’aucune portion de ses propres & immeubles tenans nature de propres ; & à l’égard des acquêts & conquêts immeubles, on ne peut en léguer l’usufruit que du tiers, comme on ne peut léguer que le tiers en proprieté & en fond ; la raison de cet disposition, est qu’on ne peut imposer de servitude sur ce qu’on ne peut aliéner.

Il n’y à qu’une exception à cette regle generale, qui est qu’un Testateur, quoique marié & ayant des enfans, peut léguer une année du revenu de ses immeubles, soit propres soit acquêts & conquêts, à ses serviteurs & domestiques pour une récompense de services, ou aux pauvres, où à l’Eglise, ou pour toutes autres causes pieuses ; on dit d’une année, car si la joüissance léquée excedoit le revenu d’une année, elle seroit réductible au revenu d’une leule sannée, & même si par les termes du Testament la disposition est bornée, fixée & limitée à l’usufruit du revenu d’une année, elle ne pourra se prendre sur les meubles ; Arrest du Parlement de Roüen, du 7. Mars 1634. & même s’il y pa des dettes mobiliaires ou hypotecaires, elles se prendront sur cette année de joüissance avant que le Légataire puisse joüir.


ARTICLE CCCCXXIX.

L E mari n’ayant enfans, ne peut donner de ses meubles à sa femme, sinon jusqu’à la concurrence de la moitié de la valeur de ses heritages & biens immeubles qu’il possede lors de son déces ; & s’il a enfans, il ne peut lui donner qu’à l’avenant du tiers de ses immeubles.

Cet article paroit directement opposé à l’article 410. par lequel il est dit ; que gens mariez ne se peuvent donner aucune chose directement ni indirectement ; cependant parcelui-ci, il est permis à un mari qui n’a point d’enfans, de léguer à sa femme de ses meubles jusqu’à concurrence de la moitié de la valeur des héritages & immeubles, tant propres qu’acquêts ou conquêts, qu’il à & possede au jour de son déces, & S’il a des enfans, jusqu’à concurrence du tiers de ses héritages & immeubles ; il faut avoiier que ces deux dispositions paroissent se contrarier ; mais enfin telle est la Lois de manière que dans ce cas une femme comme héritière de son mari, a un tiers où une moitié dans les meubles trouvez au jour du déces de son mari, & un tiers où une moitié par par droit de legs, faite en sa faveur par son Testament & ordonnance de derniere volonté, sans cependant que la moitié ou le tiers des meubles léguez, puissent exceder la moitié ou le tiers des héritages & immeubles du Testateur, suivant le cas qu’au jour de son décés il ait ou n’ait point d’enfans.

Sous le mot de meubles, les meubles meublans ne sont pas seulement compris, mais encore les effets mobiliers.

C’est au jour du décés du Testateur, que pour regler la valeur de ses héritages & immeubles, il faut regarder la quotité & quantité des héritages & im-meubles qui sont dans sa succession.

Mais si le mari n’a point de meubles, il ne peut rien léguer à sa femme ; Arrest du Parlement de Normandie, du 20. Novembre 1669. car il ne peut lui lé-guer aucuns de ses immeubles, tels qu’ils loient.

Un bâtard n’ayant point d’enfans, poutroit donner & léguer par Testament ou donation à cause de mort à sa femme tous ses meubles & effets mobiliers, encore qu’ils excedassent la valeur de la moitié de ses héritages & immeubles, sans que le Fise, lé Roy ou les Seigneurs de Fief, puissent demander la réduëtion du legs ; parce que la dispusition de cet article regarde uniquement les hé-ritiers du mari ; Arrest du même Parlement, du 23. Aoust 1632.

Comme notre article ne donne point à la femme la faculté qu’elle donne au mari au sujet de la disposition y contenuë, & que cet article renferme un droit exorbitant, il semble qu’on ne doive pas permettre à la femme, soit qu’elle ait des enfans ou qu’elle n’en ait point, de faire un pareil legs à son mari ; cependant l’équité demanderoit que cette faculté fut réciproque.


ARTICLE CCCCXXX.

L Es Exécuteurs testamentaires sont saisis durant l’an & jour du trépas du défunt, des biens meubles demeurez après le décès, pour l’accomplissement du Testament, jusqu’à concurrence des legs & autres charges, en faisant au préalable inventaire, appellez les heritiers, & en leur absence les plus prochains parens, si mieux l’héritier ne veut saisir l’Exécuteur testamentaire des legs & charges en argent ou en essence.

On peut réduire cet article à trois difficultés ; 10. Quelles personnes penrent ê-re nommées Exécuteurs testamenraires ; 20. Du devoir & pouvoir des Executeurs testamentaires ; 30. Quelles actions on peut exercer contre eux, & quelles actions ils peuvent exercer contre les héritiers du défunt.

Sur la première difficulté, on peut remarquer que quoiqu’un Testament puisse être valable sans Exécuteur reslamentaire, cependant l’usage est d’y en nommer un ou plusieurs, cela dépend de la volonté du Testateur ; or toutes personnes peuvent faire & remplir cette fonction, mâle ou femelle, Laies ou Ecclesiastiques, même les Religieux, pourvû que ce soit sous l’autorité de leur Superieur. un Exécuteur testamentaire peut être Légataire dans le Testament dont il est Bxécuteur.

On n’est point tenu d’accepter une exécution testamentaire malgré soiOn peut attacher la fonction d’exécuter un Testament à une Charge ; par exem-ple, si le Testateur dit : e prie Messieurs les Gens du Roy, M. le Lieutenant General, oz autre Officier, d’exécuter ou faire exécuter mon à testament aprés ma mort, nonseulement cette disposition est valable, mais encore le successeur en la Charge sera en droit de faire cette fonction.

Des héritiers ou des Créanciers seroient en droit de s’opposer qu’un mineur nommé Exécuteur testamentaire n’en fit les fonctions, parce que ce mineur pourr oit se défendre de payer le reliquat du compte de l’exécution testamentaire, si aucun il y avoit, par la maxime qu’un mineur ne peut valablement s’obliger ni hypotequer ses biens,

Un Exécuteur chargé par le Testament de faire des aumones ou distributions fecretes, n’est point obligé d’en rendre compte, pourvû que ces aumones ou distributions ne soient pas exorbitantes.

Lin Exécuteur testamentaire qui auroit recu le legs que le Testateur lui auroit fait pour les peines de l’exécution testamentaire, ne pourroit pas refuser l’exécution testamentaire sans être privé du legs.

Si l’Exécuteur restamentaire ne vouloit point accepter l’exécution testamentaire, ce seroit aux héritiers à se charger de cette exécution, sans qu’on pût faire nommer un autre Exécuteur testâmentaire par la Justice ; c’est ce qui fut Jugé au Parlement de Paris, par Arrest du 8. Avril 1647.

Un legs fait à deux Exécuteurs testamentaires in solidum, & s’ils sont conjuncti re & verbis, accroit à l’autre au cas que l’un des Exécureurs testamentaires vint à ne pas vouloir accepter l’exécutiun testamentaire, mais non si le legs a été fait sigiIlatim & divisément, cela dé pend des termes dans lesquels le legs est conçuSi un Testateur avoit nommé une femme pour Exécûtrice d’un Testament, il faudroit que son mari l’autorifât dans sa gestion, ou du moins qu’à son refus elle se fit autoriser par Justice ; autrement les héritiers du Testateur leroient en droit de la refuser pour Exécutrice testamentaire ; encore la simple autorisation par Justice setoit bien délicate pour assurer un reliquat de compte aux héritiers ou aux Créanciers du Testateur.

Sur la seconde, un Exécuteur testamentaire doit avant toutes choses, & avant de se saisir de rien, faire faire inventaire dans les formes ordinaires, présens les héritiers préfomptifs ou duëment appellez, & en leur absence les plus prochains parens ; dans ce dernier cas on y appelle aussi le Procureur du Roy. ou le Procureur Fiscal du lieu, mais non les Légataires, le tout au dépens de la succession.

Aprés l’inventaire fait & clos, l’Exécuteur testamentaire doit être saisi des meubles & effets mobiliers trouvez aprés le déces du Testateur & revenus des immeubles pendant l’an & jour, à compter depuis le décés du Testateur, pour necomplir, acquitter & payer les legs en essence ou en argent suivant la qualité du legs, sis mieux n’aime l’héritier mettre és mains de l’Exécuteur testamentaire deniers suffisans pour payer les legs, ou les choses qui auroient été léguées en corps ou en essence ; mais les Exécuteurs testamentaires ne peuvent demander d’être saisis des immeubles.

L’exécution testamentaire ne dure qu’un an, à compter du jour du déces du Testateur ; si cependant il y avoit procés au sujet de la validité ou invalidité du Testament, l’année ne commenceroit que du jour du Jugement défini-tif sur le Proces ; car il faut que l’année soit utile.

Les Exécureurs testamentaires peuvent pendant l’an & jour exercer toutes les actions qui tendent à l’exécution testamentaire & à ses fonctions, même faire vendre les meubles meublans, s’il ne se trouve de l’argent comptant suffisant pour payer les legs, sans cependant pouvoir faire vendre les immeubles, ni s’ingerer à payer les dettes de la succession, autres que les legs.

Les Légataires doivent recevoir leurs legs des mains de l’Exécuteur testamentaire ou de l’héritier.

On ne peut obliger un Exécuteur testamentaire à donner caution sur son exécution testamentaire, parce que le Testateur est censé avoir connu la solvabilité de l’Exécuteur restamentaire.

Sur la troisième & dernière difficulté, il est à remarquer que l’Exécuteur testamentaire n’a point d’action pour demander des salaires pour les peines & fonctions de son exécution restamentaire, il peut seulement demander le remboursement des frais qu’il auroit bien & legitimement faits pendant son execution testamentaire ; Arrest du Parlement de Normandie, du 28. Mars 1637.

Mais d’un autre côté l’action que l’héritier & les Légatatres non payez, ont contre lui pour lui faire rendre compte, ne va pas par corps, ni même le paye ment du reliquaire de son compte, autrement personne ne voudroit accepter la charge d’Exécuteur restamentaire, si cependant il y avoit du doi, de la fraude, une mauveise administration affectée ou autre mauvaise manoeuvre de la parr d’un Exécuteur testamentaire, j’estimerois qu’il y auroit en ce cas lieu à la contrainite par corps.