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ARTICLE CCCCXXXI.

P Ersonne âgée de vingt ans accomplis peut donner la tierce partie de son héritage & biens immeubles, soit acquêts, conquêts ou propres, à qui bon lui semble, par donation entre vifs, à la charge de contribuer à ce que doit le donateur lors de la donation, pourvû que le Donafaire ne soit héritier immédiat du Donateur ou descendant de lui en ligne directe.

Toute personne majeure de vingt ans, mâle ou femelle, capable de contracter & disposer de son bien, peur donner par Donation entre vifs le tiers de ses propres & de ses acquêts & conquêts immeubles à qui bon lui semble, autre toutefois qu’à son heritier présomptif & immédiat ou descendant de lui en ligne directe ; de manière qu’on ne peut donner aucune portion de ses immeu-bies à son héritier présomptif & immédiat, soit en ligne directe soit en ligne collaterale ; & comme parle l’article 92. du Reglement de 166s, nul ne peut donner aucune part de son immeuble à ses descendans, mais bien aux descendans de son héritier présomptif & immédiat, soit en ligne directe soit en ligne collaterale ; mais ajoute l’article S3. du même Reglement, on peut donner partie des acquêts à celui qui est seulement héritier aux propres, & partie des propres à celui qui est seulement héritier aux acquêts ; le Parlement de Paris. avoit jugé la même chose dans nôtre Coutume, par Arrest du 23. Avril 1625. rapporté dans le Journal des Audiences, liv. 1. chap. 49. C’étoit une Donation faite par un frère à son frere uterin, d’un propre pûternel, encore bien que ce Donataire fut héritier immédiat du Donateur quant aux meubles & acquets conjointement avec le frère consanguin du même Donateur, qui contestoit la donation.

Ce ne seroit point un avantage indirect fait par un pere à un de ses enfans ; que le cautionnement qu’il auroit fait pour lui ; d’autant que ses cohéritiers dans la succession du pere, auroient une action contre l’enfant que le pere auroit. caurionné, pour leur apporter une décharge du cautionnement.

Or pour sçavoir si le Donataire est héritier immédiat du Donateur ou s’il ne l’est pas, il faut regarder le jour de la mort du Donateur, & non le jour de l’Acte contenant la donation.

Il suffit que le Donateur qui demeure & qui a son domicile en Normandie, ait vingt ans accomplis, pour pouvoir donner le tiers de tous ses immeubles, propres ou acquêts, nobles ou roturiers, situez en Normandie, par donation entre vifs, quand bien même les immeubles duDonateur seroient situez dans une Coûtume où les perfonnes ne sont majeures qu’à vingte cinq ans ; Arrest du Parlement de Roüen, du 4. Fevrier 16b6 ; parce que c’est-là une capacité personnelle, & qui suit la personne du Donateur par tout & en tous lieux : ce qui ôte l’espece présente de la maxime, que les Coûtumes sont réelles.

Il y a un cas où il est permis de donner, quoiqu’on n’ait pas vingt ans aeComplis, c’est une fille mineure de vingt ans qui se marie ; elle peut donner par Contrat de mariage à son futur Epoux le tiers de ses immeubles, pourvûqu’elle soir autorisée par ses parens, sans même que le decret du Juge soir en cela nécessaire, desorte qu’une telle Donatrice ne seroit pas restituable contre cette donation ; Arrest du même Parlement, du 23 Fevrier 1657.

Les furieux, les mineurs de vingt ans, les interdits, soit pour cause de démence ou de prodigalité, ceux qui ont commis un crime capital, & dont l’ac-cusation a été suivie d’une condamnation, les personnes mortes civilement & la femme non aurorisée par son mari, toutesces personnes-là, quoique majeures de vingt ans accomplis, ne peuvent donner aucune portion de leurs biens, me ubles ou immeubles ; de plus la femme en puissance de mari, ou séparée de biens d’avec lui, ne peut, même au rorisée specialement par son mari, donner aucune portion de ses propres, mais seulement le tiers de ses acquets immeubles ; Arrêts du même Parlement, des 30 May & 2y Juillet 1685.

Les Aubains ou Etrangers sont capables de donner entre vifs, mais non à Cause de mort ou par Testament ; ils peuvent aussi recevoir par Donation entrevifs, mais non par Donation à cause de mort ou par Testament.

On considere la capacité du Donateur & du Donataire, au tems de la Donation, & non au tems de la mort du Donateur & du Donataire.

Il faut que les vingt ans qui sont requis dans la personne du Donateur, soient & ecomplis, il ne suffiroit pas qu’ils fussent commencez ; car ce n’est pas ici le cas, non plus que pour les Testamens, que annus inceptas pro completo habetur.

Une Donation entre-vifs, qui excederoit le tiers des immeubles, tant propres qu’ac quêts, ne pourroit pas valider pour l’excedent du tiers par le con-sentément formel & par écrit de l’héritier présomptif du Donateur, cette Donation seroit toûjours reductible au tiers ; il en seroit de même, si l’héritiet avoit ratifié la Donation du vivant du Donateur, parce qu’il est à présumer qu’un consentement ou une ratification de cette qualité ne seroit pas libre ; mais il en seroit autrement, si l’héritier avoit ratifié la donation apres la mort du Donateur.

En Donation entre-vifs, le tiers des immeubles se regle au jour de la Donation, & non au tems du décës au Donateur ; c’est pourquoi le Donataire n’est tenu de contribuer qu’aux dettes contractées par le Donareur au jour de la Donation.

Une Donation entre-vifs du tiers des immeubles du Donateur sans aucune autre dénominatian, ne comprend que le tiers des immeubles que le Donateur possedoit au jour de la Donation ; mais quant à la Donation entre vifs du tiers de ses immeubles, presens & à venir, elle se regle sur les biens du Donateur au jour de son déces, & le Donataire contribuëra aun dettes contractées par le Donateur jusqu’au jour de fonéces, La Donation du tiers de tous les immeubles comprend tous les immeubles qu’à le Donateur, en quelque lieux qu’ils soient situez, pourvû néanmoins que par la Coûtume du lieu où les immeubles sont situez, il soit permis de disposer par Donation entre-vifs jusqu’à la tierce partie : mais si le Donateur avoit donné plus que le tiers de ses immeubles situez en Normandie, l’excedent du tiers ne pourroit être pris sur les autres biens du Donateur, situez dans une Courume qui ne borne point le pouvoir des Donareurs dans les Donations entre-vifs.

Le Donareur ne seroit pas recevable à demander lui-même la réduction de la Donation au tiers de ses immeubles, cette faculté est reservée à ses héritiers & ayans cû-se ; car ce seroit aller contre son propre fait, ce qui résiste aux maximes.

Tonte Donâtion entre-vifs d’immeubles, doit être acceptée par le Donafaire au moment & à l’instant de la Dunation, & en outre être insinuée dans le tems de l’Ordonnance à peine de nullité.

S’il y avoit plusieurs Donations entre vifs d’immeubles, lesquelles excederoient le tiers, les dernieres qui se trouveroient exceder le tiers, seroient nulles ; car quelques Donations qu’ait fait le Donateur, & en quelque nombre qu’elles soient, elles ne peuvent aller qu’au tiers des iniineubles, de sorte que dans ce chs, chaque Donataire ne contribuëra pas à la réduction, il n’y aura que le Donataire, qui malheureusement se trouve Donataire d’immeubles que le Donareur ne pouvoit pas lui donner, en ce qu’il avoit épuisé son pouvoir par les premieres Donations Si le Donateur n’avoit qu’un Fief pour tout immeubles, & qu’il en donnant le tiers du Fief en essence, parce que les Fiefs sont indivisibles ; eil pourroit seulement en demander le tiers en deniers suivant l’estimation qui en sera faite en la manière aecoûtumée.

Par Arrest du Parlement. de Paris, en la quatrième Chambre des Enquêtes, du 11 Août 168s, une Donation entre-vifs de la totalité d’une Terre, dont la valeur excedoit le tiers des biens du Donateur, mais faite à condition que le Donaraire auroit la faculté de payer au Donateur en argent comptant ce qui pourroit exceder le tiers des biens, dont il étoit permis au Donateur de disposer par Donation entre-vifs par cet article, fut confirmée par les offres du Donataire de payer en argent comptant cet excedent ; cet Arrest est rapporté dans le Journal des Audiences, tomt. 5. liv. 1. chap. 15.