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ARTICLE CCCCXXXIV.

L E pere & la mere ne peuvent avantager l’un de leurs enfans plus que l’autre, soit de meubles ou d’héritage, pour ce que toutes Donations faites par les pere ou mère à leurs enfans, sont réputées com-me avancement d’hoirie, réservé le Tiers de Caux.

Il n’est pas permis aux pere, mère, ayeul, ayeule ou autre ascendant, d’avantager par Donation entre-vifs, ou à cause de mort ou par Testament, directe ment ni indirectement, un de leurs enfans ou petits enfans, & descendans en ligne directe, habiles à succeder, plus que l’autre, soit de meubles, soit d’immeubles, tels qu’ils soient ; ils sont obligez de garder l’égalité entre leurs en-sans & descendans d’eux en ligne directe.

Toute Donation de meuble ou d’immeuble, faite par pere, mère, ascendant à leurs enfans, ou à l’un d’eux, est réputée faite en avancement d’hoirie ; c’est pourquoi il faut que le Don ataire rapporte à la masse de la succession tout ce qui qui a été donné, en cas que la chose donnée excede la porrion héreditaire du Donataire, soit qu’il accepte & vienne à la succession comme héritier & comme par-tageant, ou qu’il y renonce ; car dans notre Coûtume un Donataire en ligne directe ne peut pas se tenir au don qui lui a été fait, même pur Contrat de mariage, par son père, sa mere ou autre ascendant, pour se dispenser de rapporter.

Tout ce qui est donné en héritage & immeuble en ligne directe, est un propre en la personne du Donataire, & non un acquét.

Les fruits & joüissances d’héritages, & les arrerages de rentes qui auront été données en ligne directe, les pensions & nourritures ne se rapportent point ; Arrests du Parlement de Roüen, des 3 Fevrier & 27 Mars 1622, 28 Juin 623 & 9 Mars 1638, & art. 95. du Reglement de ré6s ; mais suivant ce même article du Reglement, ce qui en reste du lors de la succession échûë, ne peut être exigé par celui auquel le don avoit été fait, même en saveur de mariage, sinon la dernière année échüé au tems du décës du Donareur.

Il est permis au pere ou à la mere, en mariant une de leurs filles, de lui donner plus qu’à une autre fille, si les filles ne sont point héritieres du Donateur ou Donatrice, ce qui arrive lorsque ces filles ont des frères ; car dans ce cas là les pere & mere ne sont point tenus de garder l’égalité entre leurs filles.

La Donation ou remise faite par pere ou mere ou autre ascendant, du droit de Treizième ou autres droits Seigneuriaux utiles, ni la dépense faite par le pere ou la mere où autre nscendant pour la nourriture, entretien & éducation au College ou ailleurs, de l’un de leurs enfans, ne se rapportent point ; mais les habits de noces sont sujets à rapport.

Si un pere ou une mere avoit payé & acquitté les dettes de l’un des enfans, cet enfant seroit obligé d’en tenir compte à ses co-heritiers jusques à conenrrence de ce que les dettes acquittées excedent sa portion héréditaire, quand mé-me il renonceroit à la succession du donateur ; & s’il venoit à partage, il faudroit tout rapporter ou moins prendre ; Arrest du même Parlement du 1a May. 1638.

Le rapport n’a lieu qu’entre co-héritiers, ainsi les filles qui ne sont point héritieres, & qui n’ont point été réservées par leur pere ou mêre à leurs successions, ne sont point obligées de rapporter ce qui leur a été donné en mariage, & ce qui leur à été payé en deniers comptans, quoique ces deniers excedent de beaucoup leur légitime, qui auroit été leur mariage avenant si elles n’avoient pas été mariées du vivant de leur pere ou mere : mais si la somme qui avoit été promise en dot à la fille par ses pere & mere, ou par l’un d’eux, étoit encore duë lors de la succession ouverte du pere ou de la mere, qui auroit fait la promesse, ob si les pere & mere avoient donné à leurs filles des héritages ou autres immeubles en dot, excedans leur légitime, leurs freres pourroient faire ré duire cet avantage à la légitime des filles, qui est le tiers de la succession ; & en ce cas les soeurs seroient tenuës de rapporter l’excedent, quand même elles renonceroient à la succession, & qu’elles se tiendroient à leur don.

Le rapport à lieu entre les filies, lorsqu’à défaut de mâles elles sont seules heritières de leur pere ou mere, soit qu’elles ayent été mariées du vivant de leur pere ou mere, ou non ; & même celles qui auroient été mariées du vivant des pere & mere, & dotées, ne pourroient en ce cas renoncer à la succession, & s’en tenir à leur don ; il faudroit qu’elles rapportassent leur dot & leur avantage à la succession pour ce qui excederoit leur portion héreditaire : ce qui n’auroit pas lieu si les soeurs au temps de leur mariage, avoient des freres qui seroient depuis décede sans enfans avant les pere & mère ; car les soeurs mariées ne seroient point obligées de rapporter ce qui leur avoit été donné en mariage, pour être partagé entre les soeurs leurs co-héritieres avec les autres biens de la succession ; elles pourroient même renoncer à la succestion, & s’en tenir à leur don ; Arrêt du même Parlement du 1. Mars 1678.

Un héritage rétiré par le pere oi la mère au nom de l’un de leurs enfans, doit être mis en partage avec les autres biens de la succession ; & même si un pere ou une mere avoit renoncé à une suecession pour la faire tomber à un des enfans plutût qu’à l’autre, les autres enfans y prendroient partage, parec que ce seroit là un avantage indirect.

L’heriner par benefice d’inventaire n’est pas moins obligé au rapport, que l’héritier absolut ou pur & simple.

Le petit fils venant à la succession de son ayeul, est tenu de rapporter ce qui n été donné à son pere ou à sa mere Donataire, nonobstant qu’il renonce à la succession de son pere ou de sa mére.

Des créanciers ne peuvent demander de rapport ; Arrest du même Parlement, du S Ianvier té60. ni encore moins les Seigneurs de Fief dans le cas de deshérance ; parce que le rapport n’a lieu qu’entre co-héritiers, & qu’il n’a été introduit qu’en faveur de co-héritiers, afin de conferver l’égalité entre eux.

Une femme n’est point obligée de rapporrer ni précompter le don mobil que ses pere & mere en la mariant auroient donné à son mari, Les Offices donnez par les pere & mère se rapportent sur le pied de leur juste valeur au tems de l’Acte de Donation, & non au tems de la mort de celui de cujus bonis agitur ; Arrests du même Parlement, des 2sFevrier 1669. & 7 Mars 1679.

Si le Donataire lors du partage a en sa possession les héritages & autres immeubles à lui donnez, il est obligé de les rapporter en essence au partage, ou moins prendre en autres héritages de la succession de pareille valeur & Bonté, mais en faisant ce rapport, il doit être remboursé par ses cochcritiers des Impenses utiles & nécessaires ; aurrement il seroit seulement obligé de rapporter l’estimation des héritages & immeubles donnez, eû égard au tems du parrage, déduction préalablement faite des impenses, augmentations & améliorations : mais à l’égard des meubles & sommes mobiliaires, on ne les rapporte point en essence, le Donataire en tient compte à ses co-héritiers, & les précompre sur sa portion héreditaire Si la chose donnée se trouvoit aliénée lors de la succession ouverte, non seulement le Donataire venant à la succession, ne seroit pas tenu de la rapporter en essence, mais encore les cohcritiers seroient mal fondez à inquièter les acquereurs dans leur acquisition ; tout ce que les cohéritiers pourroient demander au Donataire, seroit qu’il soit tenu d’en précompter la valeur & moins prendre, le tout jusques à duë concurrence de sa portion héréditaire ; & si sa portion hereditaire étoit moindre, il rapporteroit à ses coheritiers l’excedent : Or pour regler la juste valeur de cet héritage & immeuble, il faudroit suivre l’estimation donnée par le Donateur par l’acte de donation, à moins que les cohé-ritiers ne fissent évidemment voir que cette estimation étoit par sa modicité un avantage indirect fait au Donataire ; ou bien on suivroit le prix du Contrat de vente & d’aliénation, ou on feroit une estimation sur le pied de la valeur au jour du daces,

Quoique les pere & mere ne puissent avantager un de leurs enfans plus que Pautre, néanmoins dans la Coûtume particulière du pays de Caux, il leur est permis de donner à l’un de leurs enfans puinez le tiers de leurs biens au préjudice des autres puinez, ce don est cependant un avancement d’hoirie ; cela si vrai, que le donataire doit contribuer aux dettes de la succession pour son tiers ; mais c’est que cette Coûtume a voulu laisser cette liberté aux pere & mère, le puiné donataire ne seroit pas néanmoins tenu des dettes personnellement envers les créanciers, mais seulement hypotecairement ; Arrest du mé-me Parlement, du 2 Decembre 1650. il est pourtant certain dans nôtre Coutume que tous les coheritiers sont tenus des dettes de la succession solidaire ment, quand l’un d’eux n’auroit que des meubles & effets mobiliers dans son lot, ou que toute la succession ne consisteroit que dans les meubles & effets mobiliers ; mais ce qui a pû donner lieu à l’Arrest, ce fut qu’on régarda ce puiné comme un simple donataire, qui par consequent ne pouvoit être tenu des dettes que sur la chose donnée, & non sur ses biens personnels.