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TITRE XVIII. DES RETRAITS ET CLAMEURS DE BOURSE.

ARTICLE CCCCLI.

L’On peut se clamer en l’héritage vendu, en quatre manieres, à droit de lignage, droit Seigneurial, droit conventionnel, & à droit de Lettre luë.

Le Retrait ou Clameur de Bourse en general, est une faculté accordée par la Coutume aux parens lignagers, aux Seigneurs de Fief, à l’acquereur & au propriétaire, de retirer un fond aliéné pour en devenir seul propriétaire.

De-là il résulte qu’il y a quatre sortes de Rétraits, le Retrait lignager, le Retrait féodal, le Retrait conventionnel, & le Retrait à droit de Lettre Iuë.

Le Retrait lignager, est la faculté donnée à un parent de retirer un héritage ou autre immeuble vendu & aliéné par son parent à prix d’argent ; on dit aussi Clameur lignagere.

Le Retrait ou Clameur féodale, est la faculté donnée au Seigneur de Fief de retirer un héritage noble ou roturier, vendu & aliéné à prix d’argent par le Vassal ou Censitaire.

Le Retrait conventionnel, est la faculté qu’a le vendeur, par une clause du Contrat de vente, de retirer l’héritage ou autre immeuble par lui vendu & aliéné, dans le tems marqué par le Contrat, ou celui preserit par la Coûtume Le Retrait à droit de Lettre luë, est la faculté donnée au tiers détempteur d’un héritage ou autre immeuble par an & jour par un Contrat aurentique, de retiter cet héritage & immeuble dont il a été dépossedé par decret pour les dettes de son vendeur, antérieures à son acquisition, en remboursant par lui le prix de l’adjudication, frais & loyaux coûts.

Il y a cette difference entre le Retrait conventionnel & le Retrait à droit de Lettre Iué, que celui-là dépend de la convention des contractans, & celuici dépend de la possession du tiers détempteur pendant l’an & jour ; car si la nossession de cet acquereur est au dessous de ce tems-là, la faculté de retirer à titre de Lettre luë, lui est fermée.

Il n’y a point de Retrait lignager, féodal & à droit de Lettre luë en meubles & choses mobiliaires, mais seulement en héritages & choses immeubles ; quant au Retrait conventionnel, rien n’empécheroit qu’un vendeur de meubles ne pût convenir avec l’acheteur qu’il lui seroit permis de les retirer dans un certain tems en lui rendant le prix de la vente, frais & loyaux couts.


ARTICLE CCCCLII.

T Out héritage ou autre chose immeuble, soit propre ou acquêt, vendu par deniers ou fieffé par rente raquitable à prix d’argent, peut être rétiré tant par le Seigneur féodal immédiat, que par les lignagers du vendeur jusqu’au septième degré, icelui inclus, dedans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat.

Cet Article ne parle que du Retrait lignager & du Retrait féodal ; & la premiere observation qu’il raut faire sur le texte de cet Article, est que quoiqu’il soit fait mention du Retrait féodal avant le Retrait lignager, néanmoins il n’y point de doute que le Retrait lignager est présérable au Retrait féodal.

Pour donc donner lieu au Retrait lignager ou au Retrait féodal, il faut ; 10 Que ce soit un héritage ou autre immeuble, propre ou acquét, noble ou roturier, & non un meuble ni chose mobiliaire ; 26. Que ce soit un héritage ou autre chose immeuble, qui soit vendu à deniers & prix d’argent, numerata pecuniâ, au tems de la vente ou en autre tems, ou aliéné par fieffe ou autre rente rachérable & amortissable en deniers & à prix d’argent ; 30. Que celui qui retire par Retrair lignager, soit au moins parent & lignager du vendeur au septième de-gré de parenté inclusivement, & que le Seigneur qui retire par Rettait féodal, loit le Seigneur immédiat du Fief ou de l’héritage roturier qu’il veut retiret ; 40. Que le Retrait lignager ou féodal soit intenté dans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat de vente ou de fieffe : toutes conditions éga lement essentiellies à ces deux Retraits.

Il n’y a point d’ouverture au Retrait lignager ni au Retrait féodal, à moins que la vente ne soit parfaite & valable, sans néanmoins que l’acquereur puisse opposer au Retrayant la nullité ou l’inexecution du Contrat de vente ; parce que par le Retrait on lui rembourse le prix qu’il a payé, & tous les frais & soyaux coûts, & par là on le met hors d’interét, ixdemnis abit : Mais dés que la vente est faite & parfaire, les contractans ne peuvent réioudre le Contrat de vente au préjudice du Retrait, quoique le prix de la vente n’ait point été payé, & que l’Acquereur ne fût pas en possession de l’héritage ou immeubie par lui ncquis, Comme la simple promesse de vendre n’est pas une vente, aussi ne peut-elle pas donner lieu au Retrait : Le Vendeur & l’Acquereur ne peuvent empécher par aucune paction ni convention le Retrait.

Les rentes hipoteques ou constituées à prix d’argent, ne sont point clamables ou retrayables, art. 11s du Reglement de rSbé, ni pareillement les immeubles par fiction ni les Offices non héréditaires ; mais à l’égard des Offices Domaniaux, comme sont les Notariats, Tabellionnages, Greffes, Sergenteries & autres Offices héreditaires, ils sont retrayables par Retrait lignager ; Arrêts du Parlement de Roüen des 21 l’anvier 1651 & 27 Juin 1653. La même chose à été jugée pour les Greffes de Normandie par Arrêt du Parlement de Paris du 22 Fevrier 16yS, rapporté dans le Journal des Audiences, 1om. 4 liv. 1. cbap. 1.

Les dixmes inféodées & possedées par un laic, & par lui venduës à un autre laic, sont rétrayables, mais non lorsqu’elles son : venduës à l’Eglise ; d’au-tant que par ce moyen elles retournent à leur premiere origine.

Une rente constituée par le pere ou la mere pour la dot de leur fille, ou depuis devenuë foncière par quarante ans, est sujette au Retrait si la fille ou ses héritiers la vendent ; Arrest du même Parlement, du 2o Novembre 1662. mais l’héritage ou la rente baillée par pere ou mêre à leur fille en payement de sa dot promise, ou par un frere pour la dot de sa seur, n’est point retrayable ; Arrest du même Parlement, du 5 May 1658.

Le Retrait n’a point lieu dans les adjudications par licitation entre co-heritiers, lorsque l’un des CO-héritiers est adjudicataire de l’héritage licité ; mais en Normandie les licitations sont fort rares, pour ne pas dire inconnuës.

Les héritages donnez à fieffe à titre de rente rachétable, sont retrayables ; mais non si elles sont faites à rente perpétuelle & irrachetable, à moins que dans le Contrat de fieffe il n’y eût argent payé ou promis ; mais à l’égard des rentes créées & constituées par les Contrats de fieffe, elles ne sont point sujettes au Retrait, soit qu’elles soient non-rachetables ou rachetables.

L’usufruit d’un immeuble & les droits universels & héréditaires, sont retrayables, aussi bien que les navires, moulins & pressoirs dans les cas où ces sortes de biens sont reputez immeubles dans nôtre Coûtume.

Le Contrat d’échange est retrayable, lorsqu’il y a soulte de deniers ; quelque petite qu’elle soit.

L’acquereur ne peut obliger le Retrayant lignager de retirer tous les héritages & immeubles contenus au Contrat de vente, quoique vendus par un seul & même prix énico pretio, s’il y a dans le Contrat de vente des héritages & immeubles qui ne soient point de son lignage, & ausquels il n’a point droit de Retrait, art. 113 du Reglement de 1ô8s ; comme aussi le Seigneur féodal n’est tenu que de retirer les héritages & autres immeubles qui sont en la mouvance de son Fief, & à cause duquel il fait le Rotrait féodal, & non les héritages relevans des autres Fiefs qui sont en sa main, art. 11a du même Reglement. Mais lorsque par un même Contrat & par un même prix il y a vente de meubles & d’im-meubles, le tour doit être rétiré, quand même les meubles, comme chaudieres, euves & autres ustenciles, ne tiendroient point à fer ni à elouds, ou ne seroient point scellez en plâtre dans l’héritage retiré, parce qu’en ce cas il ne seroit pas raisonnable de diviser & partager l’acquisition de celui qui a acquis Phéritage & les meubles unoeodemque contractie & unico pretio.

Lorsque plusieurs héritages sont vendus par unmême Contrat, le Rétrayant lignager est tenu de les retirer tous, pourvû qu’ils soient tous de son lignage, quand même il y auroit diversité de prix par le Contrat de vente ; il faut dire la même chose du Retrait féodal, si tous les heritages vendus sont de la mouvance ESPERLUETTEfdirecte du Seigneur.

Le parent lignager peut former le Retrait lignager jusqu’au septième degré de parenté ine lusivement ; car au-de-là on ne connoit plus dans nôtre Coûtume de parenté par rapport aux effets civils, rant en succession qu’en Rerrait lignager.

Le Retrait lignager est préférable au Retrait féodal ; mais le dernier est cessible, au lieu que le premier ne l’est point.

Un mari peut intenter le Retrait lignager pour & au nom de sa femme, sans même avoir besoin de la procuration de sa femme à l’effet de la demande en Retrait : mais la femme ne pourroit pas intenter sa demande en Rétrait, méme de son propre héritage, à plus forte raison de l’héritage du côté & ligne de de son mari, sans être préalablement autorisée par son mari, à peine de nullité de son action, encore que le mari l’eûr depuis autorisée & approuvé, & qu’il eût ratifié ce qu’elle auroit fait.

Un pere peut à la vérité retirer pour ses enfans mineurs, mais non pour ses enfans majeurs.

Les Engagistes du domaine du Roy, ni les Gens de main-morte ne peuvent retirer les héritages mouvans de leurs Fiefs ; art. 99. du Reglement de 1666.

Si le Seigneur majeur, ou son Tuteur s’il est mineur, reçoit le Treizième par les mains de l’acquereur, il est exelu du Retrait féodal ; Arrest du même Parlement, du 30. Avril 1632 ; mais non s’il avoit été recu par son Fermier ; autrement le Seigneur en affermant droit de Treizième, le priveroit du Retrait féodal, ce qu’on ne peut dire, Le Retrait lignager se regle en Normandie par le même droit que les successions, de sorte que celui qui est préféré dans les successions par la proximité de degré de parenté & de lignage, est aussi préféré dans le Retrait lignager, soit qu’il s’agisse d’un propre vendu ou d’un acquet & conquêt, & le Retrait lignager n’a lieu que jusqu’au septième degré de parenté, icelui septième degré inelus, aprés lequel degré on ne peut retirer à droit lignager, comme on ne peut plus succeder.

Ce n’est pas assez d’être parent du vendeur pour intenter le Retrait lignâger, il faut en outre être du lignage d’où l’héritage & immeuble vendu, procede, & être capable de succeder ; ainsi les personnes mortes civilement, les Religieux Profez, les batards & autres personnes inhabiles à succeder, ne peuvent former de demande en Retrait : C’est pour cette raison qu’un Aubain ou Etranger ne pourroit retiter par Retrait lignager, mais il le pourroit à droit féodal, parce qu’il a cette faculté jure feudi.

Les parens lignagers d’une personne dont les biens ont été confisquez par la qualité de sa condamnation, ne peuvent retirer les héritages confisquez, & qui ont été depuis vendus par confiscation, ou qui ont été decrerez, venduë. & adjugez par decret ; Arrest du même Parlement, du 12. May 1657.

La qualité de caution ou garent de la vente, ou de Greffier, Notaire ou témoin d’une vente, volontaire ou forcée, ni la qualité de Tuteur, ne peut ex-glure ces personnes-là du droit de Retrait.

Le parent le plus proche exeiut le parent le plus éloigné en matière de Retrait lignager, à moins que le parent le plus proche n’eût renoncé au droit de Retrait ; ce qui lui est permis de faire en faveur du vendeur & de l’acque reur.

Celui pour les dettes duquel l’héritage a été vendu par decret, ne peut intenter de demande en Retrait lignager pour raison de cet héritage vendu par decret ; art. 111. du Reglement de 1688 : mais son héritier, comme l’héritier de tout autre vendeur, peut retirer par retrait lignager l’héritage vendu ; art. 112. du même Reglement.

La qualité de vendeur n’empéche point quele vendeur ne puisse intenter action en Retrait lignager au nom de son enfant mineur, en qualité de son père & son Tuteur naturel, sans même aucun avis de parens.

On peut intenter une demande en Retrait au nom d’un enfant conçu, quoique non né au tems de l’action.

Les filles, quoique non héritieres à cause qu’elles ont des freres vivans, peuvent user de Retrait lignager pour les héritages vendus par leur pere, mere, frères, soeurs ou autres parens jusqu’au septième degré inclusivement, par-ce qu’elles ont la capacité de devenir heritieres si leur freres mouroient sans enfans.

Le tems pour intenter une demande en Retrait, ne dure que l’an & jour à comprer du jour de la lecture & publication du Conttat de vente ou de fieffe, aprés lequel rems on est non recevable en cette demande ; & même les absens mineurs & tous autres privilegiez, ne sont point restituables contre cette prescription ; parce qu’elle court tant contre les absens, mineurs & autres privilégiez, que contre les majeurs.

Il faut que l’Exploit qui contient la demande en Retrait, soit fait dans les formes prescrites par la Coûtume & l’Ordonnance, à peine de nullité de l’Exploit, daquelle nullite feroit decheoir du Retrait ; car en cette matiere, qui cadit siilabâ, cadit à toto.

La demande en Retrait, qui seroit formée par un Procureur ou Mandataire, fondé d’une procuration speciale ad boc, ne seroit pas moms valable que si elle avoit été formée par le Retrayant même.

Si les Léritages vendus sont situez en diverses & différentes Paroisses, & que la lecture du Contrat n’ait pas été faite dans tous ces lieux, ou qu’elle air été faite en divers tems, on est reçû à retirer les héritages situez dans les Paroisses où la lecture n’a pas été faite, & où par consequenr l’an & jour n’est point encore passé à cet égard, quoique l’an & jout fût passé pour les autres immeubles & héritages vendus ; car quant aux immeubles, dont l’an & jour ne sera point passé, ils seront retrayables, Arrest du même Parlement du 1a Décembre 3653, & non les autres héritages.

Le Retrayant peut se départir & se désister de sa demande en Retrait, encore qu’il y ait Sentence qui juge le Retrait bon & valable, sans que l’acquereur puisse l’obliger à prendre la chose retirée, & à lui rendre le prix, frais & loyaux Coûts, Les héritages, Terres & autres immeubles vendus au Roy, ne font pas moins siijets au Rerrait que les autres ; cependant le Roy ne peut user de Retrait séodal, autrement il pourroit mettre en la main toutes les Terres mouvantes de fon Domaine Royal.

Un parent lignager peut retirer, nonobtant qu’il ait renoncé à la succession du vendeur, ou qu’il ait éte exhéredé par le vendeur, parce qu’il est toûjours vrai de dire qu’avant ces faits, il avoit la capacité naturelle & legitime de succeder.

Le jour de la lecture & publication du Contrat de vente est compris dans l’an & jour pour la demande en Retrait.

Il ne faut pas en finissant cet Article perdre de vûë deux choses dans notre Coûtume ; l’une que le Retrait lignager n’a pas moins lieu dans les acquêts que dans les propres ; l’autre que les héritages rorutiers sont sujets au Retrait féodal comme les héritages nobles, & que le Retrait lignager ou féodal n’a pas moins lieu dans les ventes & adjudications par décret, que dans les ventes volontaires.

Les héritages & immeubles vendus par décret, sont retrayables sur l’Adjudicataire.


ARTICLE CCCCLIII.

E T si lecture & publication n’en a été faite, le Contrat est clamable dans trente ans, en remboursant le prix & loyaux coûts ; desquels loyaux coûts le Clamant baillera caution s’ils ne peuvent être promptement liquidez, pour les Contrats qui seront faits à l’avenir.

S’il n’y a point eu de lecture & publication du Contrat de vente ou de fieffe, ou qu’elie n’ait pas été bien faire, l’héritage ou autre immeuble sujet à Rerrait, est clamable ou retrayable pendant trente ans du jour du Contrat de vente ou de fieffe, soit à droit lignager, soit à droit féodel, parce qu’il est à présumer que le Retrayant n’a point eû connoissance du Contrat ; car il n’y a que la lecture & la publication du Contrat, qui donnent le notification préfumée au Contrat au sujet du Retrait ; de manière que des que le Contrat n’a point été lû ni publié, ou bien & dûëment lû & publié, l’an & jour du Retrait ne courre point, l’action en Retrait durera trente ans du jour du Contrat, & le Rerrayant sera, reçû au Retrait en remboursant le prix & les loyaux coûrs, où en offrant de les rempourser suivant la liquidation qui en sera faite en la manière accoutumée ; mais jusqu’à ce que les frais & loyaux coûts soient liquidez, l’Acquereur pourrz obliger le Retrayant à lui donner caution à cet égard ; le Retrayant fera en outre tenu de rembourser le Treizième & droit de Relief à l’Acquereur, quand même l’Acquereur n’en n’auroit point payé par son privilege & exemption, ou que le Roy ou autre Seigneur lui en eût fait remise.

La lecture & la publication du second Contrat de venté ou de fieffe, ne purge point le défaut de lecture & publication du premier Contrat, & l’héritage vendu par le premier Contrat, est retrayable & clamable pendant trente ans ; Arrest du Parlement de Normandie, du 19 Juin 1669.

S’il y a des nuilitez dans la lecture & publication du Contrat, c’est comme s’il n’y avoit point eu de lecture ni de publication, les héritages seront clamables ou retrayables pendant trente ans, sans même que ces nullitez soient purgées par le decret fait des mêmes héritages sur l’Acquereur, & le Rétrait pourra être exercé sur l’Adjudicataire par decret sur le fondement de ces nullitez ; Arrest du même Parlement, du 28 Iuin 1629.

Un Retrayant ne peut ossrir en compenfation ce qui peut peut lui être dû par l’Acquereur, soit pour le remboursement du prix principal de la vente, soit pour le payement des frais & loyaux coûts, Si le Vendeur avoit accepté une rente pour le prix de l’héritage & immeuble vendu, l’Acquereur pourroit forcer le Retrayant à rembourser cette rente au vendeur ; comme pareillement si l’Acquereur par le Contrat de vente avoir constitué sur lui une rente pour le prix ou partie du prix de la vente, le Retrayant seroit tenu de la rembourser au Vendeur, à moins que Vendeur ne prit le Retrayant pour homme & pour débiteur.


ARTICLE CCCCLIV.

L Es héritages ou rentes venduës dans le Ponteaudemer, Pont-Levesque, Lisieux, Caen, Coutances, Avranches & autres endroits, esquels il n’y avoit que vingt-quatre heures de clameur, pourront être doresnavant retirez dans les quarante jours du jour de la lecture & publication du Contrat.

Avant la réformation de la Coutume, il y avoit plusieurs lieux où le tems dû Retrait

Retrait, soit lignager soit féodal, n’étoit que de vingt-quatre heures du jour de la lecture & publication du Contrat, relles étoient les Villes du Ponteaudemer, Pont-Levesque, Lizieux, Caën, Coûtances, Avrancles & quelques autres endroits de la Province de Normandie ; mais depuis la reformation de la Coûtume, l’action en Retrait dans toutes ces Villes & endroits a été prorogée jusqu’à quarante jours à compter du jour de la lecture & publication du Contrat ; de manière que dans toutes ces Villes & endroits le Retrait dure quarante jours du jour de la lecture & publication du Contrat, & non pendant an & jour ; car s’il n’y avoit pas eû de lecture & publication du Contrat, ou que la lecture & publication eût été mal faite, le Retrait dureroit trente Sans ; il n’est pas douteux que les Fauxbourgs de ces Villes sont comptis dans la disposition de cet Article, mais non les héritages & immeubles qui seroient hors ces Villes & Fauxbourgs, quoique dépendans du Bailliage & de la Vicomté de ces Villes.

Il n’y a que les rentes foncieres non rachétables qui soient lujetes à Retrait, & non les rentes constituées à prix d’argent, quelques aucitnnes qu’e les fussent dans la famille.


ARTICLE CCCCLV.

L A lecture se doit faire publiquement & à haute voix, à jour de Dimanche, issûë de la Messe Paroissiale du lieu où les héritages sont assis, en la presence de quatre témoins pour le moins, qui seront à ce appellez, & signeront l’Acte de la publication sur le dos du Contrat, dont le Curé ou Vicaire, Sergent ou Tabellion du lieu, qui aura fait ladite lecture, est tenu faire Registre ; & n’est reçû aucun à faire preuve de ladite lecture par témoins ; pourront néanmoins les Con-tractans pour leur sûreté faire enregistrer ladite lecture au Greffe de la Jurisdiction ordinaire.

Cet Article contient la forme dans laquelle la lecture & la publication du Contrat de vente ou de fieffe à rente rachétable, doivent être faites ; 1o. Elle doit être faite à jour de Dimanche, & non à autre jour de Fête, tel qu’il soit 3 20. a l’issuë de la grande Messe Paroissiale, & non de Vépres ; 30. a haute & intelligibie voix, le peuple fortant de l’Eglise ; 47. Dans toutes les Paroisses oû il y a des héritages & immeubles ; 56. En presence de quatre témoins au moins, à ce appellez, qui signeront l’Acte de la lecture & publicetion, avec le Curé, Vicaire, Sergent, Notaire ou Tabellion qui aura fait la lecture & publication du Contrat, & l’Acte de la lecture & publication, sera mis au dos du Contrat, & en sera fait Registre par celui qui aura fait la lecture & publication, avec ention des noms des témoins : & même l’Acquereur pourra pour sa plus grande suréré faire enrégistrer la lecture & publication au Greffe de la Jurisdiction ordinaire.

Il n’y a, suivant cet Article, que le Curé, Vicaire, Notaire, Tabellion ou Sergent du lieu où les héritages & immeubles sont situez, qui puissent faire cette lecture & publication, & non d’autres personnes publiques ou non ; parce que la Coûtume désigne ces quatre personnes specifiquement ; toutes autres personnes seroient étrangeres pour faire & remplir cette lecture & publication ; le Juge ne pourroit pas même en commettre in autre à moins que par quelque accident imprévû, il ne se trouvât aucune de ces personnes sur le lieu, si on prenoit un autre que celui specifiquemeut marqué & désigné par cet Article de nôtre Coûtume, la formalité requise par la Coûtume n’auroit point été remplie, la lecture & publication du Contrat seroient nulles, & le Retrait seroit prorogé à trente ans du jour du Contrat. Mais par Edit du mois de Juillet 1677, & autres Edits & Déclarations du Roy, ce pouvoir est aujourd’hui attribué aux seuls Notaires & Tabellions du lieu,

L’Edit du mois de Décembre de 1703, touchant les Insinuations Laiques, ne pourroit pas suppiéer la formalité preserite par cette Article ; de maniere que si un Contrat de vente avoit été insinué, mais non lecturé ni publié dans la forme de cet Article, l’an du Retrait ne commenceroit à courrir que du jour de la lecture & publieation, & non du jour de l’Iusinuation.

C’est sur ce principe, que par deux Arrests du Parlement de Paris, l’un du 6 Mars 1221, l’autre du 11 Août 1722, il a été jugé que l’Edit du mois de Décembre 373 ne suppléoit point la formalité renuise par la Coûtume de Foitou, de la notification & insinuation d’un Contrat de vente aux Greffes des Justices Seigneuriales où les biens vendus sont situez, pour faire courrir l’an du Retrait ; il y a un troisième Arrest rendu dans la même Coûtume, du 29 Juillet 4729.

La preuve testimoniale n’est point tecevable, pour prouver que la lecture & publication du Contrat ont été faites, ou qu’elles n’ont pas été faites quoiqu’il en fût fait mention dans les Actes, il faudroit en venir à l’inscription de faix, Le seul enregistrement du Contrat au Greffe de la Justice ordinaire, avec mention qu’il a été lû & publié, feroit preuve de la lecture & publication, si la grosse du Contrat, au dos de laquelle mention a été faire de la lecture & publication, étoit perduë ou adhirée.

La Justice ordinaire dont parle cet Article, est tant la Royale que la Subalterne ou Seigneuriale.

Toutes ces formalitez doivent être gardées & observées dans cette lecture & publication, & non par des Actes équipoians, sans quoi la demande en Retrait sera recevable pendant trente ans ; c’est pour cette raison qu’il a été jugé, 1o, Qu’ayant été obmis de faire mention sur la grosse du Contrat que la lecture & publication du Contrat avoient été faites à l’issûé de la Messe Paroissiale, Il y avoit lieu au Retrait aprés l’an & jour de cette lecture & publication, Arrest du Parlement de Roüen, du 18 Avril 16543 20. Que la lecture & publication faites au Trone, étoient nulles, Arrest du même Parlement du 26 Fevrier 1618336. Que la lecture & publication faites en une Paroisse, n’empéclent point qu’aprés l’an & jour on ne puisse retirer les héritages & immeubles situez en autres Paroisses où la lecture & publication n’ont point été faites, Arrest du même Parlement du 14 Décembre r655 ; 47. Que les rémoins qui ont signé, doivent être dénommez dans l’Acte de la lecture & publication, Arrest du méme Parlement du 1s Novembre 1656 ; 50. Que la lecture & publication ayant été faites par autre Curé, Vicaire, Notaire, Fabellion ou Sergent, que ceux du lieu où les héritages & immeubles sont situez, étoient nulles ; Arrest du méme Parlement du 3 Janvier 1é18.

Les femmes ni les Religieux ne pourroient servir de témoins en cette partie.

Ce ne seroit pas une nullité dans la lecture & publication, sous prétexte qu’elles auroient été faites par un Curé, Vicaire, Notaire, Tabellion ou Sergent, qui se trouveroient parens de l’acquereur, ou signées par quelques te-moins qui feroient ses parens, il faut néanmoins que ces témoins soient gens idoines & capables de faire foi en Iustice.

On appelle Sergent du lieu, le Sergent de la querelle, c’est-à-dire, le Sergent ordinaire, Royal ou de Seigneur du lieu où les choses contentieuses sont situées ; il ne suffiroir pas qu’il eût son domicile dans la paroisse du lieu où les hé-ritages & immeubles seroient situez, il faut qu’il ait une espece de jurisdiction. sur les choses contentieuses, On ne pourroit demander des garenties contre un Curé ou Vicaire qui auroit fait des nullitez dans la lecture & publication au Contrat, si dolus absit ; Arrest du même Parlement, du 3. Aoust 1650. il faudroit dire le contraire du Notaire, Tabellion ou Sergent, parce que ce sont des Officiers qui doivent sçavoir remplir les formalitez dans les Actes & choses qu’ils font, dépendantes de leur mi-nistere ; mais on auroit bien de la peine à reussir dans une pareille demande en garentie, à moins qu’il ne fût justifié évidemment qu’il y a du dol personnel dans son fait.


ARTICLE CCCCLVI.

E T où le corps des Eglises seroit hors le ressort de Normandie, & les héritages assis dans ledit ressort, la lecture se peut faire au prochain marché des choses venduës ou en la Jurisdiction ordinairedont lesdites terres & héritages vendus, sont dépendans.

Cet Article prévient une difficulté, dans le cas que la lecture & publication du Contrat eussent été faites à l’issuë de la Messe paroissiale d’une Eglise située hors Normandie ; dans cette occasion la Coûtume veut que l’acquereur puisse faire lire & publier son Contrat au prochain marché, ou à l’Audlience de la Jurisdiction ordinaire dont les héritages vendus, dépendent, laquelle formalité est en ce cas essentielle ; deforte que la lecture & publication qui seroient faites en une Eglise dont le corps seroit hors le ressort de Normandie, seroient nulles ; parce que cette formaliré est particuliere & préscrite par la Coutume de Normandie ; c’est pourquoi le mot de pezs, dont se sert notre Article, n’est pas seulement de faculté, mais de necessité,


ARTICLE CCCCLVII.

L’An & jour du Retrait & Clameur court aussi bien contre le mineur que contre le majeur, sans esperance de restitution.

Par la maxime que les préscriptions statutaires & coutumieres courent tant contre les mineurs que contre les majeurs, sans espèrance même de restitution, l’an & jour du Retrait lignager ou féodal coure tant contre les mineurs que contre les majeurs, sans qu’il y ait lieu à la restitution à cet égard, faul le recours des mineurs contre leurs Tuteurs ou Curateurs.

La même chose a lieu contre les furieux, insensez, interdits, ignorans, bannis, esclaves, prisonniers de guerre ou autrement, ou absens pour quelque cause que soit l’absence, même pour le service du Roy & de l’Etar ; toutes ces personnes-là sont absolument excluses du Retrait aprés l’an & jour, du jout de la publication du Contrat.

La péremption de l’instince de Retrait, qui est annale comme l’action en Retrait, & qui ne subsiste que pendant l’an & jour comme la demande en Retrait, aprés lequel tems elle périt faute de poursuites, à la difference des au-tres instances qui ne perisient qu’aprés trois ans, suivant l’Ordonnance de Roussillon, sera acquise tant contre les mineurs que contre les majeurs, & toutes autrres personnes les plus privilégiées ; on ne parle point de l’Eglise, parce que suivant la Jurisprudence du Parlement de Normandie, l’Eglise ni les gens de main-morte n’ont point la faculté du Retrait féodal.

Le tems du Retrait conventionnel, c’est-à-dire, sur une vente faite à remerer, coure pareillement conrre le mineur comme contre le majeur ; parce que le tems de ce Retrait vient de la convention des Parties, qui doit être exécutée dans son tems par toutes sortes de personnes, majeurés ou mineures sans même aucune espétance de restitution des mineurs, sauf le recours des mineurs contre leur Tuteur, s’il est prouvé que le Tuteur avoit des deniers suf-fisans pour faire le rêmeré.


ARTICLE CCCCXLVIII.

L’An & jour de la Clameur de l’héritage decreté, commence à cou rir du jour de l’adjudication par decret & dernière renchere & adjudication d’icelle, encore qu’il en fut appellé & l’appellation indécise, pourvû que le decret soit passé devant le Juge ordinaire au ressort duquel l’héritage est assis.

En matière d’héritages & immeubles vendus & adjugez par decret, soit sur des majeurs soit sûr des mineurs, l’an & jour de la demande en retrait lignager ou féodal, commence du jour de l’adjudication finale du decret, quand même Il y auroit appel de l’adjudication, & non du jour de l’Arrest confirmatif de l’adJudication, pourvû que le decret ait été fait devant le Juge ordintire du lieu où l’héritage & immeuble decreté est situez, ce qui fait entendre que le Retrait n’a pas moins lieu dans les ventes forcées & par decret, que dans les ventes volontaires & decrets volontaires.

Il y a cependant cette différence entre les decrets volontaires & les decrets forcez, que dans les decrets volontaires, l’an & jour du Retrait commence du jour de la lecture & publication du Contrat de vente, par lequel on a stipulé qu’il seroit permis à l’Acquereur de faire faire un decret volontaire ; au lieu que dans les decrets forcez, l’an & jour du Retrait ne commence, comme on vient de le remarquer, que du jour de l’adjudication : Si cependant le decret volontaire devenoit forcé, & que l’adjudicataire fût un autre que celui qui avoit acquis parContrat volontaire, en ce cas l’an & jour ne commenceroit à courir que du jour de l’adjudication : mais les decrets volontaires sont rares en Normandie.

Les adjudications par decret des héritages nobles ou roturiers, ne sont point sujetes à la lecture & publication quand elles sont faites en vertu de Lettres de Mixtion ; parce que par le decret la notification est suffisante ; arr. 97. du Reglement de 16g6. mais quand on a adjugé des héritages situez en divers Baillia-ges en vertu d’Arrest du Parlement, la lecture doit être faite à l’égard de ceux qui sont situez hors le ressort du Bailliage où ils ont été adjugez ;, art. 98. du même Reglement.

Tous les decrets d’héritages & immeubles autres que les Offices, doivent être faits dans la Justice ordinaire, soit Royale ou Seigneuriale, du lieu où les héritages & immeubles sont situez ; à l’égard des Offices, c’est au Parlement oû la sailie réelle s’en poursuit, & où ils s’adjugent apres trois publications ; les Lettres de Commit eimus, Evocations & tout autre titre, n’ont point lieu dans les saisies réelles & décrets de biens situez en Normandie, pas même les Arrests du Parlement.


ARTICLE CCCCLIX.

E T où il seroit passé ailleurs, l’an de la Clameur n’aura cours que du jour que la lecture & publication aura été faite de l’adjudication à l’issuë de la Messe Paroissiale du lieu où les héritages sont assis, selon la forme prescrite pour la publication des Contrats de vendition ; si c’est un fief noble, il suffira que la lecture & publication soit faite issuë de la Messe Paroissiale du lieu où le principal manoir est assis.

Si le decret a été fait dans une Jurisdiction étrangere autre que celle de la situation des héritages & immeubles, la lecture & la publication de l’adjudication seront faites à l’issuë de la Messe Paroissiale de chaque lieu où les héritages & immeubles vendus & adjugez pur decret, seroient situez ; sçavoir, les roturiers à l’issuë de la Messe Paroissiale de chaque lieu de leur situation, & les nobles à l’issuë de la Messe Paroissiale du lieu ou est le principal manoir du Fief & Seigneurie ; de sorte que l’an & jour ne coure dans ce cas que du jour de la lecture & publication faites en cette maniere, & non du jour de l’adjudication par decret ; parce que le decret n’a pas été fait dans la Jurisdiction ordinaire.

Mais il en seroit autrement des adjudications faites devant les Baillifs & Vicomtes, en vertu de Lettres de Mixtion, elles ne sont point sujettes à la lecture & publication, & l’an & jour de la demande en Retrait commence du our de l’adjudication ; d’autant que les Juges qui font des decrets en vertu de Lettres de Mixtion, sont réputez Juges ordinaires, tant par rapport aux Juges Haut-Justiciers que par rapport aux Iuges Royaux ; Arrest du Parlement de Normandie du S Aoust 1é8a, & art. 97 du Reglement de 1666.


ARTICLE CCCCLX.

T Outes conditions retenuës par les Vendeurs doivent être inserées dans les Contrats de vendition, & publiées, autrement on n’y aura aucun égard, & ne seront tenus les accomplir.

Sil en étoit autrement, il seroit aisé aux contractans d’éluder les Retraits par des conventions & pactions secretes ; c’est pourquoi la Coûtume par cet Article ordonne que toutes pactions secretes & hors le Contrat de vente ou de fieffe, ne puissent être opposées au Retrayant, ni lui nuire ni préjudicier ; il n’y a que les conventions & clauses inserées dans le Contrat, qui puissent former une obligation dans la personné qui veut user de Rétrait, toutes autres conventions lui sont étrangeres, & on n’y a aucun égard, pro nullis & pra non adjectis habentur.

Cependant les conventions & pactions secretes & hors le Contrat, faites devant Notaire ou sous signature privée, seroient obligatoires entre le vendeur & l’acquereur, & autres parties contractantes & leurs héritiers ; ensorte que si le Retrayant étoit héritier du vendeur, on pourroit lui opposer la convention secrete & hors le Contrat. Ainsi si le vendeur avoit par une paction secrete garanti l’acquereur de tous Retraits, le Retrayant héritier du vendeur, ne pourroir retirer, parce qu’il ne peut pas aller contre le fait de celui dont il est héritier, & qu’il seroit tenu de ses faits & promesses ; Arrét du Parlement de Normandie du y Fevrier 1673.


ARTICLE CCCCLXI.

E N permutation de choses immeubles il n’y a point de Clameur ; toutefois si l’un des compermutans, ou personne interposée pour lui, rachete l’échange qu’il à baillé, dans l’an & jour, ou bien s’il est prouvé qu’il fût ainsi convenu entre les parties lors de ladite compermutation, il y a ouverture de Clameur dans les trente ans.

Le Retrait soit lignager soit féodal, n’a point lieu en Contrats d’échange d’héritages & immeubles contre autres héritages & immeubles, quand même on auroit donné des rentes hypoteques ou autres rentes rachétables en contréchange ; mais s’il y avoit soulte de deniers, où qu’on eût donné des meubles ou autres effets mobiliers en contréchange, un Contrat seroit retrayable ; parce que ce seroit en ce cas plutôt une vente qu’une échange.

Il y a encore le cas que l’échange soit frauduleuse & déguisée, dans la vûé de se mettre à couvert du Retrait, enforte que dans le fond c’est une véritable vente sous les apparences d’un Contrat d’échange ; un Contrat de prétenduë. échange, ne seroit pas moins sujet au Retrait que le seroit un véritable Contrat de vente, & par la même raison il produiroit un droit de Treizième ; par exemple, si l’un des compermutans ou personne interposée pour lui, rachetoit dans l’an & jour l’échange qu’il lui avoit baillé, où s’il étoit prouvé qu’il y avoit une convention de rachat entre les contractans, un Contrat de cette qualité seroit retrayable & payeroit Treizième au Seigneur, & dans ce cas le Retrait durera trente ans à compter du jour du Contrat ; ce ne seroit pas assez que de demander à faire preuve par témoins qu’un Contrat d’échange est frauduleux, pour frustrer le Seigneur du droit de Treiziéme, & empécher le Retrait lignager ou féodal, & que le Contrat est une véritable vente déguisée sous le num & les apparences d’un Contrat d’échange, il faudroit prouver un pareil fait par écrit ; la preuve par témoins ne seroit pas même recevable, à moins qu’il n’y eût un commencement de preuve par écrit.


ARTICLE CCCCLXII.

L’Héritage baillé à rente rachetable en tout où partie, est sujet à Retrait dans l’an & jour, en remboursant le principal de la rente & arrérages à celui à qui elle est dûë, ou à son refus consignant icelle ; & n’est tenu le Clamant à faire la rente, si ce n’est du consentement du vendeur.

C’est ce qu’on appelle dans notre Coûtume fieffer un héritage, c’est-à-dire le donner à fieffe ou à bail d’héritage ; or si cette rente, quoique fonciere & privilegiée sur l’heritage, est rachetable en tout ou partie, le Contrat sera susceptible du Retrait, soit lignager soit féodal, dans l’an & jour du jour de la lecture & publication du Contrat, à la charge toutefois par le Retrayant de rembourser, ou consigner en cas de refus, le sort principal au vendeur & lui en payer les arrérages, à moins que le vendeur ne déclarât qu’il consentoit que le Retrayant lui continuât la rente ; il faut dire le même chose si l’acquereur s’étoit obligé à continuer des rentes dûës par le vendeur, le Retrayant seroit tenu de les rembourser, si mieux n’aimoient ceux qui se trouveroient propriétaires des rentes prendre le Retrayant pour homme & pour débiteur quoiqu’il en soit, le Retrayant ne seroit point recevable à demander à continuer la rente, même en donnant caution, il faudroit qu’il la remboursat au vendeur.

Un pareil Contrat de fieffe produiroit pareillement un droit de Treizième au Seigneur.


ARTICLE CCCCLXIII.

B Ois de haute futaye est sujet à Retrait, encore qu’il eût été vendu à la charge d’être coupé, pourvû qu’il soit sur le pied lors de la Clameur signifiée, & à la charge du Contrat.

Donc si le bois de haute futaye, vendu, étoit coupé au jour de l’Exploit donné en Retrait, il ne seroit plus sujet à Retrait ; parce que ce bois seroit dans cet état un meuble, qui par la nature n’est pas retrayable ; mais tant qu’il est sur pied, il est retrayable comme seroit un héritage.

On appelle bois de haure futaye les bois qui sont au dessus de quarante ans, & ces bois sont retrayables comme réputez faire partie du fonds ; aussi une vente de ces sortes de bois produit droit de Treizième, Arrét du Parlement de Roüen du 18 Juin 1676.

Si néanmoins c’étoit un parent du vendeur, qui eût acheté un bois de haute futaye & qui le revendit dans la suite, le parent lignager du premier acheteur ne pourroit pas retirer ce bois ; Arrét du même Parlement du 7 Juin 1612.

Le Retrayant d’un bois de haute futaye, qui seroit admis au Retrait, seroit tenu de rembourser le prix de la vente, s’il avoit été payé, frais & loyaux coûts à l’acheteur.


ARTICLE CCCCLXIV.

T Out Contrat d’échange où il y a solde de deniers, quelque petite qu’elle soit, est clamable pour le regard de la Terre contre laquelle à été baillé argent.

Un Contrat de fieffe à rente non-rachétable où il y auroit soulte de deniers, telle qu’elle fût, petite ou grosse, seroit sujet à Retrait ; de même si on donnoit une rente de fieffe non rachetable en contréchange d’un héritage ou autre immeuble, & dans laquelle échange il y auroit soulte de deniers, un Contrat d’échange de cette qualité ne seroit pas moins retrayable, qu’un Contrat d’echange d’héritage contre d’autres héritages, dans lequel il seroit entré une soulte de deniers.

Ce n’est point la quotité des deniers donnez en soulte de l’échange, qui donne lieu au Retrait dans cette occasion, c’est la seule qualité de la soulte qui est en deniers ; mais ce ne sont pas les deniers qui sont retrayables, ce sont les héritages & immeubles donnez en échange par le parent du vendeur.

En un mot, tout Contrat d’échange où il entre deniers ou argent, ou chose équipolente à deniers ou argent, est sujet au Retrait, comme au droit de Treiziême.


ARTICLE CCCCLXV.

S I l’Acheteur dénie qu’il y ait eu achat, & qu’il soit trouvé par après du contraire, le prix du Contrat est confisqué au Roy, & l’héritage demeure au Clamant, & le Treiziéme au Seigneur duquel il tient ; & pourra le Clamant faire purger par serment, tant l’acheteur que le vendeur, sur la forme & prix du Contrat.

Cet Article contient la punition de l’acquereur qui dénie faussement & contre la vérité, que son Contrat d’acquisition est une véritable vente, ou qu’il y ait un Contrat de vente qui donne lieu au Retrait ; cette punition est la confiscation du prix de la vente au prosit du Roi seul, lequel lui sera payé par le Retrayant, & non à l’acquereur ; & le Retrayant aura l’héritage & immeuble en payant au Roi le prix de la vente, & le droit de Treizième au Sei-gneur suzerain & direct de l’héritage, car comme l’acquereur vouloit se mettre à couvert du Retrait, il n’avoit eu garde de payer le Treizième au Seigneur ; il est même permis au Retrayant de faire affirmer devant le Juge, tant le vendeur que l’acquereur, sur la vérité, la forme & la qualité du Contrat, & sur de prix de la vente ; car enfin il faut en revenir à la bonne foi : les Loix ne souffrent point la fraude & le déguisement dans les Contrats & Actes, principalement lorsqu’il est justifié qu’on s’est servi de ces voies indirectes pour trom-per autrui, ce qui n’est que trop ordinaire à des acquereurs, pour frustrer les Seigneurs du droit de Treiziéme, & écarter le Retrait, soit de la part des lignager, soit de la part des Seigneurs L’acquereur peut de son côté faire affirmer le Retrayant en personne, pour déclarer si le Retrait est sérieux, véritable, si c’est pour lui, & s’il ne prête point son nom directement ni indirectement à quelqu’un, ce que le Rétrayant sera tenu de faire, de quelque condition, rang, qualité & dignité qu’il soit Arrest du Parlement de Roüen, du 3 Avril 1305.

Ponr que la dénégation puisse donner lieu aux peines portées par cet Article, Il faut qu’elle foit faite par l’Acquereur en connoissance de cause & avec perséverance ; mais si ses heritiers faisoient une pareille dénégation, ils ne tomberoient pas pour cela dans ces peines, parce qu’ils pourroient avoir juste cause d’ignorance de l’acquisition faite par leur prédecesseur dont ils sont heritiers.

La preuve par témoins est admissible sur la fraude & simulation du Contrat de vente ou sur la vérité de la vente, par exemple en mettant en fait qu’on a vù, lû & tenu le Contrat ou autre Acte de la vente, & que l’Acte qui paroit contenir le contraire en apparence, n’est pas sérieux ; car où il y a dol & fraude, la preuve des faits en est admissible, nonobstant qu’il s’âgisse d’une somme au-dessus de cent livres, car sans cela on ne pourroit jamais justifier les faits de dol & de fraude ; mais il faudroit pour pouvoir admettre dans ces cas une preuve testimoniale, qu’il y eût au moins quelque commencement de preuve par écrit ; une demande toute nuë, vague & generale, né paroîtroit pas devoir être admise, cela dépend beaucoup des circonstances d’une affaire.

La confiscation du prix de la vente ou autre Contrat, prononcée par cet Article dans le cas y porté, appartient au Roy seul privativement & à l’exclusion des Seigneurs de Fief, quoique les héritages qui ont donné lieu à la dénegation faire par l’acquereur, soient situez dans leur Seigneurie & dans leur Du-recte, parce qu’il semble que le mensonge blesse le respect qui est dû au Roy en contractant, & à ses Ordonnances, sur la bonne foi qui doit regner parmi ses Sujets.


ARTICLE CCCCLXVI.

L E Crediteur qui contre verité dénie & méconnoit le gage, confisque au Roy les deniers qu’il a prêtez sur icelui, & le gage doit être rendu à celui qui l’a baillé.

La Coûtume continuë dans cet Article à punir la mauvaise foi, non pas par rapport au Retrait, mais par rapport aux choses mobiliaires qu’un débiteur auroit données en nantissement, & mises en gage verbalement & sans écrit és mains de celui qui lui auroit prété de l’argent ; car si un Créancier avoit dénié avoir les gages & nantissemens, & qu’il fût convaincu évidemment de mauvaise foi, il perdroit son dû, la somme à lui dûë seroit confisquée au profit du Roy, & il seroit tenu de rendre les gages & nantissemens au débiteur, lequel payeroit ce qu’il devroit au Roy, à droit de confiscation, & non au preteur, apres toutefois que la confiscation auroit été prononcée par le Juge.

Les héritiers du Créancier ou préteur qui feroient cette dénegation, ne setoient pas sujets à la peine de cet Article, parce qu’ils pourroient être dans une juste ignorance, & du prest ou des gages donnez à leur prédecesseur dont ils sont héritiers.

a présent par l’Ordonnance de 167s, art. 8. du titre 6. il est défendu de faire aucun prest sous gage, qu’il n’y en ait un Acte devant Notaire, dont sera retenu minute, & qui contiendra la somme prêtée & les gages qui auroient été délivrez, à peine de restitution des gages, à laquelle le préteur sera contraint par corps, sans qu’il puisse prétendre de privilege sur les gages.


ARTICLE CCCCLXVII.

L E Contrat de transaction n’est clamable si le Tenant n’est dépossedé de l’héritage contentieux par la transaction, combien qu’il ait baillé argent, si autres choses ne sont baillées au possesseur, dont il n’étoit joüissant lors de la transaction.

Cet Article veut dire, que l’Acte contenant une transaction sur Proces mû, ou ou qui alloit être intenté touchant un héritage ou autre immeuble rétrayable, ne peut donner lieu au Retrait, lorsque celui qu’on prétendoit déposseder, n’est point dépossedé par la transaction de l’héritage & immeuble contentieux, & qu’il possedoit avant la transaction, quand même par la transaction il auroit payé ou promis des deniers comptans à sa Partie pour sortir de Proces & d’affaire ; Arrest du Parlement de Roüen, du 27. Fevrier 165y, à moins que les deniers qu’il a payez ou promis de payer, n’égalassent la valeur de l’héritage dans la possession duquel il se conserve, auquel cas l’héritage seroit retrayable, une Acte de cette qualité étant plûtôt une vente qu’une transaction.

Mais si par la transaction l’ancien possesseur de l’héritage contentieux en est dépossedé, & qu’on lui ait donné d’autres héritages & immeubles qu’il ne possedoit point, & qui ne lui appartenoient point avant la transaction, ou qu’on lui ait donné ou promis de l’argent comptant ; en ce cas cette transaction seroit ouverture au Rétrait, d’autant qu’un tel Acte seroit réputé une vente.

La cession de droits litigieux ou successifs, n’est point retrayable ; mais suivant les Loix per diversas & ab Anasiasio, il seroit permis à celui contre lequel on veut faire valoir le transport, & au cohéritier, de rembourser le cessionnaire du prix du transport, en affirmant même par le cessionnaire sur le prix du transport.


ARTICLE CCCCLXVIII.

L Es parens sont reçus à retirer les héritages vendus, selon qu’ils sont plus prochains du vendeurs.

En matière de Retrait lignager, ce n’est pas la diligence qui donne la préférence au Retrayant, mais la proximité de parenté, ainsi suivant cet Article, c’est le parent lignager le plus proche en degré de parenté du vendeur, qui prefêre le parent le plus éloigné, soit que l’héritage ou immeuble ait été acquis par un étranger, ou par un parent du vendeur, mais parent plus éloigné du vendeur ; parce que dans notre Coûtume les Retraits lignagers se reglent comme les successions ; desorte qu’un parent plus proche que l’acquereur, retire par Retrait lignager sur cet acquereur l’héritage ou immeuble qu’il avoit acquis de son parent, encore bien que l’héritage & immeuble, ne sortit point de la famille par cette vente ; Arrest du Parlement de Roüen, du 33. Janvier 1680.

La proximité de parenté pour le Retrait lignager des propres, se regle sur la souche d’où procedent les héritages & immeubles, & non sur la personne du vendeur ; desorte que ce ne seroit pas assez que le Retrayant sûr le plus proche parent du vendeur, il faudroit qu’il lui fût parent du coté & ligne d’oû qui seroient venus les héritages & immeubles., Un héritage ou autre immeuble decreté sur le confiscataire à la requête des Créanciers de celui dont les biens avoient été confisquez, ne peut être retiré par Retrait lignager par le parent de celui dont les biens avoient été confisquez, la raison est que la confiscation a tiré l’héritage & immeuble de la ligne ; Arrest du même Parlement, du 17. May 1657.


ARTICLE CCCCLXIX.

L Es paternels peuvent seulement retirer ce qui est du côté paternel, & les maternels, ce qui est du côté maternel.

De la même manière qu’en succession les propres suivent les héritiers aux propres, & que les propres paternels appartiennent aux héritiers paternels, & les propres maternels aux héritiers maternels, exclusivement d’une ligne à une autre ; en fait de Retrait lignager chaque parent peut seulement retirer par Retrait lignager les héritages & immeubles qui procedent de l’estoc & ligne du Retrayant ; ainsi les parens paternels retirent les héritages & immeubles paternels, & les parens maternels, les héritages & immeubles maternels, sans que les parens paternels puissent retirer les héritages & immeubles maternels, ni que les héritiers materneis puissent retirer les héritages & immeubles paternels, même au défaut de l’une des lignes.

Mais d’un autre côté, le Retrayant est obligé de retirer tout ce qui est de sa ligne, & ne peut contraindre l’acquereur à diviser son Contrat, à moins que les héritages qu’on veut retirer, ne soient de diverses lignes ; car le parent lignager n’est obligé que de retirer les héritages ausquels il a droit de Retrait ; art. 113. du Reglement de 1666.


ARTICLE CCCCLXX.

L Es acquêts & conquêts immeubles peuvent être retirez tant par les parens paternels que maternels, & y sont reçus selon qu’ils sont plus prochains du vendeur, soit qu’ils soient paternels ou maternels.

Nous comprenons deux choses par cet Article ; l’une, que les acquêts & conquêts immeubles ne sont pas moins retrayables que les propres ; l’autre, que par la raison que les acquêts & conquêts immeubles étent revendus par celui qui les a faits, ne font point de souche, & qu’ils ne peuvent être réputez ni paternels ni maternels, ils peuvent conséquemment être rétirez par Retrait lignager, par les parens de l’un & de l’autre côté selon les degrez de proximité, sans aucune préference d’un côté plûtôt que d’un autre ; la préference n’est donnée qu’au parent le plus proche du yendeur, soit qu’il soit parent paternel ou parent maternel : mais si les parens paternels & maternels étoient en pareil dégré de parenté, les parens paternels préfereroient en Retrait d’acquets & conquêts immeubles les parens maternels, comme il se fait en succession de biens de cette qualité.


ARTICLE CCCCLXXI.

L E propriétaire ayant possedé par an & jour l’héritage, qui puis aprés soit decreté pour dettes aînées à son acquisition, il peut s’en clamer à titre de Lettre luë, & en remboursant le prix & loyaux couts dans l’an & jour.

C’est ici le Retrait à titre ou droit de Lettre lué, qui est la faculté donnée & accordée au tiers acquereur d’un héritage ou autre immeuble qu’il a possedé paisiblement pendant an & jour, de pouvoir retirer ce même héritage ou autre immeuble qui a été decreté, vendu & adjugé en Justice sur lui pour les dettes de son vendeur, ainées, c’est-à-dire anciennes & antérieures à son acquisition, à la charge de rembourser le prix de l’adjudication à l’adjudicataire, & les frais & loyaux coûts, & pourvû que le Retrait foit intenté dans l’an & jour de l’adjudication, autrement le Retrayant en seroit déchu, Il y a encore une autre observation à faire à cet égard, qui est que pour pouvoir exercer le Retrait à titre de Lettre lué, il faut avoir possedé l’héritage ou autre immeuble par an & jour, depuis la lecture & publication du Contrat d’acquisition ; car si avant la lecture & publication du Contrat, l’héritage ou autre immeuble est saisi réellement pour les dettes du vendeur, antérieures à l’acquisition, l’acquereur n’a point la voye de Retrait à droit de Lettre lué, ayant été dépossedé par la saisie réelle avant l’an & jour de la lecture & publication de. son Contrat ; Arrest du Parlement de Normandie, du 23. Septembre 1é43.

Celui qui a acquis par échange ou par fieffe, ne peut clamer à droit de Lettre luë, art. 99. du Reglement de 1Sûë ; quoiqu’il eût possedé la chose paisible ment pendant an & jour, & qu’il n’en eût été dépossedé que par une adjudication sur décret.

Le Retrait à droit de Lettre luë est cessible,


ARTICLE CCCCLXXII.

E T combien que l’héritage soit ajugé par un seul prix avec d’autres, il ne peut être contraint prendre le tout, & ne payera que la juste valeur de son héritage, eu égard au total du prix de l’enchere.

Le Retrayant à droit de Lettre luë ne peut être contraint de prendre tous les héritages & autres immeubles compris dans le decret, enchere, vente & adjudication, mais seulement ceux qui ont été vendus & adjugez sur lui, quoique adjugez par une seule & même adjudication & par un seul & même prix ; & il ne remboursera que la juste valeur de l’héritage & immeuble decreté & vendu sur lui, suivant la ventilation qui en sera faire, eu égard au prix entier de la derniere enchere & adjudication, & non au prix de l’acquisition du Retrayant ; le surplus des biens appartiendra à l’adjudicataire, il n’y aura que ceux qui ont été decretez, vendus & adjugez sur l’acquereur, qui seront distraits de l’adjudication, & qui demeureront à ce Retrayant, aprés en avoir payé la juste valeur à l’adjudicataire.

Le Seigneur féodal a cette même prérogative, de ne retirer que ce qui est mouvant de son Fief ; & même quoique les autres héritages vendus & decretez, fussent tenus d’autres Fiefs qui lui appartiendroient, il a la faculté de n’user de son droit que pour un Fief, s’il le veut ainsi ; mais en ce cas il est obligé de prendre tout ce qui est mouvant de ce Fief.


ARTICLE CCCCLXXIII.

L Es parens de l’acquisiteur perdant, sont recevables à se clamer de l’héritage dont il auroit joui par an & jour, à titre de Lettre luë ; & ne seront les parens de celui pour les dettes duquel l’héritage est decreté, reçûs à se clamer si le possesseur perdant étoit proprietaire in-commutable.

Le Retrait à titre de Lettre lûé, n’est pas tellement personnel à l’Acquereur perdant, c’est-à-dire sur lequel les héritages & immeubles par lui acquis ont êté vendus & adjugez par decret pour les detres de son vendeur, qu’il ne passe à ses héritiers, lorsqu’il n’avoit point lui-même exercé ce Rétrait de son vivant, & qu’il avoit possede l’héritage & immeuble paisiblement & incommutaplement pendant an & jour depuis la lecture & publication de son Contrat d’acquisition, en faisant par les parens ce que l’acquereur auroit dû faire pour parvenir à ce Retrait ; & même dans ce Rétrait les parens de l’acquereur qui étoit propriétaire incommutable, excluent les parens du vendeur pour les dettes duquel l’héritage & immeubles avoient été saisis réellement, vendus & adjugez par decret.

Il y a plus, c’est que les parens de l’acquereur ne sont paint obligez en retirant à droit de Lettre lûé, de consigner le prix de l’adjudication dans le tems fatal des autres Retraits, mais seulement d’en offrir le remboursement dans l’an & jour de l’adjudication ; Artest du Parlement de Roüen, du 16 Juillet 163o.


ARTICLE CCCCLXXIV.

S I l’héritage est vendu plusieurs fois à diverses personnes, dans l’an & jour de la premiere vendition, les parens des vendeurs sont reçûs à eux clamer chacun en leur ordre ; & sont preferez les parens du premier vendeur à ceux du second, & ainsi des autres subsecutivement des autres.

On peut intenter autant de Retraits lignagers qu’il y à de vente pendant l’an & jour de la premiere vente, suivant le degré de proximité de chaque parent du vendeur ; de manière néanmoins que les parens du premier vendeur sont preferez aux parens du second, & ceux du second aux parens du troisième vendeur, & ainsi des autres subsecutivement, à condition que chaque Retrayant viendra au Retrait dans l’an & jour de la lecture & publication du Con-trat sur lequel il retire.

Nous avons déja remarqué, mais nous le repetons comme une décision importante, que dans notre Coûtume en matière du Retrait lignager le plus pro-che parent du vendeur est préféré au parent plus eloigné, non seulement si le Retrait est exercé sur un acquereur étranger de la famille, mais encore si le Retrait est intenté sur un acquereur parent, c’est-à-dire qu’un parent plus proche peut retirer sur un acquereur parent plus éloigné, parce que dés que la Coûtume a accordé le Retrait lignager au plus proche parent, c’est une consequence nécessaire, que le parent plus proche peut exercer le Retrait sur l’ac-quereur qui est parent plus éloigné que le Retrayant ; & dans ce cas, le parent plus eloigné est pour ainsi dire un étranger, qui ne peut s’opposer à la demande en Retrait du parent plus proche.


ARTICLE CCCCLXXV.

E N concurrence de Clamans lignagers, le plus prochain parent du vendeur & plus habile à lui succeder, est préferé, encore que delai eût été fait à autre du lignage.

En Retrait lignager la prévention d’un parent sur un autre, n’a point lieu ; le plus proche parent l’emporte toûjours, & est préféré au parent plus éloigné, quand même celui-ci seroit le plus diligent dans la demande en Retrait, & sans même que le parent plus proche qui viendroit au Retrait dans le tems de la Coûtume, fût tenu de rembourser les frais qui auroient été faits par le parent plus éloigné au sujet du Retrait qu’il avoit le premier formé & intenté.

L’acquereur ne peut s’empécher de prêter le gron, c’est à dire, donner les mains au Retrait formé par un parent, sous prétexte que le Retrayant ne seroit pas le parent le plus proche du vendeur, ce n’est point à lui à entrer dans cette discution, il suffit quant à lui, que le Retrayant soit parent en lignage d’où procedent les héritages du vendeur.

Par la maxime que les Retraits lignagers se reglent sur l’ordre des successions, il s’ensuit, 15. Que la fille descenduë du mâle, exclut les filles, & descendans des filles, en Retrait lignager d’héritages & immeubles propres, mais non d’acquêts & conquêts ausquels les parens maternels peuvent succeder comme les parens paternels ; 20. Que le parent plus eloigné en degré, peut venir au Retrait, par representation du parent plus proche ; ainsi le frère du vendeur ne seroit pas preféré aux neveux ; & en ce cas, il faudroit suivre l’ordre des successions ; 30. Que quiconque n’est pas habile à succeder, ne peut exclure le parent plus éloigné du vendeur du Retrait lignager ; ensorte qu’il faut deux choses en Retrait lignager, la proximité du desiré, & la capacité. de succeder, ces deux conditions doivent concourrir, l’une sans l’autre ne seroit rien ; 4’. Que le parent le plus éloigné exclut du Retrait lignager le parent le plus proche, qui ne seroit ni conçû ni né au tems de l’action en Rétrait, & lorsque l’action a été pleinement consommée dans le rems fatal de la Coutume.

Quoique l’acquereur ait fait delai, c’est-à-dire, ait prété le gyron où donné les mains au parent plus éloigné & plus diligent, néanmoins le plus proche parent venant au Retrait dans l’an & jour, est recevable au Retrait, & exclut l parent plus éloigné qui l’avoit prevenu, & au Retrait duquel l’acquereur çavoit donné les mains volontairement ou autrement.


ARTICLE CCCCLXXVI.

E T où les Clamans seroient en semblable degré, ils sont reçûs à la clameur, selon l’ordre que les successions sont déférées par la Coutume.

L’ordre de succeder regle l’ordre de retirer par Retrait lignager ; ainsi lorsque les Retrayasf se trouvent en parité de degré de parenté, ils y seront re-çûs selon l’ordre de succeder, établi par la Coutume ; de manière, que suivant cet Article, en concurrence de plusieurs lignagers Retrayans qui sont en pareil degré de parenté, ce n’est pas la diligence du premier Retrayant, qui don-ne la preference, il faut suivre l’ordre dans lequel les successions sont déferées par la Coûtume ; c’est pourquoi, si le Retrait lignager étoit d’un Fief auquel l’ainé auroit succedé seul comme héritier du vendeur s’il ne l’’avoit pas vendu, l’ainé en retirant ce Fief excluroit tous les autres Retrayant du Retrait ; comme pareillement dans la Coûtume de Caux, si l’ainé eût succedé seul au vendeur du Fief, les puinez ou les autres parens qui n’y pourroient rien avoir, ne seroient point admis au Retrait, quoiqu’ils fussent aussi proches parens que leur frere ainé ; ainsi il ne suffit pas d’être en pareil degré, il faut être habile à succeder à l’héritage ou autre immeuble sujet au Rgggait.


ARTICLE CCCCLXXVII.

S I les freres, soeurs ou autres étans parens du vendeur en pareil degré, se clament, le plus ainé des Clamans preferera les autres, si c’est un Fief, & si c’est un héritage partable, ils partageront également.

Il est donc évident suivant cet Article, qu’on ne peut retirer par Retrait lignager que pour la part en laquelle on succederoit en la chose venduë, si le Retrayant comme heritier du vendeur, avoit trouvé la chose venduë dans la succession du vendeur, & qu’en parité de degré on suit en Retrait lignager l’ordre de succeder ; ainsi si un frere, une seur ou autres parens du vendeur, étans en pareil de gré, retirent par Retrait lignager, le plus ainé des Retrayans prefera les autres dans le Retrait d’un Fief, & si ce sont des héritages roturiers ils viendront tous au Retrait, & partageront également entre eux la chose venduë & retirée ; ce qui fait qu’en matière de Retrait, la diligence & la prévention ne sont rien même en parité de degré de parenté.


ARTICLE CCCCLXXVIII.

O U l’un des Clamans aura laissé la suite à l’autre, il peut néanmoins poursuivre l’effet de sa clameur dans trente ans, si celui qui a la suite, cede par fraude l’héritage à l’acquereur, où à un autre pour lui.

La fraude d’un parent qui s’accommode avec l’acquereur ; ou autre personne par lui interposée, ne peut préjudicier à un autre parent, quoique plus cloigné, lequel avoit intenté sa demande en Retrait dans l’an & jour ; & ce parent pourra poursuivre sa demande en Retrait pendant trente ans, nonobstant qu’il eût donné les mains au Retrait du parent plus proche qui ne faisoit T. que préter son nom à l’acquereur ; ensorte que si l’un des Retrayans est obligé par la proximité de parenté de l’autre Retrayant, de délaisser la suite de sa demande en Retrait eu parent qui est plus proche que lui, il pourra néanmoins reprendre & poursuivre l’effet de son action dans trente ans, si dans la suire il est découvert que celui auquel l’action en Retrait avoit été remise & delaissée, s’est accordé de la chose retirée avec l’acquereur, & la lui a remise directement ni indirectement par personne interposée, pourvû toutefois & non autrement, que ce parent plus éloigné eût formé sa demande en Retrait dans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat qui donnoit lieu au Retrait lignager ; En un mot, cette fraude proroge & perpétué l’action en Retrait pendant trente années à die detecte fraudis, mais il faudroit que la fraude & l’intelligence eussent été consommées, parce qu’en fait de fraude deux choses doivent concou-rir, coxsilium & eventus, l’un sans l’antre ne seroit rien, il seroit necessaire que l’accommodement & délaissement de la chose retirée, fussent réelle & executez ; Arrêt du Parlement de Normandie du 11 Juillet 1633.

Un Seigneur exclueroit un parent, quoique le plus proche, qui auroit intenté une demande en Retrait simulé & frauduleux, si les parens les plus éloi-gnez ne se presentent point dans l’an & jourLa preuve par témoins est recevable pour prouver que le Retrait est srau-duleux ; parce que nonobstant l’Ordonnance les faits de dol & de fraude peuvent être prouvez par témoins, mais il faudroit qu’il y eût au moins quelque commencement de preuve par écrit du dol & de la fraude.


ARTICLE CCCCLXXIX.

L’Acquereur, encore qu’il ait fait délai & obéi à la Clameur, peut dans trente ans demander l’héritage à lui vendu, si fraude a été commise en la Clameur.

La Coûtume dans le precedent Article punissoit la fraude entre un parent & l’acquereur en matière de Retrait lignager, & dans celui-ci la fraude concertée entre un Retrayant & autre personne à qui le prétendu Retrayant ne faisoit que prêter son nom, est condamnée ; car quoique l’acquereur eût prété le gyron, obci & donné les mains au Retrait formé sur lui, croyant le Retrait véritable & serieux, si néanmoins il découvre dans la suite que le Retrait n’avoit été intenté que pour faire tomber l’héritage & immeuble à une tierce personne, il pourra se pourvoir contre le Retrait pendant trente ans, & demander qu’il soit remis dans la possession & joüissance de l’héritage & immeuble qui lui avoit été vendu.

C’est une maxime certaine, que tout Retrayant est obligé de jurer & se purger par serment en personne à l’Audience, s’il en est requis soit par l’acque-reur soit par le Juge, que la demande en Retrait par lui formée est véritable & sérieuse, & non feinte ni simulée, & qu’il ne prête point son nom directe ment ni indirectement à l’acquereur ou à autre, & que c’est pour lui qu’il entend & prétend retirer l’heritage ou autre immeuble.


ARTICLE CCCCLXXX.

S I le vendeur promet faire cesser les Clameurs lignageres, & l’acquereur est dépossedé, le vendeur est tenu seulement aux interêts du prix à raison du denier dix, sur ce déduit les fruits de l’héritage qu’il aura perçus.

La convention par laquelle un vendeur prend sur lui tous les Retraits qui pourroient survenir, & qu’il en garentit l’acquereur, est licite & permise mais elle se résout en dommages & interêts, lesquels au temps de la réformation de la Coûtume se payoient au denier dix ; mais depuis l’Edit du Roi de 602. sur la réduction des rentes, ils ne doivent être payez qu’au denier quatorze ; art. 107 du Reglement de 168s ; encore faudroit-il déduire sur ces in-terêts les fruits & revenus que l’acquereur auroit perçus jusques au jour de la demande en Retrait ; le vendeur seroit en outre tenu de rendre le prix de la vente à l’acquereur, s’il l’avoit reçûQuoiqu’un pere en vendant son héritage ou autre immeuble, eût promis par le Contrat de vente de faire cesser les demandes en Retrait s’il en survenoit, en faveur de l’acquereur, il seroit néanmoins recevable à intenter Retrait en qualité de pere & tuteur de ses enfans, sans préjudice des dommages & interêts de l’acquereur pour l’inexecution de la clause ; Arrét du Parlement de Roüen du 30 Ianvier 1636.

Quoiqu’un mari eût parlé dans un Contrat de vente, & y eût signé comme autorisant & pour y autoriser sa femme, il ne seroit pas pour cela non recevable à exercer le Retrait lignager ou féodal de la chose venduë, s’il y avoit droit, parce que dans ce cas le mari n’a pas été co-vendeur.


ARTICLE CCCCLXXXI.

S I par la fraude ou collusion du tuteur le mineur est évincé de sa clameur, le pupille aura recours contre son tuteur pour ses dommages & interêts dans l’an de sa majorité.

Un mineur peut être évincé & déchu d’un Retrait lignager ou féodal par le fait de son tuteur, non seulement en obme : tant par le tuteur de former la demande en retrait dans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat, mais encore par fraude & collusion pratiquées entre le tuteur & l’acquereur ou autre, ou en laissant tomber l’instance de Retrait en péremption ; dans tous ces cas le mineur devenu majeur, pourra agir en dommages & interets contre son tuteur dans l’an & jour de sa majorité de vingt ans, mais sans pouvoir revenir contre ce que son tuteur aura fait, ni par la voye de restitution ni autrement : l’héritage demeurera à l’acquereur.

Dans ce cas l’an & jour accordé au mineur contre son tuteur, ne doit pas être pris du jour. de la majorité du mineur, de momenrâ ad momentum, mais du jour que son tuteur lui aura présenté & affirmé son compte de tutelle, puisque l’action qu’il intenteroit ne pourroit être jugée qu’aprés la reddition & apurement du compte.

Il est néanmoins permis à un tuteur de former une demande en Retrait pour son mineur sans avis de parens, mais il seroit tenu de l’évenement du proces en son propre & privée nom s’il arrivoit que le mineur y succombûr, sans que le mineur en pût rien souffrir ni supporter, toutes les condamnations tomberoient sur le tuteur.


ARTICLE CCCCLXXXII.

L’Héritage rétiré par le pere ou la mere au nom de l’un de leurs enfans, doit être remis à partage, si d’ailleurs l’enfant n’a biens suf-fisans pour payer le prix de la clameur.

Il est permis à un pere ou à une mére de retirer par Retrait lignager ou féodal au nom de leurs enfans, comme leur tuteur ou tutrice, sans avoir besoin d’autre pouvoir que leur qualité, étans dans nôtre Coûtume tuteurs naturels de leurs enfans ; ils pourroient même retirer en la même qualité de tuteur & tutrice, un héritage ou autre immeuble qu’ils auroient vendu en leur nom & qui leur appartenoit ; Arrêt du Parlement de Normandie du 30 Janvier 16363 mais si un héritage est retiré par un pere, une mere ou autre ascendant au nom de l’un de leurs enfans, il doit être remis en partage & dans la masse de la succession pour y être partagé en forme de droit, à moins que l’enfant au nom duquel le Retrait a été fait, n’ait d’ailleurs & de son chef lors du Retrait, des biens suffisans pour en payer le prix : de la même manière que les acquisitions faites par pere, mere ou autres ascendans au nom de leurs enfans, doivent être mises en partage, si l’enfant n’avoit d’ailleurs & de son chef, lors de l’acquisition, des biens suffisans pour en payer le prix ; art. 101. du ReGlement de 1666. En un mot, on considere un Retrait comme une acquisition faite par le pere, qui se partage entre les enfans, même de divers lits, lorsque le pere a payé le Retrait de ses deniers.

Si un pere ou une mere avoit retiré au nom de leur fille, & que depuis elle eût été mariée, cette fille ne pourroit prétendre la chose retirée au préjudice de ses freres, quoique nez & conçûs depuis le Retrait, à moins que cette fille n’eût payé le prix du Retrait de suo, & de son propre arsent qu’elle avoit de son chef, & non de ses pere & mére ; Arrest du Parlement de Roüen, du 17 Decembre 1632.

Un héritage ou autre immeuble retiré par pere, mere ou autre ascendant, même de leurs deniers, au nom de leurs enfans, appartient tellement en proprieté aux enfans, que les pere, mere ou autre ascendant, qui a fait le Retrait, ne peut plus l’aliéner, engager, & l’hypotequer, il en a seulement la jouissance pendant sa vie ; Arrest du même Parlement, du roDecembre 1644. La mére de ces enfans n’auroit même rien, soit en usufruit, soit en proprieté dans les héritages que son mari auroit reTirez pendant le mariage au nom de leurs enfans, ni pareillement dans les deniers employez au Retrait, ni aucune récompense sur les biens du mari ; parce que ce Retrait a été fait au nom & pour les enfans, ce qui leur en a acquis dés ce moment-là la pleine propriété, & à l’égard des deniers, le mari ayant pû librement en disposer pendant son mariage comme de chose mobiliaire, principalement pour le bien & avantage commun de leurs enfans.

L’héritage rétiré par pere, mere ou autre ascendant au nom de l’un de leurs enfans, ne tomberoit pas même dans la confiscation du pere, ou mere, ou autre ascendant confisqué, mais il tomberoit dans la confiscation des biens de l’enfant confisqué au nom duquel l’héritage avoir été rétiré, pour la part qu’il y pourroit avoir par le partage s’il y avoit plusieurs enfans, & pour le total S’il étoit seul enfant ; Arrest du même Parlement, du 19 Janvier 1630.

Cependant les Créanciers du pere ou de la mere, ou autre ascendant, dont la dette seroit anterieur au Retrait, seroient en droit de se vanger sur l’héritage ou autre immeuble retiré, aprés la mort de leur débiteur, quoique les en-sans au nom desquels le Retrait a été fait, renoncent à la succession de l’ascendant qui a fait le Retrait ; parce que ce Retrait est toujours censé être fait des deniers de l’ascendant pour frauder & tromper ses créanciers ; Arrest du même Parlement, du 25 May 1674. Cette décision n’auroit pas lieu si les créanciers étoient posterieurs au Retrait, ne pouvant pas dire que cette acquisition a été faite faite de leurs deniers, ou pour les frauder & tromper, ou si les enfans au nom desquels le Retrait a été fait, justifioient évidemnent que le prix du Retrait avoit été payé de leurs propres deniers.


ARTICLE CCCCLXXXIII.

L’Héritage retiré par Clameur de bourse à droit de lignage, tient nature de propre & non d’acquêts.

Quoique generalement parlant, tous les biens soient réputez propres s’il n’est justifié qu’ils soient acquets, art. 10z du Reglement de 1666. néanmoins tout héritage ou autre immeuble rétiré par Retrait lignager, tient toujours nature de propre & non d’acquêt, soit que l’héritage retire fût un propre ou un acquêts en la personne du Vendeur ; & ce sera un propre tant de disposition que de succession : mais à l’égard de l’héritage rétiré par Retrait feodal & réuII ni au Fief qui tenoit nature de propre, il est censé propre ; art. 108. du même Reglement, si au contraire l’héritage rétiré féodalement, & réuni au Fief par Retrait féodal, étoit un acquêt en la personne du Vendeur, ce même héritage. sera pareillement censé acquet, & il tiendra nature d’acquêt en la personne du Seigneur Retrayant.

L’héritage rétiré à droit de Lettre luë, tient nature de propre au Rétrayant si cet héritage lui étoit un propre avant son Retrait, & il tiendra nature d’acquet si cet héritage lui étoit un acquêt avant qu’il l’eût retiré à titre de Lettre lûë ; Arrêt du Parlement de Roüen, du 3 May 1645.

L’héritage rétiré par Retrait lignager est tellement, propre, qu’il appartient aux héritiers des propres du Rétrayant, sans être tenus de rembourser aux heritiers des acquêts le prix du Retrait ; & même la femme du Rétrayant ne prend ni doüaire ni droit de conquêts dans cet héritage & imméuble retiré, nont plus que dans l’héritage retiré & réuni au Fief par Retrait féodal, si le Fief auquel la réünion est faite, étoit un propre en la personne du Seigneur Rétrayant ; quant au Retrait à droit de Lettre lué, la femme n’auroit rien dans la propriété de l’héritage & immeuble retiré, mais elle prendroit la moitié des deniers qui ont servi à payer le prix du Retrait, si l’héritage étoit situé en Bourgage ; mais à l’égard du Retrait à titre conventionnel ou à rêmerer, la femme n’auroit aucune chose ni dans la propriété de l’héritage on autre immeuble, ni dans les deniers qui ont servi à rembourser l’Acquereur.


ARTICLE CCCCLXXXIV.

I L suffit que la Clameur soit prise & signifiée à l’acheteur dans l’an & jour de la lecture & publication faites du Contrat de venduë, encore que le jour de l’assignation pour venir compter deniers & exhiber le Contrat, échue après l’an & jour, pourvû que l’Assignation soit aux prochains Plaids ou Assises du jour de ladite signification.

Quoique l’action ou demande en Retrait doive être formée dans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat, néanmoins il sussit que la demande en Retrait soit formée, signifiée & Assignation donnée à l’acquereur dans l’an & jour de la lecture & publication dus Contrat, quoique le jour de l’Exploit & Assignation tombe & échée aprés l’an & jour de la lecture & publication du Contrat, pourvû toutefois que l’Assignation en Retrait soit donnée au prochains Plaids s’il s’agit d’héritages ou immeubles roturiers, ou aux Assises si les héritages en question sont nobles ; car suivant cet Article l’ajournement valable en Retrait sert & vaut interruption ; & l’an & jour étant donné pour re-tirer, le Retrayant peut signifier sa demande en. Retrait au dernier jour de l’an & jour, à l’acquereur.

L’Exploit de demande en Retrait doit être, résigné de l’Huissier ou Sergent, & de deux témoins ou records ; 28. Il doit être donné à la personne ou domicile de lacquereur ; 3é. Non seulement il sera controlé dans le temps de l’Ordonnance, mais encore l’Huissier ou Sergent sera tenu de l’enregistrer sur son régistre. 4. L’Exploit sera libellé, & contiendra les offres de rembourser le prix, frais & loyaux coûts de la vente à l’effet de quoi l’Acquereur sera tenu d’exhiber son Contrat. 56. Il y sera fait mention du pariant à qui. 6s. Il faut que ce soit le Sergent de la querelle ou contestation, qui donne l’Assignation, ou du moins un Sergent qui ait pouvoir d’exercet dans le lieu où l’Exploit sera donné, & en son absence la Partie en fera autoriser & commettre un autre par le Juge à l’effet de cette diligence ou demande ; en un mot, l’Exploit sera fait suivant toutes les formalitez prescrites par l’Ordonnance de 1éé7, au titre 2, pour les Ajournemens & Assignanions, & par la Coûtume pour les Assignaiions en Retrait ; le tout à peine de nullité de l’Exploit, laqueile emporteroit la nullité du Retrait.

Une assignation en Retrait, donnée un Dimanche ou jour de Fête seroit valable, si le tems fatal pour former la demande en Retrait expiroit ce jour : là, mais non autrement.

Les nullitez qui se trouveroient dans un Exploit en Retrait, seroient couvertes par les defenses fournies au fonds, sans avoir été proposées par l’acque-reur ; c’est la disposition de l’article 3. du titre S, de l’Ordonnance de 1667.

Quoique le demandeur en Retrait soit tenu de donner assignation aux prochains Plaids ou aux Assises ordinaires, il peut néanmoins anticiper ce délai, & donner l’assignation aux Plaids ou Assises extraordinaires ; or les Plaids. c’est en Vicomté pour les héritages & immeubles roturiers ; les Assises, c’est en Bailliage pour les Fiefs & héritages nobles.

Un Exoloit en Retrait, nul, peut être recommencé, si le demandeur en Retrait est encore en l’an & jour du Retrait.

L’Exploit nul & déclaré tel par Jugement, n’interrompt point la prescription de l’an & jour du Retrait.

Par Arrest du Parlement de Paris, du 31. May 1656, rendu dans nôtre Coûtume, il a été jugé deux choses ; l’une, qu’en matière de Retrait l’obmission faite par le Sergent d’avoir fait mention du domicile des témoins, n’étoir point une nullité dans l’Exploit.

L’autre, qu’en action de Retrait, le défendeur en Retrait ne pouvoit refuser de répondre sur faits & articles & par serment sur les faits de fraude, mis en avant par le demandeur, sans que le demandeur fût obligé de s’inscrire en faux contre un Acte prétendu frauduleux ; cet Arrest est dans le Recueil des Arrests de Soëfve, tom. 2. Cent. 1. chap. 27.

Il faut remarquer en cet endroit ; 16. Que la vente die la condition de remerer, ne peut être clamée & retirée aprés le tems de la condition expirée, encore que l’an & jour de la vente de la condition de remeter, ne fût pas encore expiré ; art. 107. du Reglement de 1666 ; 20. Que le relevement, ou Lettres de rescision contre la vente faite à condition de remerer, doit être pris dans les dix ans du jour du Contrat de vente, & non du jour de l’expiration de la faCulté de remerer ; art. 110 du même Reglement.

Il n’y a point de relevement, ou Lettres de restitution ou rescision, contre des obmissions ou nullitez faites en Retrait, même à l’égard des mineurs.


ARTICLE CCCCLXXXV.

E T où l’acheteur seroit demeurant hors la Vicomté où sont assis lesdits héritages, il suffira de la signifier aux détenteurs desdits héritages, soit Fermier, Receveur ou autre.

Suivant la regle generale, toute assignation doit être donnée à personne ou domicile ; cependant en matière de Retrait l’assignation peut être donnée aux détempteurs des héritages contentieux & qu’on entend retirer, soit au Fermier, Receveur ou autre demeurant sur les héritages, principalement si l’acquereur défendeur en Retrait, étoit domicilié & demeuroit hors l’etenduë de la Vicomté dans laquelle sont assis les héritages qu’on veut retirer, & le défendeur en Retrait ne seroit point recevable à demander son renvoi devant le Juge de son domicile ; parce que cette action seroit dans ce cas une action réelle qui ne pourroit être portée que devant le Juge de la Glebe ; Arrest du Parlement de Normandie, du 10. Janvier 1633 ; mais sila demande en Rétrait étoit formée au domicile de l’acquereur, elle pourroit être portée devant le Juge de son domicile, & même elle seroit sujete aux Lettres de commitiimus & de renvoi, comme étant dans ce cas une action personnelle, ou du moins mixte.

En matière de Retrait, soit lignager ou féodal, il faut suivre les formalitez de la Coûtume où les héritages & immeubles qu’on veut retirer, sont siruez.

La contestation des Retraits lignagers ou féodaux des terres & héritages nobles, appartient aux Baillis Royaux, & la contestation des retraits des hérita-ges & immeubles roturiers appartient aux Vicomtes ; les Juges de Seigneurs ne peuvent prendre connoissance de ces sortes de differends.

Une Assignation en Retrait, donnée devant un juge incompetent, est nulle & ne peut interrompre la prescription de l’an & jour, aprés toutefois que l’incompetence en aura été jugée ; mais la demande pourroit être réiterce, si le Retrayant étoit encore dans le tems du Retrait ; Arrest du même Parlement, du 2. Juillet 1676. Quod enim est nullum, nulium proaucit effectum.


ARTICLE CCCCLXXXVI.

L Es fruits sont acquis au Retrayant du jour de l’ajournement, dépuours ou garnissement qu’il aura fait des deniers du prix princi-cipal du Contrat, & loyaux coûts.

Le Retrayant doit offrir par son Exploit le prix principal de la vente, avec les frais & loyaux couts, en monnoye d’or ou d’argent ou autre monnoye ayant cours, & l’Exploit contiendra en même rems interpellation à l’acquereur de recevoir les offres & d’exhiber son Contrat d’acquisition, sinon & à faute de ce, que le Retrayant consignera le prix principal, & une certaine. somme pour les frais & loyaux couts, & à parfaire aprés que la liquidation. en aur a été faite ; mais faut e il toujours offrit réellement le prix principal en argent comptant & à découvert, & non une partie ou quelques pieces d’or ou d’argent ou autre monnoye ayant cours, comme il se pratique à Paris, & dans d’autres Coutumes semblables à celle de Paris, avec une certaine somme pour les frais & loyaux couts.

Le Retrayant gagne les fruits du jour de l’ajournement & des offres valables. par lui faites de rembourser à l’acquereur le prix principal & les loyaux coûts, sans que la consignation soit nécessaire pour donner les fruits au Retrayant ; Arrest du Parlement de Roüen, du 4. Decembre 1653. parce que le refus déraisonnable de l’acquereur de recevoir, ne peut & ne doit nuire ni préjudicier au Retrayant qui a son argent prét & comptant, qui l’exhibe & qui l’ossre réellement.

Par la maxime, que toute consignation se doit faire autore Pratore, un Retrayant ne pourroit consigner les sommes par lui offertes, qu’en vertu d’Or-donnance de Justice, Sentence ou Jugement, à peine de nullité de la consignation.


ARTICLE CCCCCLXXXVII.

E T où l’aquisiteur seroit resusant ou délayant d’obéir à la Clameur, il suffira d’offrir les deniers du prix & loyaux couts, pour gagner les fruits du jour de l’offre.

Les termes dans lesquels cet Article est conçû, ne laisse aucun doute que de Retrayant n’est point obligé de consigner les sommes par lui offertes pour gagner les fruits, mais qu’il les gagne du jour de ses offres, puisqu’il est dit par cet article, que lorsque l’acquereur refuse de prêter le gyron ou de donner les mains sur le Retrait, & de délaisser au Retrayant la chose venduë, il sufsira au Retrayant pour gagner les fruits, d’offrir par l’Exploit le prix principal & les loyaux couts, avec déclaration qu’il consignera les sommes offertes à ses risques, périls & fortune : cependant en Retrait conventionnel il n’y auroit que la consignation actuelle & faite dans les formes, qui pourroit donner les fruits au Retrayant, & non les simples offres ; il n’y auroit aussi que la consignation qui pourroit arrêter le cours des arrerages d’une rente ou des interêts qui seroient légitiment dus.

En matière de Retrait conventionnel ou faculté de rêmerer, non seulement la déchéance de cette faculté n’est point acquise de plein droit pour n’avoir point été exèrcée dans le tems marqué & préfini par le Contrat, il faut un jugement qui ait déclaré le Retrayant conventionnel déchû du Retrait ou faculté de remerer, mais encore le tems du reméré ne courera que du jour que l’acquereur aura duëment interpellé le vendeur d’exercer la faculté de remerer dans le tems porté au Contrat, sinon qu’il en sera déchù ; il faudroit même qu’il intervint un Jugement sur cette assignation, mais aprés cela il n’y aura plus lieu au Retrait conventionnel.


ARTICLE CCCCLXXXVIII.

L Es grains étans sur la terre après le jour S. Jean-Baptiste, sont réputez meubles, encore qu’ils ne soient fiez ni coupez, tout ainsi comme s’ils étoient séparez du sol.

Aprs la Saint Iean-Baptiste les grains, de quelque nature & qualité qu’ils soient, gros ou menus, ne font plus partie du fonds, & sont réputez meubles, quoiqu’ils ne soient pas encore séparez du fonds, fiez, coupez ni recueillis, ni même en maturité à cause de mauvais tems ou autrement ; & quant aux pommes, poires & raisins, ils sont réputez meubles le premier Septembre, quoi-que non recueillis & non en maturité.

Cette décision regle l’état auquel les fruits doivent rester au profit du Retrayant, du jour de son assignation & offres en Retrait : il ne gagne les fruits con-sistant en grains de l’héritage rétiré du jour de l’ajournement & des offres de rembourser le prix de la vente & les loyaux couts, qu’au cas que l’ajournement & les offres soient faites avant la Saint Iean-Baptiste ; car aprés la Fête de Saint Iean-Baptiste les grains appartiennent à l’acquereur, nonobstant l’assignation en Retrait & les offres, & même nonobstant que le Retrayant eût consigné valablement ses deniers : mais si la demande en Retrait a été formée avant la Saint Jean, ils appartiennent au Retrayant du jour de son assignation. en Retrait & ses offres ; il en seroit de même pour les pommes, poires & raisins si la demande a été faite avant le premier Septembre.

De plus si l’héritage contentieux étoit affermé ou loué, l’acquereur n’abroit les fermages ou loyers que du jour qu’ils seroient échus & dus, parce que les deniers des fermages & loyers ne sont meubles qu’à leur échéance,


ARTICLE CCCCLXXXIX.

L’Acheteur sera payé de ses airures, semences & engrais, s’il n’a les fruits ; & outre il aura pour le terrage des deniers du fermage ou du prix qu’eût pû être baillée la terre, prorata du tems qu’il a possedé avant l’ajournement.

Le Retrayant ne peut gagner ni avoir les fruits qu’en remboursant les labours, engrais & semences à l’acquereur, & même la valeur des fermages de l’héritage au prorata & à proportion du tenis que l’acquereur a joüi de l’héritage avant la demande en Retrait, sur le pied du bail, s’il y en a, & que le bail soit véritable & sincere & devant Notaire, ou reconnu devant Notaire ou en Justice avant la demande en Retrait, sinon suivant l’estimation qui sera faite du revenu annuel de l’héritage.

Mais il seroit permis au Retrayant d’abandonner tous les grains de l’héritage à l’acquereur, pour s’exempter de lui rembourser & payer les labours, engrais & semences, & le prix du Bail.

L’acquereur ne peut faire aucune dépense dans l’héritage par lui acquis, pendant l’an & jour du Retrait, ni y faire bâtimens ni réparations, s’il ne l’a ex-pressément stipulé par son Contrat, ou que les réparations ne fussent absolument necessaires pour la conservation de la chose ; c’est pourquoi l’acquereur prudent ne doit point entrer en possession, sans avoir fait dresser Procés verbal de l’état des lieux par autorite de Justice, son vendeur present ou dûëment appellé, il pourra même faire faire un Bail au rabais des réparations urgentes & nécessaires, aux termes du Proces verbal ; il peut encore moins dégrader & déterriorer les lieux, & s’il le faisoit, il seroit tenu de les rétablir avec dommages & intéréts.

L’acquereur qui est évincé de l’héritage ou autre immeuble par la voye du Retrait, n’est point en droit de prétendre l’interét du prix de son acquisition, conTre le Retrayant, encore que par le Contrat deavente il eût stipulé l’interét de ses deniers en cas de ReTrait ; Arrests du Parlement de Roüen, des 24 Fevrier 1656, & 1s suin 1665, saus à se pourvoir contre le vendeur.


ARTICLE CCCCXC.

E T quant aux Prez, bois, pommes & autres fruits naturels, l’acheteur en sera payé au prorata du tems qu’il aura possedé avant l’a-journement, sur l’estimation qui en sera faite, si mieux le Clamant ne lui veut payer l’interêt des deniers du Contrat au denier quinze.

Lorsque le Retrayant gagne les fruits des prez, bois, pommer, poires, raisins, & autres fruits naturels, étans sur l’héritage rétiré, comme il n’y a ni labours ni semences à rembourser à cet égard, l’acquereur en fera payé & remboursé par le Retrayant au prorata & à proportion du tems qu’il a possedé l’héritage avant & jusqu’à la demande en Retrait, suivant l’estimation qui sera faite de ces fruits par Experts en la manière accoûtumée, si mieux n’aime le Retrayant lui payer l’interét du prix du Contrat de vente au denier quinze, aux termes de cet Arric le ; mais à present au denier vingt, suivant l’’Article 100. du Reglement de 1666. Mais quand l’acquereur n’a point les grains, le Retrayant doit lui rembourser les labours, engrais & semences, & en outre il a pour le terrage les deniers du fermage, ou du prix que l’héritage eût pû être baillé à ferme, au prorata du tems qu’il l’a possedé avant l’ajournement en Retrait.


ARTICLE CCCCXCI.

L E garnissement doit être fait en or ou argent monnoyé ayant cours ; & au cas que la Clameur soit gagée, le garnissement doit être fait dans les vingt-quatre heures.

Le garnissement doit être fait en or ou argent monnoyé ayant couts.

Le mot de garnissement, veut dire ici remboursement ou consignation.

Il n’est pas nécessaire que le remboursement ou la consignation foit faite en la même monnoye que l’acquereur avoit donnée au vendeur, il suffit de rembourser ou consigner dans la monnoye du Prince & ayant cours dans le Royau-me, mais non en papier.

Et au cas que la Clameur soit gagée, le garnissement doit être fait dans les vingtquatre Heures.

Le Retrayant auquel le Retrait a été age, c’est-à-dire consenti par l’acquereur, & auquel l’acquereur à donné les mains, est tenu fut le refus de l’acque-reur, de garnir & consigner réellement & en entier ses deniers en monnoye d’or ou d’argent ayant couts, & non en papier, comme Billers, Promesses, Obligations ou Contrats, dans vingt-quatre heures, à compter du jour de la declaration par écrit de l’acquereur, l’acquereur present ou dûëment appellé ; & si le Retrait a été adjugé en Iustice, dans les vingt-quatre heures du jour de la Sentence ou Jugement d’Adjudication du Retrait, à peine de déchéance du Retrait.

Lorsque l’acquereur donne volontairement les mains & consent sans aucune contestation à la demande en Retrait, le Retrayant est tenu de consigrer les deniers du Retrait dans vingt-quatre heures, à compter du jour de la declaration & consentement par écrit de l’ac quereur, quoique les delais de l’Assignation en retrait ne soient pas encore échus, à peine de déchéance du Retrait ; Arrests du Parlement de Normandie, des S Décembre 1651, & 27 Fevrier 1658.

Il en seroit de même, si le Retrait avoir ête adiugé en Justice par Sentence ou Jugement ; le Retrayant seroit tenu de rembourser, ou au refus de l’acquereur de recevoir, consigner dans les vingt-quatre heures du jour de la Sentence ou Jugement, ou au jour & heure marquez par la Sentence ou Jugement ; Arrests du même Parlement, des 1s Juillet 166z & 13 Décembre 1670.

Le remboursement doit être fait au domicile de l’acquereur, & non au lieu où l’Instance est pendante, si l’acquereur n’y a pas son domicile ; Arrest du même Parlement, du premier Fevrier 1630.

Un Retrayant pourroit renoncer au Retrait, encore qu’il lui eût été adjugé par Sentence ou Iugement, pourvû que cela se fit incontinent, ou tout au plus dans les vingt-quatre heures du jour de la Sentence ou Jugement adjudicatif du Retrait.

Une déclaration ou consentement verbal de l’Acquereur, qu’il prête le gyron, obéi & donne les mains au Retrait, ne suffiroit pas pour mettre le Retrayant en demeuré, il faut qu’il soit par écrit & bien & dûëment signifié à personne ou domicile, ou du moins au lieu où l’Assignation en Retrait a été donnée.


ARTICLE CCCCXCII.

E T s’il y a eu refus, & depuis obéissance, le garnissement doit être fait dans les prochains Plaids si c’est Terre roturiere, & si elle est noble, dans la prochaine Assise.

Il y a cette différence entre le Retrait gagé & consenti par l’acquereur extrajudiciairement & avant l’échéance de l’Assignation en Retrait, & le Retrait contesté en Justice, & depuis gagé ou adjugé en Piaidoirie où Inssance, que dans le premier cas le Retrayant est tenu de rembourser ou consigner les deniers du Retrait dans les vingt-quatre heures de la declaration & consente ment de l’acquereur, au lieu que dans le second cas le remboursement où la consignation doit être faite dans les vingt-quatre heures dn jour de la Sentence ou Jugement d’Adjudication du Retrait, renduë aux Assises du Bailly s’il s’aoit d’un Fief & héritage noble, où aux Plaids du Vicomte s’il est question d’un héritage roturier : On peut mête offrir le remboursement, ou faire le rembour sement, ou consioner pendant l’Audience du Juge ; mais si on le faisoit aprés, il faudroit que du moins cela se fit dans le jour des Assises où des Plaids, & même sur une Sommation par le ministere d’un Huissier ou Sergent.

Quoique le remboursement eût été ordonné en Justice reglée, & en vertu de Sentence ou Jugement, ce n’est point devant le Juge que le rembour sement duit être fait, mais devant un Notaire ou Tabellion ; Arrest du Parlement de Roüen, des S. Juillet 161s & sAoût 1622.


ARTICLE CCCCXCIII.

T Out lignager qui a renoncé à user de ses droits de Clameur, soit lors du Contrat ou aprés, n’y peut revenir.

Le parent lignager majeur de vingt ans, & capable de retirer, qui auroit expressément & formellement, & par écrit, renoncé à son droit de Rerrait, soit avant où lors du Contrat de vente ou depuis, né, seroit plus recevable à intenter la demande en Retrait lignager, quand bien même cette renonciation n’auroit été faite qu’en faveur du vendeur ; car une pareille renonciation profiteroit à l’acquereur, même contre tous les lignagers ; il faut dire la même chose du Seigneur, qui auroit renoncé au Retrait seudal : Mais il faut qu’une renonciation de cette qualité soit expresse & formelle, elle ne pourroit s’induire de la seule presence, ou de la signature du lignager ou du Seigneur an Con-trat de vente, ou d’autres circonstances ; en un mot, il faut que la renonciation soit faite par un Acte, soit devant Notaire ou sous signature privée, ou en Iustice réglée, la preuve par témoins ne seroit pas recevable à cet égard. L’héritier du parent lignager ou du Seigneur, qui auroit renonce au droit de Retrait, ne pourroit aprés la mort de ce parent ou du Seigneur, & aprés avoir accepté sa succession, former la demande en Retrait, auquel celui dont il est héritier avoit renoncé ; Arrest du Parlement de Roüen, du y Fevrier 1673.

Comme la cession du Retrait lignager est nulle dans son principe, le parent qui auroit fait une pareille cession, ne seroit pas pour cela déchu du Retrait, il pourroit en former la demande, nonobstant la cession ; mais il seroit plus sûr de faire préalablement déclarer la cession nulle, où du moins aprés avoir formé la demande en Retrait, faire déclarer la cession nulle.

Quoique le parent le plus proche du vendeur, soit sommé & interpellé par un parent plus éloigné, d’acheter l’heritage qu’on entend retirer, & que le parent ainsi sommé & interpellé ait déclaré qu’il ne vouloir puint l’acheter, il n’est pas pour cela exclut du Retrait, il pourra l’exercer en temps & lieu ; il en seroit de même si le vendeur avoit offert de vendre l’héritage à son parent lignager ou au Seigneur de Fief.


ARTICLE CCCCXCIV.

L E droit de clameur de bourse & lignagere, est de sa nature incessible, & néanmoins est transmissible aux heritiers.

Par l’article 116. du Reglement de 1686, le droit de Retrait féodal n’est pas moins incessible que le Retrait lignager ; ils sont cependant l’un & l’autre transmifsibles aux heritiers du parent lignager de la ligne d’où procede l’héritage, & aux heritiers des Seigneurs feodaux ; mais à l’égard dés Retraits conventionnels & à droit de Lettre luë, ils sont cessibles.

Il y à pourtant cette difference entre le Retrait lignager & le Retrait féodal, que le Retrait féodal ne peut en aucun cas être cédé, au lieu que le Retrait lignager peut être cedé de parent à parent du lignage ; ainsi un parent plus proche peut faire cession de son droit de Retrait lignager à un parent plus éloigné, parce que le Retrait lignager n’est incessible que par rapport à un êtranger de la famille & de la ligne du vendeur.

Les créanciers du parent lignager ou féodal, ne peuvent exercer le Retrait lignager ou féodal, comme subrogé aux droits & exerçans les droits de leur débiteur qui avoit droit de retirer, sans même qu’ils pussent alléguer que leur Aébiteur ne veut pas retirer, dans le dessein de les frustrer d’un avantagerqu’ils trouveroient dans le Retrait.


ARTICLE CCCCXCV.

L E mari ou ses héritiers peuvent répeter la moitié des deniers qu’il a déboursez pour retirer l’héritage au nom de sa femme.

Si un mari retire un héritage ou autre immeuble par Retrait lignager ou féodal, du chef & au nom de sa femme, ce qu’il peut faire sans le consentement & participation de sa femme, lui ou ses heritiers peuvent repeter la moitié des deniers, frais & loyaux coûts du Retrait, si la femme ou ses heritiers veulent avoir l’héritage ouimmeuble retiré : ce qui a tieu, soit que la femme soit séparée de biens d’avec son mari, soit qu’elle ne le soit pas ; Arrét du Parlement de Normandie du 21 May 1632 ; & même les créanciers du mari pourroient répeter contre la femme ou ses heritiers le prix entier du Retrait, si la femme étoit lors du Retrait séparée de biens d’avec son mari, si mieux n’aimoit la femme, ou ses heritiers, abandonner l’héritage rétiré aux créanciers du mari, ce qui leur seroit permis ; Arrét du même Parlement du 13 Mars x655.

Le mari, ou ses heritiers, qui étoit obligé par son Contrat de mariage d’employer les deniers doraux de sa femme en héritages ou autres immeubles, ne pourroient repêter contre la femme ou ses heritiers la moitié des deniers employez au Retrait d’un héritage ou autre immeuble, fait par le mari du chef & au nom de sa femme, si les deniers dotaux de la femme ont été employez dans cette acquisition, avec déclaration de rembourser & payer le prix du D Retrait ; parce qu’en ce cas le mari est censé n’avoir rien payé de ses deniers pour ce Retrait.

Les heritiers de la femme sont tenus de faire raison au mari ou à ses heritiers, de la moitié des ameliorations & augmentations faites par le mari, sur l’héritage par lui rétiré du chef & au nom de la femme, sur le pied de l’estimation qui sera faite des ameliorations & augmentations.

L’action en répetition des deniers déboursez par le mari pour un Retrait du chef & au nom de sa femme, est une action mobiliaire ; comme les deniers qui seroient rendus & remboursez au mari à ce sujet, seroient mobiliers, & conséquemment l’action ou les deniers appartiendroient aux heritiers des meubles & acquêts du mari, & se regleroient comme meubles ; Arrêt du même Parlement du 1s Decembre 1655 ; & même cette repetition n’appartiendroit pas moins au mari ou à ses heritiers, si le mari avoit fait le Retrait au nom des enfans du premier lit de sa femme.

ARTieLE


ARTICLE CCCCXCVI.

E T où il auroit vendu ou hypotequé son propre pour retirer héritaage au droit de sa femme, elle ni ses héritiers n’y peuvent prétendre aucune chose que le propre ne soit remplacé.

Cet Article est fondé sur un premier principe dans nôtre Coûtume, qu’il n’y point d’acquêts que les propres ne soient remplacez, ainsi la femme ni ses héritiers ne peuvent rien avoir niprétendre dans l’héritage ou autre immeuble reti-ré par le mari, du cher & au nom de la femme ou des enfans d’un premier lit de la femme, que les propres du mari, ou les immeubles que le mari avoit avancez au jour de son mariage, n’ayent été remplacez, si le mari en a vendu, engagé ou hyporequé pour le Retrait & en rembourser le prix, frais & loyaux-coûts du Retrait ; & aprés le remplacement, le mari ou ses héritiers seront en outre remboursez par la femme ou ses heritiers, de la moitié des deniers remboursez pour le même Retrait, excedans la valeur des propres du mari, si mieux n’aime la femme ou ses héritiers abandonner l’héritage retiré au mari ou à ses hé-ritiers ; & même pour donner lieu au remplacement des propres du mari, il suffit que les propres ou partie d’iceux, ayent été vendus, alienez, engagez ou ypotequez, quoiqu’il n’y ait point eû de déclaration & quittance de remploi, & qu’il ne paroisse point que les deniers de cette aliénation ou engagemenr, ayent été employez au payement & remboursement du Retrait, non seulement parce qu’il n’y a point d’acquêts que les propres ne soient remplacez, iais encore pour éviter les avantages indirects qu’un mari pourroit faire à sa femme pendant & constant le mariage ; Arrest du Parlement de Normandie, du 28. danvier 1660.


ARTICLE CCCCXCVII.

I L ne suffit pas que le Rérrayant s’oblige de décharger l’Acheteur qui s’est soumis d’acquiter le Vendeur d’aucune rente envers ses Créanciers, ains sera & doit être contraint à garnir les deniers desdites rentes pour la décharge dudit Acheteur ; & où ledit Acheteur ne seroit tenu qu’à la saisance & raquit desdites rentes, il suffit que le Rétrayant s’oblige de l’en décharger, pourvû qu’il soit ainsi accepté par le Vendeur ; & doit ce faire sous l’hypoteque de tous ses biens, & non seulement de l’héritage retiré ; en quoi faisant, l’Acheteur demeure déchargé de tout.

Ce qu’on peut inferer en general de cette disposition, est que l’acquereur doit être indemnisé par le Retrayant, de maniere que non seulement le Retrayant soit tenu de lui rembourser les deniers qu’il a payez comptant, & ceux qu’il s’étoit obligé de payer dans de certains temps, frais & loyaux coûts, mais encore les principaux des rentes dont le vendeur avoit chargé l’acquereur de les amortir & racheter dans un certain temps, sans qu’il suffise au Retrayant de dire à l’acquereur qu’il s’obligeroir & prometrroit de l’en decharger, & de les payer & continuer à l’avenir en son lieu & pface, même de les amortir & racheter dans un temps, il faut qu’il les rachete & rembouse actuellement, aprés que le Retrait est gagé & consenti, ou adjugé par Sentence ou Jugement ; Arrêts du Parlement de Normandie des 24 Avril 1629, & o Mars 1650. Mais si par le Contrat de vente l’acquereur s’étoit seulement obligé à la souffrance, c est-à-dire à la continuation des rentes, & non au rachat & amortissement d’icelles, il suffiroit au Ratrayant de se charger de ces rentes sous l’obligation & hypoteque generale de tous ses biens presens & à venir, & de l’hypoteque speciale de l’héritage retiré, sans que l’une dérogeât à l’autre, pourvil toutefois, & non autrement, que cela se fit du consentement exprés du vendeur, aprés quoi l’acquereur sera & demeurera pleinement & entierement quite & déchargé, mais si le vendeur ne vouloit pas accepter ce pûrti, le Retrayant seroit tenu de rembourser, & au refus de l’acquereur, consigner les principaux des rentes ; & même il ne seroit pas admis à offrir de donner caution à l’acquereur pour sa sure té sur ces rentes, parce que l’acquereur pourroit alléguer qu’il ne trouveroit pas sa décharge dans cette caution, & qu’il vouloit être déchargé de tout purement & simplement, puisqu’il étoit dépossedé de la chose venduë par le Retrait sur lui exercé.


ARTICLE CCCCXCVIII.

L’Héritage donné en faveur ou récompense de service, peut être retiré tant par le lignager que par le Seigneur, en rendant la vraye valeur & estimation de l’héritage.

Cet Article a une disposition sigulière ; car quoique le Retrait lignager ou féodal n’ait point lieu dans les donations purement gratuites & faites par pure liberaliré, mais seulement dans les ventes & Contrats de fieffe à rente rachétables, il est néanmoins permis par cet Article de retirer, tant par Retrait lignager que par Retrait féodal, l’héritage donné en faveur & pour ré-compense de services, en payant & rendant par le Retrayant au donataire la véritable & juste valeur de l’héritage donné, suivant l’estimation qui en sera faire sur le pied de ce qu’il valoit au temps de la donation ; peut-être que la Coûtume n’a pas regardé une donation de cette qualité comme une donation qui n’a eu pour motif qu’une pure liberalité, mais comme un titre remunératoire qui approchoit du Contrat do Et facias, ou d’une quitance des services rendus au donateur, qui au lieu de les payer en deniers comptans, soit parce qu’il ne le voulût pas ou qu’il ne le pût pas, a donné un héritage ou autre immeuble à celui dont il avoit regu les services ; & dans ce cas la Coûtume a admis le Retrait lignager & féodal, comme dans les véritables Contrats susceptibles du Retrait lignager ou féodal ; quoiqu’il en soit, il faut restraindre ces sortes de donations dans leur cas particulier par rapport au Retrait, & en exclure toutes autres donations.


ARTICLE CCCCXCIX.

A Près que l’action en Retrait lignager, Seigneurial, ou à droit de Lettre lûë, aura été discontinuée par an & jour, le Clamant n’est recevable après d’en faire ancune poursuite.

Comme l’action de Retrait lignager, féodal & à droit de Lettre luë, ne dure que pendant l’an & jour, de même l’instance où il s’agit de ces Retraits, ne dure que pendant an & jout faute de poursuites & diligences ; Arrêts du Parlement de Roüen du 22 Fevrier 1657 ; & en ce cas cesse la disposition de l’Ordonnance de Roussillon, qui met les peremptions d’instances à trois années faute de poursuites.

La peremption d’instance du Retrait lignager, féodal & à droit de Lettre lué, par discontinuation de poursuites pendant an & jour, emporte la déchéance pure & simple du Rerrait, sans que le Retrayant ou autre puisse en recommencer la poursuire par nouvelle action ni autrement ; parce que le Retrayant se trouveroit hors l’an & jour.

Une instance d’appel de Sentence reuduë en matière de ces Retraits, dure trois années comme les instances à l’ordinaire, parce qu’en cause d’appel il n’est plus question de l’action en Retrait, mais seulement du bien ou du mal jugé de la Sentence dont est appel ; Arrét du même Parlement du 27 Juin 1657.

La disposition de cet Article n’a point lieu en Retrait conventionnel ; la péremption d’instance ne s’acquiert que par trois années de cessation de pourquites ; Arrét du même Parlement du premier Fevrier réa8 ; parce que cette intance est une instance à l’ordinaire, & qui procede d’une convention, & non de la Coûtume.

Il n’est pas douteux que la péremption d’instance a lieu tant entre majeurs & mineurs, & : toutes autres personnes, que contre l’Eglise, mais le cours de la péremprion est interrompu par le décés de l’une des parties, ou de l’un des Procureurs des parties, ou par un compromis, & autres moyens de peremption.


ARTICLE D.

T Out Contrat de vente où il y a fraude commise au préjudice du droit de Retrait, appartenant aux lignagers ou aux Seigneurs séodaux, est clamable dans trente ans.

Ce n’est pas assez d’alléguer la sraude, & de dire qu’il y a eu de la sraude concertée entre le vendeur & l’acquereur pour empécher & prévenir le Retrait, il faur le prouver ; & en ce cas la preuve par témoins a lieu, principa-lement lorsqu’il y a un commencement de preuve par écrit ; Arrêts du Parlement de Roüen, des 23 May 1618, 24 Fevrier 1é2o, & 13 Decembre 1658, mais il faut que la fraude ait été commise avec dessein, & qu’elle ait été consomme & executée, même prouvée par évidence ; car ensin il s’agit de détruire un Contrat.

L’effet de la fraude est de perpetuer l’action en Retrait à trente ans, tant pour le Retrait lignager que pour le Retrait féodal : or c’est à die dete-La fraudis, que les trente ans commeucent à courir, le Retrayant n’étant pas en état d’agir avant ce temps-là, & non du jour de la Sentence & publication du Contrat.

In odium d’un Contrat de vente frauduleux, il a été jugé que l’enfant de ceui qui avoit fait & exe la fraude, ne pouvoit exercer le Retrait au préjudice d’un autre Retrayant ; Arrét du même Parlement du 14 May 1625.


ARTICLE Du.

S I rente fonciere est venduë, & non retirée par le Seigneur ou le lignager, le propriétaire du fonds peut retirer ladite rente dans l’an & jour de la lecture du Contrat, & en décharger le fonds, en payant le prix & loyaux couts.

Le Contrat de vente d’une rente fonciere peut être clamé en trois manieres : re. Par Rétrait lignager ; 28. Par Retrait féodal ; 3. Par le propriétaire du fonds ou héritage sur lequel la rente est à prendre, supposé que le lignager ou le Seigneur n’usent point de Retrait. Ces trois Retraits doivent être formez dans l’an & jour de la lecture & publication du Contrat de vente, comme Il se pratique pour les Retraits d’heritages & autres immeubles ; & le Retrayant sera tenu de payer & rembourser le prix du Contrat de vente de la rente, & les frais & loyaux coûts.

Si le créancier de la rente la vendoit au propriétaire de l’héritage sujet à la rente, comme ce Contrat seroit plutôt un amortissement & une extinetion de la rente, consenti par le créancier nonobstant que la rente fût perpe-tuelle & non rachétable, qu’un Contrat de vente, en ce cas le Retrait lignager ou féodal n’auroit point lieu sur le propriétaire dont l’héritage se trouve par à déchargé de la rente ; Arrêt du Parlement de Roüen du 37 Juin 1655, & art. 18 du Reglement de ré6s ; le propriétaire de l’héritage ne pourroit pas même être poursuivi par action en déclaration d’hypoteque, ni par voie de saisie réelle ni autrement, pour raison de cette rente par les créanciers du vendeur ; art. 76. du même Reglement.

Une mouvance féodale venduë à une tierce personne, est sujere à Retrait tant lignager que féodal, Arrêt du même Parlement du 20 Aoust 16683 ; mais non si la mouvance est venduë au Vassal, parce que dans ce cas ce n’est pas une vente, mais une extinction & liberation de la mouvance ; mais cette difficulté ne peut presque point arriver dans notre Coûtume, parce que le Vassal n’y peut vendre ses mouvances au préjudice du Seigneur dominant, à moins que ce ne soit de son consentement.

Par Arrét du 25 May 162s du même Parlement, il a été jugé qu’un droit de Tiers & Dangers, appartenant au Roi & faisant partie de son Domaine engagé, ayant été vendu par l’Engagiste à une tierce personne, avoit pû être rétiré par de propriétaire du bois, sans préjudice des droits du Roi-


ARTICLE DII.

B Aux à ferme à longues années, faits pour plus de neuf ans, sont à retrayables ; comme aussi est la vente d’un usufruit faite à autre qu’au propriétaire, lequel est préferé à la Clameur.

Baux à ferme à longites années, faits pour plus de neuf ans, sont retrayables.

On regarde ces sortes de baux comme une aliénation du fonds ou héritage affermé ou loüé ; c’est pourquoi ils sont sujets au Retrait lignager où féodal, comme le seroit le Contrat de vente du fonds & de l’héritage.

On appelle Baux à longues années, ceux qui passent & excedent neuf années.

a cette occasion on remarquera ici en passant qu’il est expressément défendu par les Ordonnances, d’acheter des grains en ver.

Les Contrats emphitéotiques & les Contrats de fieffe à rente viagere pendant la vie du bailleur, ne sont point retrayables ; Arrêt du Parlement de Normandie du premier Octobre réte ; les Contrats de fieffe à rente, quoiqu’à rente perpétuelle & non rachétable, sont encore moins retrayables.

Comme aussi la vente d’un usuftuit, faite à autre qu’au propriétaire lequel est préféré à la Clameur.

De manière donc qu’un usufruit d’un héritage ou autre immeuble, vendu, n’est sujet au Retrait lignager ou féodal, que lorsque le propriétaire de l’héritage ou immmeuble sur lequel est l’usufruit, ne le veut point retirer ; car la Clameur ou Retrait du propriétaire de l’héritage ou autre immeuble, est préferable au Retrait lignager ou féodal ; parce que dans ce cas l’usufruit est consolidé au fonds de l’héritage & immeuble.

Si l’usufruitier achetoit l’héritage sur lequel est l’usufruit, cet téritage seroit à la vérité rétrayable, mais l’usufruit subsisteroir.

La vente des fruits, soit ceux pendans par les racines, soit ceux dont la vente est faite avant la saint sean, ou avant le premier Septembre, soit apres, ou ceux siez & séparez du fonds, ne sont point rétrayables ; parce que les fruits en quelque état qu’ils se trouvent, ne sont point de véritables immeubles.

Comme les Contrats de rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, ne sont point retrayables, de même la vente de l’usufruit de ces sortes de rentes, ne sera point sujet à Retrait.


ARTICLE DIII.

E N Retrait conventionnel le Retrayant doit au jour de lassignation offrir, consigner & déposer actuellement les deniers du Con-trat, autrement il n’est recevable.

La vente faite à la faculté de remerer ne rend l’acquereur incommutable qu’aprés le tems du reméré, expiré, tel qu’il est exprimé par le Contrat de venté, & si la faculté de remerer est à toujours, le tems du reméré sera de trente ans, VR3 mais l’acquereur ne laisse pas pendant ce tems-là de jaire les fruits siens, & sans être tenu de les restituer au vendeur qui exerceroit la faculté de remerer.

Le tems de remerer ne pourroit être prolongé par l’acquereur au préjudice du Retrayant.

En matière de Retrait conventionnel, il ne suffit pas au Retrayant d’offrir le prix de la vente & les loyaux coûts, il est en oûtre indispensabiement tenu, en cas de refus de l’acquereur, de recevoir son remboursement, de consigner & déposer les deniers du Contrat de vente actuellement & réeilement ës mains du Receveur des consignations ; car depuis que les Receveurs des consignations ont été mis en titre d’Office, il est défendu aux Notaires, Tabeilions, Greffiers & autres, de recevoir aucunes consignations, & aux Juges de les ordonner ; & ces offres & consignation doiventêtre faites par le Retrayant le jour de l’assignation en Retrait, apres lequel tems il y seroit non recevable, si le rems de remeter étoit fini & expire.

Il n’est point nécessaire de faire la consignation en présence de l’acquereur, il suffit qu’elle soit faite dans le tems du reméré, encore bien qu’elle n’eûr été signifiée à l’acquereur qu’aprés le tems du reméré, expiré ; Arrest du Parlement de Normandie, du 20. Janvier 167s. Cependant il seroit bon d’appeller l’acquereur à la consignation.

La consignation qui doit être faite dans le tems du remerer, s’entend seulement du prix principal du Contrat de vente ; car à l’égard des frais & loyaux coûts, ou du Treizième qui auroit été payé par l’acquereur au Seigneur, le vendeur Retrayant n’est point obligé de les consigner, il lui suffira de les offrir par l’Exploit en une certaine somme, sauf à parfaire & augmenter, si la diquidation est plus forte que la somme offerte, ou de les offrir en general & tels qu’ils seront liquidez.

La vente de la condition de remerer ne peut être clamée & retirée aprés le tems passé & expiré de la condition, encore que l’an & jour de la vente de la condition de remerer, ne soit pas expiré ; art. 109. du Reglement de 1666.

Il faut un Jugement pour faire décheoir du Retrait conventionnel, & le seul Contrat ne suffit pas ; & même le tems de remerer durera tant que celui qui a la faculté du reméré, n’aura pas été déclaré déchu du Retrait par un Iugement.

Il est à remarquer au sujet des consignations, que les Receveurs des eonsignations doivent rendre les mêmes especes, qui leur ont été consignées & dé-posées ; Arrest du même Parlement, du 12. Janvier 1653. Mais c’est ce que ces Depositaires publies n’observent gueres, ou pour mieux dire, n’observent point, ils payent en monnoye & especes qu’ils jugent à propos.