Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.
TITRE XX. DES PRESCRIPTIONS.
ARTICLE DXXI.
P Rescription de quarante ans vaut titre en toute Justice, pour quelque chose que ce soit, pourvû que le possesseur en ait joüit pai-siblement par ledit tems, excepté le droit de Patronage des Eglises, appartenant tant au Roy qu’autres.
Prescription de quarante ans vaut tître en toute Justice, pour quelque chose que ce soit, pourvu que le Possesseur en ait jouit paisiblement par ledit tems.
La Préscription est un moyen d’acquerir ou de se liberer, rondé sur le tems marqué par la Loy, & sur la possession déterminée par la Coûtume.
Notre Coutume ne connoit que quatre sortes de Prescriptions.
Sçavoir : De quarante ans.
De trente ans.
D’un an.
Er de six mois.
Il n’y a point dans cette Coûtume de Prescription de dix ans entre présens, & de vingt ans entre absens.
On peut encore admettre la Prescription centenaire & immémoriale, L’action hypotecaire est ici prise pour l’action réelle ; car elle est bornée à chose réelle & pétitoire ; c’est rei vindicatio.
Dans cet Article il n’y est parlé que de la Préscription de quarante ans.
Cette Prescription s’ac quiert par une possession paisible & publique de quarante ans consécutifs & continuels, d’une chose immobiliaire ou d’une action immobiliaire réelle & hypotequaire, & cette possession vaut titre en Justice ; ensorte qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un titre, pas même de bonne foi, pour acquerir cette Prescription ; & c’est en ce cas qu’on peut dire, aeossideo quiae possideo,.
Si en alléguant cette Prescription ou une autre, fût-elle centenaire ou immémoriale, on exhiboit un titre vicieux ou contraire à la possession, ce seul titre détruiroit & empécheroit la Prescription ; c’est pourquoi il vaut mieux n’avoir point de titre que d’en avoir un vicieux, La Prescription de quarante ans n’est point nécessaire dans les choses & action mobiliaires & personnelles, la Prescription de trente ans suffiroit.
Le trouble dans la possession interrompt le cours de la Prescription ; il faut qu’elle foit de suite & sans interruption ; mais d’un autre côté, on peut l’acquerir tant par soi-même que par autre dont on a cause & droit, comme par nos Fermiers & Locataires.
La Prescription de, quarante ans a lieu, tant entre présens qu’absens, imajeurs de vingt ans, mais non contre les mineurs & interdits, contra enim non valentem agere non currit Prescriptio ; les femmes, quoiqu’en puissance de mari, y sont sujettes, à la réserve néanmoins de leurs biens dotaux moins que duëment aliénez ; car la Prescription ne commenceroit à cet égard que du jour de la dissolution du mariage, de la même manière que la Prescription contre le tiers coûtumier des enfans, ne commence que du jours de la mort du pere, encore faut-il que les enfans soient majeurs au jour de la mort de leur pere.
Les rentes & redevances Seigneuriales, comme toutes autres rentes, soit constituées, soit foncieres & de fieffe, rachétables ou non rachétables, sont prescriptibles par quarante ans tam active qudm passivè, c’est-âdire, tant par le debiteur que par une tierce personne sur une autre qui en étoit proprié taire avant la Prescription. La bonne foi n’est pas requise pour donner lieu à la Prescription de quarante ans.
Excepté le droit de Patronage des Eglises, appartenant tant au Roy qu’autres.
La Prescription de quarante ans a lieu contre l’Eglise pour ses biens domaniaux comme à l’égard de ceux des Laiques, à la réserve des dixmes solites, desquelles on peut seulement prescrire la quotité ; art. 117. du Reglement de 688 ; mais non le droit ou la proprieté par ceux qui doivent la dixme ; & à l’égard des dixmes des bois, prez & autres dixmes insolites, elles se peuvent prescrire par quarante ans, & elles sont reglées par la possession sur la chose pour laquelle il y a proces, & non par la possession sur le plus grand nombre des autres héritages de la même Paroisse ; art. 118. du même Reglement.
La Prescription a pareillement lieu contre le Roy par rapport à ses biens domaniaux, mais non par rapport aux droits de la Couronne & Souveraineté.
Il n’y a que le droit de Patronage & présentation aux Benefices, tels qu’ils soient, séculiers ou réguliers, simples ou à charge d’ames, qui ne peut être prescrit par quarante ans, soit que le droit de patronage & de présentation appartienne au Roy, ou qu’il appartienne à ses Sujets ; mais le droit de patronage n’est pas pour cela imprescriptible, trois présentations ou collations consécurives & cum effectis, suffiroient pour acquerir le droit de patronage sur autrui.
La possession de quarante ans ou autre, peut être prouvée, tant par titres que par témoins.
L’interruption dans la possession de l’un des co-obligez solidairement, & un seul pour le tout, nuit & préjudicie à l’autre obligé qui n’a point été interrompu ; & même si un des co obligez a une rente, en a payé les arrerages, l’autre qui n’auroit rien payé pendant quarante ans, ne seroit pas liberé de la rente par la Prescription de quarante ans ; parce que dans ce cas, sa Jum uniaes est factum alierius ; Arrest du Parlement de Normandie, du 8. Juillet 1666.
ARTICLE DXXII.
T Outes actions personnelles & mobiliaires sont prescrites par trente ans.
Generalement parlant, toute action personnelle & mobiliaire se prescrit par trente ans paisibles, publies, consécutifs & complets entre majeurs & personnes non privilegiées, quand même l’action hypotecaire qui affecte les immeubles se trouveroit jointe à l’action personnelle ; car en Normandie dés que l’action personnelle est éteinte & prescrite par trente ans, elle ne peur être prorogée à quarante ans par l’action hypotecaire, qui par la nature du Contrat se trouveroit jointe à l’action personnelle & mobiliaire ; & telle est la jurisprudence du Parlement de Roüen, qui ne suit point en cela la jurisprudence de plusieurs autres Cours, & entre autres du Parlement de Paris, qu’on pourroit dire n’être en ce point fondée ni prétextée que sur une subtilité de quelques Auteurs, & en particulier deDumoulin , & non sur des principes solides & conformes à l’équité qui ne souffre point qu’on doive proroger le tems de la Prescription contre le repos des familles ; cependant l’action parmi nous pour demander une rente, soit fonciere ou constituées à prix d’argent, ne peut être prescrite que par quarante ans ; parce que dans l’esprit de notre Coûtume, cette action doit être régardée comme une action réelle & hypotecaire, & non comme une action qui procede de la seul personne du débiteur de la vente.
Toute action est mobiliaire, qui tend à chose mobiliaire, & toute action est personnelie, qui procede ex contractie & conventione, ou lorsqu’on agit du fait de quelqu’un, comme l’action réelle est lorsqu’on demande un fonds.
L’action extraordinaire ou criminelle est mise au nombre des actions personnelles ; mais elle se prescrit par vingt ans, quand même l’accusation auroit été suivie d’une information, decret, & autre instruction ; mais si l’accusation a été suivie d’un Jugement de condamnation par contumace, executé par effigie ou autrement, elle n’est prescriptible que par trente ans.
Il ne faut point de titre, pas même de honne foi, pour acquerir la Prescription de trente ans, il ne faut que la possession ou cessation de possession pendant trenté ans, pour acquerir la Prescription de trente ans.
L’interruption empèche le cours de la Prescription de trente ans comme celle de quarante ans : Or il y a de deux sortes d’interruptions, l’une est naturelle, l’autre est civile ; l’interruption naturelle se fait lorsqu’on est dépossedé par force & par violence ; l’interruption civile se fait par l’assignation donnée en Justice ou par la contestation de la cause ; l’interruption naturelle sert à tous, quoiqu’elle n’ait été faite qu’à un seul, au lieu que l’interruption civile ne profite qu’à celui qui l’a faite, heritiers ou ayans cause.
La saisie réelle ou decret, empéche la Prescription des cinq années pour les arrerages des rentes hypoteques ou constituées ; ensorte que tant que le decret dure, les arrerages courent, encore que ceux ausquels les rentes sont duës, ne se soient pas opposez à la saisie réelle ; art. 147. du Reglement de 1666. a l’égard des arrérages des rentes & redevances Seigneuriales, il faut distinguer par rapport à la Prescription, ou elles sont dûës aux Seigneurs bas & ou moyens Justiciers, ou elles sont dûës aux hauts Justiciers, dans le premier cas on n’en peut demender que trois années ; dans le second on n’en peut demander vingt-neuf années, comme de toutes les rentes de fieffes & foncieres, rachétables ou non rachétables ; & quant aux arrerages des rentes hypoteques ou constituées, on n’en peut demander que cinq années, s’il n’y a demande ou poursuite litterale, La reconnoissance volontaire de sa dette efface la Prescription, même au préjudice des Créanciers de celui qui auroit volontairement reconnu sa dette, nonobstant qu’elle fût prescrite, & même celui qui auroit fait cette reconnoissance, ne pourroit pas se faire restituer contre par les Lettres du Prince ou autrement ; Arrest du Parlement de Roüen, du 19 Aoust 1éay, à moins qu’elle n’eût été faite par force & violence ; un aveu fourni conforme aux anciens, empécheroit même la Prescription d’une redevance ou rente fonciere Seigneuriale, qui de soi seroit sujette à Prescription.
Une Instance qui a été déclarée perie faute de poursuites pendant le tems de l’Ordonnance ou de la Coûtume, est incapable d’interrompre le cours de la Prescription, d’autant que c’est comme s’il n’y avoit point eu de poursuites & de procedures.
ARTICLE DXXIII.
L A faculté donnée par Contrat de racheter un héritage toutefois & quantes, se prescrit par quarante ans.
La faculté de remerer toutefois & quantes la chose immeuble venduë, est prescriptible entre majeurs par quarante ans, aprés lequel tems l’acquereur demeure de plein droit proprietaire incommutable de l’héritage ou autre immeuble par lui acquis, sans qu’il ait besoin d’aucune sommation, interpellation ni Jugement ; dans ce cas-là, dies interpellat pro homine : Mais si la faculté de remerer étoit pour un tems, il faudroit suivre & attendre ce tems, pour pouvoit se dire propriétaire incommutable de la chose ; & même il seroit necessaire d’obtenir un Jugement de déchéance de la faculté de remerer, faute par le vendeur de l’avoir exercée dans le tems marqué par le Contrat de vente.
Si la faculté de remerer accordée pour un tems par le Contrat, avoit été prorogée par un autre convention, la Prescription des quarante années ne commenceroit que du jour de la prorogation expirée.
La Prescription de la faculté de remerer, commencée contre un majeur, est interrompué par la minorité de son héritier ; parce qu’enfin des que cet héritier est mineur, il n’est point en état d’agir par lui-même & d’exercer la faculté de remerer ; il ne tiendroit même à son Futeur qu’à demeurer dans l’inaction & à ne point exercer la faculté de remerer, quoiqu’il eût des deniers suffisans appartenans à son mineur pour faire ce Retrait conventionel ; cela seroit trop dangereux aux mineurs, il est juste que la Prescription dorme pendant la minorité de l’héritier du majeur, contre lequel elle avoit commencé.
Il y a un cas particulier, dans lequel la faculté de remerer est imprescriptible, qui est d’un Greffe vendu par un Seigneur Justicier avec faculte de le pouvoir remerer & retirer toutefois & quantes en remboursant le prix de la vente, frais & loyaux coûts ; il est permis au Seigneur, ses héritiers ou ayans-cause de remerer ce Greffe, & de le retiret, même aprés quarante ans, pour le réunir à sa Justice ; Arrêt du Parlement de Roüen, du 3 Décembre 162t ; & cela en faveur d’une pareille réunion.
ARTICLE DXXIV.
R Ente constituée à prix d’argent en faveur de mariage, par pere, mere ou frere, pour être dot, combien qu’elle soit rachetable, néanmoins la faculté de rachat se peut prescrire par la fille ou ses enfans par quarante ans : mais si elle passe en autre main avant les quarante ans expirez, elle sera toûjours raquitable.
Voici un cas ou une rente constituée à prix d’argent, amortissable par sa nature ou convention, devient irrachetable par le tems seul & sans aucune convention ; qui est qu’une rente de cette qualité, constituée par pere, mere ou frere en faveur de mariage, & pour dot à une fille, devient irrachétable par quarante ans ; & aprés cette Prescription on en peut même demander vingtneuf années d’arrerages, comme si c’étoit une rente fonciere, pourvû toute-fois & non autrement que la rente n’ait point sorti des mains de la fille ou ses enfans, ou descendant d’eux, mâles où femelles, majeurs ou mineurs, avant les quarante ans ; car si elle en avoit sorti avant ce tems-là, elle seroit rachetable a toûjours, c’est un privilege que la Coûtume a accordé à une rente dorable, à condition ; 1. Qu’elle ait été constituée par pere, mere ou frere, & non par un étranger, 2.. Qu’elle ait toûjours été possedée par la fille dotée, ses enfans ou descendans d’eux en ligne directe, pendant quarante ans consecutifs & complets : Il y a plus, c’est qu’aprés ce tems-là, cette rente seroit sujette au Retrait lignager ; Arrest du Parlement de Roüen, du 2o Novembre 1664 ; mais d’un autre coté, quoique cette rente n’eût passé avant les quarante ans, qu’ides collateraux par vente, donation ou succession, ce seroit assez pour empécher qu’elle ne pût acquerir le titre de rente non rachétable ; parce que la Coûtume ne donne ce privilege qu’au cas que la rente reste & demeure entre les mains de la fille, ses enfans ou descendans d’eux en ligne directe pendant quarante ans, à plus forre raison, une rente de cette qualité ne pourroit jamais de venir irrachetable, si la fille, ses enfans ou descendans la vendent, cedenr & en disposent en faveur & au profit d’un étranger, dans ces cas, les possesseurs de cette rente n’en pourrtient demander que cinq années d’arrerages ; car on n’en peut demander vingt-neuf an-nées, que lors qu’elle reste entre les mains de la fille, ses enfans ou descendans, pendant les quarante ans, ou aprés qu’elle est devenuë irrachétable.
Cependant il est à remarquer que quoiqu’une rente constituée à prix d’argent, par pere, mere ou frere en dot d’une fille, soit devenuë non rachétable, on ne peut neanmoins des arrérages d’icelle en constituer une rente ; une rente de cette qualité seroit vicieuse & usuraire ; Arrest du même Parlement, dù 13 Iuillet 1651. Cela ne se peut faire que des arrerages des rentes foncieres & de fieffe, ou des fermages ; parce que les arrerages de ces rentes, où les fermages tiennent lieu des fruits des héritages sujets à ces rentes, ou donnez à ferme, dont on peut faire des capitaux de rentes ; il est même permis d’acheter une rente à moindre prix que le principal de sa constitution, comme le Créancier peut la vendre à plus haut prix que la constitution.
La vente constituée au mari pour son mobil, ne peut devenir arrachetable par quarante ans, encore qu’elle n’eût point sorti des mains du mari, ses enfans & descendans pendant quarante ans consécutifs & accomplis ; Arrest du même Parlement du 8 May 1611.
ARTICLE DXXV.
S I la vente est créée pour fonds ou pour amendement de lotie, la condition de rachapt se peut prescrire par le temps de quarante ans.
Une rente foncière, comme celle de fieffe, ou une rente pour amandement de lotie, c’est-à dire pour soulte, retour & récompense de partage, stipulée rachétable à toujours, la faculté de rachat peut être préscrite par quarante ans consécutifs & accomplis, pourvû néanmoins, & non autrement, que cette rente ait toujours été possedée pendant les quarante ans par la personne à qui elle a été créée & constituée, ses enfans ou descendans en ligne directe ; car si cette rente a passé avant les quarante ans ës mains d’autres personnes, elle sera rachétable à toujours ; cette rente suit en cela les regies de la rente constituée pour dot par les pere & mere, ou autre ascendant à leur fille.
Pour qu’une rente soit réputée avoir été créée pour vente & aliénation d’héritages ou pour soulte de partage, il ne suffit pas qu’elle soit établie par un Contrat qui contienne l’aliénation de l’héritage ou le partage de la succession, il faut qu’il soit dit par le Contrat ou partage, que c’est pour & au lieu de l’héritage donné à rente, & pour tenir lieu au propriétaire de l’héritage qu’il met hors ses mains ; & à l’égard des co-partageans, pour lui tenir lieu au droit qu’il avoit par indiois dans l’héritage, qui demeure chargé specialement de la rente ainsi constituée ; c’est pour cette raison que lorsqu’une rente a été créée & constituée pour le prix ou partie du prix de la vente & aliénation, ou pour la somme de deniers à laquelle les partageans ont estimé la soulte de partage, sans dire que la rente est pour tenir lieu ce l’héritage au propriétaire, ou du droit du partageant dans les biens de la succession, cette rente ne seroit pas foncière ; elle seroit seulement réputée rente hipoteque ou constituée, & conséquemment rachétable à toujours, sans que cette faculté pût être prescrite par quarante ans, quand même elle auroit été créée à l’instant & par le Contrat d’aliénation, ou par le partage, que l’’héritage aliéné & les lots de tous les partageans y fussent specialement affectez & hypotequez, & que le créancier originaire, ses enfans ou descendans eussent continuellement possedé la rente pendant quarante ans ; on ne pourroit même demander que cinq années d’arrerages de cette rente, & non vingt-neuf années, quoique dans la regle generale on puisse demander vingtneuf années d’arrerages des rentes foncieres ou pour soulte de partage, rachetables ou non rachétables ; ainsi en se faisant faire une rente pour le prix ou partie du prix de la vente d’un héritage ou pour soulte de parrage, il faut bien faire attention sur les termes, expressions & clauses du Contrat ou du partage, cela est bien important pour les consequences.
Les rentes foncieres sur les maisons des Villes, ne laissent pas de pouvoir être rachetables à toujours, quoique par le Contrat elles soient non rachétables, à moins qu’elles ne soient les premieres rentes aprés le cens, comme seroient les rentes de fieffe ; Edirs de Charles VII. du mois de Novembre 1440. de Henri Il. de 1553. & de Charles IY. de 1574.
ARTICLE DXXVI.
L E Seigneur feodal ne peut prescrire le Fief de son Vassal saisi en sa main par faute d’homme, comme le vassal ne prescrit point la soi & hommage qu’il doit à son Seigneur, par quelque laps de temps qu’il ait tenu la chose feodale sans en faire hommage.
Il y a deux choses dans cet article ; l’une, que le Seigneur féodal ne peut prescrire contre son Vassal le Fief sur lui saisi ou mis en sa main par saisie féodale faute d’homme, droits & devoirs non faits ni rendus, ou dénombrement non baillé, par quelque tems que ce soit, fût-il de cent ans, & plus ; l’autre, que le vassal ne peut prescrire la foi qu’il doit à son Seigneur, pour quelque tems qu’il en ait joui, encore que ce fût par cent ans & plus : mais les profits de de Fiefs échus sont prescriptibles par trente ans, s’il n’y a saisie ou instance pour raison d’iceux ; à l’égard des rentes & redevances Seigneuriales, elles sont sujettes à la prescription, tant pour le fonds que pour les arrérages, quadité & quotité, Un seigneur peut acquerir par la prescription de quarante ans la directe & inouvance sur un Fief & sur les vassaux du Fief contre un autre Seigneur de Fief, même contre l’Eglise & le Roi, comme l’Eglise & le Roi le peuvent contre un autre Seigneur de Fief.
ARTICLE DXXVII.
N Ul n’est tenu attendre preuve de son héritage par témoins, ains doivent tous Contrats héréditaires & hipotecaires être passez devant Notaires & Tabellions, ou pour le moins sous seing privé des contractans.
Cette disposition tend à rejetter la preuve par témoins, pour justifier qu’il y a eu un Contrat de vente, fieffe, échauge, cession ou autre aliénation d’un hérirage ou autre immeuble, il faut que ces Contrats & Actes contenans les alienations, soient passez devant un Notaire ou Tabellion, & deux témoins idoines au moins, ou deux Notaires ou Tabellions, ou faits sous la signature privée des contractans ; en un mot, il faut qu’ils soient par écrit d’une manière ou d’une autre, avec cette difference que les Actes sous signature privée n’emportent point hiporeque que du jour qu’ils ont été reconnus devant Notaite ou Tabel. lion ou en Justice, au lieu que les Contrats & Actes passez devant Notaire ou Tabellion, soit Royal ou de Seigneur, donnent hipoteque des l’instant de leur passation, à la charge toutefois du Contrûle.
Notre Article se sert du mot Contrals bereditaires, c’est-à-dire concernans les héritages ou autres immeubles, parce qu’en vente de choses mobiliaires, on peut les vendre & en disposer verbalement, & de la main à la main sans avoir besoin d’Acte par écrit, soit devant Notaire ou Tabellion, ou sous signature privée ; il s’en fait néanmoins, principalement lorsque la vente ou cession de choses & effets mobiliers, est considérable.
S’il se trouvoit deux ventes d’une même chose & par le même venceur, une par Acte ou Contrat devant Notaire ou Tabellion, & l’autre par Acte sous signature privée, la rente faite devant Notaire ou Tabellion prévaudroit ; Arrest du Parlement de Normandie, du 3. Mars 1663.
La preuve par témoins d’une possession arriculée, est admissible ; parce qu’il s’agit d’un fait dont la preuve ne peut gueres être faite que par témoins, sans qu’il soit necessaire qu’il y ait un commencement de preuve par écrit de la possession articuléo ; les faits de possiession & autres qui gissent en preuve, doivent être succinctement articulez sans alléguer aucune raison de droit ; Art. 1. du Titre 20. de l’Ordonnance de 1667. qu’il faut consulter au sujet des faits qui gissent en preuve vocale ou’litterale,
ARTICLE DXXVIII.
N Eanmoins, si le Contrat en a été passé ou le seing privé reconnu devant Tabellions, ou que les Registres ne s’en puissent recouvrer, celui qui l’a perdu doit être reçû à faire preuve par témoins que ledit Contrat avec la reconnoissance ont été vûs, tenus & lûs, & le contenu en iceux, & qu’il y ait eû possession suivant le Contrat.
La preuve par témoins est admissible de la perte d’un Contrat, Obligation ou autre Acte passé devent Notaire ou Tabellion, ou fait sous signature privée, mais reconnu devant Notaire ou Tabcilion, ou en Justice, ou enregistrée dans les défûts publies ; mais il faut pour cela, 16. Que le demandeur articule que le Contrat, Acte ou Ecrit reconnu a été vû, tenu & Iû, avec le contenu en icelui. 2. Qu’en execution du Contrat, Acte ou Ecrit, on avoit possedé & joii publiquenent de l’héritage & immeuble contentieux ; Arrest du Parlement de Roüen du 17. Ianvier 1653.
Si l’Acte sous signature privée qu’on dit être perdu ou adhiré, n’avoit point été reconnu devant Notaire ou Tabellion, ou en Justice, la preuve par témoins ne seroit pas admissible, quand même on mettroit en fait qu’il a été vU, tenu & lû avec le contenu en icelui, & qu’on avoit possedé & joui en consequence, d’autant qu’il seroit facile de supposer un Acte de cette qualité, Arrest du même Parlement, du is Ianvier 367z.
Par l’Ordonnance de 1667. Arr. 3. du Titre 20. la preuve par témoins est re cevable pour dépût nécessaire en cas d’incendie, ruine, tumulte ou naufrage, ou autres aCcidens imprévus, ou lorsqu’il y aura un commencement de preuve par écrit.
Celui qui a perdu la grosse de son Contrat ou Sentence, peut se faire autoriser par Justice à en lever un Extrait sur la minute étant és mains des Greffiers, Notaires ou Tabellions, l’Obligé ou Debiteur présent ou dûëment appellé, lequel Extrait a le même effet que la Grosse ; Art. 119. du Reglement de 1666. on juge autrement au Parlement de Paris, on n’y donne en ce cas hipoteque que du jour de la seconde Grosse.
ARTICLE DXXIX.
E Ntre cohéritiers, la Prescription quadragenaire n’a point de lieu avant le partage ; & ne peuvent les aînez, aussi peu que les puînez, se prévaloir de ladite Prescription pour empêcher l’action de partage.
L’action en partage entre cohéritiers, majeurs ou mineurs, dans une succession directe ou collaterale, est imprescriptible, sans que les ainez & les puinez puissent se prevaloir de la Prescription de quarante ans les uns contre les autres pour se mettre à couvert de l’action en partage ; mais cette action seroit preicriptible par une Prescription au dessus de quarante ans, comme de cent ans & immemoriale ; parce qu’aprés une aussi longue espace de tems, il est à presumer que les partages ont été faits.
Mais lorsque le partage a été une fois fait, l’action pour venir à partage d’efféts, tant mobiliers qu’immobiliers, obmis à partager, seroit prescriptible par quarante ans, C’est à celui qui allégue qu’il y a eu un partage fait, à le prouver & justifier ; car car un partage n’est point presumé, à moins qu’il ne paroisse évidemment que tous les cohéritiers ont joui pendant lonques années, des choses qu’on dit être rombées en leur lor, & chacun en particulier, d’une quotité de biens & effets de la succession commune.
Si d’un côté, l’action en partage n’est point sujette à la Prescription de quarante ans, de l’autre les puinez copartageans majeurs, perdent les fruits & revenus de leurs portions héreditaires & afférantes jusqu’au jour de leur demande en partage, formée par Exploir & Assignation en justice ; ces fruits & revenus appartiennent incommutablement au frère ainé.
ARTICLE DXXX.
F Aculté de racheter rentes constituées à prix d’argent, ne se peut prescrire par quelques laps de tems que ce soit : ains sont telles rentes rachetables à toûjours, encore qu’il y ait cent ans.
La faculté du rachat ou amortissement perpétuel des rentes constituées à prix d’argent, ou rentes hypoteques, est de l’essence de ces rentes ; ensorte que par aucune clause & convention telle qu’elle soit, on ne peut empécher le rachat ou amortissement volontaire de ces rentes en la personne du debiteur, goties quoties ; une clause contenant une convention de cette qualité seroit nulle & vicieuse, & pro non adjecta Baberetur, sans néanmoins donner atteinte au Contrat au surplus de son contenu ; c’est pourquoi on dit dans cette rencontre que bujusmodi clausula viciatur, sed non viciat Contractum : Il faut donc tenir pour constant que la faculté de rachat des rentes constiruées à prix d’argent, ou renres liypoteques, est imperscriptible par quelque laps de tems que ce soit, même par cent ans & tems immemoriale.
Les rentes constituées à prix d’argent, payables en grain ou autres especes, sont par rapport au payement des arrerages, toûjours reductibles au taux des rentes constituces à prix d’argent ; & cette reduction est imprescriptible comme la sa-culté de les racheter ; or lorsqu’il s’agit de faire cette reduction, il faut se regler fuivant la valeur des cinq dernières années ; Artest du Parlement de Nor-mandie, du 6. Août 1649.
Les rentes données ou léguées à l’Eglise & à Gens de main-morte, à prendre sur les biens du Donateur ou Testateur, sont pareillement rachérables à toû-jours ; parce que ces sortes de rentes ont un prix comme les autres rentes constituées à prix d’argent, ou rentes hypoteques ; Arrest du même Parlement, du y Decembre 1656.
On ne peut demander que cinq années d’arrerages des rentes constituées à prix d’argent, ou rentes hypoteques, s’il n’y a eû des poursuites en Justice contre le débiteur ; une simple Sommation, Interpellation ou Commandement ne suffiroit pas pour interrompre la Prescription des cinq ans, il faudroit au moins une Assignation en Iustice.
Autrefois en Normandie on constituoit les rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent, au denier dix ; ce qui dura jusqu’en 1602. que par Edit de HenIV IV, de la même année, vérifié au Parlement de Roüen le 2 Novembre de la même année, & publié le 29, il fut ordonné qu’on ne pourroit à l’avenir saire des constitutions qu’au denier quatorze ; & finalement en 1é88, par Edit de Loüis XIV, il fut ordonné que toutes les constitutions des rentes à prix d’argent, ou rentes hypoteques, ne pourroient être faites qu’au denier dix huit ; c’est le dernier état auquel on a depuis ce tems-là constitué, & qu’ont constitué aujourd’hui ; mais quanr aux anciennes rentes, elles ont subsiste & subsistent encore sur le pied & sur le denier de leur constitution, & le débiteur est tenu d’en payer les arrerages, & d’en faire le rachat sur le denier principal qui est entré dans la constitution ; il n’y a qu’un cas, ce seroit si par l’insolvabilité du débiteur de la rente, l’acquereur où le cessionnaire de la rente, venoit en garantie sur le vendeur ou cedant, l’acquereur ou cessionnaire ne pourroit deman-der l’intérét de la somme payée par la vente ou transport de la renté, fait depuis l’Edit de 16o8, qu’au denier dix-huit, & non pas au denier dix ou quaror-zé, auquel la rente venduë & cédée, avoit été constituée.
Quoique l’on ne puisse constituer une rente à prix d’argent, à un moindre denier que celui de l’Ordonnance, autrement la constitution seroit usuraire, il est néan noins permis d’acheter une rente à un denier & à un prix moindre que celui de la constitution ; d’autant que ce Contrat est une vente où il est licite de faire sa condition la plus avantageuse qu’il est possible.
On peut constituer une rente d’arrerages de rentes & redevancés Seigneuriales, rentes foncieres, de fieise & de doüaire, de sermages de Terres & hérita-ges, du prix de vente de Marchandises, & de dépens, dommages & interêts, interêts civils adjugez & liquidez, mais non d’arrérages de rentes hypoteques ou constituées à prix d’argent.
Ori ne peut obliger le débiteur qui fait le remboursement d’une rente, à rendre les mêmes espèces que le créancier a fournies lors de la constitution ; il suf-fit de rendre la valeur des espèces sur le pied & denier de la constirution de la rente dans la monnoye du Prince, ayant cours lors du rachat & amortissement de la rente.
Les arrérages des rentes ont la même hypoteque que le principal, sçavoir, du jour du Contrat de constitution, suivi dn Contrelle.
La Promesse, Reconnoissance & tous autres Actes donnez par le débiteur d’une rente au créancier, de ne point se servir de la prescription par lui acquise contre la rente ou arrerages d’icelles, efface la Prescription, tant par rapport à lui, ses héritiers & ses ayans cause, que par rapport à ses créanciers, quoiqu’antérieurs aux Actes de Reconnoissances ; parce que ce débiteur ne fait que remettre les choses en leur premier état par la bonne foy, & qu’une dette qui n’est éteinte que par la prescription, donne au débiteur une Quitrance odieule, & qui peut devenir à rien par la moindre reconnoissance du débiteur.
ARTICLE DXXXI.
ACtion en dommage de bêtes, est annale.
L’action en dommage de bêtes se donne contre celui qui est proprietaire & possesseur des bêtes au tems du dommage sur les Terres & héritages d’autrui ; & s’il y a plusieurs maîtres des bêtes, chaque maître est tenu solidairement du dommage : Or le dommage est reglé arbitrairement par le Juge, ou suivant l’estimation par des Experts & gens à ce connoissans.
Cetre action ne dure qu’un an du jour du dommage arrivé, tant entre masieurs que mineurs, & toutes autres personnes, même privilegiée comme seroit l’Eglise, & aprés l’an, elle est éteinte par la Prescription ; & même si l’instance intentée pour le dommage, avoit été discontinuée de poursuites pendant un an, la demande en dommage ne pourroit plus être rêtteree ; car l’action & l’instance perissent par un an faute de poursuites ; & c’est ici une Prescription sta-tutaire & coûtumiere, dont l’effet est de ne faire durer l’Instance qu’autant de tems que dure l’action.
Si on ne pouvoit pas arrêter & prendre une bête trouvée en dommage, il seroit permis de la blesser, même la tuer avec armes à feu ou autrement, mais il n’en faut venir là qu’à l’extrémité, & suivant la qualité du dommage ; il vaut mieux prendre & arrêter les bêtes, si faire se peut, & les mettre au Parc du Roy ou du Seigneur, ou en fouriere, aux frais & dépens du maître des bestiaux, & ensuite lui donner Assignation en dommages & interéts.
ARTICLE DXXXII.
L E Créancier peut contraindre le possesseur de l’héritage qui lui est hypotequé, soit à titre particulier ou droit universel ou successif, à lui passer titre nouveau, faire reconnoissance de la dette, & que son héritage y est obligé.
Il y a deux sortes de possesseurs, le possesseur à titre universel, & le possesseur à titre particulier ; un héritier, un donataire en avancement d’hoirie en ligne directe, un donataire ou legataire universel, sont des possesseurs à titre universel ; un acquereur, donataire, legataire ou cessionnai e particulier, sont des possesseurs à titre singulier.
Un créancier hypotecaire peut obliger tous ces possesseurs à lui passer titre nouvel & reconnoissance de la dette qui lui est dûë, & faire ordonner que les biens, & specialement tel héritage ou autre immeuble, s’il y a lieu, seront & demeureront affectez & liypotequez à sa dette, telle que seroit un Contrat d’une rente, une Obligation, une Sentence & Iugement, ou autre acte & dette portant hypoteque ; car cette action n’appartient point au créancier chirographaire, il n’a que l’action en condamnation contre son débiteur à ce qu’il ait a lui payer le contenu en son Billet, Cedule, Promesse, ou autre Ecrit sous lignature privée, aprés qu’il aura été reconnu.
L’action pour faire passer Titre nouvel & Reconnoissance ne peut être dirigée ni intentée que contre le propriétaire & possesseur incommutable de l’héri-tage ou autre immeuble affecté à la dette, & non contre le Fermier, Locataire, Doüairiere, Usufruitier, ni tout autre Possesseur à tems & passager, de l’héritage & immeuble pour raison duqnel l’action en reconnoissance & à passer titre nouvel, a été intentée ; cependant en Normandie il n’est point necessaire de faire déclarer : son titre exécutoire conrre l’héritier du défunt ainsi qu’il l’étoit contre le défunt, le titre est exécutoire de plein droit contre l’héritier ainsi qu’il l’étoit contre le défunt, art. 129. du Reglement de 1666.
L’s principaux effets du titre nouvel & reconnoissance, sont que celni qui fournit le titre nouvel se déclare par là obligé à la rente & dette hipotecaire sur tous ses biens, & fpecialement sur l’héritage & imme uble affecté & hipotequé à la rente & dette, & que le titre nouvel & reconnoissance rendent le Con-trat ou obligation exécutoire, sur les biens personnels de celui qui fournit le titre nouvel & reconnoissance, & empéoüent la prescription.
Si le mari & la femme passent titre nouvel & reconnoissance d’une rente ou dette dûé seulement par la femme, & à laquelle le mari n’est point obligé par convention, le titre nouvel & reconnoissance engagent seulement le mari personnellement au payement des arrérages de la rente ou des interêts, si la dette emportoir interêts, pendant le mariage, mais non au principal de la rente & dette ; & même aprés la dissolution du mariage, son obligation cesse, sauf au créancier à se pourvoir contre la femme & sur ses biens.
Quoiqu’un acquereur ou tiers détempteur ait passé titre nouvel & reconnoissance au créancier hipotecaire sur l’héritage & immeubie par lui acquis, néan-moins cet acquereur ou tiers détempteur ne peut être dépossedé de l’héritage & immeuble par ce créancierque par la voye de la saisie réelle ; arr. 120. du Reglement de ré6é & non par la voye de la demande en déclaration d’hypoteque, qui est inconnuë en Normandie.
Une simple protestation faite contre un tiers acquereur ou dérempteur, ne seroit pas capable d’interrompre le cours de la prescription avec laquelle il se seroit maintenu dans sa possession ; car generalement parlant, une simple protestation ne peut interrompre la prescription.
Un tiers détempteur fait les fruits siens de l’héritage & immeuble qu’il possede, jusqu’au jour qu’il en air été dépossedé par un Bail judiciaire ; Arrest du Par-lement de Normandie, du 21 Juillet 1é37. & non du jour de la saisie réelle.
ARTICLE DXXXIII.
M Archands, gens de metier & autres vendeurs de marchandises & denrées en détail ; comme Boulangers, Patissiers, Couturiers, Selliers, Bouchers, Bourliers, Passementiers, Marêchaux, Cuisiniers, Rotisseurs & autres semblables, ne peuvent faire aucune action de demande après les six mois passez du jour de la premiere délivrance de leurs marchandises & denrées, sinon qu’il y eût arrest de compte, sommation & interpellation judiciairement faite, cedule ou obligation.
Tous Marchands, gens de métier & autres détailleurs de marchandises, comme Boulangers, Bouchers, Cordonniers, Tailleurs d’habiTs, Tapissiers, Rotisseurs, Patissiers, Selliers, Passementiers, Cuisiniers ou Traiteurs, Maréchaux ou autres détailleurs, n’ont que six mois pour demander leur payement du jour de la première livraison, à moins qu’il n’y eût une assignation en condamnation, arrété de compte, cedule ou obligation ; auquel cas l’action dureroit trente ans.
L’article 8. du titre premier de l’Ordonnance de 2673, est conforme à cet Article.
La peremption de l’instance emporteroit la prescription de l’action.
O’il y avoit eû continuation de fourniture & livraison, la prescription des six mois ne commenceroit que du jour de la derniere fourniture & livraison.
Une simple interpellation ou sommation, sans assignation ou condamnation, n’interromproit point le cours de la prescription.
Cette prescription comme celle d’un an, comme il est parlé dans l’article suivant, coure, tant contre les mineurs que contre les majeurs.
Quoique l’action dont il fait mention dans cet article & dans l’article suivant, soit prescrite par six mois ou par un an, néanmoins l’usage est de faire affirmer le défendeur si le demandeur le requiert, même ex officio Judicis, qu’il a payé & qu’il ne doit rien de ce que l’on lui demande ; mais quant à ses heritiers, on ne peut leur déferer que le serment de crédulité, qui est qu’ils n’ont point connoissance que la dette demandée fût encore due par le deffunt dont ils sont heritiers.
Les Livres ou Registres des Marchands ne sont point des titres suffisans contre les particuliers & Bourgeois, pour les faire condamner à payer la livraison portée par leurs Registres, à moins que les particuliers & Bourgeois n’eussent signé la livraison ; il n’en est pas de même de Marchand à Marchand, ou de Marchand aux gens de metier & Artisans ; les Livres ou Registres des Marchands. qui ont vendu & fourni, font foi entière de la livraison contre les Marchands, gens de metiers & Arrisans ausquels il a été fait des livraisons fuivant qu’il est mentionné dans les Livres & Registres, sans qu’ils puissent même alléguer & proposer la fin de non-recevoir des six mois ou d’un an ; il n’y auroit que la Prescription de trente ans, qui pourroit les mettre à couvert de l’action.
L’usage est dans les Jurisdictions Consulaires, de déferer le serment au demandeur, & non au défendeur ; au lieu que dans les autres Jurisdictions, c’est au seul défendeur à qui on défère le serment.
Il suffit à un Maître d’affirmer qu’il ne doit rien à son serviteur domestique, de ses gages, il n’est point obligé de prendre des quitances de IuiLa contrainte par corps qui étoit acquise contre un Marchand, Artisan ou autre, finit par sa mort, & ne passe point contre ses heritiers Il est perinis aux propriétaires des terres & héritages de campagne, de stipuler la contrainte par corps par les baux contre les preneurs ; art. 7. du titre 84. de l’Ordonnance de 1667 ; mais il faut absolument que la contrainte par corps soit stipulée & convenuë par le bail, sans quoi le Fermier n’y pourroit être condamné.
ARTICLE DXXXIV.
D Rapiers, Merciers, Epiciers, Orsévres, & autres Marchands Grossiers, Massons, Charpentiers, Couvreurs, Barbiers, Laboureurs, & autres Mercenaires, ne peuvent faire action de demande de leurs marchandises & salaires après un an passé, à compter du jour de la délivrance de leurs marchandises ou vacation, s’il n’y a cedule, obligation, arrest de compte par écrit, ou interpellation judiciaire.
Il faut comprendre dans cette disposition les Medecins, Chirurgiens & Apoticaires ; l’Ordonnance de 1673. Tit. premier, art. 7. à une disposition semblable à celle portée par cet Article.
Cette Prescription d’un an, se regle sur les mêmes principes que la Prescription de six mois.
Les valets, serviteurs & domestiques ont à la vérité action pour leurs salaires & gages contre leurs maîtres ; mais leurs maîtres, comme on l’a remarqué ci-dessus, en sont crûs à leur serment, & ce serment fait la décision de la contestation, sans que la preuve par témoins, qui seroit demandée par le valet, serviteur ou domestique, qu’il n’a point été payé, fût recevable.
La preuve par témoins ne seroit point pareillement admissibles, que le débiteur nonobstant la Prescription acquise avoit promis de payer, il n’y auroit que l’affirmation qui pourroit lui être demandée & déférée ; car enfin la preuve par témoins est trop dangereuse pour l’admettre en toutes rencontres, quand même il ne s’agiroit que d’une somme audessous de cent livres. Aussi voyonsnous par experience que les Sentences des Juge & Consuls qui admettent la preuve par témoins audessus de cent livres, donnent ouvertute à biens dexinconveniens ; car enfin la preuve par témoins est bien délicate, mais ces Juges sont fondez dans l’Ordonnance ; art. 2. du Tit. 20. de l’Ordonnance de 1667.
L’action pour le payement du prix des meubles vendus aux inventaires, se prescrit par trois ans, encore que l’acheteur ait signé fut le Registre ou proces verbal du Sergent, s’il ne s’y est obligé depuis la vente qui lui a été faite ; art. 123. du Reglement de 1666.
ARTICLE DXXXV.
L Es Taverniers & Cabaretiers n’ont aucune action pour vin ou autre chose par eux venduë en détail par assiette en leurs maisons : ni pareillement les maîtres des jeux de paulme pour les éteufs qu’ils auront fournis esdits jeux de paulme.
Il y a deux dispositions dans cet Article.
La première sur ces paroles : Les Taverniers & Cabaretiers n’ont aucune action pour vin ou autre cbose par eux venduë en détail par assiette en leurs maisons.
Sous le terme de vin sont compris le cidre, poiré, bière, eau-de-vie, & autres liqueurs & boissons venduës en détail, & consommées dans les cabarets, tavernes, boutiques & autres lieux, & les Cabaretiers & autres dérailleurs n’en peuvent demander payement aux personnes domiciliées sur le lieu ; & les billets, promesses ou obligations causées pour avoir pris & bù ces boissons & li-queurs dans les Cabarets, Tavernes & autres lieux de détail & consommation, seroient nulles ; il n’y a pas pareillement lieu en ce cas au serment, parce que toute action est déniée pour telles choses.
Il y a néanmoins deux exceptions à faire à cette regle ; l’une est à l’égard des Voyageurs, Messagers, Voituriers, Rouliers, Forains, Etrangers & passans, lesquels peuvent être poursuivis par les Hôteliers, Aubergistes & Cabaretiers pour la dépense par eux faite dans leurs hôtelleries, auberges & cabarets, & même arrêter leurs chevaux, carosses, litieres, charettes, équipages & hardes ; l’autre est à l’égard du vin, cidre, poiré, biere & autres liqueurs & boissons, qu’un Bourgeois ou autre habitant du lieu prendroir au cabaret où autre endroit pour sa maison & famille, il y auroit action pour telle chose, mais qui ne dureroit que six mois, & en ce cas de dénégation, il n’y auroit que l’affirmation du défendeur.
On peut étendre la disposition de la premiere partie de cet Article aux Marchands de caffé & autres liqueurs, dont il y a aujourd’hui grand nombre dans le Royaume, il ne faut pas leur donner d’action pour cette sorte de marchandise qu’ils vendent par détail dans leurs boutiques.
L’autre disposition est sur ces paroles, ni pareillement les ssfaîtres des Jeux de Paulmes pour les éteufs qu’ils auront fournis esdits Jeux de Paulmes.
Le mot d’éteu fs veut dire balles, à quoi il faut ajouter tout ce qui peut être fourni par les Maîtres des jeux de Paulmes, propre & necessaire pour jouer à la Paulme ; la Coûtume dénie toute action aux Maîtres des Jeux de Paulmes pour pareille fourniture & dépense, à plus forte raison ceux qui donnent à joüer en leurs maisons, soit aux Cartes, Dez, Triquetrac, Echecs & autres Jeux ces gens-là n’ont point d’action pour raison de ce qu’ils auroient fourni ou prété aux oüeurs ; de plus, tous Billets, Promesses ou Obligations causées pour le Jeu, sont nuls, sans qu’on en puisse demander la valeur & le contenu.
ARTICLE DXXXVI.
L Es Taverniers étans sur les Ports & Havres, qui fourniront la nourriture des Compagnons durant qu’on dresse l’équipage d’un Navire, auront action de ce qui aura été arrêté par le proprietaire Bourgeois ou Maître du Navire.
C’est encore ici une exception à la premiere partie du précedent Article, fondée, qu’une dépence de cette qualité se fait ex causâ necessariâ, mais cette action ne dure que six mois, s’il n’y a arrêté de compte, billet, promesse, obligation ou interpellation judiciaire.
Gous le terme de Compagnozs, il faut entendre les gens de l’équipage d’un Navire, étans au Port & Havre de la mer ou des Rivieres navigables ; dans ce cas les Cabaretiers établis sur les Ports & Havres ont action pour demander au Maître ou Bourgeois du Navire le payement de la dépense faite par les Compagnons & gens de l’équipage dans leurs cabarets, pendant leur sejour dans le Port & Havre, dans le tems qu’on y dresse l’équipage d’un Navire, qu’on le racommode, ou qu’on en fait la charge & la cargaison.