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ARTICLE DCVIII.

Q Uiconque a le fonds peut faire bâtir & édifier dessus & par-dessous sondit héritage, & y faire puits, caves & autres choses licites, s’il n’y a titre au contraire.

Quiconque a le sol, c’est-à-dire le fonds d’un héritage, peut & a droit de faire construire & batir dessus & par dessous son sol ou fonds, même y faire puits & caves & autres choses qu’il jugera à propos, pourvû toutefois qu’elles foient licites & qu’il n’y ait titre au contraire ; car cette liberté naturelie peut être génée par la disposition de P’homme ; en effet, quoiqu’on puisse bâtir aussi haut qu’on veut sur son fonds, cependant cette liberté peut être botnée, limitée & diminuée par des reglemens de Potice, ou par des titres particuliers entre personnes privées.

Celui qui a la partie inférieure d’une maison, peut bâtir dessus & dessous, & y faire ce qui lui plait sans le consentement de celui qui a la Partie supérieure de la maison ; pourvû que ce qu’il entend faire barir ne porte aucun dommage ni préjudice à la partie supetieure de la maison ; aussi par le droit Romain il falloit bâtir de manière que le batiment n’ôtât point la vûë au bâtiment voisin.

L’on peut bâtir sur son fond joignant immédiatement l’héritage de son voisin, sans le consentement du voisin.

Lorsque quelqu’un fait réparer ou réédifier sa maison, le voisin est tenu lui donner passage pour faire cet ouvrage, & de soussrir le tour de l’échelle, de manière néanmoins que le voisin n’en reçoive aucun dommage, & que celui qui fait bâtir ne fasse aucune entreprise sur le fonds de son voisin, ou du moins qu’il répare le dommage s’il en fait.

Il est permis de planter sur son fonds, mais il faut qu’il y ait une certaine espace ou intervale en matière de plants entre son héritage & celui de son voisin ; cette distance est dans l’usage, de sept pieds ; cependant les terres plantées en vignes, demandent une plus grande espace, parce que le moindre ombrage est entièrement nuisible aux vignes : d’un autre côté en fait de plants, le voisin a droit de profiter d’une portion des fruits des arbres, dont les branches s’étendent sur son fonds, si mieux n’aime le proprietaire des arbres en faire couper les branches ; & cette portion de fruits est ordinairement la moitié, Si à cause de la converture d’une maison, l’’eau du ciel incommodoit le voisin, le propriétaire seroit tenu de détourner l’eau ; car quoiqu’elle tombe na-turellement du ciel, & que chacun puisse bâtir sur son fonds à sa volonté, il ne peur néanmoins le faire au dommage du voisin ; mais autre chose seroit si l’eau qui tomberoit directement dit ciel, venoit s’écouler par son égout & pente naturelle sur l’héritage voisin ; en ce cas, comme il n’y auroit rien du fait de l’homme, chacun seroit dans l’obligation de supporter l’incommodité causée par cette voye.

Le Roy a seul droit de faire foüiller dans le fonds d’autrui pour en tirer les mines ; car les Seigneurs de Fief n’ont pas le même droit sur le fonds de leurs Vassaux ; on ne peut pas même foüiller son prepre fonds pour en tirer des mines, relles qu’elles soient, mais principalement celles d’or ou d’argent.

Par la raison que dans nôtre Coûtume, le decret ne purgent point les chartres réelles faute d’opposition au decret, il faut conclure que les servitudes sur l’héritage d’autrui, ne sont point purgées par le decret faute d’opposition, principalement les servitudes visibles ; quant aux servitudes ocultes, il y auroit plus de difficulté, parce que, par exemple en achétant une maison ou au-tre héritage, on ne peut pas voir si cette maison on cet héritage est chargé d’une servitude qui est oculte, & pour ainsi dire invisible ; cela seroit d’une dan-gereuse consequence pour un acquereur d’une maison ou héritage sur lequel y auroit une servitude oculte.

Il faut restraindre les servitudes de vuës sur les Couvens, Monasteres & Communautez Régulieres ou Seculieres, & principalement de filles, aurant qu’il est possible, à cause de la bienséance qu’il faut garder pour les personnes qui habitent ces Maisons.

Le propriétaire d’un héritage peut disposer à sa volonté de l’eau d’une fontaine dont la source est dans son héritage, & la détourner de l’héritage de son voisin, dans lequel elle avoit coutume de couler, même depuis long-tems ; parce qu’on peut faire de chose qui nous appartient, ce qu’on veut, à moins que dans ce cas, il n’y eût une servitude aque ducendae au contraire.

Le voisin dans le fonds duquel sont les véines de l’eau, peut détourner cette enu, & par ce moyen l’empécher de sortir du fonds superieur ; c’est la disposition de la Loi si in meo fundo, aux Dig. de aqua pluv. arc. & de la Loi fluminum, aux Di8. de damno infecto.

C’est sur ce principe qu’on peut faire construire un moulin à eau sur son fonds, quoique l’eau qui servira pour le faire tourner, soit par-là détournée de l’héritage du voisin, c’est assez que la source de l’eau soit dans le fonds sur lequel le moulin est bâti, car enfin quoique l’eau qui sort de mon fonds ait coulé, même depuis un tems considérable dans celui de mon voisin, néanmoins j’en peut disposer pour mon utilité, soit en la détournant, soit en la retenant, sans que le voisin puisse s’en plaindre, ni même opposer de prescription : il ne faudroit pourtant pas que cela se sit dans le seul motif de nuire au voisin.